BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?

No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!



BAILII [Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback]

European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> DRENK v. THE CZECH REPUBLIC - 1071/12 - Chamber Judgment (French Text) [2014] ECHR 897 (04 September 2014)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2014/897.html
Cite as: [2014] ECHR 897

[New search] [Contents list] [Printable RTF version] [Help]


     

     

     

    CINQUIÈME SECTION

     

     

     

     

     

     

     

    AFFAIRE DRENK c. RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

     

    (Requête no 1071/12)

     

     

     

     

     

     

     

     

    ARRÊT

     

     

     

    STRASBOURG

     

    4 septembre 2014

     

     

     

     

    Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

     


    En l’affaire Drenk c. République tchèque,

    La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :

              Mark Villiger, président,
              Angelika Nußberger,
              Boštjan M. Zupančič,
              Ann Power-Forde,
              Ganna Yudkivska,
              Helena Jäderblom,
              Aleš Pejchal, juges,

    et de Claudia Westerdiek, greffière de section,

    Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 1er juillet 2014,

    Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

    PROCÉDURE

    1.  À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 1071/12) dirigée contre la République tchèque et dont un ressortissant allemand, M. Christoph Drenk (« le requérant »), a saisi la Cour le 23 décembre 2011 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

    2.  Le requérant a été représenté par Me K. Samková, avocate au barreau tchèque. Le gouvernement tchèque (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. V.A. Schorm, du ministère de la Justice. Le gouvernement allemand, qui a reçu communication de la requête (articles 36 § 1 de la Convention et 44 § 1 a) du règlement), n’a pas souhaité se prévaloir de son droit d’intervenir dans la procédure.

    3.  Le requérant allègue en particulier que la procédure sur l’exercice de l’autorité parentale n’a pas été équitable et n’a pas respecté les intérêts protégés par l’article 8 de la Convention. Il se plaint également que les autorités n’ont pas pris les mesures appropriées afin de lui assurer le contact avec son enfant.

    4.  Le 27 mars 2013, la requête a été communiquée au Gouvernement. Le 5 décembre 2013, des questions supplémentaires ont été posées aux parties.

    EN FAIT

    I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

    5.  Le requérant est né en 1966 et réside à Prague.

    6.  En septembre 2004, le requérant devint père d’un garçon, C., né de sa relation avec J.S. Depuis décembre 2005, les parents ne vivent plus ensemble, ce qui amena J.S. à saisir les tribunaux afin qu’ils décident notamment du droit de garde et de visite (voir paragraphe 7 et s. ci-dessous). Peu après la fin de cette procédure, J.S. engagea une nouvelle procédure visant à modifier le droit de visite du requérant (voir paragraphe 22 ci-dessous). Pendant ce temps-là, le droit de visite du requérant était régi par les mesures provisoires (voir paragraphe 27 ci-dessous).

    A.  Première procédure portant sur les droits de garde et de visite et sur la pension alimentaire (no 83 Nc 120/2005)

    7.  Le 21 décembre 2005, J.S. intenta devant le tribunal municipal de Brno une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale sur C., demandant de se voir attribuer sa garde. Le requérant sollicita d’abord une garde alternée, puis consentit à l’attribution de la garde à J.S. en contrepartie d’un droit de visite.

    8.  Après avoir tenu plusieurs audiences en l’affaire, le tribunal municipal ordonna une expertise psychologique et psychiatrique, qui fut réalisée en novembre 2007. Après avoir examiné les parents et rencontré le mineur, alors âgé de trois ans, l’expert conclut que les deux parents étaient volontaires et aptes à élever leur enfant et que rien n’indiquait qu’ils le monteraient l’un contre l’autre ; le mineur avait des liens normaux avec le requérant, leurs rencontres dans une structure spécialisée s’étaient bien déroulées et étaient bénéfiques pour l’enfant. Selon l’expert, la garde alternée n’était pas appropriée car les parents n’étaient pas à même de se mettre d’accord, et la meilleure solution était de laisser la garde de l’enfant à la mère et d’accorder au père un droit de visite à raison d’un week-end sur deux (sans la nuit pendant les deux premières années environ) et d’un après-midi par semaine. Etant donné que le requérant avait des liens affectifs à l’égard de son fils et ne risquait pas de lui faire du mal, l’expert estima que leurs rencontres pouvaient se dérouler en l’absence de tierce personne.

    9.  Par jugement du 30 mars 2010, le tribunal municipal de Brno décida d’attribuer la garde de C. à J.S., d’enjoindre au requérant une obligation alimentaire et de lui accorder un droit de visite à raison de deux heures toutes les deux semaines, dans un établissement spécialisé et en présence d’un des employés de celui-ci. Il prit en compte notamment les dépositions des parents, le rapport d’expertise susmentionné, les rapports de l’autorité de la protection sociale agissant en tant que tuteur de l’enfant, ainsi que ceux élaborés par deux établissements spécialisés abritant depuis février 2009 les rencontres entre le requérant et son fils, comme prévu par les mesures provisoires (voir paragraphes 28-31 ci-dessous) ; ces rapports faisaient entre autres état d’un comportement inacceptable du requérant (voir paragraphe 32 ci-dessous). Sur la base de ces preuves, le tribunal constata que J.S. s’occupait dûment du mineur mais que les relations entre les parents étaient très conflictuelles. Il releva que, selon les rapports du tuteur, qui proposait de ce fait de maintenir la forme et l’étendue actuelle du droit de visite, le requérant ne respectait pas les règles des établissements dans lesquels il réalisait son droit de visite provisoire et ne se comportait pas de manière appropriée, ce qui nuisait à l’ambiance des rencontres ainsi qu’à la relation entre lui et son fils.

    10.  En mai 2010, le requérant fit appel de ce jugement, contestant la décision sur la pension alimentaire et le droit de visite qu’il voulait non médiatisé. Il invita ensuite plusieurs fois les tribunaux municipal et régional à accélérer la procédure et, le 17 août 2010, il les informa de l’échec de plusieurs rencontres prévues par la mesure provisoire.

    11.  Deux audiences furent ensuite tenues par le tribunal régional de Brno en janvier et février 2011. Lors de la seconde, le tuteur de l’enfant proposa, compte tenu du déroulement des rencontres médiatisées ayant eu lieu jusqu’à lors, de ne pas changer ce régime mais de réduire la durée des rencontres. Il informa également le tribunal qu’il s’était entretenu avec l’enfant, sans présence de la mère ; à cette occasion, le mineur déclara qu’il ne voulait pas aller chez son père qui lui faisait peur. Il ressort du procès-verbal que le requérant ne proposa pas de compléter les preuves.

    12.  Par arrêt du 25 février 2011, passé en force de chose jugée le 11 avril 2011, le tribunal régional décida de revoir à la hausse le montant de la pension alimentaire à payer par le requérant et de réformer la décision sur son droit de visite de manière à lui permettre de voir son fils un samedi sur deux (de 10h à 17h) en l’absence d’autres personnes ; il enjoignit en outre à J.S. de dûment préparer le mineur à ces rencontres.

    Pour définir le montant de la pension alimentaire, le tribunal régional prit en compte entre autres le revenu auquel le requérant pourrait prétendre au vu de ses capacités, et non son revenu réel de l’époque, et expliqua sa démarche.

    Quant au droit de visite, il nota que J.S. avait légitimement reproché au tribunal de première instance que le rapport d’expertise élaboré en novembre 2007 ne pouvait pas, faute d’avoir été bien administré, servir de base à la décision. Selon le tribunal, il résultait des preuves restantes que, à part le fait que le mineur n’était plus accoutumé à voir son père, rien ne diminuait son intérêt à le rencontrer selon les modalités habituelles. Pour ce qui est du requérant, le tribunal estima que s’il était vrai que son comportement n’était pas à la hauteur de la situation et qu’il n’appréciait pas le droit de visite médiatisé qui, de toute manière, n’avait plus de sens après plusieurs années de durée, on ne pouvait pas lui faire de reproches essentiels ; ainsi, aussi longtemps que les rencontres entre le requérant et son fils ne compromettaient pas le bon développement de ce dernier, rien ne s’opposait à ce qu’ils se voient sans assistance de tiers.

    13.  Le 13 avril 2011, le tribunal municipal de Brno décida, eu égard au fait que J.S. avec l’enfant avaient déménagé, de transférer la compétence pour connaître de l’affaire au tribunal d’arrondissement de Prague 2 ; s’ensuivit un conflit de compétences qui ne fut résolu que le 13 septembre 2011. Entre-temps, le 4 mai 2011, le requérant réagit à la décision du 13 avril 2011 par une objection de partialité soulevée à l’encontre du juge du tribunal municipal.

    14.  Le 23 avril 2011, alors qu’il devait rencontrer son fils en vertu de l’arrêt du 25 février 2011, le requérant se rendit à l’endroit prévu en présence des journalistes et d’une équipe de télévision. Après que l’enfant, apeuré, eut refusé de partir avec lui, il appela la police qui entendit tous les intéressés.

    15.  Le 3 mai 2011, le requérant contesta les décisions sur le fond par un recours constitutionnel dans lequel il invoquait les articles 6 § 1, 8 et 14 de la Convention. Selon lui, les tribunaux n’avaient pas dûment pris en compte les conclusions du rapport d’expertise de 2007 qui étaient clairement en faveur d’un droit de visite normal, et n’avaient pas expliqué pourquoi ils n’avaient pas suivi ces conclusions ni entendu l’expert. Ainsi, les tribunaux se seraient fondés uniquement sur les allégations de la mère et la prétendue désaccoutumance du mineur, situation à laquelle ils avaient contribué par leurs décisions antérieures. Le requérant dénonça également la durée et l’iniquité de la procédure, le manque de motivation de la décision sur la pension alimentaire ainsi que le fait que l’affaire avait été décidée par un autre juge que celui compétent en fonction du domicile réel de l’enfant. Il se plaignit enfin que, après avoir été privé d’un contact normal avec son enfant pendant presque trois ans, il s’était vu accorder un droit de visite très limité, qu’il n’avait même pas pu réaliser en raison de la résistance de J.S.

    16.  Le 21 mai 2011, l’enfant refusa de nouveau de voir le requérant. Le mineur confirma ensuite sa position devant les policiers que le requérant avait appelés.

    17.  Le 3 juin 2011, la Cour constitutionnelle rejeta le recours pour défaut manifeste de fondement, considérant que le requérant ne faisait que répéter ses objections et polémiquer sur les conclusions des tribunaux, sans pour autant soulever des griefs relevant du droit constitutionnel. De l’avis de la Cour constitutionnelle, les décisions contestées étaient dûment motivées et dépourvues d’arbitraire et le requérant n’avait pas été empêché de défendre ses droits ; quant au grief tiré de la durée de la procédure, la référence fut faite à la possibilité de demander une indemnisation selon la loi no 82/1998. Cette décision fut notifiée à l’avocate du requérant le 24 juin 2011.

    18.  Entre le 9 mai 2011 et le 15 mars 2012, le requérant s’adressa à plusieurs reprises aux juridictions nationales pour les informer de la non-réalisation, depuis avril 2011, de son droit de visite accordé par l’arrêt du tribunal régional et pour demander l’exécution de celui-ci, soit par des sommations adressées à la mère, soit par l’infliction d’amendes à celle-ci. D’après lui, J.S. prétextait des problèmes de santé mineurs de C., organisait divers séjours de ce dernier de manière à compromettre la réalisation du droit de visite ou prétendait que C. ne voulait pas le rencontrer ; de plus, elle ne réagissait pas à ses demandes de voir son fils à d’autres dates. Selon les dires du requérant, il dénonça le comportement de J.S. également par les plaintes pénales qui furent toutes classées sans suite.

    19.  En réponse à l’invitation du tribunal du 20 décembre 2011, J.S. expliqua les raisons de la non-réalisation de certaines rencontres prévues, notamment celles du 23 avril 2011 et 21 mai 2011 visées par les demandes d’exécution du requérant. Elle fit valoir que, malgré ses efforts, considérés par C. comme une trahison, celui-ci refusait de voir le requérant qu’il jugeait méchant et grossier.

    20.  Les demandes d’exécution concernant l’année 2011 furent rejetées, le 3 février 2012, par le tribunal d’arrondissement de Prague 2 qui constata que, du fait des conflits entre les parents et de la communication problématique entre C. et son père, il n’avait pas été possible de réaliser leurs rencontres comme prévu par l’arrêt du 25 février 2011. Selon le tribunal, J.S. ne s’opposait pas à ces rencontres mais le mineur les refusait ; par ailleurs, J.S. avait entamé une nouvelle procédure sur le droit de visite, dans le cadre de laquelle de nouveaux rapports d’expertise seraient élaborés.

    21.  Sur appel du requérant, cette décision fut confirmée par le tribunal municipal de Prague le 21 mai 2012. Le tribunal releva que les relations entre les parents étaient tendues, que C. avait peur du requérant et était très perturbé par leurs rencontres ; ainsi, seules des rencontres avec assistance d’un tiers avaient pu avoir lieu, le 8 avril 2011, le 13 janvier 2012, le 27 janvier 2012 et le 10 février 2012. Eu égard à l’état psychique de l’enfant, la question se posait de savoir s’il était approprié de le forcer à rencontrer le requérant sans assistance ou s’il fallait résoudre le conflit par une mesure alternative, tel un régime d’adaptation progressif au sens de l’article 273 § 2 du code de procédure civile ; cette question fit l’objet de la nouvelle procédure initiée par J.S.

    B.  Nouvelle procédure relative au droit de visite du requérant

    22.  Le Gouvernement note dans ses observations que, le 20 décembre 2011, J.S. engagea devant le tribunal d’arrondissement de Prague 2 une nouvelle procédure visant à modifier le droit de visite du requérant. Le 1er octobre 2012, elle demanda l’interdiction de contact entre ce dernier et l’enfant.

    23.  Le 4 septembre 2012, le tuteur informa le tribunal du déroulement des visites prévues par la mesure provisoire du 26 juin 2012, du souhait de l’enfant de ne pas rencontrer son père et de l’avis de la psychologue de l’enfant selon laquelle le comportement du requérant durant ces visites avait des répercussions négatives sur le développement et la santé psychique de l’enfant.

    24.  Le 25 septembre 2012, un rapport d’expertise fut élaboré à la demande de J.S. et soumis au tuteur ainsi qu’au tribunal. Ayant examiné l’enfant à deux reprises, l’expert confirma son attitude négative à l’égard du requérant et constata l’existence chez l’enfant d’un trouble névrotique anxieux qui pourrait avoir des conséquences durables ; il recommanda dès lors l’interdiction de contact.

    25.  Après avoir tenu trois audiences entre octobre et décembre 2012, le tribunal d’arrondissement commanda lui-même un rapport d’expertise. Dans ce rapport, élaboré le 30 mai 2013, les experts constatèrent que le requérant voulait participer à l’éducation de son fils mais manquait d’empathie, et que le déroulement actuel de leurs rencontres ne faisait que fixer et accentuer leurs relations problématiques et l’opposition de l’enfant, souffrant d’une symptomatique anxieuse. Selon eux, un droit de visite médiatisé accompagné d’un travail psychologique avec les deux parents représentait la seule solution.

    C.  Droit de visite provisoire

    26.  En avril 2006, le requérant déclara devant les autorités nationales qu’il ne voyait son fils que pendant quelques heures tous les quinze jours. Il allègue devant la Cour que les relations entre lui et J.S. étaient constamment tendues et que cette dernière s’évertuait à lui rendre impossible tout contact avec son fils.

    27.  Dès lors, durant la première procédure relative aux droits de garde et de visite, les deux parents sollicitèrent un certain nombre de mesures provisoires relatives au droit de visite du requérant.

    28.  En vertu de la première d’entre elles, rendue par le tribunal municipal de Brno le 26 avril 2006, le requérant devait voir son fils tous les samedis en présence de J.S. Selon le dossier, les rencontres se réalisaient - malgré les conflits entre les parents, dus selon le tuteur de l’enfant notamment à un comportement problématique du requérant, que celui-ci conteste - jusqu’au 28 avril 2007. À cette dernière date, le requérant blessa le compagnon de J.S., ce qui lui valut d’être condamné à une peine de prison avec sursis (bien qu’il continue de nier sa culpabilité devant la Cour).

    29.  Le 16 mai 2007, le tribunal municipal adopta une nouvelle mesure provisoire selon laquelle le droit de visite du requérant devait se réaliser, en raison des conflits croissants entre les parents, dans un établissement spécialisé S., en présence d’un employé de celui-ci et de J.S., une fois par semaine. Selon le rapport de l’établissement, adressé au tribunal en juillet 2007, les rencontres se déroulaient comme prévu même si le requérant n’était pas assez sensible aux besoins de l’enfant.

    30.  Le 29 novembre 2007, le tribunal municipal accueillit la demande du requérant tendant à ce que son droit de visite se déroule sans présence de tiers ; sur appel de J.S., le tribunal régional de Brno limita, le 8 janvier 2008, l’étendue de ce droit de visite à un jour toutes les deux semaines.

    31.  Le 3 juin 2008, le requérant demanda que son droit de visite se déroule de nouveau dans l’établissement S. et soit limité à trois heures toutes les deux semaines, alléguant que, n’ayant pas pu voir son fils conformément à la mesure précédente, en raison du changement d’emploi, il était nécessaire de rétablir le contact entre eux. Le 23 juin 2008, le tribunal municipal accéda à cette demande mais limita l’étendue du droit de visite à deux heures toutes les trois semaines, tenant compte de l’avis et des disponibilités de l’établissement S. Malgré les demandes du requérant, cette étendue resta inchangée jusqu’à l’adoption du jugement sur le fond en mars 2010. Selon le requérant, seulement vingt-et-une rencontres de deux heures eurent ainsi lieu en un an et neuf mois.

    32.  Selon les rapports élaborés en octobre 2009 ainsi qu’en mars et mai 2010 par les établissements abritant ces rencontres, le requérant manquait d’empathie et se comportait de manière inappropriée, ce qui avait des répercussions négatives et traumatisantes sur l’enfant ; il aurait également méprisé les personnes proches à l’enfant et les éducateurs spécialisés.

    33.  Le 16 juin 2010, le requérant se vit infliger une amende dans une procédure en protection des droits de la personnalité engagée par l’époux de J.S., en raison des propos diffamatoires qu’il diffusait au sujet de ce dernier.

    34.  A la suite de la dernière rencontre médiatisée du 8 avril 2011, le fils du requérant manifesta des troubles de santé qui amenèrent J.S. à consulter plusieurs médecins et experts. Compte tenu des résultats de ces examens, selon lesquels l’enfant était anxieux, traumatisé, souffrait de problèmes psychosomatiques et ne devait pas être exposé aux situations stressantes, et de l’incident du 23 avril 2011 où le requérant était venu à la rencontre de son fils en présence de journalistes (voir paragraphe 14 ci-dessus), J.S. demanda en date du 9 juin 2011 l’adoption d’une mesure provisoire mettant en place un droit de visite médiatisé. Le 14 juin 2011, cette demande fut rejetée par le tribunal d’arrondissement de Prague 2.

    35.  Par une mesure provisoire du 10 janvier 2012, adoptée à la demande du tuteur de l’enfant et motivée par le comportement inapproprié du requérant, le tribunal d’arrondissement mit en place un droit de visite médiatisé à raison d’une heure toutes les deux semaines et enjoignit aux parents de coopérer avec un centre de conseil psychopédagogique. Sur appel du requérant, le tribunal municipal de Prague décida, le 22 février 2012, que les visites pouvaient se réaliser en dehors d’un établissement spécialisé.

    36.  Le 23 mars 2012, l’établissement dans lequel plusieurs rencontres s’étaient déroulées entre janvier et mars 2012 informa le tuteur que le requérant s’était comporté de manière inappropriée, ce qui provoquait une attitude négative de l’enfant ; de l’avis de l’établissement, le contact entre les intéressés devrait être interdit ou rester indéterminé. Quelques jours plus tard, le tuteur fut informé du résultat de l’examen subi par l’enfant dans le centre de conseil psychopédagogique, selon lequel le contact avec le requérant perturbait la stabilité psychique de l’enfant et mettait en péril son développement.

    37.  Le 4 avril 2012, le tribunal d’arrondissement accueillit la demande du tuteur tendant à ce que le droit de visite se déroule une fois par semaine dans l’établissement spécialisé.

    38.  Le 4 juin 2012, l’affaire fut examinée en présence des experts et de tous les intéressés, en vue d’établir un plan de protection de l’enfant et de soutien aux parents ; le résultat ainsi que l’information sur le déroulement des visites après le 4 avril 2012 furent portés à la connaissance du tribunal municipal de Prague.

    39.  Le 26 juin 2012, le tribunal municipal accéda à l’appel du requérant contre la mesure du 4 avril 2012 et décida que le droit de visite devait se dérouler une fois toutes les deux semaines sans assistance. Selon le Gouvernement, les rencontres entre les intéressés ne se réalisent plus depuis.

    II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

    A.  Code de procédure civile (loi no 99/1963) dans sa version en vigueur depuis le 1er octobre 2008

    40.  Le 1er octobre 2008, certaines dispositions du code de procédure civile concernant la procédure sur l’exercice de l’autorité parentale, l’exécution des décisions judiciaires relatives aux mineurs et la coopération des autorités locales dans le cadre des procédures d’exécution ont été amendées par la loi no 295/2008, et ce en vue d’assurer la rapidité des procédures concernant les enfants, développer la possibilité de la médiation et du règlement amiable des conflits parentaux et souligner l’obligation des tribunaux de demander l’avis de l’enfant.

    41.  Ainsi, conformément aux nouveaux articles 100 § 3 et 110 § 2 du code, les tribunaux peuvent suspendre la procédure pendant une période allant jusqu’à trois mois et ordonner aux parties de prendre part à des séances extrajudiciaires de conciliation ou de médiation ou à une thérapie familiale. Puis, l’article 100 § 4 impose au tribunal chargé d’une procédure impliquant un enfant mineur capable de formuler ses opinions d’établir l’opinion de celui-ci par son audition ou, à titre exceptionnel, par le biais de son représentant, d’un rapport d’expertise ou de l’autorité de la protection sociale de l’enfant. L’audition de l’enfant peut être effectuée en l’absence d’autres personnes dont la présence pourrait empêcher l’enfant d’exprimer sa propre opinion ; l’âge et la maturité de l’enfant sont pris en compte.

    42.  Les articles 272-273a du code relatifs à l’exécution des décisions judiciaires concernant les mineurs ont été complètement remaniés le 1er octobre 2008 (pour la version antérieure, voir Choc c. République tchèque (déc.), no 25213/03, 29 novembre 2005). L’ancienne phase initiale, consistant en conseils aux parties appelées à s’acquitter volontairement de leurs obligations, est devenue partie de la procédure sur le fond. Lors de celle-ci, les tribunaux doivent également instruire les parties sur la possibilité, en cas de non-respect par elles de leurs obligations, de procéder à une exécution par voie d’amende ou de séparation forcée de l’enfant. En vertu de l’article 273 § 1, l’infliction répétitive d’amendes, qui s’était avérée inefficace par le passé, est désormais limitée aux cas où cela s’avère utile, et les tribunaux sont censés en donner les motifs. L’article 273 § 2 permet aux tribunaux d’ordonner aux parents qui ne s’acquittent pas de leurs obligations de prendre part à des séances extrajudiciaires de médiation ou de conciliation ou bien à une thérapie appropriée ; lorsque c’est dans l’intérêt de l’enfant, les tribunaux peuvent également établir, après avoir sollicité l’avis d’un expert, un plan d’un « régime d’adaptation » visant le rétablissement progressif de contact. L’article 273 § 3 dispose que si ces mesures s’avèrent infructueuses, le tribunal ordonne la réunification forcée du parent avec son enfant.

    B.  Loi no 182/1993 sur la Cour constitutionnelle

    43.  L’article 39 dispose que la Cour constitutionnelle peut ne pas examiner les recours dont elle est saisie dans leur ordre chronologique lorsqu’elle estime qu’un recours porte sur une affaire urgente.

    C.  Pratique de la Cour constitutionnelle

    44.  Par l’arrêt no III. ÚS 1206/09 du 23 février 2010, la Cour constitutionnelle annula un arrêt par lequel un tribunal régional avait confirmé en appel l’octroi de la garde de l’enfant à la mère alors qu’il avait été prouvé, y compris par un rapport d’expertise commandé par le tribunal, que la garde alternée (sollicitée par le plaignant, le père de l’enfant) était dans l’intérêt de l’enfant. La Cour constitutionnelle reprocha aux tribunaux de s’être basés seulement sur les allégations de la mère dont le refus constituait le seul obstacle à la garde alternée (pourtant recommandée par l’expert), et de ne pas avoir analysé ces allégations à l’aide des preuves. Selon la cour, le désaccord de la mère ne pouvait peser sur la décision que s’il s’appuyait sur des motifs susceptibles de compromettre l’intérêt de l’enfant.

    45.  Dans l’arrêt no II. ÚS 3765/11 du 13 mars 2012, la Cour constitutionnelle considéra que le droit de la plaignante garanti par l’article 8 de la Convention avait été enfreint lorsqu’elle s’était vue infliger une amende par les tribunaux chargés de l’exécution du droit de visite accordé au père de l’enfant. Se référant amplement à la jurisprudence de la Cour en matière d’obligations positives des États, la Cour constitutionnelle reprocha aux tribunaux d’avoir considéré qu’il incombait à la plaignante, en tant que mère d’un enfant qui refusait de voir son père, d’agir activement et, le cas échéant, d’aller à l’encontre de la volonté de l’enfant, alors que la plaignante avait suivi les recommandations des experts. Selon la cour, les tribunaux s’étaient à tort limités à chercher celui qui était coupable du refus de l’enfant, sans avoir pris en compte que l’enfant, alors âgé de sept ou huit ans, pouvait avoir sa propre opinion.

    D.  Loi no 6/2002 sur les tribunaux et les juges (version en vigueur depuis le 1er juillet 2009)

    46.  Depuis le 1er juillet 2009, le moyen accélérateur prévu par l’article 174a de cette loi, à savoir la demande tendant à la fixation d’un délai pour l’accomplissement d’un acte procédural, n’est plus conditionné par l’introduction préalable d’un recours hiérarchique (voir, pour comparer, Vokurka c. République tchèque (déc.), no 40552/02, §§ 12-24 et §§ 51-57, 16 octobre 2007).

    1.  Article 174a de la loi no 6/2002

    47.  L’article 174a de cette loi est libellé comme suit :

    « 1. Si un participant ou une partie à la procédure estime que celle-ci accuse des retards, il peut saisir le tribunal d’une demande visant à la fixation d’un délai pour l’accomplissement de l’acte procédural qu’il estime ne pas avoir été accompli en temps utile (ci-après « la demande de fixation de délai »). (...)

    2. La demande de fixation de délai est à soumettre au tribunal auquel les retards sont reprochés. Elle doit faire apparaître qui en est l’auteur (ci-après « le demandeur »), de quelle affaire et de quel acte procédural il s’agit, en quoi consistent selon le demandeur voit les retards de la procédure et ce qu’il réclame ; en outre, la demande doit contenir le nom du tribunal visé par elle, être datée et signée.

    3. Dans les 5 jours ouvrables à compter de sa réception, le tribunal auquel les retards sont reprochés transmet la demande de fixation de délai accompagnée de ses observations à la juridiction compétente pour en connaître; il en informe le demandeur. Cela ne s’applique pas lorsque le tribunal accomplit dans les 30 jours à compter de la réception de la demande tous les actes procéduraux que le requérant estime ne pas avoir été accomplis en temps utile ; dans un tel cas, l’examen de la demande ne se poursuit plus, sauf si le demandeur déclare expressément, dans le délai de 3 jours depuis qu’il appris que les actes avaient été accomplis, qu’il tient à son examen.

    4. La juridiction compétente pour statuer sur la demande est au civil et au pénal le tribunal de degré immédiatement supérieur si la demande vise un tribunal de district, un tribunal régional ou une haute cour, et la Cour suprême administrative si la demande vise un tribunal régional dans une affaire relevant de la justice administrative ; si la demande vise la Cour suprême ou la Cour administrative suprême, elle relève de la compétence d’une autre chambre que celle à qui les retards sont reprochés.

    5. Le demandeur est le seul participant à la procédure. Si la présente loi n’en dispose pas autrement, les dispositions des première et troisième parties du code de procédure civile s’appliquent de façon adéquate à la procédure relative à la demande de fixation de délai.

    6. La juridiction compétente statue sur la demande de fixation de délai par une décision (usnesení). Elle déclare la demande irrecevable si elle a été soumise par une personne non autorisée, ou si le demandeur n’a pas dûment rectifié ou complété la demande dans le délai imparti ; sinon, elle statue sans audience dans les 20 jours ouvrables à compter de la transmission de la demande ou à compter de la date à laquelle la demande a été dûment rectifiée ou complétée.

    7. Si le tribunal concerné par la demande de fixation de délai a déjà accompli l’acte procédural visé par la demande, la juridiction compétente rejette la demande ; elle procède de la même manière si elle conclut à l’absence de retards dans la procédure.

    8. Si la juridiction compétente conclut que la demande de fixation de délai est fondée, considérant que, eu égard à la complexité de l’affaire, à l’enjeu de la procédure pour le demandeur, au comportement des participants ou des parties à la procédure et à la conduite du tribunal, la procédure accuse effectivement des retards, elle fixe un délai pour l’accomplissement de l’acte procédural visé par la demande ; le délai est obligatoire pour le tribunal compétent pour l’accomplissement de cet acte. Lorsque la demande est jugée fondée, les frais de procédure afférents à la demande sont payés par l’État.

    9. La décision par laquelle la juridiction compétente a statué sur la demande de fixation de délai est notifiée au demandeur et au tribunal visé par la demande. La décision judiciaire sur la demande de fixation de délai n’est susceptible d’aucun recours. »

    2.  Pratique décisionnelle

    48.  Le Gouvernement soumet à la Cour plusieurs décisions des tribunaux nationaux par lesquelles ceux-ci ont accueilli les demandes formées en vertu de l’article 174a de la loi no 6/2002 notamment dans le cadre des procédures relatives à l’exercice des droits parentaux.

    49.  Par la décision no 8 UL 4/2010 du 9 mars 2010, le tribunal régional d’Ústí nad Labem a ainsi fixé un délai de cinq mois pour la tenue par le tribunal de district de Chomutov d’une audience dans une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale. Il a décidé ainsi malgré la charge de travail du juge compétent, en prenant en compte l’inactivité du juge depuis le début de la procédure en avril 2009, les répercussions négatives sur la vie des personnes concernées et le temps nécessaire pour préparer l’audience.

    50.  Par la décision no 16 UL 3/2010 du 4 août 2010, le tribunal régional d’Ostrava a fixé au tribunal de district de Frýdek-Místek un délai de quinze jours pour convoquer une audience, qui devait avoir lieu dans les deux mois à compter de la convocation, dans une procédure de divorce.

    51.  Par la décision no 25 UL 5/2011 du 25 mai 2011, le tribunal régional de Hradec Králové a ordonné au tribunal de district de Jičín de tenir avant le 15 juillet 2011 une audience dans une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale pendante depuis septembre 2010, prenant en compte qu’aucune des audiences prévues n’avait eu lieu, essentiellement pour les raisons incombant au tribunal.

    52.  Par la décision no 19 UL 1/2011 du 15 juillet 2011, le tribunal régional de Prague a fixé au tribunal de district de Beroun un délai d’un mois pour statuer sur la demande d’exécution du droit de visite du demandeur. Selon le tribunal régional, le tribunal de district n’aurait pas dû réagir aux demandes d’exécution du demandeur en invitant simplement la mère des enfants à se conformer à la décision sur le droit de visite, mais il aurait dû procéder à l’exécution même d’une manière prévue par l’article 273 §§ 1-3 du code de procédure civile.

    53.  Par la décision no 25 UL 8/2011 du 12 août 2011, le tribunal régional de Hradec Králové a ordonné au tribunal de district de Jičín de convoquer avant le 30 octobre 2011 une audience dans une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale, considérant qu’un tel délai correspondait aux possibilités réelles du tribunal, en dépit des difficultés objectives.

    54.  Par la décision no 8 UL 3/2012 du 14 mars 2012, le tribunal régional d’Ústí nad Labem a fixé au tribunal de district de Litoměřice un délai d’un mois pour statuer sur la demande d’exécution d’un droit de visite provisoire de la demanderesse. Le tribunal régional a reproché au tribunal de district de n’avoir pas encore notifié ladite demande d’exécution, datée du 28 avril 2011, à l’autre partie à la procédure et de s’être borné à informer la demanderesse, en février 2012, que l’infliction d’amendes à l’autre partie n’était plus considérée comme effective en l’espèce.

    E.  Pratique décisionnelle en matière du recours indemnitaire prévu par la loi no 82/1998

    55.  Dans la décision Vokurka (précitée, § 65), la Cour a considéré que le recours indemnitaire introduit dans l’ordre juridique tchèque par l’amendement no 160/2006 à la loi no 82/1998 était effectif et accessible pour dénoncer le dépassement du « délai raisonnable » dans toute procédure judiciaire tombant dans le champ d’application de l’article 6 § 1 de la Convention.

    56.  Dans le cadre de la présente requête, le Gouvernement soumet à la Cour des informations relatives au fonctionnement de ce recours dans les procédures que la Cour examine habituellement sous l’angle de l’article 8 de la Convention. Il en ressort ce qui suit.

    57.  Par l’arrêt no 64 Co 269/2011 du 22 mars 2012, le tribunal municipal de Prague a confirmé le jugement rendu en première instance le 22 mars 2011, par lequel le tribunal d’arrondissement de Prague 2 avait alloué au demandeur la somme de 58 750 CZK, en sus de la somme de 110 000 CZK allouée auparavant par le ministère de la Justice, au titre du préjudice moral causé par la durée d’une procédure relative à l’autorité parentale, qui l’avait empêché d’obtenir l’exécution de son droit de visite. Le tribunal municipal a ainsi approuvé le calcul selon lequel la somme de 112 500 CZK, correspondant à une durée de huit ans et six mois devant deux degrés de juridiction, devait être abaissée de 20% en raison de la complexité de la procédure (comportant un élément international et nécessitant un rapport d’expertise), puis augmentée de 20% car le demandeur n’avait pas contribué à la durée. De plus, la somme ainsi obtenue a été augmentée de 50% (le maximum possible) en raison de l’enjeu considérable de la procédure pour les parties ; il a été noté à cet égard que la durée de la procédure et l’incapacité de l’Etat à amener la mère à respecter la décision sur le droit de visite du demandeur avaient perturbé, de manière difficilement réversible, les relations entre ce dernier et son fils et avaient privé le demandeur de la possibilité de jouer son rôle paternel.

    58.  Dans l’arrêt no 30 Cdo 4091/2011 du 30 janvier 2013, la Cour suprême a considéré que, si les autorités nationales n’ont pas pris toutes les mesures que l’on pouvait raisonnablement attendre d’elles pour permettre au parent de voir son enfant mineur, ou si elles ont pris ces mesures avec un retard, il s’agit d’un cas de durée excessive de la procédure qui est susceptible de porter atteinte au droit au respect de la vie familiale garanti par l’article 8 de la Convention. Selon la cour, une telle violation de ce droit doit être prise en compte pour analyser l’existence du préjudice moral dans le chef du parent qui n’a pas la garde de l’enfant, ainsi que l’intensité de ce préjudice qui est décisive pour la détermination de la satisfaction raisonnable au sens de l’article 31a § 2 de la loi no 82/1998.

    59.  Par l’arrêt no 30 Cdo 1478/2012 du 6 mars 2013, la Cour suprême a annulé l’arrêt du tribunal municipal de Prague du 23 juin 2011, reprochant à celui-ci de ne pas avoir examiné de manière complète et correcte la demande de dommages-intérêts formulée au titre de l’atteinte à la vie familiale, faute d’avoir examiné la question de savoir si les tribunaux avaient pris, dans la procédure d’exécution du droit de visite du demandeur, toutes les mesures que l’on pouvait raisonnablement attendre d’eux. Elle a relevé que la procédure d’exécution d’une décision sur le droit de visite était spécifique et ne pouvait pas être assimilée à une procédure d’exécution courante. Il ne s’agissait pas en effet d’une affaire susceptible d’être réglée en une fois mais d’une affaire concernant les situations répétitives. C’est pourquoi, une fois entamée, une telle procédure ne sera habituellement pas close et, si une obligation est de nouveau violée après un certain laps de temps, le tribunal poursuivra la procédure entamée auparavant. Nonobstant les demandes introduites par les parties à la procédure, le tribunal doit entamer et poursuivre cette procédure d’office et sans retards inutiles. La procédure d’exécution d’un droit de visite ne peut pas être examinée isolément de la procédure sur le fond du droit de visite dans le cadre de laquelle cette exécution doit se réaliser, car le résultat de la procédure sur le droit de visite constitue le fondement de l’exécution ultérieure. En analysant la conduite du tribunal lors de l’exécution, il est dès lors nécessaire de prendre en compte non seulement le point de savoir si une décision formelle a été rendue au sujet de toutes les demandes d’exécution, mais aussi tous les actes du tribunal visant à la réalisation du contact entre le demandeur et son enfant mineur.

    60.  Le requérant soumet à la Cour l’arrêt no 30 Cdo 4761/2009 du 10 mai 2010 par lequel la Cour suprême a annulé les décisions des tribunaux inférieurs rejetant la demande de dommages-intérêts formulée au titre de la durée d’une procédure. Se référant à la jurisprudence de la Cour, la Cour suprême a constaté qu’on ne saurait mettre à charge de l’intéressé le fait qu’il n’avait pas introduit le recours préventif prévu par la loi no 6/2002.

    EN DROIT

    I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION AU REGARD DE LA DURÉE DE LA PROCÉDURE

    61.  Le requérant se plaint de la durée excessive de la procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale et notamment au droit de visite. Il invoque à cet égard l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

    « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

    62.  Le Gouvernement objecte que le requérant ne s’est prévalu d’aucun recours disponible en droit interne.

    63.  Rappelant que le requérant bénéficiait d’un droit de visite provisoire tout au long de la procédure en question, le Gouvernement estime d’abord que, à lui seul, le recours indemnitaire réglementé par la loi no 82/1998 était suffisant pour redresser le grief tiré de la durée de la procédure (voir, mutatis mutandis, Andělová c. République tchèque, no 995/06, § 98, 28 février 2008). Il est par ailleurs convaincu que ce recours satisfait même les exigences du test d’effectivité plus strict qui s’impose selon la Cour en matière du droit au respect de la vie familiale (voir Prodělalová c. République tchèque, no 40094/08, § 53, 20 décembre 2011). En effet, même si aucune mention n’est faite, dans la définition d’une conduite irrégulière donnant droit à des dommages-intérêts selon la loi no 82/1998, de l’article 8 de la Convention, les tribunaux nationaux tiennent compte des spécificités des procédures déterminantes pour la vie familiale des intéressés lorsqu’ils évaluent l’enjeu de la procédure et, par conséquent, lorsqu’ils fixent le montant de l’indemnisation. À l’appui de cet argument, le Gouvernement soumet plusieurs exemples de décisions rendues par les juridictions internes (voir paragraphes 57-59 ci-dessus).

    64.  Le Gouvernement considère ensuite que le requérant aurait dû faire usage également du recours préventif prévu par l’article 174a de la loi no 6/2002, du moins pour ce qui est de la période postérieure à l’amendement de cette disposition le 1er juillet 2009 (voir Prodělalová, arrêt précité, § 91). À compter de cette date, ce recours doit être selon lui considéré comme effectif non seulement en théorie mais aussi en pratique, ce que démontrent les décisions favorables des tribunaux nationaux soumises à la Cour (voir paragraphes 48-54 ci-dessus).

    65.  Se référant à l’arrêt de la Cour suprême du 10 mai 2010 (voir paragraphe 59 ci-dessus), le requérant affirme que, malgré l’existence d’un recours préventif, les tribunaux doivent décider dans un délai raisonnable et ne peuvent pas transférer cette responsabilité aux parties à la procédure.

    66.  Il s’oppose également à l’avis du Gouvernement selon lequel il aurait dû se prévaloir du recours indemnitaire, relevant que la durée de la procédure n’est qu’une conséquence secondaire de la violation plus importante de son droit au respect de la vie familiale, due aux décisions irrégulières des tribunaux.

    67.  La Cour rappelle que la règle de l’épuisement des voies de recours internes énoncée à l’article 35 § 1 de la Convention impose aux personnes désireuses d’engager la responsabilité d’un État devant une instance internationale l’obligation d’utiliser auparavant les recours qu’offre le système juridique de leur pays. Dans ce cadre, un requérant doit se prévaloir des recours normalement disponibles et suffisants pour lui permettre d’obtenir réparation des violations qu’il allègue. Ces recours doivent exister à un degré suffisant de certitude, en pratique comme en théorie, sans quoi leur manqueraient l’effectivité et l’accessibilité voulues (Akdivar et autres c. Turquie, 16 septembre 1996, § 65-66, Recueil des arrêts et décision 1996-IV ; Oreshkov c. Bulgarie, no 11932/04, § 44, 6 mars 2012).

    68.  De surcroît, l’article 35 § 1 prévoit une répartition de la charge de la preuve. Il incombe au Gouvernement excipant du non-épuisement de convaincre la Cour que le recours était effectif et disponible tant en théorie qu’en pratique à l’époque des faits, c’est-à-dire qu’il était accessible et susceptible d’offrir au requérant le redressement de ses griefs, et qu’il présentait des perspectives raisonnables de succès. Cependant, une fois cela démontré, c’est au requérant qu’il revient d’établir que le recours évoqué par le Gouvernement a en fait été employé ou bien, pour une raison quelconque, n’était ni adéquat ni effectif compte tenu des faits de la cause ou encore que certaines circonstances particulières le dispensaient de cette obligation (Akdivar et autres, précité, § 68).

    69.  En l’espèce, la Cour note que les articles 13 et 31a de la loi no 82/1998 prévoient l’octroi d’une indemnisation au titre du préjudice moral causé par la durée de la procédure (voir Vokurka c. République tchèque (déc.), no 40552/02, 16 octobre 2007). Elle rappelle avoir déjà jugé dans l’affaire Andělová (précité, § 79), concernant la durée excessive d’une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale examinée sur le terrain de l’article 6, que la requérante devait exercer cette voie de recours. A ce jour, la Cour dispose en plus des informations relatives au fonctionnement du recours indemnitaire dans les procédures concernant la vie familiale (voir paragraphes 56-59), qui confirment le caractère effectif de ce moyen en pareilles situations. Elle relève en outre que, contrairement à la réglementation slovène (voir Žunič c. Slovénie (déc.), no 24342/04, 18 octobre 2007, §§ 24 et 47 ; X c. Slovénie, no 40245/10, § 78, 28 juin 2012) qui est à l’origine du rejet de l’exception de non-épuisement dans les affaires slovènes similaires (Eberhard et M., nos 8673/05 et 9733/05, § 105, 1er décembre 2009 ; Gobec c. Slovénie, no 7233/04, § 118, 3 octobre 2013), la loi no 82/1998 ne prévoit pas de limites au montant de l’indemnisation et n’empêche pas les requérants de demander des dommages-intérêts avant la clôture de la procédure.

    Il convient donc de considérer que le recours indemnitaire prévu par la loi no 82/1998 satisfait dorénavant même les critères du test d’effectivité plus strict qui s’imposerait en matière du droit au respect de la vie familiale (voir Prodělalová, précité, § 53). Par ailleurs, vu les dates des décisions citées par le Gouvernement, on ne saurait affirmer qu’un éventuel recours du requérant introduit à l’issue de la procédure litigieuse en juin 2011 serait dépourvu de chances de succès.

    70.  En ce qui concerne le recours préventif envisagé par l’article 174a de la loi no 6/2002, qui permet aux justiciables de saisir les tribunaux d’une demande de fixation d’un délai pour l’accomplissement d’un acte procédural, la Cour a exclu son effectivité pour la période antérieure à l’amendement de cette disposition le 1er juillet 2009 (voir Vokurka, décision précitée, §§ 51-57 ; Prodělalová, précité, §§ 51-52). Pour ce qui est de la période postérieure au 1er juillet 2009, la Cour a jugé qu’elle ne pouvait pas juger de l’effectivité de ce moyen accélérateur sans disposer d’exemple concret démontrant son fonctionnement notamment dans le contexte des griefs relevant de l’article 8 (Prodělalová, précité, § 52).

    À présent, malgré la période relativement courte qui s’est écoulée depuis la date de cet amendement et le fait que la jurisprudence de Cour n’a pas jusqu’alors incité les requérants à se prévaloir de ce recours (voir, mutatis mutandis, Knebl c. République tchèque, no 20157/05, § 105, 28 octobre 2010), le Gouvernement soumet à la Cour les décisions qui illustrent le fonctionnement concret de ce moyen accélérateur, notamment dans le contexte des procédures relatives à l’exercice de l’autorité parentale (voir paragraphes 49, 51 et 52 ci-dessus). A la lumière de ces décisions, la Cour estime que ce recours doit être considéré comme effectif dans ce type de procédures. Elle observe en outre qu’il était accessible au requérant depuis le 1er juillet 2009 lorsque la procédure était encore pendante en première instance.

    71.  Force est de constater que le requérant ne s’est prévalu ni du recours indemnitaire ni du recours préventif et qu’il n’a pas présenté d’arguments permettant de conclure que ces recours se seraient révélés inadéquats ou ineffectifs au regard de son grief tiré de la durée de la procédure no 83 Nc 120/2005 et des répercussions de celle-ci sur sa vie familiale.

    72.  Au vu de ces considérations, la Cour estime que le requérant n’a pas épuisé les recours dont il disposait en droit interne et qu’il convient de faire droit à l’exception soulevée par le Gouvernement.

    73.  Il s’ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée pour non-épuisement des voies de recours internes, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

    II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 8 DE LA CONVENTION AU REGARD DE LA PROCÉDURE AYANT ABOUTI À LA DÉTERMINATION DU DROIT DE VISITE

    74.  Le requérant se plaint que la procédure no 83 Nc 120/2005 relative à l’exercice de son autorité parentale n’a pas été équitable et impartiale. Selon lui, les tribunaux n’ont notamment pas expliqué pourquoi ils ont décidé de son droit de visite sans avoir pris en compte le rapport d’expertise et sans avoir entendu son auteur. Ainsi, il se serait vu accorder un droit de visite très limité, au mépris des preuves administrées.

    75.  La Cour note que le requérant a formulé ces doléances sur le terrain des articles 6 et 8 de la Convention. Néanmoins, eu égard aux exigences procédurales inhérentes à l’article 8 et considérant que la présente requête porte dans son ensemble sur la question de savoir si l’État s’est acquitté des obligations positives que lui impose l’article 8 de la Convention, la Cour estime approprié d’examiner ces griefs uniquement sous l’angle de cette disposition, qui se lit comme suit :

    « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie (...) familiale (...).

    2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire (...) à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

    76.  La Cour observe en outre que les griefs du requérant ne portent pas sur la nouvelle procédure engagée par J.S. le 20 décembre 2011, soit trois jours avant l’introduction de la présente requête. Le requérant ne mentionne pas non plus cette procédure dans sa lettre du 26 novembre 2012, de sorte que la Cour en a été informée seulement par les observations du Gouvernement du 26 juillet 2013. Il ne ressort donc pas du dossier que le requérant entend se plaindre de cette procédure qui, au surplus, semble être pendante.

    A.  Sur la recevabilité

    77.  La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

    B.  Sur le fond

    1.  Arguments des parties

    78. Le requérant estime que les tribunaux n’ont jamais clairement expliqué pourquoi ils ont ignoré les conclusions du rapport d’expertise de 2007 ou pourquoi ils n’ont pas entendu son auteur ou commandé un complément au rapport. De plus, l’avis de l’enfant n’a pas été établi. La seule preuve considérée comme décisive était le rapport - partial - des assistantes sociales qui soulignait son comportement inapproprié et qui s’écartait significativement du rapport d’expertise. Selon le requérant, les tribunaux ne disposaient donc pas d’éléments suffisants et pertinents pour lui accorder un droit de visite très limité.

    79.  Le Gouvernement soutient que les tribunaux ont toujours procédé avec diligence, réagissant à l’évolution actuelle de la situation et tenant compte avant tout de l’intérêt supérieur de l’enfant. S’il est vrai que le rapport d’expertise élaboré en automne 2007 prévoyait un droit de visite en l’absence de tierce personne, la situation a ensuite connu une évolution difficilement prévisible. En effet, les relations entre les intéressés se sont dégradées, et ce non en raison de l’écoulement du temps mais à cause du comportement inapproprié du requérant et des difficultés de réaliser le droit de visite non assisté. Dès lors, il a fallu mettre en place, par le biais de mesures provisoires rendues avant les décisions sur le fond, un droit de visite médiatisé. Malgré ces aménagements, les rencontres se déroulaient souvent dans une ambiance stressante, voire traumatisante pour le mineur (voir paragraphe 32 ci-dessus). Le Gouvernement relève donc que, avant même de l’adoption du jugement du 30 mars 2010 accordant au requérant un droit de visite médiatisé à raison de deux heures toutes les deux semaines, le requérant rencontrait son fils dans un établissement spécialisé une fois toutes les trois semaines. Sur ce point, le jugement du tribunal municipal, et encore davantage celui du tribunal régional, lui a été donc plus favorable. En effet, en décidant - malgré les avis négatifs du tuteur et de l’établissement spécialisé - que le requérant pouvait voir son fils en l’absence d’autres personnes, le tribunal régional a pris en compte les souhaits du requérant. Ces décisions ne peuvent donc pas être considérées comme apportant une restriction radicale aux droits de ce dernier.

    80.  Il convient également de noter que les tribunaux ont été guidés par le principe de la libre appréciation des preuves et disposaient donc d’une marge d’appréciation assez large pour examiner les différentes preuves afin d’en tirer les conclusions appropriées. Le Gouvernement est convaincu que, les tribunaux n’ayant pas transgressé leur pouvoir d’appréciation, les décisions rendues à l’issue de la procédure litigieuse ne sont pas dénuées de fondement. De plus, elles ont fait l’objet d’un examen approfondi par la Cour constitutionnelle qui a conclu qu’elles étaient dûment motivées et dépourvues d’arbitraire. Eu égard au principe de la subsidiarité, la Cour ne devrait pas réexaminer ces conclusions.

    81.  Concernant en particulier le rapport d’expertise de 2007, le Gouvernement soutient que le tribunal municipal n’a pas négligé ses conclusions mais les a bien prises en compte, tout en décidant différemment des modalités du droit de visite du requérant. Admettant que le tribunal n’a pas expliqué pour quelles raisons il s’est partiellement écarté des conclusions du rapport, le Gouvernement estime qu’il ressortait clairement du jugement quelles étaient les preuves considérées comme décisives. Ces pièces, à savoir les rapports du tuteur et des établissements spécialisés abritant les rencontres entre le requérant et son fils, étaient plus récentes et ont été élaborées par des experts en matière d’éducation des enfants et de conflits parentaux, qui étaient parfaitement familiers avec la situation. Puis, concédant que le tribunal régional aurait dû expliquer pourquoi le rapport d’expertise ne pouvait pas selon lui servir de base à l’établissement des faits, le Gouvernement note que le jugement du tribunal de première instance ne contenait pas pourtant d’erreurs fondamentales entraînant la nécessité de l’annuler en appel.

    Le Gouvernement relève également que les tribunaux sont obligés d’entendre les auteurs d’un rapport d’expertise seulement lorsque ceux-ci n’ont pas répondu aux questions posées de manière exhaustive ou lorsque leurs conclusions sont vagues, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

    82.  Le Gouvernement souligne enfin que le tribunal régional a été informé de l’avis de l’enfant, établi par le tuteur conformément à l’article 100 § 4 du code de procédure civile (voir paragraphe 11 ci-dessus). Étant donné le jeune âge de l’enfant, la situation familiale complexe et les conflits accompagnant les contacts de l’enfant avec le requérant, on ne saurait reprocher aux tribunaux de ne pas avoir procédé à l’audition du mineur.

    2.  Appréciation de la Cour

    83.  Selon la jurisprudence constante de la Cour, pour rechercher si une ingérence était « nécessaire dans une société démocratique », il convient d’examiner, à la lumière de l’ensemble de l’affaire, si les motifs invoqués pour justifier la mesure litigieuse étaient pertinents et suffisants aux fins du paragraphe 2 de l’article 8 de la Convention et si le processus décisionnel, considéré comme un tout, a assuré au requérant la protection requise de ses intérêts, compte tenu des circonstances propres à chaque affaire (Sommerfeld c. Allemagne [GC], no 31871/96, §§ 62, 66 et 68, CEDH 2003-VIII (extraits)).

    84.  L’article 8 exige que les autorités nationales ménagent un juste équilibre entre les intérêts de l’enfant et ceux des parents et que, ce faisant, elles attachent une importance particulière à l’intérêt supérieur de l’enfant, qui, selon sa nature et sa gravité, peut l’emporter sur celui des parents. En particulier, l’article 8 ne saurait autoriser un parent à faire prendre des mesures préjudiciables à la santé et au développement de l’enfant (voir T.P. et K.M. c. Royaume-Uni [GC], no 28945/95, § 71, CEDH 2001-V (extraits) ; Ignaccolo-Zenide c. Roumanie, no 31679/96, § 94, CEDH 2000-I).

    85.  Il faut avoir à l’esprit que les autorités nationales bénéficient de rapports directs avec tous les intéressés. La Cour n’a donc point pour tâche de se substituer aux autorités internes pour réglementer les questions de garde et de visite ; toutefois il lui incombe d’apprécier sous l’angle de la Convention les décisions qu’elles ont rendues dans l’exercice de leur pouvoir d’appréciation. La marge d’appréciation laissée aux autorités nationales compétentes varie selon la nature des questions en litige et l’importance des intérêts en jeu. Dès lors, la Cour reconnaît que les autorités jouissent d’une grande latitude en particulier en matière de droit de garde. Il faut en revanche exercer un contrôle plus rigoureux sur les restrictions supplémentaires, comme celles apportées par les autorités au droit de visite des parents, et sur les garanties juridiques destinées à assurer la protection effective du droit des parents et des enfants au respect de leur vie familiale. Ces restrictions supplémentaires comportent le risque d’amputer les relations familiales entre un jeune enfant et l’un de ses parents ou les deux (Sommerfeld, précité, §§ 62-63).

    86.  Dans la présente affaire, la Cour rappelle que le droit de visite du requérant a toujours été reconnu dans son principe ; il ne s’agissait donc pas en l’espèce d’un refus d’accorder ce droit comme dans l’affaire Sommerfeld précitée (§ 62) mais de la détermination de ses modalités d’exercice. La Cour note, avec le Gouvernement, qu’au moment de l’adoption du jugement du tribunal municipal, le droit de visite était régi par une mesure provisoire du 23 juin 2008, qui a limité son étendue à deux heures toutes les trois semaines et l’a soumis à l’assistance des tiers (voir paragraphe 31 ci-dessus). Sur ce point, le jugement du 30 mars 2010 accordant au requérant un droit de visite médiatisé à raison de deux heures toutes les deux semaines ne saurait être qualifié de décision surprenante. Au cours de la procédure, le requérant a donc eu la possibilité de présenter tous les arguments en faveur de l’octroi d’un droit de visite plus ample et il a aussi eu accès à tous les éléments sur lesquels les tribunaux se sont appuyés et qu’ils ont soumis à une discussion contradictoire (voir, mutatis mutandis, Antonyuk c. Russie, no 47721/10, §§ 123 et 131, 1er août 2013). Il convient de rappeler à cet égard que c’est en principe aux juridictions nationales qu’il revient d’apprécier les éléments rassemblés par elles (Sommerfeld, précité, § 71).

    87.  De l’avis de la Cour, les juridictions tchèques ont avancé des motifs pertinents pour justifier leurs décisions relatives au droit de visite, parmi lesquels figuraient les relations conflictuelles entre les parents, le fait que l’enfant n’était pas accoutumé à voir le requérant et le comportement inapproprié de ce dernier qui nuisait à l’ambiance des rencontres ainsi qu’à la relation entre lui et son fils. Dans ces conditions, selon la Cour, les décisions peuvent être considérées comme ayant été prises dans l’intérêt de l’enfant.

    88.  La Cour observe également que le tribunal municipal de Brno a étayé sa décision par plusieurs éléments de preuve : les dépositions des parents, le rapport d’expertise de 2007, les observations soumises par l’autorité de la protection sociale compétente agissant en tant que tuteur de l’enfant et les rapports élaborés par les experts des établissements spécialisés. Puis, l’avis de l’enfant, âgé de six ans à l’époque, a été établi par le tuteur conformément à l’article 100 § 4 du code de procédure civile et porté à la connaissance du tribunal régional de Brno (voir paragraphe 11 ci-dessus). Celui-ci s’est rallié aux conclusions du tribunal municipal, sauf pour l’assistance des tiers aux rencontres, qu’il n’a pas considéré nécessaire.

    89.  Dans la mesure où le requérant allègue que l’avis du tuteur sur lequel les tribunaux se sont fondés était partial car il mettait l’accent sur son comportement inapproprié, la Cour ne peut que constater que ces informations ressortent aussi de deux rapports élaborés par les établissements spécialisés (voir paragraphe 32 ci-dessus).

    90.  Il est vrai que les tribunaux n’ont pas clairement expliqué pourquoi ils se sont écartés des recommandations du rapport d’expertise de 2007 pour ce qui est de l’étendue du droit de visite. La Cour note, toutefois, que le tribunal régional a indiqué les raisons pour lesquelles il n’y avait pas lieu en l’espèce de mettre en place une étendue habituelle du droit de visite. Puis, vu le délai qui s’était écoulé depuis l’élaboration du rapport d’expertise, les tribunaux ont pu raisonnablement considérer qu’ils disposaient d’informations plus récentes et, partant, plus pertinentes, fournies par les personnes ayant été témoins des derniers contacts entre les intéressés. Il convient de noter également que le requérant n’a pas demandé l’élaboration d’un rapport de révision ; il ne ressort pas non plus du dossier qu’il ait demandé aux tribunaux inférieurs d’entendre les auteurs du rapport de 2007 (voir notamment paragraphe 11 ci-dessus). Dans ces conditions, la Cour n’est pas convaincue que le fait de n’avoir pas sollicité une mise à jour du rapport d’expertise sur les relations entre le requérant et l’enfant ait été contraire aux exigences procédurales inhérentes à l’article 8 de la Convention.

    91.  Eu égard à ce qui précède et à la marge d’appréciation de l’Etat défendeur, la Cour est d’avis que la procédure suivie par les juridictions tchèques était raisonnable et leur a permis de rassembler suffisamment d’éléments pour prendre une décision motivée sur le droit de visite dans les circonstances particulières de la cause.

    92.  Partant, il n’y a pas eu en l’espèce violation de l’article 8 de la Convention.

    III.  SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES

    A.  Décision sur la pension alimentaire

    93.  Invoquant l’article 6 § 1, le requérant dénonce un manque de motivation de la décision sur le montant de sa pension alimentaire.

    94.  La Cour a examiné ce grief. Compte tenu de l’ensemble des éléments en sa possession, et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des allégations formulées, elle n’a relevé aucune apparence de violation des droits et libertés garantis par la Convention ou ses Protocoles.

    95.  Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 (a) et 4 de la Convention.

    B.  Réglementation du droit de visite provisoire

    96.  Dans la mesure où le requérant se plaint, sur le terrain de l’article 8, que depuis 2009 il n’a pas pu rencontrer son fils « normalement », la Cour estime que ce grief porte sur la réglementation du droit de visite provisoire du requérant.

    97.  Se référant à l’arrêt Prodělalová (précité, § 46), le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes. Selon lui, le requérant aurait dû introduire le recours constitutionnel tant contre les mesures provisoires par lesquelles son droit de visite a été déterminé que contre les décisions par lesquelles ses demandes de mesures provisoires ont été rejetées.

    98.  Le requérant estime que, étant donné la nature des mesures provisoires qui sont censées réglementer la situation à court terme et de manière temporaire, il serait ineffectif de les contester devant la Cour constitutionnelle qui peut mettre plusieurs années à statuer. En l’occurrence, il ne pouvait pas prévoir que la mesure du 23 juin 2008, dont il se plaint particulièrement, allait rester en place pendant deux ans (voir paragraphe 31 ci-dessus). En conséquence, son droit de visite provisoire a été limité à deux heures toutes les trois semaines, de sorte que seulement vingt-et-une rencontres ont eu lieu jusqu’à l’adoption du jugement sur le fond le 30 mars 2010. Le requérant juge par ailleurs inadmissible qu’une telle mesure restrictive était motivée par les disponibilités de l’établissement devant abriter les rencontres.

    99.  La Cour rappelle avoir déjà conclu, à la lumière de la pratique de la Cour constitutionnelle tchèque, que le fait d’obliger les requérants de contester devant celle-ci les mesures provisoires susceptibles de porter atteinte à leurs droits consacrés par la Convention était conforme au principe de subsidiarité qui caractérise le mécanisme de plainte devant la Cour (voir Prodělalová, précité, § 46). En réponse aux arguments du requérant en l’espèce, la Cour note que la Cour constitutionnelle peut réserver un traitement prioritaire à certaines affaires (voir notamment paragraphe 43 ci-dessus).

    100.  Dès lors, faute de n’avoir jamais contesté la réglementation de son droit de visite provisoire devant la Cour constitutionnelle, le requérant n’a pas satisfait sur ce point à la condition de l’épuisement des voies de recours internes.

    101.  Il s’ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

    C.  Exécution du droit de visite

    102.  Sur le terrain de l’article 8 de la Convention, le requérant dénonce enfin le fait que les autorités ne lui ont pas assuré un contact effectif avec son enfant, en ce qu’il ne parvient pas à réaliser son droit de visite, et ce essentiellement en raison de l’attitude de son ex-compagne et de l’inactivité des tribunaux face à ses demandes d’exécution.

    103.  Le Gouvernement observe d’abord que le requérant réalisait son droit de visite sans difficultés jusqu’à l’incident du 28 avril 2007 (voir paragraphe 28 ci-dessus). Par la suite, les mesures provisoires oscillaient entre un droit de visite médiatisé et non médiatisé, que le requérant exerçait plutôt régulièrement. Après que le tribunal régional eut décidé, par un arrêt sur le fond, de mettre en place un droit de visite non médiatisé, un nouvel incident s’est produit le 23 avril 2011 (voir paragraphe 14 ci-dessus). Depuis cette date, et jusqu’à une nouvelle mesure provisoire du 10 janvier 2012 (voir paragraphe 32 ci-dessus), les rencontres n’ont pas eu lieu, essentiellement en raison de la résistance de l’enfant, que le Gouvernement attribue aux événements du 23 avril 2011. La situation qui s’en est suivie fait l’objet de l’examen dans le cadre de la nouvelle procédure (voir paragraphes 21-25 ci-dessus).

    104.  Le Gouvernement note que, contrairement aux allégations du requérant, il n’a pas été démontré devant les tribunaux nationaux, alors que la situation était constamment suivie par le tuteur de l’enfant, que la non-réalisation du droit de visite serait due à l’attitude négative de la mère de l’enfant. Le Gouvernement souligne en revanche que, à part quelques demandes introduites en 2011, le requérant n’a pas déployé d’efforts particuliers afin de réaliser son droit de visite sans entraves. Si le tribunal n’a décidé de ces demandes d’exécution que le 3 février 2012, c’est notamment parce qu’il a dû étudier le dossier après s’être vu transférer la compétence territoriale en septembre 2011 (voir paragraphe 13 ci-dessus).

    De plus, faute de dûment coopérer avec le tuteur, de suivre les conseils des experts et de mettre fin à son comportement inapproprié, le requérant a contribué à l’évolution négative de la situation, de sorte que l’échec des rencontres est en premier lieu imputable à lui-même.

    105.  En réponse aux observations du Gouvernement, le requérant affirme que l’attitude de l’enfant a changé seulement après de nombreuses ingérences des tribunaux mettant en place un droit de visite très limité. Puis, comme son fils lui manifestait un refus dès le début de leurs rencontres, c’est-à-dire sans que lui-même provoque cette réaction, il est clair qu’il avait été manipulé par sa mère. Il s’interroge dès lors sur le rôle de celle-ci, censée préparer l’enfant aux visites, et sur celui des tribunaux et du tuteur censés protéger le droit du mineur à avoir des contacts avec son père. Il fait valoir enfin qu’il s’est occupé de son fils jusqu’en 2007, sans aucun problème.

    106.  La Cour rappelle que, en matière de non-exécution du droit de visite, elle était jusqu’à présent en attente d’exemples concrets de décisions démontrant le fonctionnement, dans le contexte des griefs relevant de l’article 8, du moyen accélérateur prévu par l’article 174a de la loi no 6/2002 sur les tribunaux et les juges (voir Prodělalová, précité, § 52), ou de procédures menées en vertu de la loi no 82/1998 qui auraient abouti à un redressement satisfaisant des griefs relatifs au respect de la vie privée et familiale (voir Jedličková et Jedlička c. République tchèque (déc.), nos 32415/06 et 32216/07, 3 juin 2008 ; Prodělalová, précité, § 53). Elle se doit de constater que de tels exemples ont été soumis par le Gouvernement en l’occurrence (voir paragraphes 52, 54, 57 et 59 ci-dessus), sans que celui-ci excipe du non-épuisement des voies de recours internes.

    107.  En tout état de cause, la Cour n’estime pas nécessaire d’examiner dans la présente affaire la question de savoir si le requérant a satisfait, au regard de son grief tiré de la non-exécution de son droit de visite, à la condition relative à l’épuisement des voies de recours internes, puisque cette partie de la requête est irrecevable pour les motifs indiqués ci-dessous.

    108.  La Cour rappelle que là où l’existence d’un lien familial au sens de l’article 8 de la Convention se trouve établie, l’État doit en principe agir de manière à permettre à ce lien de se développer et prendre les mesures propres à réunir le parent et l’enfant concernés. Cependant, l’obligation pour les autorités nationales de prendre des mesures afin de réunir le parent et l’enfant qui ne vivent pas ensemble n’est pas absolue, et la compréhension et la coopération de l’ensemble des personnes concernées constituent toujours un facteur important. Si les autorités nationales doivent s’évertuer à faciliter pareille collaboration, une obligation pour elles de recourir à la coercition en la matière ne saurait être que limitée : il leur faut tenir compte des intérêts et des droits et libertés de ces mêmes personnes, et notamment des intérêts supérieurs de l’enfant et des droits que lui reconnaît l’article 8 de la Convention. En particulier, l’article 8 de la Convention ne saurait autoriser le parent à faire prendre des mesures préjudiciables à la santé et au développement de l’enfant. Le point décisif consiste donc à savoir si les autorités nationales ont pris, pour faciliter le regroupement, toutes les mesures nécessaires que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elles en l’occurrence (Pedovič c. République tchèque, no 27145/03, § 109, 18 juillet 2006).

    109.  En l’occurrence, la Cour observe que le requérant a formé, entre mai 2011 et mars 2012, plusieurs demandes d’exécution de son droit de visite tel que mis en place depuis le 11 avril 2011. Par ces demandes, il invitait le tribunal à adresser des sommations à la mère de l’enfant ou à lui infliger des amendes, alléguant que celle-ci tentait par tous les moyens de compromettre la réalisation de son droit de visite (voir paragraphe 18 ci-dessus). En réponse à l’invitation du tribunal, J.S. expliqua par le refus du mineur l’échec de certaines rencontres visées par les demandes d’exécution du requérant (voir paragraphe 19 ci-dessus). La Cour note à cet égard que, dès le mois d’avril 2011, l’enfant était apparemment assez fragilisé (voir paragraphe 34 ci-dessus) et qu’il avait confirmé sa position négative en présence des policiers (voir paragraphe 16 ci-dessus).

    110.  Dès lors, les tribunaux appelés à statuer devaient en l’occurrence prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant, tout en tenant compte du climat conflictuel existant entre les parents et d’un comportement parfois inadéquat du requérant. De plus, les allégations de ce dernier, selon lesquelles J.S. l’empêchait de réaliser son droit de visite, n’ont pas été démontrées. Dans cette situation, la Cour estime qu’il pouvait sembler inapproprié aux tribunaux nationaux de prendre des mesures coercitives à l’égard de la mère de l’enfant ou d’insister sur la mise en œuvre d’un droit de visite non médiatisé. Cette situation a en effet donné lieu à une nouvelle mesure provisoire du 10 janvier 2012 (voir paragraphe 35 ci-dessus). Bien qu’elle ait ensuite été réformée, les experts ont plus tard confirmé qu’un droit de visite médiatisé accompagné d’un travail psychologique avec les deux parents représentait la seule solution (voir paragraphe 25 ci-dessus).

    111.  Dans ces circonstances, tout en déplorant que la décision du tribunal d’arrondissement de Prague 2 ne soit intervenue que le 3 février 2012, à savoir cinq mois après que celui-ci se soit vu transférer la compétence territoriale (voir paragraphe 13 ci-dessus), la Cour estime qu’on ne saurait reprocher à ce tribunal, ni à la juridiction d’appel, d’avoir débouté le requérant de ses demandes d’exécution (voir paragraphes 20-21 ci-dessus). Comme l’a relevé le tribunal régional, il s’est à ce moment avéré nécessaire d’examiner la question de savoir s’il était approprié de forcer à l’enfant à rencontrer le requérant sans assistance ou s’il fallait résoudre le conflit par une mesure alternative, laquelle devait faire l’objet de la nouvelle procédure initiée entre-temps par J.S.

    112.  Tout en admettant que le tribunal chargé de l’exécution n’a pas fait preuve d’une grande activité entre mai 2011 et décembre 2011, la Cour souligne que le droit de visite du requérant a toujours été reconnu dans son principe et que les autorités ont tenté, tout au long de la procédure portant sur le droit de visite du requérant, de créer des conditions nécessaires pour qu’il puisse rencontrer son fils. Il ressort d’ailleurs du dossier que, à la suite de la mesure provisoire du 10 janvier 2012, les contacts entre les intéressés ont repris, du moins jusqu’en juin 2012.

    113.  Dès lors, eu égard à l’ensemble des circonstances de l’affaire et compte tenu de la marge d’appréciation de l’Etat défendeur en la matière, la Cour considère qu’il ne saurait être reproché aux autorités tchèques d’avoir omis de déployer des efforts adéquats et suffisants pour faire respecter le droit de visite du requérant et assurer ainsi le respect effectif de sa vie familiale. Puis, tout en reconnaissant la frustration suscitée chez le requérant par les difficultés de réaliser ce droit, la Cour ne peut que relever que, selon les constats des autorités nationales, il ne s’est pas toujours comporté de façon convenable et adaptée à l’égard de l’enfant.

    114.  Il s’ensuit que ce grief est manifestement mal fondé, au sens de l’article 35 § 3 a), et doit être rejeté en application de l’article 35 § 4 de la Convention.

    PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

    1.  Déclare la requête recevable quant au grief tiré de l’article 8 de la Convention au regard de la procédure ayant abouti à la détermination du droit de visite du requérant, et irrecevable pour le surplus;

     

    2.  Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8 de la Convention.

    Fait en français, puis communiqué par écrit le 4 septembre 2014, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

    Claudia Westerdiek                                                                Mark Villiger
           Greffière                                                                              Président


BAILII: Copyright Policy | Disclaimers | Privacy Policy | Feedback | Donate to BAILII
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2014/897.html