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European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> SEKERCI v. TURKEY - 9961/08 - Committee Judgment (French Text) [2014] ECHR 693 (01 July 2014)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2014/693.html
Cite as: [2014] ECHR 693

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    DEUXIÈME SECTION

     

     

     

     

     

     

    AFFAIRE ŞEKERCİ c. TURQUIE

     

    (Requête no 9961/08)

     

     

     

     

     

     

     

     

    ARRÊT

     

     

     

     

    STRASBOURG

     

    1er juillet 2014

     

     

    Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.

     

     


    En l’affaire Şekerci c. Turquie,

    La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en un comité composé de :

              András Sajó, président,
              Helen Keller,
              Robert Spano, juges,
    et de Abel Campos, greffier adjoint de section,

    Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 3 juin 2014,

    Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

    PROCÉDURE


  1. .  À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 9961/08) dirigée contre la République de Turquie et dont un ressortissant de cet État, M. Radi Şekerci (« le requérant »), a saisi la Cour le 14 février 2008 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

  2. .  Le requérant a été représenté par Mes M. Filorinalı et Y. Filorinalı, avocats à Istanbul. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent.

  3. .  Le 27 avril 2010, la requête a été déclarée partiellement irrecevable et les griefs tirés des articles 5 et 6 de la Convention ont été communiqués au Gouvernement.
  4. EN FAIT

    I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE


  5. .  Le requérant est né en 1978.

  6. .  Le 26 juillet 2005, une action publique fut engagée contre le frère du requérant du chef d’homicide volontaire et son procès commença devant le tribunal pour enfants d’Istanbul.

  7. .  Le 15 décembre 2005, le requérant fut arrêté et placé en garde à vue dans le cadre de la même affaire et fut placé en détention provisoire le 16 décembre 2005.

  8. .  Par un acte d’accusation du 25 janvier 2006, une action publique fut également engagée à l’encontre du requérant pour homicide volontaire.

  9. .  Le 7 mars 2006, la cour d’assises tint sa première audience au cours de laquelle elle décida du maintien en détention provisoire du requérant.

  10. .  Le 6 avril 2006, la cour d’assises entendit le requérant en sa défense et un témoin de l’incident. Au terme de cette audience, elle décida du maintien en détention provisoire du requérant.

  11. .  Le 27 juillet 2006, la cour d’assises entendit, en qualité de témoin, le policier ayant dressé le procès-verbal d’incident et ordonna auprès du laboratoire criminalistique de la police d’Istanbul une expertise sur les balles extraites du corps de la victime pour vérifier si elles provenaient des armes saisies chez le requérant.

  12. .  Le 19 septembre 2006, le 2 novembre 2006, le 26 décembre 2006 et le 22 mars 2007, la cour d’assises releva que le rapport d’expertise n’avait toujours pas été versé au dossier et ajourna les audiences pour ce motif.

  13. .  Entre-temps, par un jugement du 14 février 2007, le tribunal pour enfants condamna le frère du requérant à une peine de onze ans et huit mois de prison pour homicide volontaire.

  14. .  Le 17 juillet 2007, le procureur de la République présenta ses réquisitions sur le fond de l’affaire et la cour d’assises décida du maintien en détention provisoire du requérant.

  15. .  La cour d’assises décida de nouveau de maintenir le requérant en détention lors de l’audience du 24 janvier 2008. À une date non précisée, le requérant forma opposition contre cette décision. Le 25 janvier 2008, la cour d’assises la rejeta, statuant sur dossier et après avoir demandé l’avis du procureur de la République.

  16. .  Le 24 janvier 2008, la cour d’assises décida d’attendre l’issue du pourvoi en cassation formé contre le jugement prononcé par le tribunal pour enfants (paragraphe 12 ci-dessus) et de prolonger le maintien en détention provisoire du requérant.

  17. .  La cour d’assises décida d’ajourner les audiences des 22 avril, 20 juin et 5 août 2008 dans l’attente que la Cour de cassation se prononce sur le jugement du tribunal pour enfants et ordonna le maintien en détention provisoire du requérant.

  18. .  À l’audience du 17 octobre 2008, la cour d’assises accusa réception de l’information concernant le pourvoi du frère du requérant. Elle releva que le 21 avril 2008, la Cour de cassation avait cassé le jugement du 14 février 2007 en raison des manquements procéduraux et que l’affaire avait été renvoyée devant le tribunal pour enfants.

  19. .  À l’issue de l’audience du 12 novembre 2008, le requérant fut mis en liberté compte tenu de l’état des preuves.

  20. .  Le 10 avril 2009, la cour d’assises d’Istanbul acquitta le requérant pour manque de preuves.

  21. .  Faute de pourvoi, l’arrêt de la cour d’assises devint définitif le 24 juin 2009.
  22. II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS


  23. .  Pour le droit et la pratique interne pertinents, voir l’affaire Altınok c. Turquie (no 31610/08, §§ 28-32, 29 novembre 2011).
  24. EN DROIT

    I.  SUR L’EXCEPTION DU GOUVERNEMENT


  25. .  Le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes. Il estime que le requérant aurait dû utiliser le recours prévu par les articles 141 et 142 du code de procédure pénale pour demander la réparation de son préjudice.

  26. .  Le requérant conteste la thèse du Gouvernement.

  27. .  Pour autant que cette exception concerne le grief tiré de l’article 5 § 3, la Cour rappelle que l’article 141 § 1 d) du code de procédure pénale prévoit pour un détenu n’ayant pas obtenu un jugement dans un délai raisonnable la possibilité de demander une indemnisation.

  28. .  Elle note que la détention provisoire du requérant au sens de l’article 5 § 3 de la Convention a pris fin avec sa mise en liberté le 12 novembre 2008 (paragraphe 18 ci-dessus). Le 24 juin 2009, l’acquittement est devenu définitif (paragraphes 19-20 ci-dessus). À partir de cette dernière date, le requérant aurait pu demander une indemnisation sur le fondement de l’article 141 du code de procédure pénale.

  29. .  À la lumière de ses considérations dans les affaires Demir c. Turquie ((déc.), no 51770/07, §§ 32-34, 16 octobre 2012) et Gürceğiz c. Turquie (no  1045/07, §§ 19-34, 15 novembre 2012), quant à l’effectivité du recours en question, la Cour estime que le requérant était tenu de saisir les juridictions internes d’une demande d’indemnisation fondée sur l’article 141 § 1 d) du code de procédure pénale, ce qu’il ne démontre pas avoir fait. Dès lors, la Cour rejette le grief tiré de l’article 5 § 3 pour non-épuisement des voies de recours internes, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

  30. .  Pour autant que l’exception du Gouvernement se rapporte au grief tiré de l’article 5 § 4 de la Convention, la Cour note que le recours prévu à l’article 141 du code de procédure pénale ne vise pas à mettre fin à une détention mais qu’il a pour seule finalité l’octroi d’une indemnité. Elle estime que le fait d’exiger du requérant d’introduire un recours en dommages-intérêts modifierait la nature de la garantie offerte par le paragraphe 4 de l’article 5 de la Convention. En effet, il convient de relever que le requérant se plaint de l’absence d’un recours efficace pour contester son maintien en détention provisoire - grief qui relève de l’article 5 § 4 de la Convention - alors que le moyen avancé par le Gouvernement concerne le droit d’obtenir réparation à raison d’une détention et se rapporte ainsi à l’article 5 § 5 de la Convention. La Cour rappelle ici que le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale, se distingue de celui de recevoir un dédommagement pour une telle détention (Smatana c. République tchèque, no 18642/04, § 122, 27 septembre 2007). Le recours en question ne peut donc être considéré comme un remède efficace au sens de l’article 5 § 4 de la Convention. Partant, la Cour rejette cette exception du Gouvernement pour autant qu’il concerne cette disposition.

  31. .  Enfin, pour autant que cette exception concerne l’article 5 § 5 de la Convention, la Cour note qu’elle soulève des questions étroitement liées à l’examen du bien-fondé de ce grief. Elle décide donc de la joindre au fond.
  32. II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 4 DE LA CONVENTION


  33. .  Le requérant se plaint de l’ineffectivité du recours en opposition et allègue la violation des articles 5 § 4 et 6 de la Convention. Il reproche à la cour d’assises d’avoir examiné son opposition le 25 janvier 2008 sur la seule base du dossier, sans tenir d’audience. Il ajoute que la cour d’assises a pris à cette occasion l’avis du procureur de la République et que lui ou son avocat n’ont pas reçu notification de cet avis et n’ont donc pas eu la possibilité de le commenter.

  34. .  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.

  35. .  La Cour estime opportun d’examiner ce grief sous l’angle de l’article 5 § 4 de la Convention, ainsi libellé :
  36. « 4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. »

    A.  Absence d’audience lors de l’examen de l’opposition


  37. .  La Cour note que le 25 janvier 2008, la cour d’assises a rejeté, sans tenir audience, l’opposition formée par le requérant contre la décision de son maintien en détention rendue lors de l’audience du 24 janvier 2008. Ainsi, lorsque la cour d’assises a examiné l’opposition, la dernière comparution de l’intéressé devant un juge remontait seulement à la veille (paragraphes 14-15 ci-dessus). Aussi, dans les circonstances de l’espèce, la Cour considère que la tenue d’une audience ne s’imposait pas lors de l’examen de l’opposition le 25 janvier 2008. Il convient de préciser que cette circonstance n’a pas en soi porté atteinte au respect des principes de l’égalité des armes et du contradictoire dans la mesure où aucune des parties n’a participé oralement à la procédure d’opposition (Altınok c. Turquie, no 31610/08, § 55, 29 novembre 2011, et Çatal c. Turquie, no 26808/08, § 41, 17 Avril 2012).
  38. 33.  Dès lors, il s’ensuit que le grief tiré de l’absence d’audience lors de l’examen de l’opposition est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.

    B.  Non-communication de l’avis du procureur de la République

    34.  La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 de la Convention. Elle relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.


  39. .  La Cour rappelle qu’un procès portant sur un recours formé contre une détention doit être contradictoire et garantir l’égalité des armes entre les parties - le procureur et le détenu (Nikolova c. Bulgarie [GC], no 31195/96, § 58, CEDH 1999-II). La législation nationale peut remplir cette exigence de diverses manières, mais la méthode adoptée par elle doit garantir que la partie adverse soit au courant du dépôt d’observations et jouisse d’une possibilité véritable de les commenter (Lietzow c. Allemagne, no 24479/94, § 44, CEDH 2001-I).

  40. .  En l’espèce, lors de l’examen de l’opposition formée par le requérant contre la décision du 24 janvier 2008, la cour d’assises a invité le procureur de la République à présenter son avis écrit. Le procureur a déposé devant cette juridiction ses conclusions écrites tendant au rejet de la demande d’élargissement, lesquelles conclusions n’ont pas été communiquées au requérant ou à son avocat. Ces derniers n’ont donc pas eu la possibilité de répondre à cet avis. La cour d’assises a statué dans le sens de l’avis du procureur et a rejeté l’opposition formée par le requérant.

  41. .  Dès lors, considérant que le principe du contradictoire et l’égalité des armes entre les parties n’ont pas été respectés, la Cour estime que le recours prévu en droit interne n’a pas satisfait aux exigences de l’article 5 § 4 de la Convention (Altınok, précité, § 60).
  42. III.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 5 DE LA CONVENTION


  43. .  Le requérant se plaint de l’absence de voies de recours effectives pour obtenir réparation à raison de sa détention irrégulière alléguée. Il invoque l’article 5 § 5 de la Convention, ainsi libellé :
  44. « 5. Toute personne victime d’une arrestation ou d’une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation. »


  45. .  La Cour rappelle que le droit à réparation énoncé au paragraphe 5 de l’article 5 de la Convention suppose qu’une violation de l’un des autres paragraphes de cette disposition ait été établie par une autorité nationale ou par les institutions de la Convention (N.C. c. Italie [GC], no 24952/94, § 49, CEDH 2002-X). En l’espèce, la Cour ayant conclu à la violation du paragraphe 4 de l’article 5, reste à déterminer si le requérant disposait de la possibilité de demander réparation pour le préjudice subi.

  46. .  La Cour relève que l’article 141 du code de procédure pénale prévoit la possibilité pour une personne ayant fait l’objet d’une mesure de détention préventive de demander une indemnisation dans certains cas limitativement énoncés. Or, à la lecture de cette disposition telle qu’elle était en vigueur à l’époque des faits, aucun des cas de figure énumérés ne prévoyait la possibilité de demander la réparation d’un préjudice subi en raison de l’absence d’un recours effectif pour contester la détention provisoire.

  47. .  Partant, la Cour estime que la voie de l’indemnisation indiquée par le Gouvernement ne saurait constituer un recours effectif au sens de l’article 5 § 5 de la Convention. En conséquence, la Cour rejette l’exception du Gouvernement sur ce point et conclut à la violation de l’article 5 § 5 de la Convention.
  48. IV.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION


  49. .  Le requérant se plaint de ce que sa cause n’a pas été entendue dans un délai raisonnable. Il invoque à cet égard l’article 6 de la Convention, ainsi libellé dans sa partie pertinente en l’espèce :
  50. « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »


  51. .  Le Gouvernement combat la thèse du requérant.
  52. A.  Sur la recevabilité


  53. .  La Cour fait observer qu’un nouveau recours en indemnisation a été instauré en Turquie à la suite de l’application de la procédure d’arrêt pilote dans l’affaire Ümmühan Kaplan c. Turquie (no 24240/07, 20 mars 2012). Elle rappelle que, dans sa décision Turgut et autres c. Turquie (no 4860/09, 26 mars 2013), elle a déclaré irrecevable une nouvelle requête, faute pour les requérants d’avoir épuisé les voies de recours interne, en l’occurrence le nouveau recours. Pour ce faire, elle a considéré notamment que ce nouveau recours était, a priori, accessible et susceptible d’offrir des perspectives raisonnables de redressement pour les griefs relatifs à la durée de la procédure.

  54. .  La Cour rappelle également que dans son arrêt pilote Ümmühan Kaplan (précité, § 77) elle a précisé notamment qu’elle pourra poursuivre, par la voie de la procédure normale, l’examen des requêtes de ce type déjà communiquées au Gouvernement. Elle note en outre que le Gouvernement n’a pas soulevé dans le cadre de la présente affaire une exception portant sur ce nouveau recours. À la lumière de ce qui précède, la Cour décide de poursuivre l’examen de la présente requête.

  55. .  Constatant que le grief tiré de l’article 6 de la Convention n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, elle le déclare recevable.
  56. B.  Sur le fond


  57. .  La Cour note que la période à prendre en considération a commencé le 15 décembre 2005 et s’est terminée le 10 avril 2009. En conséquence, la procédure a duré presque trois ans et quatre mois, pour une instance.

  58. .  La Cour ne relève aucun élément imputable au requérant qui ait pu allonger d’une manière ou d’une autre la durée de la procédure.

  59. .  S’agissant du comportement des autorités internes, la Cour note que près de sept mois ont été nécessaires pour que le rapport d’expertise soit versé au dossier et les audiences du 19 septembre 2006, du 2 novembre 2006, du 26 décembre 2006 et du 22 mars 2007 ont été ajournées pour ce motif. En outre, la cour d’assises a attendu pendant près d’un an l’issue du pourvoi dans l’affaire du frère du requérant, alors que l’affaire de ce dernier était en état pour être mise en délibéré. Les audiences du 24 janvier 2008, du 22 avril 2008, du 20 juin 2008 et du 5 août 2008 ont été ajournées pour ce motif. Ce n’est qu’à l’audience du 17 octobre 2008 que la cour d’assises a été informée de l’arrêt de cassation qui avait été rendu dès le 21 avril 2008.

  60. .  De plus, la Cour observe que le requérant était maintenu en détention provisoire pendant une grande partie de la procédure, situation qui requiert des tribunaux chargés de l’affaire une diligence particulière pour administrer la justice dans les meilleurs délais (voir Kalachnikov c. Russie, no 47095/99, § 132, CEDH 2002-VI).

  61. .  Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis et compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime qu’en l’espèce la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable ».

  62. .  Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
  63.  

    V.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

     


  64. .  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
  65.  

    « Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

    A.  Dommage moral


  66. .  Le requérant réclame 15 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu’il aurait subi.

  67. .  Le Gouvernement conteste ce montant.

  68. .  Statuant en équité, la Cour considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 1 500 EUR pour dommage moral.
  69. B.  Frais et dépens


  70. .  Le requérant demande également 5 350 EUR pour les frais et dépens engagés devant la Cour. À titre de justificatif, il fournit des décomptes horaires.

  71. .  Le Gouvernement conteste ce montant.

  72. .  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux.
  73. En l’espèce et compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable la somme de 500 EUR tous frais confondus et l’accorde au requérant.

    C.  Intérêts moratoires


  74. .  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
  75. PAR CES MOTIFS, LA COUR À L’UNANIMITÉ,

    1.  Déclare la requête recevable quant aux griefs tirés de l’article 6 de la Convention ainsi que des paragraphes 4 (non-communication de l’avis du procureur) et 5 de l’article 5, et irrecevable pour le surplus ;

     

    2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 4 de la Convention ;

     

    3.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 5 de la Convention ;

     

    4.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;

    5.  Dit

    a)  que l’État défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois les sommes suivantes, à convertir en livres turques au taux applicable à la date du règlement :

    i)  1 500 EUR (mille cinq cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;

    ii)  500 EUR (cinq cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par le requérant, pour frais et dépens ;

    b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

     

    6.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

    Fait en français, puis communiqué par écrit le 1er juillet 2014, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

        Abel Campos                                                                        András Sajó
      Greffier adjoint                                                                        Président


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