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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Commission v Spain (Environment & consumers) French Text [2006] EUECJ C-332/04 (16 March 2006) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2006/C33204F.html Cite as: [2006] EUECJ C-332/04, [2006] ECR I-40, [2006] EUECJ C-332/4 |
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ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)
16 mars 2006 (*)
"Manquement d'État - Directive 85/337/CEE telle que modifiée par la Directive 97/11/CE - Évaluation des incidences de projets sur l'environnement - Interaction entre facteurs susceptibles d'être affectés directement ou indirectement - Obligation de publication de la déclaration d'impact - Évaluation limitée aux projets d'aménagement urbain situés en dehors des zones urbaines - Projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna"
Dans l'affaire C-332/04,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l'article 226 CE, introduit le 28 juillet 2004,
Commission des Communautés européennes, représentée par M. G. Valero Jordana et Mme F. Simonetti, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
contre
Royaume d'Espagne, représenté par M. M. Muñoz Pérez, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse,
LA COUR (troisième chambre),
composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. A. Borg Barthet et U. Lõhmus (rapporteur), juges,
avocat général: Mme C. Stix-Hackl,
greffier: M. R. Grass,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l'avocat général entendu, de juger l'affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que:
- en ayant transposé de manière incomplète l'article 3 de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement (JO L 175, p. 40, ci-après la "directive 85/337, dans sa version initiale"), telle que modifiée par la directive 97/11/CE du Conseil, du 3 mars 1997 (JO L 73, p. 5, ci-après la "directive 85/337 modifiée"),
- en n'ayant pas transposé l'article 9, paragraphe l, de la directive 85/337 modifiée,
- en n'ayant pas respecté le régime transitoire prévu à l'article 3 de la directive 97/11/CE,
- en n'ayant pas transposé correctement les dispositions combinées du point 10, sous b), de l'annexe II ainsi que des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée, et
- en n'ayant pas soumis à la procédure d'évaluation des incidences sur l'environnement le projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna, et, par conséquent, en n'ayant pas appliqué les dispositions des articles 2, paragraphe 1, 3, 4, paragraphe 2, 8 et 9 de la directive 85/337 modifiée,
le Royaume d'Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces directives.
2 Le Royaume d'Espagne conclut au rejet du recours et à la condamnation de la Commission aux dépens.
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
3 L'article 2, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée dispose:
"Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l'octroi de l'autorisation, les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure de demande d'autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences. Ces projets sont définis à l'article 4."
4 L'article 3 de la directive 85/337 modifiée énonce:
"L'évaluation des incidences sur l'environnement identifie, décrit et évalue de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier et conformément aux articles 4 à 11, les effets directs et indirects d'un projet sur les facteurs suivants:
- l'homme, la faune et la flore,
- le sol, l'eau, l'air, le climat et le paysage,
- les biens matériels et le patrimoine culturel,
- l'interaction entre les facteurs visés aux premier, deuxième et troisième tirets."
5 Les deux articles susmentionnés appliquent aux projets énumérés aux annexes I et II de la directive 85/337 modifiée. Le point 10, sous b), de l'annexe II de cette directive mentionne les travaux d'aménagement urbain, y compris la construction de centres commerciaux et de parkings.
6 Aux termes de l'article 4 de la directive 85/337 modifiée:
"1. Sous réserve de l'article 2, paragraphe 3, les projets énumérés à l'annexe I sont soumis à une évaluation, conformément aux articles 5 à 10.
2. Sous réserve de l'article 2, paragraphe 3, les États membres déterminent, pour les projets énumérés à l'annexe II:
a) sur la base d'un examen cas par cas,
ou
b) sur la base des seuils ou critères fixés par l'État membre,
si le projet doit être soumis à une évaluation conformément aux articles 5 à 10.
Les États membres peuvent décider d'appliquer les deux procédures visées aux points a) et b).
3. Pour l'examen cas par cas ou la fixation des seuils ou critères fixés en application du paragraphe 2, il est tenu compte des critères de sélection pertinents fixés à l'annexe III.
[...]"
7 L'article 5, paragraphe 3, de la directive 85/337 modifiée énumère les informations à fournir par le maître d'ouvrage. Ces informations comportent au minimum:
"- une description du projet comportant des informations relatives au site, à la conception et aux dimensions du projet,
- une description des mesures envisagées pour éviter et réduire des effets négatifs importants et, si possible, y remédier,
- les données nécessaires pour identifier et évaluer les effets principaux que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement,
- une esquisse des principales solutions de substitution qui ont été examinées par le maître d'ouvrage et une indication des principales raisons de son choix, eu égard aux effets sur l'environnement,
- un résumé non technique des informations visées aux tirets précédents".
8 L'article 6, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée précise:
"Les États membres veillent à ce que toute demande d'autorisation ainsi que les informations recueillies aux termes de l'article 5 soient mises à la disposition du public dans un délai raisonnable afin de donner au public concerné la possibilité d'exprimer son avis avant que l'autorisation ne soit délivrée."
9 L'article 8 de la directive 85/337 modifiée est libellé comme suit:
"Le résultat des consultations et les informations recueillies conformément aux articles 5, 6 et 7 doivent être pris en considération, dans le cadre de la procédure d'autorisation."
10 En vertu de l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée:
"Lorsqu'une décision d'octroi ou de refus d'autorisation a été prise, la ou les autorités compétentes en informent le public selon les modalités appropriées et mettent à sa disposition les informations suivantes:
- la teneur de la décision et les conditions dont celle-ci est éventuellement assortie,
- les motifs et considérations principaux qui ont fondé la décision,
- une description, le cas échéant, des principales mesures destinées à éviter, réduire et, si possible, compenser les effets négatifs importants."
11 L'article 3 de la directive 97/11 dispose:
"1. Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 14 mars 1999. [...]
[...]
2. Si une demande d'autorisation a été soumise à une autorité compétente avant la fin du délai fixé au paragraphe 1, les dispositions de la directive 85/337/CEE, dans sa version antérieure aux présentes modifications, continuent à s'appliquer."
La réglementation nationale
12 La directive 85/337 dans sa version initiale a été transposée dans l'ordre juridique espagnol au moyen du décret royal législatif 1302/1986, du 28 juin 1986, relatif à l'évaluation de l'impact environnemental (BOE n° 155, du 30 juin 1986, p. 23733). Les dispositions d'exécution dudit décret royal législatif ont été approuvées au moyen du décret royal 1131/1988, du 30 septembre 1988 (BOE n° 239, du 5 octobre 1988, p. 28911).
13 Afin d'assurer la transposition de la directive 97/11, le décret royal législatif 1302/1986 a été modifié à deux reprises, à savoir par le décret-loi royal 9/2000, du 6 octobre 2000 (BOE n° 241, du 7 octobre 2000, p. 34608), puis par la loi 6/2001, du 8 mai 2001 (BOE n° 111, du 9 mai 2001, p. 16607), ci-après le "décret royal législatif 1302/1986 modifié".
14 Conformément à l'article 2, paragraphe 1, du décret royal législatif 1302/1986 modifié:
"Les projets qui, selon l'article 1er du présent décret royal législatif, doivent être soumis à une évaluation de l'impact environnemental, doivent comporter une étude d'impact environnemental contenant au minimum les données suivantes:
[...]
c) Évaluation des effets prévisibles directs ou indirects du projet sur la population, la faune, la flore, le sol, l'air, l'eau, les facteurs climatiques, le paysage et les biens matériels, y compris le patrimoine historique artistique et archéologique.
[...]"
15 Selon l'article 4 du décret royal législatif 1302/1986 modifié:
"1. Préalablement à la résolution administrative à adopter pour la réalisation ou, le cas échéant, l'autorisation du projet, de l'installation ou de l'activité visée, l'organe compétent remet le dossier à l'organisme chargé de l'environnement, accompagné, le cas échéant, des observations qu'il juge pertinentes, afin que ce dernier formule une déclaration d'impact déterminant les conditions à imposer pour assurer une protection adéquate de l'environnement et des ressources naturelles.
2. En cas de divergence de vues entre les deux organismes, il appartient, en fonction de l'administration qui a transmis le dossier, au Conseil des ministres ou au gouvernement de la Communauté autonome concernée ou, le cas échéant, à l'organe désigné par ladite Communauté, de prendre une décision.
3. La déclaration d'impact est rendue publique dans tous les cas."
16 Conformément à l'article 18, paragraphes 1 et 2, du décret royal 1131/1988:
"1. La déclaration d'impact environnemental détermine, aux seules fins environnementales, l'opportunité de réaliser ou non le projet et, dans l'affirmative, détermine les conditions dans lesquelles il doit être réalisé.
2. Les conditions contiendront des prescriptions concrètes concernant la protection de l'environnement et formeront un ensemble cohérent avec les conditions imposées pour l'autorisation du projet; le cas échéant, elles seront intégrées aux prévisions contenues dans les projets environnementaux existants et feront référence à la nécessité de sauvegarder les écosystèmes et à leur capacité de reconstitution."
17 Aux termes de l'article 19 du décret royal 1131/1988:
"Dans un délai de trente jours après la réception du dossier auquel se réfère l'article 16, la déclaration d'impact environnemental est remise à l'organe de l'administration qui doit formuler la résolution administrative d'autorisation du projet."
18 La disposition transitoire unique du décret-loi royal 9/2000 énonce:
"Le présent décret-loi royal ne s'applique pas aux projets privés pour lesquels la procédure d'autorisation administrative a débuté avant son entrée en vigueur.
De même, il ne s'applique pas aux projets publics qui ont déjà fait l'objet d'une divulgation au public ni aux projets publics qui ne doivent faire l'objet d'une telle procédure et qui ont déjà été approuvés."
19 La loi 6/2001 contient la même disposition transitoire.
20 L'annexe I, groupe 9, sous c), point 3, du décret royal législatif 1302/1986 modifié mentionne, parmi les projets qui doivent faire l'objet d'une évaluation d'impact, les projets qui "se situent dans des zones particulièrement sensibles, désignées en application des directives 79/409/CEE et 92/43/CEE, ou dans des zones humides figurant sur la liste de la Convention de Ramsar" et en particulier "les projets d'aménagement urbain et les complexes hôteliers situés en dehors des zones urbaines et les constructions liées, y compris la construction de centres commerciaux et de parkings".
21 L'annexe II, groupe 7, sous b), du décret royal législatif 1302/1986 modifié mentionne, parmi les projets à soumettre à une évaluation d'impact, les "projets d'aménagement urbain et les complexes hôteliers situés en dehors des zones urbaines et les constructions liées, y compris la construction de centres commerciaux et de parkings (projets non inclus dans l'annexe I)".
La procédure précontentieuse
22 Le présent recours concerne deux procédures d'infraction ouvertes par la Commission contre le Royaume d'Espagne en 2001. La première, introduite sous la référence n° 2001/2210, avait pour but d'examiner la conformité des dispositions nationales transposant la directive 85/337 modifiée. La seconde, portant la référence n° 2001/2257, visait à vérifier si, en n'ayant pas conclu à la nécessité de soumettre à une évaluation d'impact environnemental le projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna, cet État membre avait appliqué correctement les dispositions de ladite directive.
23 Dans le cadre de la procédure d'infraction n° 2001/2210, la Commission a, le 21 décembre 2001, adressé une lettre de mise en demeure à l'État membre concerné. Les autorités espagnoles ont répondu à cette mise en demeure par une lettre du 27 mars 2002, dans laquelle elles précisaient que la directive 85/337 modifiée avait été correctement transposée dans le système juridique interne.
24 N'étant pas satisfaite des explications fournies par le Royaume d'Espagne, la Commission a, le 11 juillet 2003, envoyé un avis motivé invitant cet État membre à prendre les mesures nécessaires pour s'y conformer dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet avis. Le 16 juillet 2003, le Royaume d'Espagne a demandé à la Commission un délai supplémentaire d'un mois pour y répondre, délai qui ne lui a pas été accordé. Ledit avis motivé est resté sans réponse.
25 Dans le cadre de la procédure d'infraction n° 2001/2257, la Commission a, le 13 décembre 2001, adressé une lettre aux autorités espagnoles par laquelle elle les invitait à lui faire connaître leurs observations au sujet des faits dénoncés. Le 23 janvier 2002, ces autorités ont transmis à la Commission un rapport rédigé par la Communauté autonome de Valence concluant que le projet de centre de loisirs en cause ne devait pas être soumis à une évaluation de ses incidences sur l'environnement au titre des dispositions en vigueur dans cette Communauté autonome, au motif qu'il allait être construit dans une zone urbaine qui ne relevait pas de l'une des zones sensibles évoquées à l'annexe I, groupe 9, sous c), point 3, du décret royal législatif 1302/1986 modifié ni à l'annexe II, groupe 7, sous b), du même décret royal législatif.
26 Après avoir analysé les informations reçues, la Commission a considéré que les dispositions des articles 2, paragraphe 1, 3 et 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée combinées aux dispositions du point 10, sous b), de l'annexe II et à celles de l'annexe III ainsi que les articles 8 et 9 de la même directive avaient été appliqués de façon incorrecte, dans la mesure où la nécessité de soumettre le projet à la procédure d'évaluation des incidences, prévue aux articles 5 à 10 de ladite directive, n'avait pas été établie.
27 Par conséquent, par lettre de mise en demeure datée du 18 juillet 2002, la Commission a invité le gouvernement espagnol à présenter ses observations à ce sujet dans un délai de deux mois.
28 N'ayant pas reçu de réponse à cette lettre de mise en demeure, la Commission a, le 19 décembre 2002, émis un avis motivé dans lequel elle a invité le Royaume d'Espagne à adopter, dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet avis, les mesures nécessaires pour s'y conformer. Le 24 février 2003, les autorités espagnoles ont répondu en indiquant que les dispositions du point 10, sous b), de l'annexe II de la directive 85/337 modifiée n'avaient pas été transgressées.
29 Considérant que les informations transmises par les autorités espagnoles démontraient que certaines dispositions de la directive 85/337 modifiée n'avaient pas été correctement transposées ni appliquées, la Commission a décidé d'introduire le présent recours.
Sur le recours
30 à l'appui de son recours, la Commission invoque cinq griefs, tirés respectivement:
- de la transposition incomplète de l'article 3 de la directive 85/337 modifiée;
- de la non-transposition de l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée;
- de l'infraction à l'article 3, paragraphe 1, de la directive 97/11;
- de la transposition incorrecte des dispositions combinées du point 10, sous b), de l'annexe II ainsi que des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée, et
- de l'absence d'évaluation de l'impact environnemental du projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna.
Sur le premier grief tiré d'une transposition incomplète de l'article 3 de la directive 85/337 modifiée
31 La Commission soutient que, même si l'article 2, paragraphe 1, sous c), du décret royal législatif 1302/1986 modifié transpose la presque totalité du contenu de l'article 3 de la directive 85/337 modifiée, il ne mentionne pas pour autant l'interaction entre les facteurs énumérés aux premier à troisième tirets de cet article 3, interaction qui est prévue au quatrième tiret. De même, l'article 9 du décret royal 1131/1988 n'imposerait pas la prise en considération de l'interaction de tous les facteurs énumérés audit article 3, alors que cette obligation devrait figurer expressément dans la législation espagnole pour qu'elle s'impose clairement aux différents agents et autorités.
32 Le gouvernement espagnol considère que la mention de l'évaluation des effets prévisibles directs et indirects du projet, qui était déjà prévue dans la rédaction originale de l'article 2, paragraphe 1, du décret royal législatif 1302/1986, fait précisément allusion à l'interaction entre tous les facteurs qui doivent être pris en compte dans la déclaration d'incidence sur l'environnement, ce qui explique que l'article 7 du décret royal 1131/1988, censé appliquer le décret royal législatif 1302/1986, mentionne, parmi les éléments composant l'étude des incidences sur l'environnement, l'"inventaire environnemental et la description des principales interactions écologiques ou environnementales".
33 Il convient de signaler, à titre liminaire, que l'article 3 de la directive 85/337 modifiée se réfère au contenu de l'évaluation des incidences sur l'environnement, qui comprend une description des effets directs et indirects d'un projet sur des facteurs énumérés aux trois premiers tirets de cet article et l'interaction entre eux. Il appartient à l'autorité environnementale compétente de réaliser une telle évaluation.
34 En ce qui concerne la législation espagnole, il y a lieu de constater, d'une part, que l'article 2, paragraphe 1, du décret royal législatif 1302/1986 modifié ne mentionne pas l'interaction entre les facteurs énumérés aux premier à troisième tirets de l'article 3 de la directive 85/337 modifiée.
35 D'autre part, l'article 7 du décret royal 1131/1988 établit la liste des documents que doit inclure l'étude des incidences sur l'environnement, dont la réalisation est confiée au maître d'ouvrage, parmi lesquels figure un inventaire environnemental, non prévu dans les informations à fournir en vertu de l'article 5, paragraphe 3, de la directive 85/337 modifiée. Ce document, dont le contenu est précisé à l'article 9 de ce décret royal, doit effectivement décrire les interactions écologiques et environnementales clés.
36 Toutefois, s'il est vrai que l'inventaire environnemental a pour objet de décrire l'état du site sur lequel le projet doit être construit ainsi que ses caractéristiques environnementales, y compris les principales interactions écologiques, il n'évalue pas pour autant les incidences du projet sur les différents facteurs environnementaux expressément cités à l'article 3 de la directive 85/337 modifiée et l'interaction entre eux.
37 Il s'ensuit que les dispositions de droit national invoquées par le gouvernement espagnol ne garantissent pas que l'autorité administrative compétente procède à l'évaluation des incidences d'un projet sur l'interaction entre les facteurs environnementaux énumérés à l'article 3 de la directive 85/337 modifiée.
38 Il appert que, comme le fait valoir à bon droit la Commission, à supposer même qu'il existe une pratique administrative d'évaluation d'une telle interaction, cela ne permettrait pas non plus de considérer que l'article 3 de la directive 85/337 modifiée a été transposé correctement. En effet, selon une jurisprudence constante, la transposition d'une directive dans l'ordre juridique interne doit être achevée par des dispositions susceptibles de créer une situation suffisamment précise, claire et transparente pour permettre aux particuliers de connaître leurs droits et leurs obligations (voir, notamment, en ce sens, arrêts du 30 mai 1991, Commission/Allemagne, C-361/88, Rec. p. I-2567, point 24; du 7 novembre 1996, Commission/Luxembourg, C-221/94, Rec. p. I-5669, point 22, et du 13 septembre 2001, Commission/Espagne, C-417/99, Rec. p. I-6015, point 38).
39 Enfin, le Royaume d'Espagne fait valoir que l'article 127, paragraphe 1, de la loi 62/2003, du 30 décembre 2003 (BOE n° 313, du 31 décembre 2003, p. 46874), a modifié l'article 2, paragraphe 1, sous c), du décret royal législatif 1302/1986 avant l'introduction du recours par la Commission de sorte que, à présent, cette disposition prévoit, expressément, que l'évaluation des incidences sur l'environnement doit viser également l'interaction entre tous les facteurs énumérés à l'article 3 de la directive 85/337 modifiée.
40 Il suffit de rappeler à cet égard que, selon une jurisprudence constante, l'existence d'un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l'État membre telle qu'elle se présentait au terme du délai fixé dans l'avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 30 janvier 2002, Commission/Grèce, C-103/00, Rec. p. I-1147, point 23; du 30 mai 2002, Commission/Italie, C-323/01, Rec. p. I-4711, point 8, et du 15 septembre 2005, Commission/Allemagne, C-372/03, non encore publié au Recueil, point 51).
41 Or, en l'espèce, force est de constater que, à l'expiration du délai imparti dans l'avis motivé envoyé le 11 juillet 2003, les mesures nécessaires pour assurer la transposition correcte de la directive 85/337 modifiée, en particulier l'article 3, quatrième tiret, de cette directive, n'avaient pas été adoptées.
42 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer comme fondé le premier grief soulevé par la Commission au soutien de son recours.
Sur le deuxième grief tiré de la non-transposition de l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée
43 à l'appui de ce grief, la Commission soutient que, même si depuis son adoption en 1986, le décret royal législatif 1302/1986, impose, d'une part, à son article 3, paragraphe 1, l'obligation d'informer le public concernant l'étude d'impact environnemental et, d'autre part, à son l'article 4, paragraphe 3, celle de publier la déclaration d'impact environnemental, ce même décret royal législatif n'exige pas pour autant la publication de la décision d'octroi ou de refus de l'autorisation de réaliser le projet. Or, c'est précisément la communication au public d'une telle décision qui est imposée par l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée.
44 Selon le gouvernement espagnol, l'article 2 de la directive 85/337 modifiée impliquerait l'adoption d'un système comme celui qui est prévu par le décret royal législatif 1302/1986 dans son ensemble, lequel, avant que l'autorité compétente autorise l'exécution du projet, prescrirait que l'autorité compétente en matière environnementale se prononce sur les incidences que ce projet entraînerait en matière d'environnement, ainsi que sur les conditions dont il serait assorti afin de protéger l'environnement de façon adéquate. L'autorisation de mettre en œuvre le projet, mentionnée à l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée, ne pourrait, contrairement aux affirmations de la Commission, être assimilée à une autorisation du projet par l'autorité compétente.
45 Il découle des documents soumis à la Cour que, en vertu de l'article 18, paragraphe 1, du décret royal 1131/1988, la déclaration d'impact environnemental détermine, aux seules fins environnementales, l'opportunité de réaliser un projet et fixe les conditions dont il est assorti. Une telle déclaration est formulée par l'administration compétente en matière de protection de l'environnement et, en application de l'article 19 dudit décret royal, elle est ensuite transmise à l'organe administratif responsable de l'octroi ou du refus de la décision de réaliser le projet et, en cas de divergence, la décision est adoptée par un organe supérieur.
46 Le seul fait qu'il se soit avéré nécessaire, aux yeux du législateur espagnol, d'organiser en plusieurs étapes, devant des administrations publiques différentes, la procédure d'autorisation d'un projet susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement n'est pas en soi répréhensible du point de vue du droit communautaire. La mise à la disposition du public de la déclaration d'impact réalisée par l'administration compétente en matière d'environnement ne saurait cependant justifier l'absence de publication de la décision autorisant ou refusant la réalisation du projet, imposée par l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée.
47 Le gouvernement espagnol fait également valoir que l'article 9 de la directive 85/337 modifiée doit être interprété en tenant compte des autres dispositions, en particulier l'article 2, paragraphe 1, de cette directive aux termes duquel le législateur communautaire distingue entre l'"autorisation du projet" ("autorización") et l'"autorisation de mettre en œuvre le projet" ("autorización de su desarrollo"), de sorte que la première ne peut pas être accordée sans que ledit projet ait été préalablement soumis à la seconde. En effet, si l'autorisation de mettre en œuvre le projet, qui doit être mise à la disposition du public conformément à l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée, devait coïncider avec l'autorisation du projet par l'autorité compétente, il serait illogique que l'article 2, paragraphe 1, de cette même directive exige que l'"autorisation du projet" soit précédée de l'"autorisation de mettre en œuvre le projet".
48 Cet argument, qui s'appuie sur une lecture erronée de l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée, ne saurait non plus être accueilli.
49 En effet, contrairement à la thèse soutenue par le gouvernement espagnol, la directive 85/337 modifiée n'entend pas faire de distinction entre l'autorisation du projet et l'autorisation de mise en œuvre du projet. Il ressort tant du libellé de cette directive que de son contexte et des objectifs qu'elle poursuit que les deux expressions se réfèrent au même acte administratif.
50 S'il est exact que, dans les versions linguistiques anglaise et espagnole de la directive 85/337 modifiée, l'article 2, paragraphe 1, comprend deux expressions différentes en ce sens qu'il impose aux États membres l'obligation de prendre les dispositions nécessaires pour que, avant l'octroi de l'autorisation ("consent" dans la version anglaise et "autorización" dans la version espagnole), les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis, entre autres, à une procédure de demande d'autorisation de mise en œuvre ("development consent" dans la version anglaise et "autorización de su desarrollo" dans la version espagnole) il n'en est pas de même dans l'ensemble des autres versions linguistiques.
51 Ainsi, plusieurs versions linguistiques utilisent un même et unique terme pour désigner une notion ce qui, en anglais et en espagnol, est traduite par deux expressions différentes. Le seul terme "autorisation" figure dans la version française, de même que "aprovação" dans la version portugaise, "lupa" dans la version finnoise, "tillstånd" dans la version suédoise, "vergunning" dans la version néerlandaise, "Genehmigung" dans la version allemande, "autorizzazione" dans la version italienne, "tilladelse" dans la version danoise et "άδεια" dans la version grecque.
52 Or, en vertu d'une jurisprudence constante, les diverses versions linguistiques d'un texte communautaire doivent être interprétées de façon uniforme et, dès lors, en cas de divergences entre ces versions, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l'économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (voir arrêts du 27 octobre 1977, Bouchereau, 30/77, Rec. p. 1999, point 14; du 7 décembre 1995, Rockfon, C-449/93, Rec. p. I-4291, point 28; du 17 décembre 1998, Codan, C-236/97, Rec. p. I-8679, point 28, et du 13 avril 2000, W. N., C-420/98, Rec. p. I-2847, point 21).
53 Il convient de relever que l'article 1er, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée ne définit qu'un seul type d'autorisation, à savoir la décision de l'autorité ou des autorités compétentes qui ouvre le droit du maître d'ouvrage de réaliser le projet.
54 S'il est vrai que l'article 6, paragraphes 1 et 2, de la directive 85/337 modifiée impose aux États membres l'obligation d'organiser une procédure de consultation par laquelle respectivement les autorités susceptibles d'être concernées par ledit projet et le public sont invités à donner leur avis, il n'en demeure pas moins qu'une telle procédure se déroule, nécessairement, avant que l'autorisation ne soit délivrée. De tels avis, ainsi que d'autres avis complémentaires que les États membres peuvent prévoir, s'insèrent dans la procédure d'autorisation et visent à aider l'organe compétent dans sa décision d'octroi ou de refus de l'autorisation. Ils ont, partant, un caractère préparatoire et, en règle générale, ne peuvent faire l'objet d'un recours.
55 En revanche, l'information au public prévue à l'article 9 de la directive 85/337 modifiée a lieu une fois que la décision d'octroi ou de refus a été adoptée. L'objectif recherché au moyen de cette information est non seulement d'informer le public, mais aussi de permettre aux personnes qui s'estimeraient lésées par le projet d'exercer leur droit de recours dans les délais impartis.
56 Il découle de ce qui précède que le fait pour un État membre de publier la déclaration d'impact environnemental réalisée par l'organe administratif compétent en matière d'environnement, publication qui n'est pas imposée par le droit communautaire, ne remplace pas l'obligation prévue à l'article 9 de la directive 85/337 modifiée de communiquer au public l'autorisation ou le refus de réaliser ledit projet au sens de l'article 1er, paragraphe 2, de cette directive.
57 Cette interprétation est corroborée par la finalité de la directive 85/337, dans sa version initiale, qui consiste, aux termes de son premier considérant, à éviter, dès l'origine, la création de pollution ou de nuisances plutôt qu'à combattre ultérieurement leurs effets. Cette finalité a été confirmée par la directive 97/11 qui rappelle, à son deuxième considérant, que, aux termes de l'article 130 R, paragraphe 2, du traité CE (devenu, après modification, article 174, paragraphe 2, CE), la politique de la Communauté dans le domaine de l'environnement est fondée sur les principes de précaution et d'action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement et sur le principe du "pollueur-payeur".
58 En établissant, à son article 9, l'obligation pour les États membres d'informer le public lorsqu'une décision d'octroi ou de refus est adoptée, la directive 85/337 modifiée a entendu associer le public concerné à une surveillance de la mise en œuvre de ces principes. Or, le fait que le public ait seulement connaissance du contenu d'un avis dont doit tenir compte l'organe compétent avant d'adopter sa décision ne permet pas de l'associer à une telle surveillance avec autant d'efficacité que lorsque l'information qui lui est transmise porte sur la décision définitive qui met fin à la procédure d'autorisation.
59 Dans la mesure où la législation nationale n'exige pas la publication de la décision d'octroi ou de refus de l'autorisation de réaliser le projet, l'article 9, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée n'a pas été correctement transposé.
60 Il s'ensuit que le deuxième grief soulevé par la Commission au soutien de son recours est fondé.
Sur le troisième grief tiré d'une infraction à l'article 3, paragraphe 1, de la directive 97/11
61 La Commission rappelle que le décret-loi royal 9/2000, adopté en vue de la transposition des modifications introduites dans la directive 85/337 par la directive 97/11 et entré en vigueur le 8 octobre 2000, contenait une disposition transitoire unique selon laquelle "le présent décret-loi royal ne s'applique pas aux projets privés pour lesquels la procédure d'autorisation administrative a débuté avant son entrée en vigueur. De même, il ne s'applique pas aux projets publics qui ont déjà fait l'objet d'une divulgation au public ni aux projets publics qui ne doivent faire l'objet d'une telle procédure et qui ont déjà été approuvés". La loi 6/2001, qui a abrogé ce décret-loi royal, contiendrait la même disposition. Elle serait entrée en vigueur le 10 mai 2001.
62 Or, selon la Commission, l'article 3, paragraphe 1, de la directive 97/11 imposerait aux États membres l'obligation d'adapter leur législation au plus tard le 14 mars 1999 et le paragraphe 2 de ce même article établirait que les dispositions de la directive 85/337, dans sa version initiale, sont applicables aux demandes d'autorisation introduites avant cette date. Dès lors, les dispositions de la directive 85/337 modifiée auraient été applicables à toutes les demandes d'autorisation introduites après 14 mars 1999, ce que ne prévoirait pas la réglementation espagnole.
63 Le gouvernement espagnol invoque les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime pour justifier la mesure en cause. En effet, une modification de la réglementation qui était applicable au moment de l'introduction d'une demande d'autorisation, si elle impose de nouvelles conditions, comporterait une violation de ces deux principes au préjudice de ceux qui ont constitué un dossier conformément à la réglementation antérieure.
64 Selon la Commission, ces deux principes ne pourraient toutefois être invoqués pour justifier le fait que la nouvelle réglementation ne s'applique pas aux projets en cours d'autorisation ou d'examen. En effet, tant qu'aucune décision administrative n'a été adoptée concernant les projets présentés, les promoteurs n'auraient acquis aucun droit.
65 S'agissant de l'obligation de procéder à l'évaluation d'impact environnemental, la Cour a jugé, à plusieurs reprises, qu'elle s'applique à tous les projets concernés par la directive 85/337, dans sa version initiale, pour lesquels la demande d'autorisation a été introduite après la fin du délai de transposition. En ce sens, la Cour a estimé que ladite directive ne permet pas à un État membre, qui a transposé celle-ci dans son ordre juridique national postérieurement à la date d'expiration du délai de transposition, de dispenser, par une disposition transitoire, des obligations concernant l'évaluation des incidences sur l'environnement exigée par la directive les projets dont la procédure d'approbation avait été engagée avant l'entrée en vigueur de la loi nationale de transposition, mais après la date limite fixée pour la transposition (voir, notamment, arrêts du 9 août 1994, Bund Naturschutz in Bayern e.a., C-396/92, Rec. p. I-3717, point 20; du 22 octobre 1998, Commission/Allemagne, C-301/95, Rec. p. I-6135, point 29, et du 21 janvier 1999, Commission/Portugal, C-150/97, Rec. p. I-259, point 23).
66 Comme le souligne à juste titre la Commission, cette jurisprudence est valable, mutatis mutandis, pour interpréter le régime transitoire établi par l'article 3 de la directive 97/11. Il s'ensuit qu'un État membre n'est pas autorisé, par l'adoption tardive des dispositions visant à la transposition des modifications introduites par la directive 97/11 dans la directive 85/337 dans sa version initiale, à reporter l'application desdites dispositions au-delà de la date fixée par la directive 97/11. Une interprétation opposée aboutirait à un report de la date limite et serait contraire aux obligations découlant de la directive 97/11 (voir, en ce sens, arrêt Bund Naturschutz in Bayern e.a., précité, points 19 et 20).
67 Le risque encouru, selon le gouvernement espagnol, par les particuliers qui ont introduit une demande d'autorisation avant le 8 octobre 2000, date d'entrée en vigueur du décret-loi royal 9/2000, d'être lésés dans leurs droits ne saurait dispenser cet État membre de prendre, conformément à l'objectif de la directive 97/11, les mesures utiles pour que, d'une part, les projets pour lesquels une évaluation est requise fassent l'objet d'une demande d'autorisation et que, d'autre part, à partir du 14 mars 1999, de nouvelles catégories de projets, ajoutées à l'annexe I de la directive 85/337 modifiée, soient soumises, en principe, à une évaluation systématique.
68 Par ailleurs, il y a lieu de relever que la demande de constatation de manquement, telle que formulée par la Commission, ne vise pas les demandes introduites auprès de l'autorité nationale compétente après le 14 mars 1999 et pour lesquelles une décision d'autorisation serait déjà intervenue.
69 Il convient donc de considérer également le troisième grief comme fondé.
Sur le quatrième grief tiré d'une transposition incorrecte des dispositions combinées du point 10, sous b,) de l'annexe II ainsi que des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée
70 La Commission constate que la loi 6/2001 prévoit, au groupe 7, sous b), de son annexe II, l'évaluation d'impact environnemental uniquement pour les projets d'aménagement urbain et de construction de complexes hôteliers situés en dehors des zones urbaines ainsi que pour les constructions liées, y compris la construction de centres commerciaux et de parkings (projets ne figurant pas à l'annexe I de la loi 6/2001).
71 Par conséquent, selon la Commission, seraient exclus de la procédure prévue pour les projets visés à l'annexe II de la directive 85/337 modifiée de tels projets d'aménagement lorsqu'ils sont situés en zone urbaine. Cette situation, découlant de la législation nationale, ne serait pas corrigée, sauf dans de rares exceptions, par la législation régionale en matière d'urbanisme, complétée par la législation régionale en matière d'évaluation des incidences. En effet, ces dernières n'imposeraient pas non plus une évaluation de l'impact environnemental en ce qui concerne les instruments de planification urbanistique.
72 Le gouvernement espagnol soutient que la directive 85/337 modifiée permet aux États membres de décider que certains projets énumérés à son annexe II ne feront pas l'objet d'une évaluation des incidences sur l'environnement.
73 Selon ledit gouvernement, ce serait en usant de cette faculté que la législation espagnole soumettrait tous les projets d'aménagement urbain et de constructions de complexes hôteliers hors des zones urbaines ainsi que les constructions qui s'y rattachent, y compris la construction de centres commerciaux et de parkings, à l'obligation de fournir une déclaration d'incidence sur l'environnement dès lors qu'ils se trouvent dans des zones spécialement sensibles.
74 Le gouvernement espagnol ajoute que, de cette manière, les seuls projets d'urbanisation qui ne sont pas soumis à une déclaration d'incidence sur l'environnement sont ceux qui visent des zones urbaines dans lesquelles les incidences sur celui-ci sont pratiquement nulles puisqu'il s'agit de terrains compris dans une zone urbaine.
75 Ce gouvernement estime que, partant, il n'a pas excédé les pouvoirs d'appréciation qui lui sont confiés en vertu des articles 2 et 4 de la directive 85/337 modifiée.
76 Certes, la Cour a déjà souligné, à cet égard, que les États membres ont la possibilité de fixer les critères et/ou les seuils permettant de déterminer quels projets relevant de l'annexe II de la directive 85/337, dans sa version initiale, doivent faire l'objet d'une évaluation (arrêt du 24 octobre 1996, Kraaijeveld e.a., C-72/95, Rec. p. I-5403, points 49 à 53). Toutefois, dans la fixation de ces seuils et/ou critères, les États membres doivent tenir compte non seulement de la dimension des projets, mais aussi de leur nature et de leur localisation (voir, en ce sens, arrêts du 21 septembre 1999, Commission/Irlande, C-392/96, Rec. p. I-5901, points 65 à 67, et du 13 juin 2002, Commission/Espagne, C-474/99, Rec. p. I-5293, point 31).
77 Or, en limitant l'évaluation de l'impact environnemental des projets d'urbanisation aux seuls projets situés sur des sols non urbains, le gouvernement espagnol se limite à appliquer le critère de la localisation, qui n'est que l'un des trois critères énoncés à l'article 2, paragraphe 1, de la directive 85/337 modifiée, sans tenir compte des deux autres critères, à savoir la nature et les dimensions du projet.
78 En outre, dans la mesure où elle prévoit l'évaluation de l'impact environnemental uniquement pour les projets de travaux d'aménagement urbain en dehors des zones urbaines, la législation espagnole fait une application incomplète du critère de la localisation.
79 En effet, les zones à forte densité de population, ainsi que les paysages importants des points de vue historique, culturel et archéologique, repris au point 2, sous g) et h) de l'annexe III, de la directive 85/337 modifiée, figurent parmi les critères de sélection dont les États membres doivent tenir compte, conformément à l'article 4, paragraphe 3, de ladite directive, pour l'examen cas par cas ou la fixation des seuils ou des critères prévus au paragraphe 2 de cet article afin de déterminer si un projet doit être soumis à une évaluation. Or, ainsi que le souligne à juste titre la Commission, ces critères de sélection concernent, le plus souvent, des zones urbaines.
80 La thèse soutenue par le gouvernement espagnol selon laquelle, dans les zones urbaines, l'impact environnemental des projets d'urbanisation serait pratiquement inexistant ne saurait non plus être accueillie au vu de la liste des facteurs pouvant être affectés directement ou indirectement par les projets visés par la directive 85/337 modifiée.
81 En effet, ces facteurs, énumérés à l'article 3 de la directive 85/337 modifiée, se retrouvent tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des zones urbaines et les probabilités qu'ils soient affectés par l'un des projets susmentionnés ne varient pas nécessairement en fonction de la situation de ces zones. En tout état de cause, ni les considérants ni les dispositions de la directive 85/337 modifiée ne confortent l'interprétation selon laquelle tous les projets concernant des travaux d'aménagement urbain dans des zones urbaines ne seraient pas susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement au sens de l'article 1er, paragraphe 1, de cette directive et pourraient dès lors être exclus de la procédure de demande d'autorisation et d'évaluation en ce qui concerne leurs incidences.
82 Dans ces conditions, le quatrième grief soulevé par la Commission doit être accueilli.
Sur le cinquième grief tiré d'une absence d'évaluation de l'impact environnemental du projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna
83 La Commission fait valoir sur ce point que le gouvernement espagnol a fait une application incorrecte des dispositions combinées des articles 2, paragraphe 1, 3 et 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée, du point 10, sous b), de l'annexe II ainsi que des articles 8 et 9 de cette directive, dès lors qu'il n'a adopté aucune mesure visant à vérifier si le projet de centre de loisirs situé à Paterna pouvait avoir des répercussions notables sur l'environnement, notamment en raison de sa nature, de ses dimensions ou de sa localisation.
84 Selon la Commission, cette constatation ne pourrait être remise en cause par le fait que ledit projet aurait été présenté comme le deuxième plus grand complexe cinématographique d'Europe, qu'il serait situé en zone urbaine, à côté d'urbanisations existantes et à proximité de zones de développement urbain, et pour lequel l'affluence hebdomadaire prévue serait de 60 000 personnes.
85 Le gouvernement espagnol justifie l'absence d'évaluation des incidences sur l'environnement de ce projet en soutenant que le centre en cause sera construit sur un sol urbain, c'est-à-dire sur des terrains totalement transformés soit parce qu'ils comportent au moins un accès routier, une distribution d'eau, une évacuation des eaux usées et l'alimentation en électricité, soit parce qu'ils sont consolidés par une construction qui répond aux conditions de forme et aux caractéristiques établies par la réglementation urbanistique applicable, ou bien parce qu'ils ont été urbanisés conformément à cette réglementation. S'agissant d'un projet qui aurait vocation à être exécuté sur un terrain complètement transformé, les incidences sur l'environnement ne pourraient pas être importantes.
86 Le manquement reproché par la Commission dans ce grief n'est que la conséquence de l'application à un cas particulier de la législation qui a déjà été considérée comme contraire au droit communautaire lors de l'examen du quatrième grief. En effet, l'application de la législation nationale, qui exclut de la soumission à la procédure de demande d'autorisation et de l'évaluation d'impact environnemental les projets de travaux d'aménagement urbain dans des zones urbaines, a eu comme résultat l'exonération de telles obligations en ce qui concerne le projet de construction du centre de loisirs en cause.
87 Or, d'une part, au vu des dimensions, de la nature et de la localisation de ce projet, il ne peut être exclu, d'emblée, qu'il soit susceptible d'avoir des répercussions importantes sur l'environnement. D'autre part, tel que cela a été démontré lors de l'examen du quatrième grief, la législation espagnole en matière d'environnement, appliquée au projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna, n'est pas conforme à la directive 85/337 modifiée, dans la mesure où les autorités compétentes ne sont pas obligées de déterminer si la réalisation de projets d'aménagement urbain, y compris la construction de centres commerciaux et de parkings dans des zones urbaines, risque de provoquer des effets notables sur l'environnement et, dans l'affirmative, de soumettre ces projets à une évaluation d'impact environnemental.
88 Il convient donc de considérer le cinquième grief comme fondé.
89 Au vu de l'ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que:
- en ayant transposé de manière incomplète l'article 3 de la directive 85/337 modifiée;
- en n'ayant pas transposé l'article 9, paragraphe l, de la directive 85/337 modifiée;
- en n'ayant pas respecté le régime transitoire prévu à l'article 3 de la directive 97/11;
- en n'ayant pas transposé correctement les dispositions combinées du point 10, sous b), de l'annexe II ainsi que des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de la directive 85/337 modifiée, et
- en n'ayant pas soumis à la procédure d'évaluation des incidences sur l'environnement le projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna et, par conséquent, en n'ayant pas appliqué les dispositions des articles 2, paragraphe 1, 3, 4, paragraphe 2, 8 et 9 de la directive 85/337 modifiée,
le Royaume d'Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces directives.
Sur les dépens
90 En vertu de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation du Royaume d'Espagne et ce dernier ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) déclare et arrête:
1) En ayant transposé de manière incomplète l'article 3 de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, telle que modifiée par la directive 97/11/CE du Conseil, du 3 mars 1997, en n'ayant pas transposé l'article 9, paragraphe l, de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 97/11, en n'ayant pas respecté le régime transitoire prévu à l'article 3 de la directive 97/11, en n'ayant pas transposé correctement les dispositions combinées du point 10, sous b), de l'annexe II ainsi que des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 97/11, et en n'ayant pas soumis à la procédure d'évaluation des incidences sur l'environnement le projet de construction d'un centre de loisirs à Paterna et, par conséquent, en n'ayant pas appliqué les dispositions des articles 2, paragraphe 1, 3, 4, paragraphe 2, 8 et 9 de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 97/11, le Royaume d'Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces directives.
2) Le Royaume d'Espagne est condamné aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure: l'espagnol.