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European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> SOLTANI v. FRANCE - 45287/11 (Judgment : Right to a fair trial : Fifth Section Committee) French Text [2019] ECHR 886 (05 December 2019)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2019/886.html
Cite as: ECLI:CE:ECHR:2019:1205JUD004528711, [2019] ECHR 886, CE:ECHR:2019:1205JUD004528711

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CINQUIÈME SECTION

AFFAIRE SOLTANI c. FRANCE

(Requête no 45287/11)

 

 

 

 

 

 

ARRÊT

 

STRASBOURG

5 décembre 2019

 

Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.


En l’affaire Soltani c. France,

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en un comité composé de :

          Mārtiņš Mits, président,
          André Potocki,
          Lәtif Hüseynov, juges,

et de Milan Blaško, greffier adjoint de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 12 novembre 2019,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1.  À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 45287/11) dirigée contre la République française et dont un ressortissant marocain, M. Hassan Soltani (« le requérant »), a saisi la Cour le 29 juin 2011 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2.  Le requérant a été représenté par Me O. Trilles, avocat à Carcassonne. Le gouvernement français (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. F. Alabrune, directeur des affaires juridiques du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.

3.  Le 14 janvier 2015, les griefs tirés de l’article 6 §§ 1 et 3 c) de la Convention, concernant le défaut de notification de son droit au silence et l’absence, dès le début de la mesure de garde à vue et durant chacun des interrogatoires, d’assistance effective d’un avocat, ont été communiqués au Gouvernement et la requête a été déclarée irrecevable pour le surplus conformément à l’article 54 § 3 du règlement de la Cour.

EN FAIT

4.  Le requérant est né en 1976 et réside à Paris.

5.  Soupçonné de faits d’agressions sexuelles commis sur deux personnes en état de vulnérabilité, avec usage ou menace d’une arme, le requérant fut placé en garde à vue le 11 avril 2005 à 9 h 30. Il put faire prévenir une personne de son choix. Il ne souhaita ni se faire examiner par un médecin ni avoir un entretien avec un avocat pour la durée légale ne pouvant excéder trente minutes. Le 12 avril 2005, à 9 h 30, le procureur de la République ordonna la prolongation de la garde à vue, qui dura au total trente-deux heures. Dans un premier temps, le requérant nia catégoriquement les faits, avant de reconnaître, près de 24 heures après le début de sa garde à vue, une partie des faits commis sur l’une des victimes. La mesure de garde à vue fut levée le 12 avril à 17 h 30.

6.  Le requérant fut remis en liberté à l’issue de sa garde à vue. Se trouvant sans domicile connu, il fut considéré en fuite et un mandat d’arrêt fut émis à son encontre le 4 juillet 2007.

7.  Le 17 mars 2009, il fut interpellé à Paris pour des faits d’agressions sexuelles sur mineure de quinze ans intervenus le jour même. Il fut placé en garde à vue à 17 h 45 et put s’entretenir avec son avocat de 20 h 15 à 20 h 45.

8.  Le 21 mars 2009, en exécution du mandat d’arrêt, il fut présenté au juge d’instruction et mis en examen. Devant le juge d’instruction le requérant revint sur ses aveux et nia les faits qui lui étaient reprochés. Il indiqua avoir accepté de reconnaître ces faits au cours de sa garde à vue en 2005, en raison d’une offre qui lui aurait été faite par les enquêteurs de ne pas le faire reconduire à la frontière en échange de ses aveux.

9.  Le 2 décembre 2009, le requérant adressa une requête en annulation à la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Montpellier, soutenant que ses aveux effectués au cours de la garde à vue de 2005 avaient été extorqués sous le menace d’une expulsion. Le 23 décembre 2009, la demande fut déclarée irrecevable. Le requérant ne forma pas de pourvoi en cassation.

10.  Par une ordonnance du 20 janvier 2010, le requérant fut renvoyé devant le tribunal correctionnel de Carcassonne des chefs d’agressions sexuelles avec arme sur deux personnes dont la vulnérabilité est apparente ou connue.

11.  Devant le tribunal correctionnel, le requérant souleva, par conclusions écrites et avant toute défense au fond, une exception tendant à ce que les procès-verbaux d’audition en garde à vue soient écartés des débats, et ce sur le fondement de la jurisprudence de la Cour dans son arrêt Salduz c. Turquie du 27 novembre 2008.

12.  Par un jugement du 10 mars 2010, le tribunal correctionnel de Carcassonne jugea que cette demande était irrecevable à ce stade de la procédure. Cependant, il relaxa le requérant des chefs de la poursuite, compte-tenu du doute persistant quant à la matérialité des faits d’agression et leur connotation sexuelle. Le ministère public interjeta appel.

13.  Le 4 janvier 2011, la cour d’appel de Montpellier déclara irrecevable la demande d’annulation des déclarations faites en garde à vue, dans la mesure où le requérant, contrairement au parquet, n’avait pas fait appel du jugement. Elle le condamna à huit mois d’emprisonnement, durée correspondant à la détention provisoire subie par le requérant, ainsi qu’à l’interdiction définitive du territoire national. Elle releva notamment que c’est au cours de son audition en garde à vue que le requérant avait fini par reconnaître les faits. Elle releva en outre que les victimes avaient toujours maintenu leurs accusation et que les diverses expertises psychiatriques avaient conclu à la crédibilité de leurs propos. La cour d’appel précisa à ce titre que si le requérant était depuis revenu sur sa position, ses aveux faits au cours de la garde à vue n’avaient pas pu être dictés par les gendarmes et confirmaient pour l’essentiel les déclarations des victimes. Le requérant ne se pourvut pas en cassation.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 §§ 1 et 3 c) DE LA CONVENTION

14.  Le requérant allègue une violation de l’article 6 §§ 1 et 3 c) de la Convention, ainsi libellé :

« 1.  Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...)

3.  Tout accusé a droit notamment à :

(...)

c)  se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ;

(...) »

15.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.

A.    Sur la recevabilité

16.  Le Gouvernement indique qu’une personne mise en examen dispose de deux voies de recours pour contester la régularité d’une garde à vue, à savoir en cours d’instruction puis au stade du jugement devant les juges du fond. Il estime que le requérant n’a pas épuisé les voies de recours internes, d’une part, faute d’avoir saisi la chambre de l’instruction d’une demande en annulation fondée sur l’absence de notification du droit au silence et d’assistance effective d’un avocat et, d’autre part, pour n’avoir pas formé de pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Montpellier du 4 janvier 2011.

17.  Le requérant soutient qu’à l’époque des faits il n’existait pas de recours efficace pour contester utilement la régularité de la garde à vue compte tenu du droit français et de la jurisprudence de la Cour de cassation, qui n’a évolué qu’à partir des arrêts prononcés en Assemblée plénière le 15 avril 2011.

18.  La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention, elle ne peut être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes, qui doivent être à la fois relatives aux violations incriminées, disponibles et adéquates. Elle rappelle également qu’il incombe au Gouvernement excipant du non-épuisement de convaincre la Cour que le recours était effectif et disponible tant en théorie qu’en pratique à l’époque des faits, c’est-à-dire qu’il était accessible, était susceptible d’offrir au requérant le redressement de ses griefs et présentait des perspectives raisonnables de succès (voir, parmi beaucoup d’autres, Selmouni c. France [GC], no 25803/94, § 76, CEDH 1999‑V, Sejdovic c. Italie [GC], no 56581/00, § 46, CEDH 2006-II, Gherghina c. Roumanie [GC] (déc.), no 42219/07, § 85, 9 juillet 2015, et Molla Sali c. Grèce [GC], no 20452/14, § 89, 19 décembre 2018).

19.  La Cour rappelle également qu’un recours devant la chambre de l’instruction, comme celui exercé par le requérant en l’espèce (paragraphe 9 ci-dessus), avait très peu de chances d’être accueilli favorablement (Bloise c. France, no 30828/13, § 36, 11 juillet 2019) : en effet, la notification du droit au silence et à l’assistance d’un avocat pendant la garde à vue n’étaient pas encore consacrées en droit français (Bloise, précité, §§ 38-40).

20.  Il s’ensuit que l’exception soulevée par le Gouvernement doit être rejetée.

21.  Par ailleurs, la Cour constate que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’elle ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité. Elle la déclare donc recevable.

B.     Sur le fond

1.    Arguments des parties

22.  Le requérant souligne qu’il a fait l’objet d’une garde à vue pendant trente-deux heures, qu’il a longtemps nié les faits et que ce n’est qu’à partir de la trentième heure qu’il a commencé à faire des déclarations contraires et à reconnaître une partie de ce qui lui était reproché. Il soutient que ce revirement dans sa version des faits a été obtenu par les gendarmes en échange d’une promesse de ne pas l’expulser, le requérant étant de nationalité marocaine. Il estime que le respect de ses droits l’aurait préservé de toute tentative de lui extorquer des aveux. Le requérant ajoute que la cour d’appel s’est en partie fondée sur ses dernières déclarations faites au cours de sa garde à vue pour le condamner.

23.  Le Gouvernement ne conteste pas, d’une part, que le requérant a été placé en garde à vue sans que lui ait été notifié son droit au silence et, d’autre part, qu’il n’a pas bénéficié de l’assistance effective d’un avocat pendant ses interrogatoires de garde à vue. Il relève cependant que le requérant n’a pas souhaité s’entretenir avec un avocat dès le début de sa garde à vue et lors de la prolongation de celle-ci.

24.  Il estime que le droit français présentait d’autres garanties procédurales : le requérant a fait prévenir une personne de son choix, il aurait pu être examiné par un médecin, ce qu’il a refusé, et sa garde à vue s’est déroulée sous le contrôle du procureur de la République. Il considère en outre que le requérant a pu contester la valeur probante des pièces de la procédure devant les juridictions du fond. Il précise que la cour d’appel a souligné que les victimes avaient toujours maintenu leurs déclarations, qui étaient précises, détaillées et circonstanciées et dont certaines ont pu être confirmées par les premiers examens médicaux, outre le fait que les expertises psychiatriques ont conclu à la crédibilité des victimes.

2.    Appréciation de la Cour

25.  La Cour renvoie aux principes généraux maintes fois réaffirmés par elle (Salduz c. Turquie [GC], no 36391/02, §§ 56 et 61-62, CEDH 2008, Ibrahim et autres c. Royaume-Uni [GC], nos 50541/08, 50571/08, 50573/08 et 40351/09, 13 septembre 2016, et Simeonovi c. Bulgarie [GC], no 21980/04, 12 mai 2017 (extraits)), et rappelés récemment dans l’affaire Beuze c. Belgique ([GC], no 71409/10, §§ 119 et s., 9 novembre 2018), ainsi que dans les arrêts Olivieri c. France (no 62313/12, 11 juillet 2019) et Bloise (précité).

26.  En l’espèce, la Cour note tout d’abord que si le requérant aurait pu s’entretenir avec un avocat durant sa garde à vue, la loi l’y autorisant pour une durée de trente minutes, et ce de nouveau lors de la prolongation de la mesure, il n’a pu bénéficier ni de l’assistance d’un avocat pendant les interrogatoires ni de la notification du droit au silence, ce que le Gouvernement reconnaît. Dans ces conditions, la question d’une éventuelle renonciation au droit à l’assistance d’un avocat, au motif que le requérant n’a pas demandé le bénéfice d’un simple entretien d’une durée légale ne pouvant excéder trente minutes, est sans objet (Navone et autres c. Monaco, nos 62880/11, 62892/11 et 62899/11, § 83, 24 octobre 2013).

27.  Elle relève ensuite qu’aucune raison impérieuse ne justifiait les restrictions susmentionnées en l’espèce (Olivieri, précité, § 32, et Bloise, précité, § 51).

28.  La Cour doit dès lors évaluer l’équité de la procédure en opérant un contrôle très strict et ce, à plus forte raison, dans le cas de restrictions d’origine législative ayant une portée générale et obligatoire (Olivieri, précité, § 33, et Bloise, précité, § 52).

29.  Examinant, dans la mesure où ils sont pertinents en l’espèce, les différents facteurs découlant de sa jurisprudence tels qu’ils ressortent des arrêts Ibrahim et autres, Simeonovi et Beuze (précités, respectivement §§ 274, 120 et 150), la Cour note en premier lieu l’absence tant de vulnérabilité particulière du requérant que de coercition exercée sur lui durant la garde à vue. Elle estime ensuite que des considérations d’intérêt public justifiaient la poursuite du requérant, celle-ci ayant pour objet des faits d’agressions sexuelles commis sur deux personnes en état de vulnérabilité.

30.  En outre, la Cour constate que le requérant, assisté cette fois d’un avocat, a pu faire valoir ses arguments devant les juridictions du fond, notamment pour discuter des différents éléments de preuve, en première instance comme en appel, dans le cadre du recours qui lui était ouvert et qu’il a pu exercer.

31.  Elle relève cependant que l’exception de nullité soulevée par le requérant, sur le fondement de l’article 6 de la Convention, en raison du défaut de notification du droit au silence et d’assistance d’un avocat durant sa garde à vue, a été déclaré irrecevable tant par le tribunal correctionnel de Carcassonne que par la cour d’appel de Montpellier. Elle souligne en particulier que cette dernière a justifié sa décision d’irrecevabilité par le fait que le requérant n’avait pas interjeté appel (paragraphe 13 ci-dessus), et ce alors que si le requérant n’était pas appelant, cela résultait précisément du jugement de relaxe prononcé à son profit par le tribunal correctionnel (paragraphe 12 ci-dessus). La Cour rappelle en effet que des dispositions légales susceptibles d’être invoquées par le Gouvernement et prévoyant in abstracto certaines garanties qui auraient pu assurer, à elles seules, l’équité globale de la procédure, ne suffisent pas : la Cour doit examiner si l’application de ces dispositions légales au cas d’espèce a eu concrètement un effet compensatoire rendant la procédure équitable dans son ensemble (Beuze, précité, § 161), en particulier si les juridictions internes ont procédé à l’analyse nécessaire de l’incidence de l’absence d’un avocat à un moment crucial de la procédure (ibidem, §§ 174 et 176, et Olivieri, précité, § 36). Tel n’a pas été le cas en l’espèce.

32.  S’agissant du droit du requérant de ne pas s’incriminer lui‑même et de l’utilisation des différents éléments de preuve du dossier, la Cour relève l’existence de déclarations et de réponses faites aux enquêteurs qui ont manifestement affecté sa position de manière substantielle dans la procédure. Tout d’abord, le requérant a été interrogé par la police durant trente-deux heures au cours de la garde à vue, à la fin de laquelle il a fini par reconnaître sa responsabilité après l’avoir contesté pendant près d’une trentaine d’heures (paragraphe 5 ci-dessus). Ensuite, alors que le requérant a été relaxé en première instance, rien dans la motivation de la cour d’appel ne permet de considérer que d’autres éléments pourraient être regardés comme des parties intégrantes et importantes sur lesquelles reposaient la condamnation. La Cour relève en particulier que si les déclarations des victimes ont également été prises en compte par la cour d’appel, celle-ci en a apprécié la crédibilité à la lumière des déclarations faites par le requérant au cours de sa garde à vue, en jugeant qu’elles confirmaient pour l’essentiel les dires des victimes (paragraphe 13 ci-dessus).

33.  En conséquence, rappelant qu’en l’absence de raisons impérieuses justifiant les restrictions constatées, elle est appelée à opérer un contrôle très strict, la Cour considère que ces éléments doivent peser lourdement dans son appréciation de l’équité de la procédure dans son ensemble (Beuze, précité, §§ 178-179). Il en va d’autant plus ainsi en l’espèce que le requérant a été privé à la fois du droit de bénéficier de la présence physique de son avocat durant les interrogatoires menés par la police et de la notification de son droit à garder le silence, ce qui rend encore plus difficile, pour le Gouvernement, de démontrer que le procès a été équitable (Ibrahim et autres, précité, § 273, Beuze, précité, § 146, et Olivieri, précité, § 38).

34.  Enfin, s’agissant de l’existence éventuelle d’autres garanties procédurales, la Cour estime que les mesures évoquées à ce titre par le Gouvernement, à savoir le fait que le requérant ait pu faire prévenir une personne de son choix et qu’il aurait pu se faire examiner par un médecin s’il l’avait souhaité, ne sont pas, malgré leur importance, de nature à compenser l’absence d’assistance d’un avocat et le défaut de notification du droit de garder le silence durant la garde à vue (Olivieri, précité, § 39).

35.  Compte tenu de ce qui précède et du contrôle auquel elle doit procéder en l’absence de raisons impérieuses, la Cour estime que la procédure pénale menée à l’égard du requérant, considérée dans son ensemble, n’a pas permis de remédier aux lacunes procédurales survenues durant la garde à vue.

36.  Partant, il y a eu violation de l’article 6 §§ 1 et 3 c) de la Convention.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

37.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A.    Dommage

38.  Le requérant réclame 50 000 euros (EUR) au titre du préjudice matériel et moral qu’il estime avoir subi.

39.  Le Gouvernement considère que la demande concernant le préjudice matériel doit être rejetée et qu’un constat de violation constituerait, en soi, une satisfaction équitable suffisante au titre du préjudice moral subi par le requérant.

40.  Ainsi que la Cour l’a fait valoir à maintes reprises, le constat d’une violation de l’article 6 §§ 1 et 3 c) de la Convention à l’égard du requérant ne permet pas de conclure que celui-ci a été condamné à tort, et il est impossible de spéculer sur ce qui aurait pu se produire si cette violation n’avait pas existé (Beuze, précité, § 199). Dans les circonstances de l’espèce, la Cour estime qu’une constatation de violation suffit et elle rejette dès lors la demande du requérant (Olivieri, précité, § 45).

B.     Frais et dépens

41.  Le requérant demande également 11 000 EUR pour les frais et dépens, soit 6 000 EUR engagés devant les juridictions internes et 5 000 EUR devant la Cour.

42.  Le Gouvernement considère que la demande doit être rejetée. Il note en particulier que si le requérant justifie des honoraires à hauteur de 8 770 EUR, ces factures ne lui ont pas été adressées, mais à un tiers.

43.  La Cour constate que les mentions portées sur les factures d’honoraires ont en réalité été acquittées par deux tiers différents pour le compte du requérant. Partant, ce dernier ne démontrant pas avoir supporté personnellement les frais concernés, la Cour estime qu’aucune somme ne saurait lui être allouée à ce titre (Vaturi c. France, no 75699/01, § 66, 13 avril 2006).

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1.      Déclare la requête recevable ;

2.      Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 §§ 1 et 3 c) de la Convention ;

3.      Dit que le constat d’une violation fournit en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage moral subi par le requérant ;

4.      Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 5 décembre 2019, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

    Milan Blaško                                                                       Mārtiņš Mits
  Greffier adjoint                                                                        
Président


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