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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Biernacka-Hoba v EUIPO - Formata Bogusław Hoba (Formata) (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-23/16 (08 March 2017) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T2316.html Cite as: ECLI:EU:T:2017:149, EU:T:2017:149, [2017] EUECJ T-23/16 |
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Édition provisoire
DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)
8 mars 2017 (*)
« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative Formata – Motif absolu de nullité – Absence de mauvaise foi – Article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Motif relatif de nullité – Risque de confusion – Article 53, paragraphe 1, sous a), et article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009 »
Dans l’affaire T‑23/16,
Ilona Biernacka-Hoba, demeurant à Aleksandrów Łódzki (Pologne), représentée par Me R. Rumpel, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folliard-Monguiral et Mme K. Zajfert, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été
Formata Bogusław Hoba, résidant à Aleksandrów Łódzki,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 4 novembre 2015 (affaire R 102/2015‑2), relative à une procédure de nullité entre Mme Biernacka-Hoba et Formata Bogusław Hoba,
LE TRIBUNAL (première chambre),
composé de Mme I. Pelikánová (rapporteur), président, MM. V. Valančius et U. Öberg, juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 25 janvier 2016,
vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 2 mai 2016,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 30 janvier 2013, Formata Bogusław Hoba a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :
3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Chaussettes ; collants ; bas ; serre-pantalons ».
4 La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 56/2013, du 21 mars 2013, et la marque a été enregistrée le 27 mars 2014.
5 Le 11 juillet 2014, la requérante, Mme Ilona Biernacka-Hoba, a présenté une demande de nullité de la marque susvisée, pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus. D’une part, cette demande était fondée, sur la cause de nullité absolue visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, tirée de la mauvaise foi du demandeur lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée. D’autre part, la requérante invoquait la cause de nullité relative visée à l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), et l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009, tiré de l’existence d’un risque de confusion avec une marque antérieure.
6 Au titre de la cause de nullité relative, la requérante invoquait, notamment, l’enregistrement international n° 825663, représenté ci-après, désignant, notamment, la Slovaquie, enregistré le 10 mai 2004 au nom de Przedsiębiorstwo Produkcyjno Handlowo Usługowe Formata II, Ilona Biernacka-Hoba désignant des produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Vêtements ; chaussettes ; bas ; collants »
7 Le 12 novembre 2014, la division d’annulation a rejeté la demande de nullité, motif pris, en substance, de ce que la requérante n’avait produit aucun élément de preuve attestant de la réunion des conditions d’application des causes de nullité absolue et relative invoquées par elle.
8 Le 12 janvier 2015, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.
9 S’agissant, en particulier, des circonstances établissant la mauvaise foi, la requérante a fait valoir, dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours, premièrement, qu’une intention malhonnête était prouvée par le fait que l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO et elle-même étaient mariés et qu’ils avaient ensemble déposé une marque polonaise antérieure, identique à la marque contestée, venue à échéance en 2011 et non renouvelée, sous le nom de « Przedsiębiorstwo Produkcyjno Handlowo Usługowe Formata II, Ilona Biernacka-Hoba ». Elle a ajouté que, la demande d’enregistrement de la marque contestée ayant été déposée après leur divorce, mais avant la répartition de leur patrimoine conjugal, les droits de la marque contestée ne sauraient appartenir uniquement à l’autre partie. Deuxièmement, la requérante faisait valoir, devant la chambre de recours, que le fait qu’un ancien époux demandait l’enregistrement d’une marque identique à une marque dont il était déjà le titulaire avec celle qui était à l’époque son épouse était contraire à une « norme objective ».
10 Par décision du 4 novembre 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours et condamné la requérante à supporter les frais exposés par l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, pour un montant de 1 000 euros. En particulier, elle a considéré, d’une part, que la cause de nullité absolue invoqué ne s’appliquait pas en raison de l’absence de tout élément de preuve de la mauvaise foi du titulaire de la marque contestée et, d’autre part, que le recours, en tant qu’il était fondé sur la cause de nullité relative avancé était irrecevable, dans la mesure où la requérante n’était pas titulaire de la marque antérieure, cette dernière étant enregistrée au nom d’une personne morale.
Conclusions des parties
11 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– réformer la décision attaquée en annulant la marque contestée ;
– réformer la décision attaquée en ce qui concerne les dépens ;
– condamner l’EUIPO aux dépens.
12 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
Sur la demande d’annulation de la décision attaquée
13 Au soutien de ses conclusions, la requérante invoque quatre moyens, dont le premier et le deuxième concernent la cause de nullité relative, le troisième la cause de nullité absolue et le quatrième, la décision de la chambre de recours sur les dépens.
Sur la cause de nullité relative, tirée d’un risque de confusion avec la marque antérieure
14 Aux termes de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, une marque de l’Union européenne est déclarée nulle sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, lorsqu’il existe une marque antérieure visée à l’article 8, paragraphe 2, et que les conditions énoncées, notamment, au paragraphe 1 dudit article sont remplies.
15 L’article 8, paragraphe 1, prévoit, notamment, que, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, une marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou les services pour lesquels la marque a été demandée sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée.
16 Il ressort de l’article 56, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, qui renvoie à l’article 41, paragraphe 1, du même règlement, qu’une demande en nullité peut être présentée par le titulaire d’une marque antérieure visée à l’article 8, paragraphe 2, dudit règlement, ainsi que par les licenciés habilités par les titulaires d’une telle marque.
17 En outre, conformément à la règle 37, sous b), ii), du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1), une demande de nullité présentée en vertu de l’article 53, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 contient, notamment, des précisions sur le droit sur lequel est fondée la demande en nullité, ainsi que, le cas échéant, des éléments démontrant que le demandeur est habilité à invoquer le droit antérieur comme cause de nullité.
18 La marque invoquée par la requérante, en tant qu’enregistrement international ayant effet en Slovaquie, est une marque antérieure, au sens de l’article 8, paragraphe 2, sous iii), du règlement n° 207/2009. Les parties s’opposent toutefois sur la question de savoir si la requérante s’est conformée à la règle 37, sous b), ii), du règlement n° 2868/95 et, plus précisément, à l’exigence de présenter des éléments démontrant qu’elle était titulaire de la marque antérieure ou habilitée à l’invoquer.
– Sur le premier moyen
19 Dans le cadre de son premier moyen, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir supposé à tort que le titulaire de la marque antérieure était une personne morale. En réalité, la requérante exercerait simplement une activité économique sous un nom commercial qui contient les éléments indiquant l’objet de ladite activité, conformément à l’article 43[4], paragraphe 4, du code civil polonais. La requérante souligne que, en vertu de cette disposition, le nom commercial d’une personne physique agissant en tant qu’entrepreneur individuel doit être constitué par son prénom et son nom de famille, auxquels peuvent être ajoutés, notamment, des termes indiquant l’objet de l’activité économique et des termes librement choisis. Selon la requérante, il y a donc identité entre elle et le titulaire de la marque antérieure, qui n’est nullement une personne morale.
20 L’EUIPO fait valoir que les dispositions du code civil polonais relatives aux entrepreneurs et aux noms commerciaux constituent de nouveaux éléments de preuve, présentés pour la première fois devant le Tribunal et réputés irrecevables en application de l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal. L’EUIPO estime, par ailleurs, ne pas être tenu d’office de connaître le droit national, au-delà du seul domaine de la protection de la propriété intellectuelle. Selon lui, il appartenait donc à la requérante de lui présenter les dispositions relatives au caractère légal de l’activité commerciale poursuivie par le titulaire de la marque antérieure et définissant le statut juridique de ce dernier. Enfin, l’EUIPO considère que les dispositions citées par la requérante ne prouvent pas que celle-ci avait démontré être habilitée à se prévaloir de l’enregistrement de la marque antérieure.
21 La chambre de recours a considéré que le certificat de renouvellement de la marque antérieure, présenté par la requérante devant elle et indiquant comme titulaire « Przedsiębiorstwo Produkcyjno Handlowo Usługowe Formata II, Ilona Biernacka-Hoba » (entreprise de production, de commerce et de services Formata II, Ilona Biernacka-Hoba), désignait une personne morale et ne prouvait donc pas que la requérante, en tant que personne physique, était le titulaire de la marque, ni qu’elle était le licencié habilité par le titulaire à invoquer ladite marque.
22 À cet égard, il est vrai, d’une part, que la désignation du titulaire de la marque antérieure contient, outre les prénom et nom de famille de la requérante, d’autres indications qui pouvaient, à première vue, faire douter l’EUIPO de l’identité entre cette dernière et le titulaire. Ainsi, le fait que ladite désignation mettait en avant les termes « entreprise de production, de commerce et de services Formata II » et que le nom de la requérante n’était mentionné qu’en deuxième lieu pouvait faire penser que le titulaire était une entité différente de la requérante.
23 Toutefois, d’autre part, la dénomination des personnes morales comporte, dans la plupart des États membres de l’Union, la mention de leur forme juridique, afin que le public soit informé, notamment, de la personne responsable des engagements, financiers et autres, pris par la société en cause, ainsi que du patrimoine garantissant ces engagements. Le fait que la désignation du titulaire de la marque antérieure, dans le certificat de renouvellement présenté par la requérante, ne mentionnait pas une telle forme juridique était donc, à tout le moins, de nature à faire douter la chambre de recours qu’il s’agissait d’une personne morale. Il convient de souligner, en particulier, que l’emploi du terme « entreprise » ne permettait pas de considérer qu’il s’agissait nécessairement d’une personne morale, puisqu’une entreprise peut, selon le droit de tous les États membres de l’Union, également être exploitée par un commerçant individuel, ainsi que le souligne l’EUIPO.
24 En effet, il est courant qu’un entrepreneur individuel agisse sous une dénomination constituée par ses prénom et nom de famille, avec adjonction d’autres indications. En l’espèce, la marque contestée a été enregistrée au nom de Formata Bogusław Hoba. Cette désignation contient, outre le prénom et le nom de famille de l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, le terme « formata », dont les caractères majuscules le distinguent clairement du nom de la personne physique et qui sert donc, à l’instar des indications adjointes aux prénom et nom de la requérante dans le certificat de renouvellement, à indiquer que l’autre partie a enregistré la marque contestée en sa qualité d’entrepreneur individuel. Or, la présence de cette indication n’a pas conduit la chambre de recours à douter de la qualité de personne physique de l’autre partie à la procédure devant lui, ainsi qu’il découle du point 47 de la décision attaquée, où elle la désigne comme « M. Bogusław Hoba ».
25 À cela s’ajoute le fait que, à la lecture des écritures devant l’EUIPO, il apparaît clairement que la requérante affirmait être titulaire de la marque antérieure invoquée par elle ; en effet, dans l’alternative, elle n’aurait pas pu invoquer la cause de nullité relative, tirée de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009.
26 Dans ces circonstances, il convient de constater que la chambre de recours ne pouvait pas simplement conclure, ainsi qu’elle l’a pourtant expressément fait aux points 46 et 49 de la décision attaquée, que le titulaire de la marque antérieure était une société et qu’il ne pouvait donc y avoir identité entre le titulaire et la requérante. Au contraire, le fait que la désignation du titulaire ne mentionnait aucune forme juridique était plutôt de nature à indiquer qu’il ne s’agissait pas d’une société et, à tout le moins, aurait dû conduire la chambre de recours à demander des explications à la requérante, qui aurait notamment pu être invitée, conformément à la règle 39, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, à produire un document officiel attestant du fait qu’il y avait identité entre elle et l’entreprise Przedsiębiorstwo Produkcyjno Handlowo Usługowe Formata II, Ilona Biernacka-Hoba, titulaire de la marque antérieure.
27 Il y a lieu de souligner, à cet égard, qu’une telle démarche s’imposait à la suite d’un simple examen des pièces du dossier devant la chambre de recours et ne supposait donc nullement d’avoir connaissance des éléments de preuve relatifs au droit polonais, présentés pour la première fois par la requérante devant le Tribunal.
28 Par ailleurs, il convient de rejeter l’argument avancé par l’EUIPO, selon lequel, lorsqu’il existe des divergences entre la désignation du titulaire de la marque figurant le certificat d’enregistrement ou, comme en l’occurrence, le certificat de renouvellement et la désignation de la partie à la procédure, il appartient au demandeur d’expliquer cette divergence et d’apporter les pièces qui confirment qu’il s’agit, dans les faits, d’une même entité. L’EUIPO se réfère, à cet égard, à deux décisions des chambres de recours. Mis à part le fait que la pratique des chambres de recours ne lie pas le Tribunal, il y a lieu de relever que les deux décisions invoquées ne sont pas susceptibles de démontrer une pratique consistant à exiger que la partie concernée clarifie spontanément des divergences entre la désignation du titulaire d’une marque invoquée et celle d’une partie devant l’EUIPO. En effet, dans l’affaire ayant donné lieu à la décision du 8 juin 2011 dans l’affaire R 1093/2010‑1, la partie en cause avait produit, à la suite d’une invitation en ce sens par la chambre de recours, des pièces qui ont été jugées insuffisantes pour démontrer qu’elle était le titulaire indiqué dans le certificat d’enregistrement de la marque antérieure. Dans l’affaire ayant donné lieu à la décision du 17 juin 2015 dans l’affaire R 1880/2014‑4, la partie en cause avait soumis les pièces attestant qu’elle était la personne indiquée dans les certificats en réponse à une contestation de la part de l’autre partie à la procédure. Contrairement à ce que l’EUIPO laisse entendre au point 47 de la réponse, ces deux décisions font donc plutôt apparaître une pratique des chambres de recours, en cas de divergences entre la désignation du titulaire d’un droit invoqué et celle de la partie qui invoque ce droit, consistant à donner l’occasion à la partie concernée de produire des éléments supplémentaires. Or, à la différence des affaires invoquées par l’EUIPO, cela n’a pas été fait en l’espèce.
29 De même, est dénué de pertinence l’argument que l’EUIPO tire du fait que, selon les propres écritures de la requérante devant la division d’annulation, les parties étaient cotitulaires de la marque antérieure, fait dont il déduit que l’autre partie en détenait, dès lors, les droits, même si ce n’était pas en exclusivité, et qu’elle avait donc le droit d’enregistrer une marque internationale dont le titulaire était identique à celui de la marque polonaise venue à échéance n° 149731, identique à la marque contestée. En effet, premièrement, l’enregistrement contesté n’est pas une marque internationale, mais une marque de l’Union européenne que l’autre partie a fait enregistrer en son propre nom et non au nom du titulaire de la marque polonaise venue à échéance n° 149731, enregistrée au nom de Przedsiębiorstwo Produkcyjno Handlowo Usługowe Formata II, Ilona Biernacka-Hoba. Deuxièmement, la question de savoir si l’autre partie avait ou non le droit, en tant que cotitulaire d’une marque antérieure, d’enregistrer une marque internationale, ou la marque contestée, est dépourvue de pertinence dans le contexte de l’examen tant de la cause de nullité relative tirée de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009, en général, que de la question de savoir si le demandeur en nullité est identique au titulaire de la marque antérieure invoquée par lui, en particulier.
30 Il en découle que la chambre de recours, en concluant que la marque antérieure n’avait pas été déposée au nom de la requérante, sans inviter cette dernière à soumettre des observations ou des pièces à cet égard, a violé l’article 56, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, ainsi que la règle 39, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95.
31 Cette constatation justifie l’annulation de la décision attaquée, dans la mesure où elle rejette la demande de nullité fondée sur la cause de nullité relative, sans qu’il y ait lieu d’examiner la question de savoir si les éléments de preuve relatifs au droit polonais, présentés par la requérante pour la première fois devant le Tribunal, sont recevables ou non.
– Sur le deuxième moyen
32 Dans le cadre de son deuxième moyen, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir procédé à un examen quant au fond de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.
33 Puisque la chambre de recours a considéré que, à défaut pour la requérante d’être habilitée à se prévaloir de la marque antérieure, la demande en nullité était irrecevable en ce qui concerne la cause de nullité relative, tirée de l’article 53, paragraphe 1, sous a), en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009, elle n’a effectivement pas examiné le bien-fondé de cette cause.
34 La décision attaquée devant être annulée, sur le fondement du premier moyen, en substance, pour défaut d’examen suffisant des conditions de recevabilité de la cause de nullité relative, la chambre de recours devra procéder à un nouvel examen de ces conditions et, éventuellement, des conditions de fond de ladite cause. Dès lors, il n’y a pas lieu, dans le cadre de la présente affaire, de statuer sur le deuxième moyen.
Sur le troisième moyen, concernant la cause de nullité absolue, tiré de la mauvaise foi de l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO
35 Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la requérante n’avait pas démontré l’existence de la mauvaise foi de l’autre partie à la procédure.
36 Dans le cadre de son troisième moyen, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir tenu compte de ses arguments relatifs à la mauvaise foi de l’autre partie à la procédure, alors que cette dernière n’aurait pas nié l’existence des faits rapportés dans les écrits de la requérante.
37 L’EUIPO considère que cet argument est irrecevable, à défaut pour la requérante d’avoir indiqué en quoi la décision attaquée serait entachée d’une erreur de droit en ce qui concernait l’appréciation de la mauvaise foi de l’autre partie à la procédure.
38 À cet égard, il convient de relever qu’il ressort de la requête que la requérante fait en substance grief à la chambre de recours de ne pas avoir constaté de mauvaise foi de l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, alors même que les faits dont elle considérait qu’ils démontraient ladite mauvaise foi n’avaient pas été contestés par l’autre partie. Ce faisant, la requérante reproche en réalité à la chambre de recours une mauvaise application de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en ce qu’elle n’a pas reconnu les faits non contestés par l’autre partie ou n’en a pas tiré les conclusions juridiques qui s’imposaient, selon la requérante.
39 Dans ces circonstances, il convient de constater que la requérante a exposé à suffisance de droit en quoi, selon elle, la décision attaquée enfreignait le droit en ce qui concernait l’appréciation de la mauvaise foi de l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO. Par conséquent, le troisième moyen doit être déclaré recevable.
40 En ce qui concerne le bien-fondé du troisième moyen, il convient, tout d’abord, de rappeler que, aux termes de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la nullité de la marque de l’Union européenne est déclarée, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande de marque.
41 Il y a lieu de noter que la notion de mauvaise foi, visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, n’est ni définie, ni délimitée, ni même décrite d’une quelconque manière dans la législation [arrêt du 1er février 2012, Carrols/OHMI – Gambettola (Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL), T‑291/09, EU:T:2012:39, point 44].
42 Selon la jurisprudence, aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi du demandeur, au sens de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il convient de prendre en considération tous les facteurs pertinents propres au cas d’espèce et existant au moment du dépôt de la demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne et, notamment, le fait que le demandeur sait ou doit savoir qu’un tiers utilise, dans au moins un État membre, un signe identique ou similaire pour un produit identique ou similaire prêtant à confusion avec le signe dont l’enregistrement est demandé, l’intention du demandeur d’empêcher ce tiers de continuer à utiliser un tel signe ainsi que le degré de protection juridique dont jouissent le signe du tiers et le signe dont l’enregistrement est demandé (arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 53).
43 Cela étant, il ressort de la formulation retenue par la Cour, dans ledit arrêt, que les facteurs énumérés ne sont que des illustrations parmi un ensemble d’éléments susceptibles d’être pris en compte à l’effet de se prononcer sur l’éventuelle mauvaise foi d’un demandeur d’enregistrement au moment du dépôt de la demande de marque. À cet égard, il y a lieu de considérer que, dans le cadre de l’analyse globale opérée au titre de l’article 52, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, il peut également être tenu compte de la logique commerciale dans laquelle s’inscrit le dépôt de la demande d’enregistrement du signe en tant que marque de l’Union européenne, ainsi que de la chronologie des événements ayant caractérisé ledit dépôt [arrêt du 9 juillet 2015, CMT/OHMI – Camomilla (CAMOMILLA), T‑100/13, non publié, EU:T:2015:481, points 36 et 37].
44 En outre, la Cour a jugé que, aux fins d’apprécier l’existence de la mauvaise foi, il convient également de prendre en considération l’intention du demandeur au moment du dépôt de la demande d’enregistrement, élément subjectif qui doit être déterminé par référence aux circonstances objectives du cas d’espèce (arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, points 41 et 42).
45 Enfin, il convient de rappeler qu’il incombe au demandeur en nullité qui entend se fonder sur ce motif d’établir les circonstances qui permettent de conclure que le titulaire d’une marque de l’Union européenne était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de cette dernière, et que la bonne foi est présumée jusqu’à preuve du contraire [arrêt du 13 décembre 2012, pelicantravel.com/OHMI – Pelikan (Pelikan), T‑136/11, non publié, EU:T:2012:689, points 21 et 57].
46 En l’espèce, il incombait donc à la requérante d’exposer et d’établir devant l’EUIPO et devant le Tribunal l’ensemble des circonstances caractérisant la relation commerciale et patrimoniale entre elle et l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, afin de permettre à ce dernier et au Tribunal d’apprécier l’existence d’une mauvaise foi dans le chef de l’autre partie. Dès lors, eu égard à la jurisprudence citée au point 47 ci-dessus, il convient d’approuver la chambre de recours en ce qu’elle a souligné que le seul fait que l’autre partie se soit abstenue de prendre position lors de la procédure devant l’EUIPO, tant s’agissant de la demande en nullité que concernant les arguments spécifiques de la requérante, ne saurait engendrer une présomption de mauvaise foi.
47 En outre, eu égard aux éléments avancés par la requérante devant la chambre de recours, tels qu’énoncés au point 9 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la requérante n’avait pas établi de circonstances démontrant la mauvaise foi de l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO. En effet, même en admettant, malgré l’absence de tout élément de preuve à cet égard, que la requérante eût été mariée à l’autre partie, que les époux soient à présent divorcés, qu’ils aient été, sous la désignation indiquée par la requérante, titulaires d’une marque polonaise désormais expirée, identique à la marque contestée, et que l’enregistrement de la marque contestée ait été demandé après le divorce, mais avant la répartition de leur patrimoine conjugal, ces circonstances ne suffisent pas à démontrer la mauvaise foi de l’autre partie au moment du dépôt de la demande.
48 Ainsi, il ne saurait être exclu que, même dans de telles circonstances et, par exemple, lorsqu’il utilisait déjà seul le signe avant la date du mariage, ou s’il est le seul des ex-conjoints à avoir l’intention de poursuivre l’activité commerciale à laquelle le signe est lié, le titulaire de la marque contestée ait poursuivi, par l’enregistrement de ce signe, un objectif légitime.
49 Or, en l’espèce, tant devant l’EUIPO que devant le Tribunal, la requérante s’est abstenue de toute indication quant à la relation entre elle et l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, s’agissant de l’exercice de l’activité commerciale à laquelle la marque contestée est liée, tant avant qu’après le divorce allégué, et, en particulier, s’agissant des droits que les deux parties détenaient respectivement sur ladite activité commerciale. En l’absence de telles indications, et dans l’ignorance quant à l’éventuelle issue de la répartition des biens conjugaux, dans l’hypothèse où elle serait intervenue entre-temps, la chambre de recours n’était pas en mesure d’apprécier l’existence d’une mauvaise foi dans le chef de l’autre partie, ce qui l’a, à bon droit, conduit à rejeter la cause de nullité tiré de la mauvaise foi.
50 Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a rejeté le moyen de nullité tiré de la mauvaise foi de l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, au moment du dépôt de la demande d’enregistrement.
51 Il convient, dès lors, de rejeter le troisième moyen de la requérante, tiré, en substance, d’une mauvaise application de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.
Sur le quatrième moyen, relatif à la décision sur les dépens de la chambre de recours
52 Dans le cadre de son quatrième moyen, la requérante reproche à la chambre de recours de l’avoir erronément condamnée à payer un montant de 1 000 euros, au titre du remboursement des frais de procédure de l’autre partie à la procédure, alors que ladite partie n’a participé à la procédure à aucun stade.
53 L’EUIPO conteste ces arguments.
54 Il suffit d’observer, à cet égard, que, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, la décision attaquée devant être annulée sur le fondement du premier moyen, la décision sur les dépens s’en trouvera, nécessairement, également annulée. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de statuer sur le quatrième moyen, relatif à la décision de la chambre de recours concernant la charge et le montant des dépens.
55 Il découle de ce qui précède qu’il y a lieu de faire droit à la demande d’annulation de la décision attaquée, sur le fondement du premier moyen, dans la mesure où celle-ci a rejeté la demande de nullité fondée sur la cause de nullité relative tirée du risque de confusion avec la marque antérieure. En revanche, il y a lieu de rejeter la demande d’annulation dans la mesure où elle est dirigée contre le rejet de la demande de nullité fondée sur la cause de nullité absolue tirée de la mauvaise foi.
Sur la demande en réformation de la décision attaquée
56 Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de réformer la décision attaquée en annulant la marque contestée. L’EUIPO excipe de l’irrecevabilité de cette demande, en ce qu’elle impliquerait que le Tribunal, dans l’exercice de son pouvoir de réformation, procède à une appréciation d’éléments sur lesquels la chambre de recours n’a pas pris position.
57 En l’espèce, ainsi qu’il a été relevé au point 33 ci-dessus, la chambre de recours ne s’est en effet pas prononcée, dans la décision attaquée, sur le bien-fondé de la cause de nullité relative, puisqu’elle a rejeté un tel motif comme étant irrecevable.
58 Or, il convient de rappeler que le pouvoir de réformation reconnu au Tribunal n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de substituer sa propre appréciation à celle de la chambre de recours et, pas davantage, de procéder à une appréciation sur laquelle ladite chambre n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 72).
59 Par conséquent, il n’appartient pas au Tribunal d’examiner cette question, pour la première fois, dans le cadre de son contrôle de légalité de la décision attaquée. Il reviendra donc à la chambre de recours de se prononcer à cet égard, en motivant son appréciation, aux fins de la décision qu’il lui incombe de rendre sur le recours dont elle demeure saisie [voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2014, CEDC International/OHMI – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑235/12, EU:T:2014:1058, points 101 et 102 et jurisprudence citée].
Sur les dépens
60 Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie. En l’espèce, il convient de condamner l’EUIPO à supporter, outre ses propres dépens, la moitié de ceux de la requérante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (première chambre)
déclare et arrête :
1) La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 4 novembre 2015 (affaire R 102/2015‑2) est annulée, dans la mesure où la chambre de recours a rejeté la demande de nullité fondée sur la cause de nullité relative.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux exposés par Mme Ilona Biernacka-Hoba.
4) Mme Biernacka-Hoba supportera la moitié de ses propres dépens.
Pelikánová | Valančius | Öberg |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 mars 2017.
Signatures
* Langue de procédure : le polonais.
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