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You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> BLOISE v. FRANCE - 30828/13 (Judgment : No Article 6+6-3-c - Right to a fair trial : Fifth Section) French Text [2019] ECHR 562 (11 July 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2019/562.html Cite as: CE:ECHR:2019:0711JUD003082813, ECLI:CE:ECHR:2019:0711JUD003082813, [2019] ECHR 562 |
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CINQUIÈME SECTION
AFFAIRE BLOISE c. FRANCE
( Requête n o 30828/13 )
ARRÊT
STRASBOURG
11 juillet 2019
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l ' article 44 § 2 de la Convention . Il peut subir des retouches de forme.
En l ' affaire Bloise c. France,
La Cour européenne des droits de l ' homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :
Angelika Nußberger,
présidente,
Yonko Grozev,
André Potocki,
Síofra O
'
Leary,
Mārtiņš Mits,
Gabriele Kucsko-Stadlmayer,
Lado Chanturia,
juges,
et de Milan Bla š ko , greffier adjoint d e section ,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 18 juin 2019, Rend l ' arrêt que voici, adopté à cette date :P ROCÉDURE
1 . À l ' origine de l ' affaire se trouve une requête (n o 30828/13) dirigée contre la République française et dont un ressortissant de cet État, M. Auguste Bloise (« le requérant »), a saisi la Cour le 6 mai 2013 en vertu de l ' article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l ' homme et des libertés fondamentales (« la Convention »). 2 . Le requérant a été représenté par M e A. Gondouin, avocat à Grenoble. Le gouvernement français (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. F. Alabrune, directeur des affaires juridiques du ministère de l ' Europe et des Affaires étrangères. 3 . Le requérant allègue la violation de l ' article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, faute d ' avoir bénéficié durant sa garde à vue de l ' assistance effective d ' un avocat et de la notification de son droit de garder le silence. 4 . Le 14 janvier 2015, la requête a été communiquée au Gouvernement.EN FAIT
Article 63-1
« Toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l ' infraction sur laquelle porte l ' enquête, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l ' article 63.
Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne gardée à vue ; en cas de refus d ' émargement, il en est fait mention.
Les informations mentionnées au premier alinéa doivent être communiquées à la personne gardée à vue dans une langue qu ' elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits.
Si cette personne est atteinte de surdité et qu ' elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec des sourds. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.
Si la personne est remise en liberté à l ' issue de la garde à vue sans qu ' aucune décision n ' ait été prise par le procureur de la République sur l ' action publique, les dispositions de l ' article 77-2 sont portées à sa connaissance.
Sauf en cas de circonstance insurmontable, les diligences résultant pour les enquêteurs de la communication des droits mentionnés aux articles 63-2 et 63-3 doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a été placée en garde à vue. »
Article 63-2
« Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, faire prévenir dans le délai prévu au dernier alinéa de l ' article 63-1, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l ' un de ses parents en ligne directe, l ' un de ses frères et sœurs ou son employeur de la mesure dont elle est l ' objet.
Si l ' officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités de l ' enquête, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au procureur de la République qui décide, s ' il y a lieu, d ' y faire droit. »
Article 63-3
« Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l ' officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois.
A tout moment, le procureur de la République ou l ' officier de police judiciaire peut d ' office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue.
En l ' absence de demande de la personne gardée à vue, du procureur de la République ou de l ' officier de police judiciaire, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ; le médecin est désigné par le procureur de la République ou l ' officier de police judiciaire.
Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue. Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l ' aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu ' il est procédé à un examen médical en application de règles particulières. »
Article 63-4
« Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à s ' entretenir avec un avocat. Si elle n ' est pas en mesure d ' en désigner un ou si l ' avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu ' il lui en soit commis un d ' office par le bâtonnier.
Le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens et sans délai.
L ' avocat désigné peut communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l ' entretien. Il est informé par l ' officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l ' infraction sur laquelle porte l ' enquête.
A l ' issue de l ' entretien dont la durée ne peut excéder trente minutes, l ' avocat présente, le cas échéant, des observations écrites qui sont jointes à la procédure.
L ' avocat ne peut faire état de cet entretien auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue.
Lorsque la garde à vue fait l ' objet d ' une prolongation, la personne peut également demander à s ' entretenir avec un avocat dès le début de la prolongation, dans les conditions et selon les modalités prévues aux alinéas précédents.
Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 4 o , 6 o , 7 o , 8 o et 15 o de l ' article 706-73, l ' entretien avec un avocat ne peut intervenir qu ' à l ' issue d ' un délai de quarante-huit heures. Si elle est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 3 o et 11 o du même article, l ' entretien avec un avocat ne peut intervenir qu ' à l ' issue d ' un délai de soixante-douze heures. Le procureur de la République est avisé de la qualification des faits retenue par les enquêteurs dès qu ' il est informé par ces derniers du placement en garde à vue. »
21 . Les dispositions suivantes, relatives à la criminalité et à la délinquance organisées, s ' appliquaient également :Article 706-88
« Pour l ' application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l ' enquête ou de l ' instruction relatives à l ' une des infractions entrant dans le champ d ' application de l ' article 706-73 l ' exigent, la garde à vue d ' une personne peut, à titre exceptionnel, faire l ' objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune.
Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d ' instruction.
La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer.
Lorsque la première prolongation est décidée, la personne gardée à vue est examinée par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d ' instruction ou l ' officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l ' aptitude au maintien en garde à vue, qui est versé au dossier. La personne est avisée par l ' officier de police judiciaire du droit de demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et éma rgée par la personne intéressée ; en cas de refus d ' émargement, il en est fait mention.
Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la durée prévisible des investigations restant à réaliser à l ' issue des premières quarante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et de la détention ou le juge d ' instruction peuvent décider, selon les modalités prévues au deuxième alinéa, que la garde à vue fera l ' objet d ' une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit heures.
La personne dont la garde à vue est prolongée en application des dispositions du présent article peut demander à s ' entretenir avec un avocat, selon les modalités prévues par l ' article 63-4, à l ' issue de la quarante-huitième heure puis de la soixa nte - douzième heure de la mesure ; elle est avisée de ce droit lorsque la ou les prolongations lui sont notifiées et mention en est portée au procès-verbal et éma rgée par la personne intéressée ; en cas de refus d ' émargement, il en est fait mention. Toutefois, lorsque l ' enquête porte sur une infraction entrant dans le champ d ' application des 3 o et 11 o de l ' article 706-73, l ' entretien avec un avocat ne peut intervenir qu ' à l ' issue de la soixante-douzième heure.
S ' il ressort des premiers éléments de l ' enquête ou de la garde à vue elle-même qu ' il existe un risque sérieux de l ' imminence d ' une action terroriste en France ou à l ' étranger ou que les nécessités de la coopération internationale le requièrent impérativement, le juge des libertés peut, à titre exceptionnel et selon les modalités prévues au deuxième alinéa, décider que la garde à vue en cours d ' une personne, se fondant sur l ' une des infractions visées au 11 o de l ' article 706-73, fera l ' objet d ' une prolongation supplémentaire de vingt-quatre heures, renouvelable une fois.
A l ' expiration de la quatre-vingt-seizième heure et de la cent-vingtième heure, la personne dont la prolongation de la garde à vue est ainsi décidée peut demander à s ' entretenir avec un avocat, selon les modalités prévues par l ' article 63-4. La personne gardée à vue est avisée de ce droit dès la notification de la prolongation prévue au présent article.
Outre la possibilité d ' examen médical effectué à l ' initiative du gardé à vue, dès le début de chacune des deux prolongations supplémentaires, il est obligatoirement examiné par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d ' instruction ou l ' officier de police judiciaire. Le médecin requis devra se prononcer sur la compatibilité de la prolongation de la mesure avec l ' état de santé de l ' intéressé.
S ' il n ' a pas été fait droit à la demande de la personne gardée à vue de faire prévenir, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l ' un de ses parents en ligne directe, l ' un de ses frères et sœurs ou son employeur, de la mesure dont elle est l ' objet, dans les conditions prévues aux articles 63-1 et 63-2, elle peut réitérer cette demande à compter de la quatre-vingt-seizième heure. »
22 . La loi n o 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, entrée en vigueur le 1 er juin 2011, a modifié certains articles du CPP (articles 63-1 à 63-4) et créé de nouvelles dispositions (articles 62-2, 62-3, 63 3 1, 63-4-1, 63-4-2, 63-4-3, et 63-4-4). Des modifications ont ensuite été réalisées par les lois n o 2014-535 du 27 mai 2014 et n o 2016-731 du 3 juin 2016. Dorénavant, la personne placée en garde à vue est immédiatement informée du fait qu ' elle bénéficie du droit, d ' une part, d ' être assistée par un avocat et, d ' autre part, lors des auditions et après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire (article 63-1, 3 o , du CPP). Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à être assistée par un avocat (article 63-3-1, alinéa 1, du CPP). L ' avocat désigné peut non seulement communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l ' entretien pendant trente minutes maximum au début de la mesure et lors de son éventuelle prolongation (article 63-4 du CPP), mais il peut également, lorsque la personne gardée à vue le demande, assister à ses auditions et confrontations (article 63-4-2, alinéa 1, du CPP). Dans certaines hypothèses, il est possible de procéder à une audition immédiate de la personne gardée à vue ou de reporter la présence de l ' avocat lors des auditions et confrontations (article 63-4-1, alinéas 3 à 5, du CPP).
« (...) Attendu qu ' en prononçant ainsi, la chambre de l ' instruction a fait l ' exacte application de l ' article 6 de la Convention européenne des droits de l 'homme ;
Attendu que, toutefois, l ' arrêt encourt l ' annulation dès lors que les règles qu ' il énonce ne peuvent s ' appliquer immédiatement à une garde à vue conduite dans le respect des dispositions législatives en vigueur lors de sa mise en œuvre, sans porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la bonn e administration de la justice ;
Que ces règles prendront effet lors de l ' entrée en vigueur de la loi devant, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, modifier le régime juridique de la garde à vue, ou, au plus tard, le 1er juillet 2011 ;
Par ces motifs :
Annule l ' arrêt susvisé de la chambre de l ' instruction (...) en ses seules dispositions ayant prononcé l ' annulation et ordonné le retrait du dossier et le classement au greffe de procès-verbaux relatifs et consécutifs à la garde à vue de M. X. (...) »
25 . Dans le cadre du pourvoi n o 10-82.902, formé cette fois par une personne mise en examen qui se plaignait du rejet de sa demande d ' annulation d ' actes par la chambre de l ' instruction, malgré le défaut d ' assistance par un avocat et l ' absence de notification du droit de se taire, la Cour de cassation rejeta le pourvoi en jugeant ce qui suit :« Attendu qu ' en prononçant ainsi, la chambre de l ' instruction a méconnu le texte conventionnel susvisé, d ' où il résulte que, sauf exceptions justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l ' espèce, et non à la seule nature du crime ou délit reproché, toute personne soupçonnée d ' avoir commis une infraction doit, dès le début de la garde à vue, être informée de son droit de se taire et bénéficier, sauf renonciation non équivoque, de l ' assistance d ' un avocat ;
Attendu que, toutefois, l ' arrêt n ' encourt pas la censure, dès lors que ces règles de procédure ne peuvent s ' appliquer immédiatement àune garde à vue conduite dans le respect des dispositions législatives en vigueur lors de sa mise en œuvre, sans porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la bon ne administration de la justice ;
Que ces règles prendront effet lors de l ' entrée en vigueur de la loi devant, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, modifier le régime juridique de la garde à vue, ou, au plus tard, le 1 er juillet 2011 ;
D ' où il suit que le moyen ne saurait être accueilli (...) »
26 . Toutefois, par quatre arrêts du 15 avril 2011 ( Bull. crim. , Ass. plén., n o 1, 2, 3 et 4), l ' Assemblée plénière de la Cour de cassation a jugé, d ' une part, que l ' article 6 § 1 de la Convention avait été violé dès lors qu ' il exige qu ' une personne en garde à vue puisse bénéficier de l ' assistance d ' un avocat dès le début de sa mesure et pendant ses interrogatoires et, d ' autre part, que ce constat de violation devait recevoir un effet immédiat pour l ' intéressé, sans attendre que la législation soit modifiée. Ainsi, dans le cadre du pourvoi n o 10-17.049, elle s ' exprima comme suit :« Vu l ' article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l ' homme et des libertés fondamentales, ensemble l ' article 63-4, alinéas 1 à 6, du code de procédure pénale ;
Attendu que les États adhérents à cette Convention sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l ' homme, sans attendre d ' être attaqués devant elle ni d ' avoir modifié leur législation ; que, pour que le droit à un procès équitable consacré par l ' article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l ' homme et des libertés fondamentales soit effectif et concret, il faut, en règle générale, que la personne placée en garde à vue puisse bénéficier de l ' assistance d ' un avocat dès le début de la mesure et pendant ses interrogatoires ;
(...)
Attendu que pour prolonger la rétention, l ' ordonnance retient que les arrêts de la Cour européenne des droits de l ' homme ne lient que les États directement concernés par les recours sur lesquels elle statue, que ceux invoqués par l ' appelante ne concernent pas l ' État français, que la Convention de sauvegarde des droits de l ' homme et des libertés fondamentales n ' impose pas que toute personne interpellée ne puisse être entendue qu ' en présence de son avocat et que la garde à vue, menée conformément aux dispositions actuelles du code de procédure pénale, ne sa urait être déclarée irrégulière ;
Qu ' en statuant ainsi alors que Mme X.... n ' avait eu accès à un avocat qu ' après son interrogatoire, le premier présid ent a violé les textes susvisés ;
(...) »
27 . Par la suite, la Cour de cassation a censuré un arrêt dont les motifs fondaient la déclaration de culpabilité sur des déclarations enregistrées au cours d ' une garde à vue, ensuite rétractées, et par lesquelles le prévenu avait contribué à sa propre incrimination sans avoir pu être assisté par un avocat (Cass. crim., 11 mai 2011, Bull. crim. , n o 97). En outre, après avoir préalablement jugé qu ' une personne mise en examen a toujours la faculté de discuter la valeur probante des pièces de la procédure, et donc notamment en lien avec la garde à vue, devant la juridiction de jugement (Cass. crim., 4 janvier 2011, Bull. crim. , n o 163), elle a jugé de manière constante que lorsqu ' une personne a fait l ' objet d ' une garde à vue sans l ' assistance effective d ' un avocat ou en l ' absence de notification de son droit de se taire, une décision de condamnation ne peut être fondée ni exclusivement ni même essentiellement sur les déclarations recueillies au cours d ' une telle garde à vue (cf., notamment, Cass. crim., 6 décembre 2011, Bull. crim. , n o 247, Cass. crim., 14 février 2012, Bull. crim. , n o 42, Cass. crim., 30 avril 2014, Bull. crim. , n o 118, Cass. crim., 16 décembre 2015, Bull. crim. , n o 608, et Cass. crim., 15 juin 2016, Bull. crim. , n o 184). Dans un arrêt du 11 décembre 2018 (pourvoi n o 18-82.854, à paraître au Bull. crim. ), elle a confirmé sa jurisprudence comme suit :« Attendu que, par arrêts du 15 avril 2011, l ' Assemblée plénière de la Cour de cassation a énoncé que les états adhérents à la Convention européenne des droits de l ' homme sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l ' homme, sans attendre d ' être attaqués devant elle ni d ' avoir modifié leur législation (Ass. plén., 15 avril 2011, pourvoi n o 10-17.049, Bull. crim. 2011, Ass. plén., n o 1 pourvoi n o 10-30.242, Bull. crim. 2011, Ass. plén., n o 2, pourvoi n o 10-30.313, Bull. crim. 2011, Ass. plén., n o 3, Ass. plén., 15 avril 2011, pourvoi n o 10-30.316, Bull. crim. 2011, Ass. plén., n o 4) ; qu ' aux termes de ses arrêts Salduz c/ Turquie et Dayanan c/ Turquie, rendus les 27 novembre 2008 et 13 octobre 2009, auxquels il est fait référence dans les décisions précitées de l ' Assemblée plénière, la Cour européenne des droits de l ' homme a jugé que, pour que le droit à un procès équitable, consacré par l ' article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l ' homme, soit effectif et concret, il faut, en règle générale, que la personne placée en garde à vue puisse bénéficier de l ' assistance d ' un avocat dès le début de la mesure et pendant ses interrogatoires ;
Attendu que, si c ' est à tort que, pour écarter la demande d ' annulation des auditions de Mme Z ... et de M. X ..., la chambre de l ' instruction énonce qu ' elles n ' étaient pas le support de leur mise en examen, l ' arrêt n ' encourt pas pour autant la censure dès lors qu ' en l ' absence, à la date des mesures critiquées, de jurisprudence établie ayant déduit de l ' article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l ' homme le droit pour la personne gardée à vue d ' être assistée par un avocat lors de ses auditions et l ' obligation de lui notifier le droit de garder le silence, l ' exigence de prévisibilité de la loi et l ' objectif de bonne administration de la justice font obstacle à ce que les auditions réalisées à cette date, sans que la personne gardée à vue ait été assistée d ' un avocat pendant leur déroulement ou sans qu ' elle se soit vue notifier le droit de se taire, soient annulées pour ces motifs ; qu ' il résulte, toutefois, des stipulations de l ' article précité de ladite Convention que les déclarations incriminantes faites lors de ces auditions ne peuvent, sans que soit portée une atteinte irrémédiable aux droits de la défense, fonder une décision de renvoi devant la juridiction de jugement ou une déc laration de culpabilité (...) »
EN DROIT
SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L ' ARTICLE 6 §§ 1 et 3 c) DE LA CONVENTION
28 . Le requérant allègue une violation de la Convention, en ce que sa condamnation pénale fut fondée sur des aveux faits au cours de sa garde à vue, à l ' occasion de laquelle il n ' a bénéficié ni de la notification de son droit de garder le silence ni de l ' assistance effective d ' un avocat. Il invoque l ' article 6 §§ 1 et 3 c) de la Convention, ainsi libellé :« 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...)
3. Tout accusé a droit notamment à :
(...)
c) se défendre lui-même ou avoir l ' assistance d ' un défenseur de son choix et, s ' il n ' a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d ' office, lorsque les intérêts de la justice l ' exigent ;
(...) »
29 . Le Gouvernement s ' oppose à cette thèse.1. Thèses des parties
a) Le requérant
43 . Le requérant rappelle qu ' il n ' a pas bénéficié de l ' information relative au droit au silence ni de l ' assistance d ' un avocat à ses côtés pendant les interrogatoires au cours de sa garde à vue. Si la Cour de cassation a jugé que la cour d ' appel ne s ' était fondée ni exclusivement ni même essentiellement sur ses déclarations recueillies durant la garde à vue, a contrario la cour d ' appel s ' est tout de même fondée sur ses déclarations qui ont vicié les droits de la défense dès l ' origine. Il ressort des procès-verbaux de garde à vue qu ' il a reconnu des faits, contribuant ainsi à sa propre incrimination. Il ne pouvait plus, par la suite, revenir sur ses déclarations, sauf à se contredire et à se décrédibiliser. Il souligne que l ' absence de notification du droit de se taire et ne pas s ' auto-incriminer rendait d ' autant plus nécessaire la présence d ' un avocat à ses côtés.b) Le Gouvernement
44 . Le Gouvernement ne conteste pas, d ' une part, que le requérant a été placé en garde à vue sans que lui ait été notifié son droit au silence et, d ' autre part, qu ' il n ' a pas bénéficié de l ' assistance effective d ' un avocat pendant ses interrogatoires de garde à vue. Il relève que le requérant a cependant pu s ' entretenir avec un avocat dès le début de cette mesure et lors de sa prolongation. Il estime que le droit français présentait d ' autres garanties procédurales : le requérant aurait pu faire prévenir un proche, ce qu ' il n ' a pas fait, il a été examiné par un médecin et sa garde à vue s ' est déroulée sous le contrôle du procureur de la République. Il considère en outre que le requérant a pu contester la valeur probante des pièces de la procédure devant les juridictions du fond, qui n ' auraient pas tenu compte de ses déclarations pour le condamner. L ' arrêt de la cour d ' appel ne se réfère pas à ses déclarations recueillies en garde à vue, tandis que sa culpabilité repose sur ses déclarations, en présence de son avocat, devant le juge d ' instruction et la juridiction de jugement, sur des documents bancaires et comptables, ainsi que sur des éléments tirés de la plainte avec constitution de partie civile.a) Principes généraux
45 . La Cour renvoie aux principes généraux maintes fois réaffirmés par elle ( Salduz c. Turquie [GC], n o 36391/02, §§ 56 et 61-62, CEDH 2008, Ibrahim et autres c. Royaume-Uni [GC], n os 50541/08, 50571/08, 50573/08et 40351/09, 13 septembre 2016, et Simeonovi c. Bulgarie [GC], n o 21980/04, 12 mai 2017 (extraits)), et rappelés récemment dans l ' affaire Beuze c. Belgique ([GC], n o 71409/10, §§ 119 et s., 9 novembre 2018). 46 . Elle souligne en particulier que, quelle que soit la restriction concernée, même si cette dernière découle directement de la loi applicable, elle procède à un examen en deux étapes : d ' une part, en vérifiant tout d ' abord l ' existence ou non de raisons impérieuses, puis, d ' autre part, en examinant l ' équité du procès dans son ensemble. Par ailleurs, si l ' absence de raisons impérieuses ne suffit pas à entraîner une violation de l ' article 6, elle entraîne un contrôle très strict de la Cour, dès lors qu ' une telle absence pèse lourdement dans la balance lorsqu ' il s ' agit d ' apprécier globalement l ' équité du procès, ce qui peut faire pencher la balance en faveur d ' un constat de violation ( Beuze , précité, § 145). Tel est d ' autant plus le cas lorsqu ' il y a cumul du défaut d ' accès à un avocat et du défaut de notification des droits, en particulier du droit de garder le silence : le gouvernement, à qui il incombe d ' expliquer de façon convaincante pourquoi, à titre exceptionnel et au vu des circonstances particulières du cas d ' espèce, la restriction à l ' accès à un avocat n ' a pas porté une atteinte irrémédiable à l ' équité globale du procès, pourra alors plus difficilement prouver que le procès a été équitable. 47 . Elle rappelle également qu ' un certain nombre de facteurs, non limitatifs, doivent être pris en compte s ' il y a lieu ( Beuze , précité, § 150). 48 . Par ailleurs, dans l ' arrêt Beuze (précitée), la Cour a précisé que la désignation d ' un conseil doit impérativement s ' accompagner des deux exigences minimales suivantes : d ' une part, le suspect doit pouvoir entrer en contact avec son avocat dès sa privation de liberté, ce qui implique qu ' il puisse consulter son avocat préalablement à un interrogatoire, voire en l ' absence d ' un interrogatoire et que l ' avocat puisse s ' entretenir avec lui en privé et en recevoir d es instructions confidentielles ( Simeonovi , précité, § 111, et Beuze , précité, § 133) ; d ' autre part, le suspect doit également bénéficier de la présence physique de son avocat durant les auditions initiales menées par la police et durant les interrogatoires ultérieurs menés au cours de la procédure antérieure à la phase de jugement, cette présence devant permettre à l ' avocat de fournir une assistance effective et concrète, notamment pour éviter les atteintes aux droits de la défense, et non seulement abstraite ( ibidem , § 134). 49 . Enfin, s ' agissant des déclarations du suspect, elle rappelle que le droit de ne pas s ' incriminer soi - même ne se limite pas aux aveux au sens strict ou aux remarques le mettant directement en cause : il suffit, pour qu ' il y ait auto - incrimination, que ses déclarations soient susceptibles d ' affecter substantiellement sa position de celui-ci, à l 'instar de déclarations circonstanciées qui orientent la conduite des auditions et interrogatoires, qui affectent la position du suspect ou sa crédibilité ( Beuze , précité, §§ 178 et 179).b) Application au cas d ' espèce
50 . La Cour note tout d ' abord que si le requérant a pu s ' entretenir avec un avocat durant sa garde à vue, la loi l ' y autorisant pour une durée de trente minutes, et ce de nouveau lors de la prolongation de la mesure, il n ' a bénéficié ni de l ' assistance d ' un avocat pendant les interrogatoires ni de la notification du droit au silence. Le Gouvernement le reconnaît. 51 . Elle relève ensuite qu ' il n ' est pas contesté que les restrictions litigieuses résultaient de la loi française applicable au moment des faits. Or, la Cour rappelle que les restrictions à l ' accès à un avocat pour des raisons impérieuses ne sont permises durant la phase préalable au procès que dans des cas exceptionnels, et qu ' elles doivent être de nature temporaire et reposer sur une appréciation individuelle des circonstances particulières du cas d ' espèce ( Beuze , précité, § 161). Une appréciation individuelle de cette nature était clairement absente en l ' espèce, la restriction ayant été de portée générale et obligatoire ( ibidem ). Quant aux arrêt s de la Cour de cassation du 15 avril 2011 et à la loi n o 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, le requérant n ' a pas pu en bénéficier durant sa garde à vue. En outre, le Gouvernement n ' a pas établi l ' existence de circonstances exceptionnelles qui auraient pu justifier les restrictions dont a fait l ' objet le droit du requérant et il n ' appartient pas à la Cour d ' en chercher de son propre chef ( Simeonovi , précité, § 130, et Beuze , précité, § 163). Aucune raison impérieuse ne justifiait donc en l ' espèce les restrictions susmentionnées. 52 . La Cour doit dès lors évaluer l ' équité de la procédure en opérant un contrôle très strict et ce, à plus forte raison, dans le cas de restrictions d ' origine législative ayant une portée générale et obligatoire. La charge de la preuve pèse ainsi sur le Gouvernement, qui doit démontrer de manière convaincante que le requérant a néanmoins bénéficié globalement d ' un procès pénal équitable ( Beuze , précité, § 165). Ainsi qu ' il a été rappelé (paragraphe 46 ci-dessus), l ' incapacité du Gouvernement à établir des raisons impérieuses pèse lourdement dans la balance et peut faire pencher la Cour dans le sens d ' une violation de l ' article 6 §§ 1 et 3 c). 53 . Examinant, dans la mesure où ils sont pertinents en l ' espèce, les différents facteurs découlant de sa jurisprudence tels qu ' ils ressortent des arrêts Ibrahim et autres , Simeonovi et Beuze (précités, respectivement §§ 274, 120 et 150), la Cour note en premier lieu l ' absence tant de vulnérabilité particulière du requérant que de coercition exercée sur lui durant la garde à vue. Elle estime ensuite que des considérations d ' intérêt public justifiaient la poursuite du requérant, celui-ci étant poursuivi pour des faits d ' abus de biens sociaux. 54 . En outre, la Cour constate que le requérant, assisté cette fois d ' un avocat, dès l ' instruction, a pu faire valoir ses arguments devant les juridictions du fond, notamment pour discuter des différents éléments de preuve, en première instance comme en appel, dans le cadre du recours qui lui était ouvert et qu ' il a pu exercer, puis devant la Cour de cassation, qui était saisie de son pourvoi. 55 . Elle relève cependant que l ' exception de nullité soulevée par le requérant, sur le fondement de l ' article 6 de la Convention, en raison du défaut d ' assistance d ' un avocat durant sa garde à vue, a été rejetée par le tribunal de première instance et la cour d ' appel de Papeete pour cause de forclusion (paragraphes 13 et 16 ci-dessus). En l ' espèce, le Gouvernement indique lui-même qu ' un tel recours devant la chambre de l ' instruction avait très peu de chances d ' être accueilli favorablement et que le requérant bénéficiait en principe d ' un second re cours, devant les juges du fond (paragraphes 30-32 ci-dessus). Or, des dispositions légales susceptibles d ' être invoquées par le Gouvernement et prévoyant in abstracto certaines garanties qui auraient pu assurer, à elles seules, l ' équité globale de la procédure, ne suffisent pas : la Cour doit examiner si l ' application de ces dispositions légales au cas d ' espèce a eu concrètement un effet compensatoire rendant la procédure équitable dans son ensemble ( Beuze , précité, § 161), en particulier si les juridictions internes ont procédé à l ' analyse nécessaire de l ' incidence de l ' absence d ' un avocat à un moment crucial de la procédure ( ibidem , §§ 174 et 176). Un tel examen n ' a pas été explicitement réalisé par les juges nationaux en l ' espèce. 56 . Cependant, s ' agissant du droit du requérant de ne pas s ' incriminer lui - même et de l ' utilisation des différents éléments de preuve du dossier par les juges du fond, la Cour constate que si, au cours de sa garde à vue, le requérant avait reconnu une partie des faits (paragraphe 7 ci-dessus), le jugement de première instance et l ' arrêt de la cour d ' appel de Papeete ne font aucune référence à ces déclarations, et ce alors même que leurs décisions sont longuement motivées. Elle note en effet que le tribunal s ' est fondé sur les seules déclarations faites par le requérant devant le juge d ' instruction alors qu ' il était assisté d ' un avocat, et sur les faits qu ' il a reconnus devant lui au cours des débats sur le fond (paragraphe 13 ci - dessus). Quant à la cour d ' appel, elle n ' a pas non plus mentionné les déclarations faites par le requérant au cours de la garde à vue, mais elle s ' est largement référée aux déclarations circonstanciées du commissaire aux comptes, à l ' origine de la procédure avec son signalement circonstancié au procureur de la République qui était un élément important de l ' accusation, de l ' expert-comptable de la société, du représentant des créanciers (dans le cadre du redressement judiciaire de l ' entreprise) et de l ' ancien dirigeant de la société qui a finalement été désigné comme nouveau représentant légal de celle-ci, en remplacement du requérant, durant la procédure de redressement judiciaire. Elle s ' est en outre fondée sur les résultats de l ' instruction, ainsi que sur les déclarations du requérant devant le tribunal de première instance, qui ressortaient des notes d ' audience, et ce en relevant toute une série de faits délictueux attestés par des documents comptables et l ' examen des relevés de comptes, caractéristiques de l ' infraction d ' abus de biens sociaux (paragraphe 17 ci - dessus). 57 . Or, la Cour rappelle qu ' il ressort clairement de sa jurisprudence que les restrictions au droit d ' accès à un avocat, même systématiques, au droit de ne pas témoigner contre soi-même et au droit à être informé de la possibilité de garder le silence ne peuvent pas entraîner ab initio la violation de la Convention mais donnent lieu à un examen en deux étapes. La première consiste à vérifier l ' existence de raisons impérieuses de restreindre ces droits : même dans l ' hypothèse où celles-ci feraient défaut, il ne saurait y avoir de constat de violation automatique de la Convention, la Cour devant, lors d ' une seconde étape, effectuer un contrôle de l ' équité de la procédure dans son ensemble ( Ibrahim et autres , précité, § 262, 269 et 273, et Beuze , précité, § 141). Parmi les facteurs susceptibles d ' établir que la procédure a été équitable dans son ensemble, figure « l ' utilisation faite des preuves, et en particulier le point de savoir si elles sont une partie intégrante ou importante des pièces à charge sur lesquelles s ' est fondée la condamnation, ainsi que la force des autres éléments du dossier » ( Ibrahim et autres , précité, § 274, Simeonovi , précité, § 120, et Beuze , précité, § 150). Dans certaines hypothèses et, surtout, dans le cadre de l ' examen au cas par cas auquel la Cour se livre, ce qui implique nécessairement une appréciation susceptible de varier en fonction des circonstances particulières de chaque affaire, ce facteur peut s ' avérer crucial. Aux yeux de la Cour, tel est le cas en l ' espèce. Elle vient en effet de constater que les juridictions du fond se sont fondées sur des éléments extérieurs aux déclarations faites par le requérant au cours de la garde à vue, à savoir sur les éléments établis par l ' instruction, pendant laquelle le requérant était assisté d ' un avocat, sur les débats devant le juge de première instance, ou encore sur les témoignages particulièrement précis et circonstanciés de tiers en lien direct avec son activité, ainsi que sur l ' examen des documents comptables et banca ires (paragraphe 56 ci - dessus). 58 . Ainsi, bien que les juges internes n ' aient pas explicitement apprécié les conséquences de l ' absence de l ' assistance d ' un avocat et de notification du droit de garder le silence lors de la garde à vue pour les droits de la défense du requérant, la Cour constate qu ' ils ont néanmoins veillé à se fonder sur d ' autres éléments que les propos tenus par le requérant au cours de la garde à vue et que les déclarations faites à ce stade ont été ignorées durant le procès au fond, pour finalement n ' occuper aucune place dans la motivation des juges du fond : compte tenu de l ' existence d ' autres preuves considérées comme étant décisives, qui ont été discutées contradictoirement dans le cadre de la procédure, les déclarations litigieuses faites en garde à vue ne constituaient à l ' évidence pas une partie intégrante et importante des preuves sur lesquelles reposait la condamnation du requérant (voir, a contrario , Ibrahim et autres , précité, § 309, Rodionov c. Russie , n o 9106/09, § 168, 11 décembre 2016, et Beuze , précité, § 193 ). 59 . Dans ces conditions, la Cour estime qu ' il est en l ' espèce indifférent que les autres garanties procédurales évoquées par le Gouvernement, à savoir le fait que le requérant aurait pu faire prévenir un proche, qu ' il ait été examiné par un médecin et que sa garde à vue se soit déroulée sous le contrôle du procureur de la République (paragraphe 44 ci-dessus), ne soient, malgré leur importance, pas de nature à compenser l ' absence d ' assistance d ' un avocat et le défaut de notification du droit de garder le silence durant la garde à vue. 60 . Compte tenu de ce qui précède et dans le cadre du contrôle auquel elle doit procéder en l ' absence de raisons impérieuses, la Cour estime que la procédure pénale menée à l ' égard du requérant, considérée dans son ensemble, a permis, dans les circonstances de l ' espèce, de remédier aux lacunes procédurales survenues durant la garde à vue. La Cour estime important de souligner, comme elle l ' a fait dans d ' autres affaires relatives à l ' article 6 § 1 de la Convention dans lesquelles un examen de l ' équité globale de la procédure était en cause, qu ' elle ne doit pas s ' ériger en juge de quatrième instance ( Beuze , précité, § 193). Lors de l ' examen de l ' équité globale de la procédure tel que celui exigé par l ' article 6 § 1, elle est toutefois appelée à examiner soigneusement le déroulement de la procédure au niveau interne, un contrôle très strict s ' imposant lorsque la restriction au droit d ' accès à un avocat ne repose sur aucune raison impérieuse. En l ' espèce, c ' est la conjonction des différents facteurs précités et non chacun d ' eux pris isolément qui la conduit à considérer que la procédure a été équitable dans son ensemble. La Cour souligne à ce titre que la motivation des décisions des juges du fond, qui n ' est ni stéréotypée ni laconique, mais au contraire circonstanciée, lui permet d ' assurer le contrôle européen qui lui est confié (cf., mutatis mutandis , X. c. Lettonie [GC], n o 27853/09, § 107, CEDH 2013). 61 . Partant, il n ' y a pas eu violation de l ' article 6 §§ 1 et 3 c) de la Convention.PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L ' UNANIMITÉ,
F ait en françai s, puis communiqué par écrit le 11 juillet 2019, en application de l 'article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.
Milan Blaško
Angelika Nußberger
Greffier adjoint
Présidente