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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Pudans (Order) French Text [2016] EUECJ C-462/15_CO (28 April 2016) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/C46215_CO.html Cite as: [2016] EUECJ C-462/15_CO, EU:C:2016:317, ECLI:EU:C:2016:317 |
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ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)
28 avril 2016 (*)
« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Politique agricole commune – Règlement (CE) n° 73/2009 – Régimes de soutien direct – Article 29, paragraphe 1 – Obligation de procéder aux paiements intégralement aux bénéficiaires – Impôt sur le revenu »
Dans l’affaire C‑462/15,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie), par décision du 18 août 2015, parvenue à la Cour le 31 août 2015, dans la procédure
Verners Pudāns
contre
Valsts ieņēmumu dienests,
LA COUR (sixième chambre),
composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. J.‑C. Bonichot et E. Regan (rapporteur), juges,
avocat général : Mme J. Kokott,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour le gouvernement letton, par M. I. Kalniņš et Mme G. Bambāne, en qualité d’agents,
– pour l’Irlande, par Mmes J. Quaney et E. Creedon ainsi que par M. T. Joyce, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement espagnol, par M. A. Gavela Llopis, en qualité d’agent,
– pour le gouvernement finlandais, par M. S. Hartikainen, en qualité d’agent,
– pour le gouvernement suédois, par Mmes A. Falk, C. Meyer-Seitz, U. Persson, N. Otte Widgren et MM. E. Karlsson et L. Swedenborg, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par MM. G. von Rintelen et A. Sauka, en qualité d’agents,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 29, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) n° 1290/2005, (CE) n° 247/2006 et (CE) n° 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) n° 1782/2003 (JO 2009, L 30, p. 16).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Verners Pudāns au Valsts ieņēmumu dienests (Service national des impôts, Lettonie) (ci-après l’« administration fiscale ») au sujet de la taxation, au titre de l’impôt sur le revenu, de paiements reçus dans le cadre de régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs relevant de la politique agricole commune (PAC).
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 Aux termes des considérants 24 et 25 du règlement n° 73/2009 :
« (24) Il convient que les autorités nationales compétentes effectuent en faveur des bénéficiaires l’intégralité des paiements prévus au titre des régimes de soutien communautaires, sous réserve des réductions prévues par le présent règlement et dans des délais fixés. […]
(25) Les régimes de soutien relevant de la PAC fournissent une aide directe au revenu, notamment, en vue d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole. […] »
4 L’article 29 de ce règlement, intitulé « Paiement », dispose, à son paragraphe 1¸:
« Sauf disposition contraire du présent règlement, les paiements au titre des régimes de soutien énumérés à l’annexe I sont effectués intégralement aux bénéficiaires .»
5 L’annexe I dudit règlement comporte la liste des régimes de soutien.
Le droit letton
6 L’article 3, paragraphe 1, de la likums « Par iedzīvotāju ienākuma nodokli » (loi relative à l’impôt sur le revenu) prévoit que l’impôt grève le montant des revenus imposables du contribuable soumis à l’impôt national, perçus au cours de la période d’imposition, laquelle correspond à l’année civile.
7 L’article 7 de cette loi dispose que le revenu annuel du contribuable est constitué par la totalité de l’argent, des valeurs en nature et des services obtenus au cours de l’ensemble de la période d’imposition.
8 Selon l’article 8, paragraphe 3, point 21, de ladite loi, les revenus non exonérés sont constitués des revenus divers d’une personne physique, qui doivent donner lieu au paiement de l’impôt.
9 Dans sa version applicable aux revenus perçus au cours des années 2011 et 2012, l’article 9 de la loi relative à l’impôt sur le revenu ne prévoyait pas d’exonération des aides versées au titre de la PAC.
Le litige au principal et la question préjudicielle
10 À la suite d’un contrôle, l’administration fiscale a adopté à l’égard de M. Pudāns une décision par laquelle elle a infligé à l’intéressé une majoration de l’impôt sur le revenu, en raison d’aides qui lui avaient été versées par le Lauku atbalsta dienests (service de soutien au monde rural, Lettonie) au cours des années 2011 et 2012, au titre de la PAC (ci-après la « décision litigieuse »).
11 Saisi par M. Pudāns d’un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse ainsi que d’une demande d’indemnisation du préjudice subi, l’administratīvā rajona tiesa (tribunal administratif de district, Lettonie) a annulé, par un jugement du 6 mai 2015, ladite décision, au motif que l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009 exigeait le paiement intégral des aides en cause. Ce recours a été rejeté pour le surplus.
12 Tant l’administration fiscale que M. Pudāns ont interjeté appel de ce jugement. M. Pudāns a présenté, dans ce cadre, une demande de suspension de l’exécution de la décision litigieuse.
13 Par une ordonnance du 19 juin 2015, l’Administratīvā apgabaltiesa (Cour administrative régionale, Lettonie) a rejeté cette dernière demande, au motif que l’administration fiscale avait conclu à juste titre à l’applicabilité du principe général de taxation.
14 Saisie par M. Pudāns d’un recours contre cette ordonnance, l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie) se demande si la réglementation nationale en cause au principal est conforme à l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009. En effet, aucune des dispositions de ce règlement ne prévoirait que les aides versées dans le cadre de la PAC puissent faire l’objet de retenues fiscales aboutissant à une réduction du montant de ces aides. Or, en l’occurrence, il découlerait de l’article 8, paragraphe 3, point 21, de la loi relative à l’impôt sur le revenu que les aides en cause doivent être considérées comme étant soumises à l’impôt sur le revenu. Toutefois, en raison du paiement de cet impôt, le bénéficiaire de ces aides ne disposerait plus de l’intégralité des sommes reçues.
15 À cet égard, la juridiction de renvoi relève que, dans l’arrêt du 5 octobre 2006, Commission/Portugal (C‑84/04, EU:C:2006:640), la Cour, dans le contexte de la réglementation de l’Union relative aux Fonds structurels, a jugé que l’obligation d’effectuer les paiements aux bénéficiaires finals sans aucune déduction ni retenue s’étend à toutes les charges ayant un rapport direct et intrinsèque avec les sommes versées.
16 Dans ces conditions, l’Augstākā tiesa (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante¸:
« L’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009 doit-il être interprété en ce sens qu’il permet, en principe, à un État membre de soumettre à l’impôt sur le revenu les paiements effectués au titre des régimes de soutien énumérés à l’annexe I de ce règlement¸? »
Sur la question préjudicielle
17 Par sa question, la juridiction de renvoi demande si l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui soumet à l’impôt sur le revenu les paiements effectués au titre des régimes de soutien énumérés à l’annexe I de ce règlement.
18 En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.
19 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire. En effet, la réponse à la question posée par la juridiction de renvoi peut être clairement déduite de la jurisprudence de la Cour, notamment des arrêts du 7 octobre 2004, Suède/Commission (C‑312/02, EU:C:2004:594), du 5 octobre 2006, Commission/Portugal (C‑84/04, EU:C:2006:640), et du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova (C‑427/05, EU:C:2007:630).
20 Selon cette jurisprudence, les États membres doivent exercer leur compétence en matière de fiscalité directe dans le respect du droit de l’Union. En particulier, en l’occurrence, la réglementation nationale en cause au principal ne doit pas entraver le fonctionnement du mécanisme institué par le règlement n° 73/2009 dans le cadre de la PAC (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 10 et jurisprudence citée).
21 S’il ressort sans équivoque du libellé de l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009 que cette disposition, comme l’indique également le considérant 24 de ce règlement, interdit tout prélèvement sur les aides communautaires allouées dans le cadre de la PAC, sous réserve des seules réductions prévues par ledit règlement, ce même libellé n’exclut pas, cependant, que le revenu dont font partie lesdites aides puisse faire l’objet d’une imposition par les États membres (voir, par analogie, arrêt du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 12).
22 À cet égard, il y a lieu de relever que la Cour s’est déjà prononcée sur la portée de dispositions relatives au Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), qui, à l’instar de l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009, exigent le paiement intégral des aides communautaires à leurs bénéficiaires.
23 En particulier, la Cour a eu l’occasion d’interpréter, en ce qui concerne la section « Orientation » du FEOGA, l’article 21, paragraphe 3, second alinéa, du règlement (CEE) n° 4253/88 du Conseil, du 19 décembre 1988, portant dispositions d’application du règlement (CEE) n° 2052/88 en ce qui concerne la coordination entre les interventions des différents Fonds structurels, d’une part, et entre celles-ci et celles de la Banque européenne d’investissement et des autres instruments financiers existants, d’autre part (JO 1988, L 374, p. 1), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 2082/93 du Conseil, du 20 juillet 1993 (JO 1993, L 193, p. 20), ainsi que, concernant la section « Garantie » du FEOGA, l’article 15, paragraphe 3, du règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil, du 30 juin 1992, instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables (JO 1992, L 181, p. 12), et l’article 30 bis du règlement (CEE) n° 805/68 du Conseil, du 27 juin 1968, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine (JO 1968, L 148, p. 24), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 2066/92 du Conseil, du 30 juin 1992 (JO 1992, L 215, p. 49).
24 À cet égard, la Cour a jugé que l’interdiction des déductions visée à ces dispositions s’étend à toutes les charges ayant un rapport direct et intrinsèque avec les sommes versées (arrêts du 7 octobre 2004, Suède/Commission, C‑312/02, EU:C:2004:594, point 22; du 5 octobre 2006, Commission/Portugal, C‑84/04, EU:C:2006:640, point 35, et du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 13).
25 Par conséquent, afin de déterminer si l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009 s’oppose à une réglementation telle que celle en cause au principal, il convient d’examiner si l’impôt sur le revenu prévu par celle-ci présente un lien direct et intrinsèque avec le versement des aides octroyées aux agriculteurs dans le cadre de la PAC (voir, par analogie, arrêt du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 14).
26 En l’espèce, il apparaît que le montant des aides communautaires reçues par le requérant au principal constitue un élément d’actif de l’exploitation de celui-ci qui, cumulé éventuellement avec d’autres revenus, est pris en compte dans le calcul de l’assiette de l’impôt sur le revenu, soumettant ainsi ce montant au régime d’imposition général institué par la réglementation nationale en cause au principal, au même titre que l’ensemble des autres revenus dudit requérant (voir, par analogie, arrêt du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 15).
27 Or, il y a lieu de constater qu’une telle imposition est indépendante de l’existence du montant des aides communautaires versé au requérant au principal. En effet, une telle imposition ne correspond pas à un prélèvement spécifiquement lié aux aides dont a bénéficié l’intéressé dans le cadre de la PAC, mais elle s’applique indistinctement à l’ensemble des revenus de ce dernier (voir, par analogie, arrêt du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 16).
28 Par conséquent, le prélèvement fiscal en cause au principal n’a pas un rapport direct et intrinsèque avec les sommes versées à leur bénéficiaire dans le cadre de cette politique (voir, par analogie, arrêt du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 17).
29 Il s’ensuit que, ainsi que l’on fait valoir tant les États membres ayant déposé des observations écrites que la Commission européenne, une telle imposition, bien qu’ayant pour effet de réduire le montant des aides communautaires perçu par le requérant au principal, n’entrave pas l’application effective du mécanisme institué par le règlement n° 73/2009 et, partant, celui-ci ne s’oppose pas à un tel prélèvement (voir, par analogie, arrêt du 25 octobre 2007, Porto Antico di Genova, C‑427/05, EU:C:2007:630, point 18).
30 Cette interprétation n’est en rien de nature à porter atteinte à l’objectif poursuivi par le règlement n° 73/2009, qui consiste, ainsi qu’il ressort du considérant 25 de ce dernier, à fournir aux agriculteurs une aide directe au revenu, notamment, en vue de leur assurer un niveau de vie équitable. En effet, un tel objectif demeure atteint, même si une partie du revenu de ceux-ci est prélevée au titre de l’impôt sur le revenu, la PAC ne visant pas à soustraire les agriculteurs aux effets d’une politique nationale des revenus (arrêts du 10 mars 1981, Irish Creamery Milk Suppliers Association e.a., 36/80 et 71/80, EU:C:1981:62, point 13, ainsi que du 26 octobre 1983, De samvirkende danske Landboforeninger, 297/82, EU:C:1983:298, point 8).
31 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 73/2009 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui soumet à l’impôt sur le revenu les paiements effectués au titre des régimes de soutien énumérés à l’annexe I de ce règlement.
Sur les dépens
32 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit¸:
L’article 29, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) n° 1290/2005, (CE) n° 247/2006 et (CE) n° 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) n° 1782/2003, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui soumet à l’impôt sur le revenu les paiements effectués au titre des régimes de soutien énumérés à l’annexe I de ce règlement.
Signatures
* Langue de procédure : le letton.
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