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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> AG v EUROPOL (Staff Regulations of officials and Conditions of Employment of other servants - Order) French Text [2019] EUECJ T-756/18_CO (17 December 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/T75618_CO.html Cite as: [2019] EUECJ T-756/18_CO, EU:T:2019:867, ECLI:EU:T:2019:867 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ORDONNANCE DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
17 décembre 2019 (*)
« Recours en annulation – Fonction publique – Décision (UE) 2015/1889 relative à la dissolution du fonds de pension Europol – Irrégularité de la procédure précontentieuse – Irrecevabilité »
Dans l’affaire T‑756/18,
AG, représenté par Me C. Abrar, avocate,
partie requérante,
contre
Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol), représentée par Mmes J. Teal et A. Ketels, en qualité d’agents, assistées de Mes D. Waelbroeck et A. Duron, avocats,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation de la décision implicite d’Europol portant rejet de sa réclamation du 2 juillet 2018 contre le refus implicite d’Europol d’adopter une décision motivée concernant les droits du requérant dans le fonds de pension provisoire indépendant institué par l’article 37 de l’annexe 6 du statut du personnel d’Europol,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre),
composé de MM. S. Gervasoni, président, Mme R. Frendo (rapporteure) et M. J. Martín y Pérez de Nanclares, juges,
greffier : M. E. Coulon,
rend la présente
Ordonnance
Antécédents du litige
1 L’Office européen de police, devenu l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol), a été initialement institué par l’acte du Conseil, du 26 juillet 1995, portant établissement de la convention sur la base de l’article K.3 [TUE] portant création d’un Office européen de police (convention Europol) (JO 1995, C 316, p. 1)
2 Le statut du personnel d’Europol a été adopté par l’Acte du Conseil du 3 décembre 1998 (JO 1999, C 26, p. 23, ci-après le « statut Europol ») en application de l’article 30, paragraphe 3, de la convention Europol.
3 L’article 72 du statut Europol prévoyait que, lors de la cessation de ses fonctions, l’agent qui avait accompli au moins dix années de service avait droit à une pension d’ancienneté. L’article 77 dudit statut disposait quant à lui que l’agent âgé de moins de 62 ans qui cessait définitivement ses fonctions pour une raison autre que le décès ou l’invalidité et qui ne pouvait bénéficier d’une pension d’ancienneté, étant donné qu’il n’avait pas accompli dix années de service auprès d’Europol, avait droit, lors de son départ, au versement d’une allocation de départ.
4 L’article 37 de l’annexe 6 du statut Europol a créé un fonds de pension provisoire indépendant (ci-après le « fonds de pension ») dans le but de financer et d’exécuter les paiements prévus par le régime de pension d’Europol. En vertu dudit article, la cotisation des employés, de 8,25 %, et celle de l’employeur, de 16,5 %, étaient versées tous les mois à ce fonds.
5 Le requérant, AG, a travaillé pour Europol du 1er janvier 2004 au 31 janvier 2007. Les cotisations au fonds de pension payées pour son compte au cours de cette période s’élevaient à 52 488,99 euros.
6 N’ayant pas acquis de droits à une pension d’ancienneté du fait qu’il avait travaillé moins de 10 ans pour Europol, le requérant a obtenu, au moment de la cessation de ses fonctions, une allocation de départ d’un montant de 35 662,18 euros, calculée sur la base de l’article 10 de l’annexe 6 du statut Europol.
7 La décision 2009/371/JAI du Conseil, du 6 avril 2009, portant création de l’Office européen de police (Europol) (JO 2009, L 121, p. 37) a remplacé la convention Europol et a transformé Europol en une agence de l’Union européenne.
8 Le 8 octobre 2015, le Conseil de l’Union européenne a adopté la décision (UE) 2015/1889 relative à la dissolution du fonds de pension (JO 2015, L 276, p. 60). Il ressort du préambule de cette décision que, à la suite de l’entrée en vigueur de la décision 2009/371, le statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») a graduellement remplacé le statut Europol. En conséquence, les cotisations versées au fonds de pension conformément à l'article 37 de l'annexe 6 du statut Europol ont progressivement diminué. Ces cotisations ont cessé lorsque le dernier contrat de travail auquel s'appliquait le statut Europol a expiré, le 31 décembre 2014.
9 Dans la mesure où les engagements du fonds de pension qui subsistaient étaient limités au paiement mensuel des pensions d'un nombre très réduit et en constante diminution de retraités et d’anciens membres du personnel et dans la mesure où les avoirs de ce fonds étaient supérieurs au capital nécessaire pour lui permettre de remplir ces engagements, il a été décidé, par souci de simplification, de dissoudre le fonds et de confier son activité résiduelle à Europol.
10 En vertu de l’article 3, deuxième et troisième alinéas, de la décision 2015/1889, le conseil d'administration du fonds de pension devait préparer un rapport dressant un état de clôture des avoirs et des dettes du fonds (ci-après le « rapport de clôture »). Ce rapport de clôture devait ensuite être transmis au conseil d'administration d'Europol et être audité par la Cour des comptes européenne.
11 Conformément à l’article 4, paragraphe 1, de la décision 2015/1889, la part des avoirs du fonds de pension correspondant au montant nécessaire pour honorer les engagements de retraite a été transférée à Europol.
12 Au vu de l’article 4, paragraphe 3, de ladite décision, la différence entre le total des avoirs du fonds de pension et le montant nécessaire pour honorer lesdits engagements a été répartie comme suit : deux tiers devaient être reversés à Europol, dont une partie devait être elle-même reversée aux États membres, et un tiers devait être distribué aux anciens participants actifs du fonds ou à leurs ayants droits au prorata du montant total de leurs cotisations à celui-ci. Selon le considérant 16 de la décision 2015/1889, cette redistribution était la solution qui se rapprochait le plus de l'objet du fonds de pension, à savoir fournir aux employés d'Europol ou à leurs ayants droit une source de revenus régulière lors de leur départ à la retraite, tout en limitant le coût des pensions du personnel pour le budget des États membres.
13 Le 1er décembre 2015, Europol a publié, sur son site Internet, une communication concernant la dissolution du fonds de pension et a invité les participants à ce dernier à lui communiquer les documents nécessaires au paiement de la somme qui leur était due. Cette communication contenait une référence à la décision 2015/1889 et exposait en substance la portée de son article 4. Il y était également précisé, d’une part, que la quote-part dans le fonds de pension revenant à chaque ancien participant ne pourrait être déterminée qu’après l’établissement du rapport de clôture et, d’autre part, que chacun recevrait, durant le quatrième trimestre de l’année 2016, un courrier lui indiquant notamment le montant à rembourser, la méthode de calcul utilisée, ainsi que ledit rapport.
14 En juin 2016, le rapport de clôture, intitulé « Dissolution du fonds de pension d’Europol », a été établi, puis publié sur le site Internet d’Europol. Il dressait un état définitif des avoirs restants et des dettes du fonds de pension. S’agissant de la différence entre le total des avoirs du fonds et le montant nécessaire pour honorer ses engagements, le rapport de clôture reproduisait notamment les dispositions de l’article 4, paragraphe 3, de la décision 2015/1889. Le rapport de clôture était enfin assorti d’une annexe où figuraient les montants devant être versés à chaque État membre et à chaque participant au fonds, ces derniers étant identifiés par leur numéro de personnel. Ainsi, la quote-part du requérant, de 1 847,17 euros, figurait dans ladite annexe au regard de son numéro personnel ES 0430.
15 Le 3 août 2017, Europol a informé le requérant par courrier électronique de ce qu’il avait droit à une quote-part des avoirs restants dans le fonds de pension à la suite de la dissolution de ce dernier et l’invitait à prendre contact. Ce courrier électronique comportait un lien vers la page du site Internet d’Europol contenant sa communication sur la dissolution du fonds de pension. À cette page avait été ajouté un lien intitulé « Dissolution du fonds de pension d’Europol » donnant accès au rapport de clôture et à son annexe au format PDF. Cette même page mentionnait également une adresse électronique qu’il convenait d’utiliser pour envoyer les documents nécessaires au paiement de la quote-part. Le requérant a répondu le jour même.
16 Après un échange de courriels, le requérant a envoyé à Europol un courrier électronique le 25 août 2017 dans lequel il indiquait qu’il était sur le point d’introduire une demande d’accès à des documents, afin d’obtenir la communication des éléments de la répartition des avoirs restants du fonds de pension. Comme alternative, il suggérait à Europol de lui faire savoir au moins dans quel délai son décompte individuel lui serait transmis.
17 Par courriel du 5 octobre 2017, le requérant a demandé à recevoir toute décision administrative adoptée en application de la décision 2015/1889. Il a réitéré cette demande le 16 octobre suivant.
18 Après avoir été informé que le paiement de sa quote-part des avoirs restants du fonds de pension interviendrait « lors du prochain tour », le requérant a de nouveau demandé, par courriel du 10 novembre 2017, à recevoir la décision le concernant mettant en œuvre la décision 2015/1889, « afin de comprendre la motivation à la base du calcul » de sa quote-part et, en particulier, pour comprendre « pourquoi la majeure partie des avoirs restants [devait] “être reversée aux États membres”, alors même que le seul objectif du fonds de pension était de garantir aux participants à ce dernier des prestations de pension et de sécurité sociale ».
19 Le 13 novembre 2017, Europol a répondu par courriel que toutes les informations étaient publiées sur son site Internet depuis octobre 2015 et a joint deux liens donnant accès à la décision 2015/1889 et au rapport de clôture.
20 Par courriel du 15 novembre 2017, le requérant a écrit à Europol que ces informations ne contenaient pas de « décision individuelle appliquant la décision [2015/1889] à [s]on cas » et qu’elles ne lui « permett[ai]ent pas non plus de vérifier la motivation à la base [du] calcul » de sa quote-part, alors qu’une décision faisant grief doit être motivée. Le requérant rappelait, à cet égard qu’il souhaitait « comprendre pourquoi la majeure partie des avoirs [du fonds de pension devait] être reversée aux États membres ». Il demandait aussi à connaître « le rapport entre [s]es cotisations [...] et la quote-part [qu’il était] censé recevoir ». Enfin, le requérant demandait une réponse dans un délai de deux semaines.
21 Le 12 décembre 2017, par courrier envoyé à l’adresse électronique « [email protected] », ainsi qu’à celles de trois agents, le requérant a envoyé une lettre ayant pour objet une « demande d’adoption d’une décision au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut ». Dans ce courrier, le requérant rappelait que ses demandes d’information étaient restées sans réponse. En conséquence, il sollicitait une décision appliquant la décision 2015/1889 à son cas particulier, ainsi que la motivation de cette décision ; cela, afin de comprendre comment sa quote-part dans le fonds de pension avait été calculée, en quoi cette quote-part correspondait à ses cotisations et à celles d’Europol en tant qu’employeur et comment pouvait être justifiée la différence entre lesdites cotisations et sa quote-part.
22 Le 22 décembre 2017, Europol a versé au requérant la somme de 1 847,17 euros représentant sa quote-part dans les avoirs restants du fonds de pension.
23 Le 2 juillet 2018, par courrier envoyé à l’adresse électronique « [email protected] », ainsi qu’à celles de trois agents, le requérant a formé une « réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut » contre une décision implicite rejetant sa demande du 12 décembre 2017. Dans cette lettre, le requérant faisait, tout d’abord, état de ses doutes quant au fait que sa quote-part dans les avoirs restants du fonds de pension ne correspondait qu’à 10 % de ses propres cotisations et qu’à 3,33 % des cotisations totales à titre d’employé et d’employeur le concernant. Il estimait que cette quote-part ne remplaçait pas une pension de retraite pour la durée de son service. Le requérant mettait ensuite en doute la régularité de la décision 2015/1889, en ce qu’elle prévoyait qu’une grande partie des avoirs du fonds de pension devait être reversée aux États membres, notamment au regard du fait que le seul objectif de ce fonds était de garantir à ses participants des prestations de pension et de sécurité sociale. Finalement, le courrier du 2 juillet 2018 contenait une demande d’accès à divers documents en application du règlement no 1049/2001/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43).
24 Europol n’a pas répondu au courrier électronique du requérant du 2 juillet 2018.
25 Le 10 août 2018, le requérant a envoyé une demande confirmative d’accès à des documents à l’adresse électronique « [email protected] ».
26 Le 26 octobre 2018, le requérant a déposé auprès du Médiateur européen une plainte pour non-réponse aux demandes d’accès à des documents. Les annexes de cette plainte contenaient les courriers électroniques du 12 décembre 2017 et des 2 juillet et 10 août 2018.
27 Par décision du 28 novembre 2018, le Médiateur européen a clôturé l’affaire, après avoir observé qu’Europol n’avait pas eu connaissance des courriers électroniques envoyés par le requérant et relevé qu’Europol consentait à examiner sa demande d’accès à des documents.
28 Le 18 décembre 2018, Europol a communiqué au requérant un ensemble de documents et, le 25 février 2019, lui a fourni des explications concernant le calcul de sa quote-part dans le fonds de pension.
Procédure et conclusions des parties
29 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 décembre 2018, le requérant a introduit le présent recours.
30 Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 12 avril 2019, Europol a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal.
31 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 avril 2019, le Conseil a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions d’Europol.
32 Le 11 juillet 2019, le requérant a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par Europol.
33 Dans la requête, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision implicite d’Europol portant rejet de sa réclamation du 2 juillet 2018 ;
– enjoindre à Europol d’adopter une décision motivée concernant son droit à une quote-part du fonds de pension ;
– condamner Europol aux dépens.
34 Europol conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme irrecevable ;
– condamner le requérant aux dépens.
35 Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter celle-ci.
En droit
Sur l’objet du recours
36 Il ressort de l’article 91, paragraphe 1, du statut et d’une jurisprudence constante que la réclamation administrative, telle que visée à l’article 90, paragraphe 2, dudit statut, et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge. Dans ces conditions, un recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (voir arrêt du 7 février 2019, RK/Conseil, T‑11/17, EU:T:2019:65, point 48 et jurisprudence citée).
37 En l’espèce, le rejet de la réclamation du 2 juillet 2018 étant implicite, il ne saurait avoir une portée différente de celle de la décision implicite rejetant la demande initiale du requérant du 12 décembre 2017. Il s’ensuit que le premier chef de conclusions du requérant doit se lire, ainsi que cela ressort d’ailleurs des développements de la requête, comme demandant l’annulation du refus implicite d’Europol d’adopter une décision motivée concernant les droits auxquels le requérant pourrait prétendre à la suite de la dissolution du fonds de pension.
Sur la recevabilité
38 En vertu de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure, si la partie défenderesse le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité ou l’incompétence sans engager le débat au fond. En l’espèce, Europol ayant demandé qu’il soit statué sur l’irrecevabilité, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sur cette demande sans poursuivre la procédure.
Sur le premier chef de conclusions tendant à l’annulation du refus implicite d’adopter une décision motivée concernant la quote-part du requérant dans le fonds de pension
39 À l’appui de son exception d’irrecevabilité, Europol fait valoir que la recevabilité d’un recours introduit devant le Tribunal en vertu de l’article 270 TFUE est subordonnée au déroulement régulier de la procédure précontentieuse. Il soutient, en l’espèce, que le rapport de clôture constituait une mesure comportant une prise de position définitive à l’égard de la situation individuelle du requérant et que le courriel de celui-ci du 15 novembre 2017 constituait déjà une réclamation au sens des articles 90 et 91 du statut. Par conséquent, le recours introduit le 28 décembre 2018 devant le Tribunal serait tardif. Il en irait de même si c’était le courrier du 12 décembre 2017 qui devait être qualifié de réclamation.
40 Le requérant répond que, dans sa communication du 1er décembre 2015, Europol a elle-même admis la nécessité d’adopter des décisions individuelles et que l’annexe anonymisée du rapport de clôture ne l’informait ni sur ses droits à l’égard du fonds de pension ni sur la méthode de calcul de sa quote-part. Le requérant expose également qu’il pensait, au départ, qu’Europol avait adopté une décision à son propos, mais que, en l’absence de réponse à son courriel du 15 novembre 2017 et au vu de la jurisprudence selon laquelle l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») est tenue de communiquer au fonctionnaire qui le demande les décisions prises à son égard, il a dû solliciter l’adoption d’une telle décision.
41 Il y a lieu de rappeler que la recevabilité d’un recours introduit devant le Tribunal, au titre de l’article 270 TFUE et de l’article 91 du statut, est subordonnée au déroulement régulier de la procédure précontentieuse et au respect des délais qu’elle prévoit (ordonnance du 15 janvier 2009, Braun-Neumann/Parlement, T‑306/08 P, EU:T:2009:6, point 27).
42 À cet égard, il convient de préciser que, selon l’article 91, paragraphe 2, du statut, lorsqu’est en cause un acte faisant grief, un recours ne peut être introduit devant le Tribunal que si l’AIPN a été préalablement saisie d’une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, dans le délai de trois mois qui y est prévu.
43 À ce propos, et selon la jurisprudence, la qualification d’une mesure d’acte faisant grief ne dépend pas de sa forme ou de son intitulé, mais est déterminée par sa substance et notamment par le point de savoir si elle produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts de la partie requérante, en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celle-ci (voir, en ce sens, ordonnance du 15 janvier 2009, Braun-Neumann/Parlement, T‑306/08 P, EU:T:2009:6, points 29 et 32).
44 En l’espèce, il ressort de l’article 3, deuxième et troisième alinéas, de la décision 2015/1889, ainsi que des courriels d’Europol des 3 août et 13 novembre 2017 que la détermination de la quote-part des participants au fonds de pension résulte du rapport de clôture.
45 Or, bien que le rapport de clôture soit rédigé sous la forme d’un document à caractère général, son annexe indique le montant à verser à chacun des participants au fonds de pension au regard de son numéro de personnel, lequel permet aux intéressés d’identifier la part qui leur revient dans le fonds de pension. Cette annexe doit dès lors s’analyser comme un faisceau de décisions individuelles fixant la quote-part de chaque participant à ce fonds, en ce compris celle du requérant (voir, par analogie, arrêt du 16 septembre 2013, CEPSA/Commission, T‑497/07, non publié, EU:T:2013:438, point 358 et jurisprudence citée). De plus, le montant en question n’est pas mentionné dans le rapport de clôture à titre indicatif ou provisoire, mais de manière définitive. Les mentions en question déterminent directement les droits des intéressés dans le fonds sans qu’une autre mesure que le versement matériel de la somme correspondante sur leur compte bancaire soit nécessaire, comme en témoigne le courrier électronique d’Europol du 3 août 2017.
46 Enfin, contrairement à ce que suggère le requérant, la communication du 1er décembre 2015 annonçait que tous les intéressés recevraient, durant le quatrième trimestre de l’année 2016, non pas une décision motivée, mais un courrier leur indiquant notamment le montant dû, la méthode de calcul utilisée, ainsi que le rapport de clôture. De toute façon, il ressort de la jurisprudence citée au point 43 ci-dessus que la qualification d’acte faisant grief dépend de la substance de la mesure en cause et de ses effets et non d’annonces faites par l’AIPN.
47 Il doit également être rappelé que, dans des hypothèses où les droits d’une catégorie abstraite de fonctionnaires ou d’agents sont affectés, à la suite de l’entrée en vigueur d’un acte de portée générale, les mesures administratives consécutives traduisent nécessairement, à l’égard de leurs destinataires, l’adoption de décisions de portée individuelle produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts des fonctionnaires concernés qui doivent être considérées comme des actes faisant grief (arrêt du 4 décembre 2018, Janoha e.a./Commission, T‑517/16, non publié, EU:T:2018:874, point 35). Or, précisément en l’espèce, l’annexe du rapport de clôture doit être regardée comme un faisceau de mises en œuvre individuelles de la décision 2015/1889.
48 Le requérant soutient certes que le rapport de clôture ne comportait pas une motivation suffisante en ce qui concerne la méthode de calcul utilisée et l’attribution aux États membres d’une large partie des avoirs restants du fonds de pension.
49 Toutefois, l’absence, par hypothèse, de motivation suffisante dans le rapport de clôture ne saurait conduire à dénier à son annexe la qualification de faisceau de décisions individuelles faisant grief qui devaient faire l’objet de réclamations dans le strict respect du délai statutaire, avant de pouvoir être contestées devant le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2019, TK/Parlement, T‑446/17, non publié, EU:T:2019:151, point 56 et jurisprudence citée).
50 En effet, si seuls les actes faisant grief sont susceptibles de recours, en vertu en l’article 91, paragraphe 1, du statut, et si les mêmes actes doivent être motivés, conformément à l’article 25, deuxième alinéa, dudit statut, l’absence de motivation n’est pas une condition dont dépendrait la qualité d’acte attaquable. Si tel était le cas, les fonctionnaires et agents concernés seraient privés de recours à l’encontre des actes qui en sont dépourvus, alors que la motivation est une garantie pour le fonctionnaire et son défaut une cause d’annulation.
51 En l’occurrence, le courrier électronique adressé au requérant le 3 août 2017 lui annonçait non seulement qu’il avait droit à une part du fonds de pension, mais comportait également un lien vers la page du site Internet d’Europol consacrée à sa communication sur la dissolution de ce fonds, laquelle page contenait elle-même un lien donnant accès au rapport de clôture et à son annexe au format PDF. Dans le contexte de cette dissolution intéressant un grand nombre de destinataires susceptibles d’en bénéficier, il y a lieu de considérer que ce rapport, ainsi que son annexe contenant, notamment, la décision individuelle concernant le requérant, comme cela a été relevé au point 45 ci-dessus, lui ont été communiqués à cette date.
52 Le requérant fait certes valoir que, s’il pensait, au départ, qu’Europol avait adopté une décision à son propos, en l’absence de réponse à son courriel du 15 novembre 2017, il avait dû se résoudre à solliciter l’adoption d’une telle décision au vu de la jurisprudence selon laquelle l’AIPN est tenue de communiquer au fonctionnaire qui le demande les décisions qui le concerne.
53 Cependant, il résulte du point 45 ci-dessus que, dès le 3 août 2017, le requérant avait été mis en mesure de prendre pleinement connaissance de la décision fixant sa quote-part dans le fonds de pension.
54 De plus, le requérant invoque vainement la jurisprudence illustrée par l’arrêt du 9 janvier 2007, Van Neyghem/Comité des régions (T‑288/04, EU:T:2007:1). Le Tribunal a certes jugé, aux points 33, 42 et 52 de cet arrêt, que l’administration a l’obligation de s’assurer que les fonctionnaires peuvent effectivement et facilement prendre connaissance des actes administratifs qui les concernent individuellement, mais aussi que lorsqu’un fonctionnaire est conscient de l’existence d’une décision lui faisant grief, il ne peut négliger d’en demander la communication dans un délai raisonnable afin d’en prendre dûment connaissance. Toutefois, le Tribunal s’est prononcé de la sorte à propos d’une décision qui concernait un élément essentiel de la situation professionnelle du fonctionnaire concerné, à savoir son classement en grade et en échelon, en distinguant cette décision de celles dont l’objet principal est d’ordre purement pécuniaire, telles que les décisions fixant le traitement des fonctionnaires qui sont reflétées dans les bulletins de rémunération (points 40 et 41 du même arrêt). Or, en l’espèce, la fixation de la quote-part du requérant dans le fonds de pension est précisément une décision d’ordre purement pécuniaire. Ne concernant pas un élément essentiel de sa situation professionnelle, elle n’appelait pas l’adoption et la notification d’autres décisions que celles contenues dans l’annexe du rapport de clôture.
55 Il découle de tout ce qui précède que, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, le requérant devait introduire une réclamation dans un délai de trois mois à compter du 3 août 2017 et que ce délai venait à expiration le 3 novembre suivant.
56 Le requérant ne prétend pas avoir introduit une réclamation durant ce délai. Toutefois, la qualification juridique exacte d’un acte de demande ou de réclamation relève de la seule appréciation du juge et non de la volonté des parties (ordonnance du 7 décembre 1999, Reggimenti/Parlement, T‑108/99, EU:T:1999:310, point 26). À cet égard, une réclamation, pour être qualifiée de telle, ne doit pas revêtir de forme particulière, mais requiert seulement qu’elle manifeste clairement et de façon précise la volonté du fonctionnaire d’attaquer une décision prise à son égard et qu’elle contienne un exposé des moyens et des arguments invoqués à l’encontre de celle-ci, afin de permettre à l’AIPN de connaître de façon suffisamment précise les arguments que le fonctionnaire formule (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2015, Cuallado Martorell/Commission, T‑506/12 P, EU:T:2015:931, points 63 à 65 et jurisprudence citée).
57 En l’occurrence, dans son courriel du 25 août 2017 et dans ceux des 5 et 16 octobre suivants, le requérant s’est limité à demander à recevoir communication des éléments à la base de la répartition des avoirs restants du fonds de pension et toute décision administrative adoptée en application de la décision 2015/1889, sans contester pour autant le montant de 1 847,17 euros qui lui était alloué, ni a fortiori soulever d’argument à cet égard. Ces courriels ne sauraient donc constituer une réclamation.
58 Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la faculté d’introduire une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut ne saurait permettre au fonctionnaire d’écarter les délais prévus par les articles 90 et 91 du statut pour l’introduction de la réclamation et du recours, en mettant indirectement en cause, par le biais d’une telle demande ultérieure, une décision antérieure qui n’avait pas été contestée dans les délais et qui, partant, est devenue définitive (voir arrêt du 28 avril 2017, HN/Commission, T‑588/16, non publié, EU:T:2017:292, point 37 et jurisprudence citée). Il s’ensuit que la demande de décision du 12 décembre 2017 ne peut justifier l’introduction du présent recours le 28 décembre 2018.
59 Partant, le requérant n’a pas régulièrement suivi la procédure précontentieuse.
60 Le même constat s’imposerait s’il fallait prendre en considération comme point de départ du délai de réclamation le 13 novembre 2017, qui correspond à la date du courrier électronique d’Europol qui comportait directement le lien donnant accès au rapport de clôture.
61 À l’instar des courriels du 25 août 2017 et de ceux des 5 et 16 octobre 2017, déjà cités, dans son courriel du 15 novembre 2017, le requérant se limitait de nouveau à déplorer la prétendue absence de décision individuelle le concernant, à observer que les informations fournies jusqu’alors par Europol étaient insuffisantes et à solliciter des explications, en substance, quant à la méthode de calcul de sa quote-part. Par conséquent et au vu de la jurisprudence citée au point 56 ci-dessus, à défaut d’une manifestation claire et précise d’une volonté du requérant d’attaquer une décision de l’AIPN, ce courriel ne saurait constituer une réclamation dirigée contre la décision d’Europol fixant cette quote-part.
62 Il en va de même de la lettre du 12 décembre 2017 envoyée par courriel à l’adresse électronique « [email protected] », ainsi qu’à celles de trois agents d’Europol. Son objet était explicitement une « demande d’adoption d’une décision au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut ». De plus, elle ne comportait pas une manifestation claire d’une volonté d’attaquer une décision de l’AIPN et ne contenait, en particulier, pas d’argument précis à l’encontre du calcul de la quote-part du requérant, mais seulement une demande d’explications à cet égard.
63 La réclamation du 2 juillet 2018 envoyée également par le requérant à l’adresse électronique « [email protected] », ainsi qu’à celles de trois agents d’Europol est quant à elle tardive, même en prenant le 13 novembre 2017 comme point de départ du délai de réclamation.
64 Il résulte, enfin, des points 58, 62 et 63 ci-dessus qu’est dépourvue de pertinence la question de savoir si, comme le soutient le requérant, l’AIPN devrait être réputée avoir reçu la demande du 12 décembre 2017 et la réclamation du 2 juillet 2018, malgré le fait que l’adresse électronique « [email protected] » était, comme l’explique Europol, équipée, pour des raisons de sécurité, d’un filtre contre les courriers indésirables bloquant, pour tous les destinataires, les courriers électroniques comportant cette adresse.
65 Il découle de ce qui précède que le requérant n’a pas respecté la procédure précontentieuse instituée par les articles 90 et 91 du statut. Par conséquent, le premier chef de conclusions du recours doit être rejeté comme irrecevable.
Sur le second chef de conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à Europol d’adopter une décision motivée sur la quote-part du requérant dans le fonds de pension
66 Le second chef de conclusions du requérant tendant à ce qu’il soit enjoint à Europol d’adopter une décision motivée concernant son droit à une quote-part du fonds de pension est étroitement lié au premier chef de conclusions et est par conséquent tout autant irrecevable (voir, en ce sens, ordonnance du 2 octobre 2014, Marcuccio/Commission, T‑447/13 P, EU:T:2014:869, point 48). Il l’est, de surcroît, en lui-même, car, conformément à une jurisprudence constante, il n’appartient pas au juge de l’Union d’adresser des injonctions à l’administration (voir ordonnance du 23 avril 2018, Winkler/Commission, T‑916/16, non publiée, EU:T:2018:226, point 31 et jurisprudence citée).
67 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son ensemble comme irrecevable.
Sur la demande d’intervention
68 Conformément à l’article 144, paragraphe 3, du règlement de procédure, lorsque la partie défenderesse dépose une exception d’irrecevabilité ou d’incompétence, visée à l’article 130, paragraphe 1, dudit règlement, il n’est statué sur la demande d’intervention qu’après le rejet ou la jonction de l’exception au fond. Par ailleurs, conformément à l’article 142, paragraphe 2, du règlement de procédure, l’intervention est accessoire au litige principal et perd son objet, notamment, lorsque la requête est déclarée irrecevable.
69 En l’espèce, le recours étant rejeté dans son ensemble, il n’y a plus lieu de statuer sur la demande d’intervention.
Sur les dépens
70 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l’article 135, paragraphe 1, du même règlement, lorsque l’équité l’exige, le Tribunal peut décider qu’une partie qui succombe supporte, outre ses propres dépens, uniquement une fraction des dépens de l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre. En outre, selon l’article 135, paragraphe 2, dudit règlement, le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, partiellement ou totalement aux dépens, si cela apparaît justifié en raison de son attitude, y compris avant l’introduction de l’instance. Il est notamment permis au Tribunal de ne pas condamner la partie qui succombe aux entiers dépens, en raison des atermoiements de la partie défenderesse, qui ont pu conduire un requérant à introduire un recours [voir, par analogie, arrêt du 25 juin 2002, British American Tobacco (Investments)/Commission, T‑311/00, EU:T:2002:167, points 64 et 65].
71 Or, en l’espèce, contrairement à ce que soutient le requérant pour justifier que la partie défenderesse soit condamnée aux dépens alors même que le recours est irrecevable, il n’apparaît pas que le comportement d’Europol serait caractérisé par une série d’erreurs procédurales.
72 Toutefois, dans la mesure où le présent recours est irrecevable, mais dans la mesure aussi où Europol n’a répondu aux courriels du requérant des 25 août, 5 octobre, 16 octobre et 10 novembre 2017 que par le courriel du 13 novembre suivant, et où elle aurait pu fournir, avant l’introduction du recours, les explications plus détaillées qu’elle a néanmoins été amenée à lui communiquer seulement par lettre du 25 février 2019, il convient que chaque partie supporte ses propres dépens, en ce compris ceux relatifs à la demande d’intervention, conformément à l’article 144, paragraphe 10, du règlement de procédure.
73 Par ailleurs, en application également de l’article 144, paragraphe 10, du règlement de procédure, il convient que le Conseil supporte ses propres dépens afférents à sa demande d’intervention.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
ordonne :
1) Le recours est rejeté.
2) Il n’y a plus lieu de statuer sur la demande d’intervention du Conseil de l’Union européenne.
3) AG et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol) supportent leurs propres dépens.
4) Le Conseil supporte ses propres dépens afférents à sa demande d’intervention.
Fait à Luxembourg, le 17 décembre 2019.
Le greffier | Le président |
E. Coulon | S. Gervasoni |
* Langue de procédure : l’allemand.
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