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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Commission v Hungary (Valeurs limites - PM10) (Judgment) French Text [2021] EUECJ C-637/18 (03 February 2021) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2021/C63718.html Cite as: [2021] EUECJ C-637/18, EU:C:2021:92, ECLI:EU:C:2021:92 |
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ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)
3 février 2021 (*)
« Manquement d’État – Environnement – Directive 2008/50/CE – Qualité de l’air ambiant – Article 13, paragraphe 1, et annexe XI –Dépassement systématique et persistant des valeurs limites fixées pour les microparticules (PM10) dans certaines zones de Hongrie – Article 23, paragraphe 1 – Annexe XV – Période de dépassement “la plus courte possible” – Mesures appropriées »
Dans l’affaire C‑637/18,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 12 octobre 2018,
Commission européenne, représentée par Mmes K. Petersen et K. Talabér-Ritz ainsi que par M. E. Manhaeve, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
Hongrie, représentée par M. M. Z. Fehér et Mme A. Pokoraczki, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LA COUR (septième chambre),
composée de M. A. Kumin (rapporteur), président de chambre, MM. T. von Danwitz et P. G. Xuereb, juges,
avocat général : M. M. Szpunar,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la Hongrie :
– en dépassant de façon systématique et persistante la valeur limite journalière fixée pour les concentrations de particules PM10, d’une part, depuis le 1er janvier 2005, dans la zone HU0001 – région de Budapest et dans la zone HU0008 – vallée de Sajó, ainsi que, d’autre part, depuis le 11 juin 2011 (à l’exception de l’année 2014), dans la zone HU0006 – région de Pécs, a manqué à l’obligation qui lui incombe en vertu des dispositions combinées de l’article 13 et de l’annexe XI de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008, concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe (JO 2008, L 152, p. 1), et,
– en n’ayant pas adopté les mesures appropriées, a manqué, depuis le 11 juin 2010, aux obligations imposées à l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu seul et en combinaison avec l’annexe XV, section A, de cette directive, en particulier à l’obligation, prévue à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de ladite directive, de veiller à ce que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible.
Le cadre juridique
La directive 96/62/CE
2 L’article 8 de la directive 96/62/CE du Conseil, du 27 septembre 1996, concernant l’évaluation et la gestion de la qualité de l’air ambiant (JO 1996, L 296, p. 55), intitulé « Mesures applicables dans les zones où les niveaux dépassent la valeur limite », prévoyait, à ses paragraphes 1, 3 et 4 :
« 1. Les États membres établissent la liste des zones et des agglomérations où les niveaux d’un ou de plusieurs polluants dépassent la valeur limite augmentée de la marge de dépassement.
[...]
3. Dans les zones et les agglomérations visées au paragraphe 1, les États membres prennent des mesures pour assurer l’élaboration ou la mise en œuvre d’un plan ou programme permettant d’atteindre la valeur limite dans le délai fixé.
Ledit plan ou programme, auquel la population doit avoir accès, contient au moins les informations énumérées à l’annexe IV.
4. Dans les zones et les agglomérations visées au paragraphe 1, où le niveau de plus d’un polluant est supérieur aux valeurs limites, les États membres fournissent un plan intégré englobant tous les polluants en cause. »
La directive 1999/30/CE
3 L’article 5 de la directive 1999/30/CE du Conseil, du 22 avril 1999, relative à la fixation de valeurs limites pour l’anhydride sulfureux, le dioxyde d’azote et les oxydes d’azote, les particules et le plomb dans l’air ambiant (JO 1999, L 163, p. 41), intitulé « Particules », disposait, à son paragraphe 1 :
« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les concentrations de PM10 dans l’air ambiant, évaluées conformément à l’article 7, ne dépassent pas les valeurs limites indiquées au point I de l’annexe III, à partir des dates y spécifiées.
[...] »
4 L’annexe III de cette directive précisait que, s’agissant des particules PM10, la date à partir de laquelle les valeurs limites devaient être respectées était le 1er janvier 2005.
La directive 2008/50
5 La directive 2008/50, qui est entrée en vigueur le 11 juin 2008, a remplacé cinq actes législatifs préexistants, relatifs à l’évaluation et à la gestion de la qualité de l’air ambiant, notamment les directives 96/62 et 1999/30, lesquelles ont été abrogées à compter du 11 juin 2010, ainsi qu’il ressort de l’article 31 de la directive 2008/50.
6 Les considérants 17 et 18 de la directive 2008/50 énoncent :
« (17) Toutes les institutions concernées devraient étudier prioritairement les mesures à adopter au plan [de l’Union européenne] pour réduire les émissions à la source, et notamment pour améliorer l’efficacité de la législation [de l’Union] relative aux émissions industrielles, limiter les émissions d’échappement des moteurs équipant les véhicules utilitaires lourds, réduire davantage, dans les États membres, le niveau autorisé d’émissions des principaux polluants et des émissions liées à l’approvisionnement des véhicules à essence dans les stations-service, ainsi que pour contrôler la teneur en soufre des combustibles, y compris les combustibles marins.
(18) Des plans relatifs à la qualité de l’air devraient être établis pour les zones et agglomérations dans lesquelles les concentrations de polluants dans l’air ambiant dépassent les valeurs cibles ou valeurs limites de qualité de l’air applicables, augmentées, le cas échéant, des marges de dépassement temporaire applicables. Les polluants atmosphériques sont produits par de multiples sources et activités. Pour assurer la cohérence entre les différentes politiques, ces plans relatifs à la qualité de l’air devraient si possible être cohérents et coordonnés avec les plans et programmes établis en application de la directive 2001/80/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 relative à la limitation des émissions de certains polluants dans l’atmosphère en provenance des grandes installations de combustion [JO 2001, L 309, p. 1], de la directive 2001/81/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2001, fixant des plafonds d’émission nationaux pour certains polluants atmosphériques (JO 2001, L 309, p. 22),] et de la directive 2002/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 juin 2002 relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement [JO 2002, L 189, p. 12]. Il convient également de prendre dûment en considération les objectifs de qualité de l’air ambiant prévus par la présente directive, lorsque des autorisations sont accordées à des activités industrielles conformément à la directive 2008/1/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2008 relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution [JO 2008, L 24, p. 8]. »
7 L’article 1er de la directive 2008/50, intitulé « Objet », énonce, à ses points 1 à 3 :
« La présente directive établit des mesures visant :
1) à définir et à fixer des objectifs concernant la qualité de l’air ambiant, afin d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs pour la santé humaine et pour l’environnement dans son ensemble ;
2) à évaluer la qualité de l’air ambiant dans les États membres sur la base de méthodes et de critères communs ;
3) à obtenir des informations sur la qualité de l’air ambiant afin de contribuer à lutter contre la pollution de l’air et les nuisances et de surveiller les tendances à long terme et les améliorations obtenues grâce aux mesures nationales et [de l’Union] ».
8 L’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions », prévoit, à ses points 5, 7 à 9 et 16 à 18 :
« Aux fins de la présente directive, on entend par :
[...]
5) “valeur limite” : un niveau fixé sur la base des connaissances scientifiques, dans le but d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs sur la santé humaine et/ou l’environnement dans son ensemble, à atteindre dans un délai donné et à ne pas dépasser une fois atteint ;
[...]
7) “marge de dépassement” : le pourcentage de la valeur limite dont cette valeur peut être dépassée dans les conditions fixées par la présente directive ;
8) “plans relatifs à la qualité de l’air” : les plans énonçant des mesures visant à atteindre les valeurs limites ou valeurs cibles ;
9) “valeur cible” : un niveau fixé dans le but d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs sur la santé humaine et/ou l’environnement dans son ensemble, à atteindre dans la mesure du possible sur une période donnée ;
[...]
16) “zone” : une partie du territoire d’un État membre délimitée par lui aux fins de l’évaluation et de la gestion de la qualité de l’air ;
17) “agglomération” : une zone qui constitue une conurbation caractérisée par une population supérieure à 250 000 habitants ou, lorsque la population est inférieure ou égale à 250 000 habitants, par une densité d’habitants au kilomètre carré à établir par les États membres ;
18) “PM10” : les particules passant dans un orifice d’entrée calibré tel que défini dans la méthode de référence pour l’échantillonnage et la mesure du PM10, norme EN 12 341, avec un rendement de séparation de 50 % pour un diamètre aérodynamique de 10 μm ;
[...] »
9 L’article 13 de ladite directive, intitulé « Valeurs limites et seuils d’alerte pour la protection de la santé humaine », dispose, à son paragraphe 1 :
« Les États membres veillent à ce que, dans l’ensemble de leurs zones et agglomérations, les niveaux d’anhydride sulfureux, de PM10, de plomb et de monoxyde de carbone dans l’air ambiant ne dépassent pas les valeurs limites fixées à l’annexe XI.
[...]
Le respect de ces exigences est évalué conformément à l’annexe III.
Les marges de dépassement indiquées à l’annexe XI s’appliquent conformément à l’article 22, paragraphe 3, et à l’article 23, paragraphe 1. »
10 L’article 20 de la directive 2008/50, intitulé « Contributions des sources naturelles », prévoit, à ses paragraphes 1 et 2 :
« 1. Les États membres transmettent à la Commission, pour une année donnée, les listes des zones et des agglomérations dans lesquelles les dépassements des valeurs limites pour un polluant déterminé sont imputables aux contributions des sources naturelles. Les États membres transmettent des informations sur les concentrations et les sources, ainsi que des éléments prouvant que les dépassements sont imputables à des sources naturelles.
2. Lorsque la Commission a été informée d’un dépassement imputable à des sources naturelles conformément au paragraphe 1, ce dépassement n’est pas considéré comme un dépassement aux fins de la présente directive. »
11 Conformément aux paragraphes 1 à 4 de l’article 21 de cette directive, intitulé « Dépassements imputables au sablage ou au salage hivernal des routes », les États membres peuvent désigner des zones ou des agglomérations dans lesquelles il y a dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 dans l’air ambiant provenant de la remise en suspension de particules provoquée par le sablage ou le salage hivernal des routes. Les États membres fournissent les preuves appropriées pour démontrer que tout dépassement est dû à ces particules remises en suspension et que toute mesure utile a été prise pour diminuer les concentrations. Sans préjudice de l’article 20 de ladite directive, les États membres ne sont tenus d’établir le plan relatif à la qualité de l’air prévu à l’article 23 de cette même directive que dans le cas où les dépassements sont imputables à des sources de PM10 autres que le sablage ou le salage hivernal des routes.
12 L’article 22 de la directive 2008/50, intitulé « Report des délais fixés pour atteindre certaines valeurs limites et exemption de l’obligation d’appliquer celles-ci », est ainsi libellé :
« 1. Lorsque, dans une zone ou agglomération donnée, les valeurs limites fixées pour le dioxyde d’azote ou le benzène ne peuvent pas être respectées dans les délais indiqués à l’annexe XI, un État membre peut reporter ces délais de cinq ans au maximum pour la zone ou agglomération en cause, à condition qu’un plan relatif à la qualité de l’air soit établi conformément à l’article 23 pour la zone ou l’agglomération à laquelle le report de délai s’appliquerait. Ce plan est complété par les informations énumérées à l’annexe XV, section B, relatives aux polluants concernés et démontre comment les valeurs limites seront respectées avant la nouvelle échéance.
2. Lorsque, dans une zone ou agglomération donnée, les valeurs limites fixées à l’annexe XI pour les PM10 ne peuvent pas être respectées en raison des caractéristiques de dispersion du site, de conditions climatiques défavorables ou de contributions transfrontalières, un État membre est exempté de l’obligation d’appliquer ces valeurs limites jusqu’au 11 juin 2011, moyennant le respect des conditions prévues au paragraphe 1 et à condition que cet État membre fasse la preuve qu’il a pris toutes les mesures appropriées aux niveaux national, régional et local pour respecter les délais.
3. Lorsqu’un État membre applique le paragraphe 1 ou 2, il veille à ce que le dépassement de la valeur limite fixée pour chaque polluant ne soit pas supérieur à la marge de dépassement maximale indiquée à l’annexe XI pour chacun des polluants concernés.
4. Les États membres notifient à la Commission les zones ou agglomérations dans lesquelles ils estiment que les paragraphes 1 ou 2 sont applicables et transmettent le plan relatif à la qualité de l’air visé au paragraphe 1, avec tous les renseignements nécessaires pour permettre à la Commission d’évaluer si les conditions pertinentes sont remplies. Dans son évaluation, la Commission prend en considération les effets estimés, actuellement et dans le futur, sur la qualité de l’air ambiant dans les États membres, des mesures qui ont été prises par les États membres, ainsi que les effets estimés, sur la qualité de l’air ambiant, des mesures communautaires actuelles et des mesures prévues, que doit proposer la Commission.
En l’absence d’objection de la part de la Commission dans les neuf mois qui suivent la réception de la notification, les conditions pertinentes pour l’application du paragraphe 1 ou du paragraphe 2 sont réputées remplies.
En cas d’objection, la Commission peut demander aux États membres d’adapter les plans relatifs à la qualité de l’air ou d’en fournir de nouveaux. »
13 L’article 23 de la directive 2008/50, intitulé « Plans relatifs à la qualité de l’air », énonce, à son paragraphe 1 :
« Lorsque, dans une zone ou agglomération donnée, les niveaux de polluants dans l’air ambiant dépassent toute valeur limite ou toute valeur cible, majorée dans chaque cas de toute marge de dépassement, les États membres veillent à ce que des plans relatifs à la qualité de l’air soient établis pour cette zone ou agglomération afin d’atteindre la valeur limite ou la valeur cible correspondante indiquée aux annexes XI et XIV.
En cas de dépassement de ces valeurs limites après le délai prévu pour leur application, les plans relatifs à la qualité de l’air prévoient des mesures appropriées pour que la période de dépassement soit la plus courte possible. Ils peuvent comporter des mesures additionnelles spécifiques pour protéger les catégories de population sensibles, notamment les enfants.
Ces plans relatifs à la qualité de l’air contiennent au moins les informations énumérées à l’annexe XV, section A, et peuvent aussi inclure les mesures visées à l’article 24. Ils sont transmis à la Commission sans délai, et au plus tard deux ans après la fin de l’année au cours de laquelle le premier dépassement a été constaté.
Lorsque des plans relatifs à la qualité de l’air doivent être élaborés ou mis en œuvre pour plusieurs polluants, les États membres élaborent et mettent en œuvre, s’il y a lieu, des plans intégrés relatifs à la qualité de l’air couvrant tous les polluants concernés. »
14 L’article 27 de cette directive, intitulé « Transmission des informations et des rapports », prévoit :
« 1. Les États membres veillent à ce que les informations sur la qualité de l’air ambiant soient mises à la disposition de la Commission dans les délais prévus par les mesures d’exécution visées à l’article 28, paragraphe 2.
2. En tout état de cause, afin d’évaluer spécifiquement le respect des valeurs limites et des niveaux critiques ainsi que la réalisation des valeurs cibles, ces informations sont communiquées à la Commission, au plus tard neuf mois après la fin de chaque année, et comprennent :
[...]
b) la liste des zones et des agglomérations dans lesquelles les niveaux d’un ou de plusieurs polluants sont supérieurs aux valeurs limites majorées de la marge de tolérance, s’il y a lieu, ou supérieurs aux valeurs cibles ou aux niveaux critiques ; et, pour ces zones et agglomérations :
i) les niveaux évalués et, le cas échéant, les dates et périodes auxquelles ces niveaux ont été observés ;
ii) s’il y a lieu, une évaluation de la part imputable aux sources naturelles et à la remise en suspension de particules provoquée par le sablage ou salage hivernal des routes dans les niveaux observés, déclarés à la Commission conformément aux articles 20 et 21.
3. Les dispositions des paragraphes 1 et 2 s’appliquent aux informations réunies à partir du début de la deuxième année civile suivant l’entrée en vigueur des mesures d’exécution visées à l’article 28, paragraphe 2. »
15 L’annexe XI de la directive 2008/50, intitulée « Valeurs limites pour la protection de la santé humaine », indique, s’agissant des PM10, que la valeur limite journalière est fixée à 50 μg/m³ et ne doit pas être dépassée plus de 35 fois par année civile, et que la valeur limite annuelle, qui est fixée à 40 μg/m³, ne peut être dépassée.
16 Au nombre des informations devant figurer dans les plans relatifs à la qualité de l’air ambiant, au sens de l’article 23 de cette directive, la section A de l’annexe XV de ladite directive indique notamment :
« [...]
8. Informations concernant les mesures ou projets visant à réduire la pollution adoptés à la suite de l’entrée en vigueur de la présente directive
a) énumération et description de toutes les mesures prévues dans le projet ;
b) calendrier de mise en œuvre ;
c) estimation de l’amélioration de la qualité de l’air escomptée et du délai prévu pour la réalisation de ces objectifs. »
La procédure précontentieuse
17 Le 7 novembre 2008, la Hongrie a, en application de l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2008/50, demandé l’exemption, jusqu’au 10 juin 2011, de l’obligation d’appliquer les valeurs limites annuelle et/ou journalière fixées pour les PM10 en ce qui concerne huit zones de qualité de l’air. Par une décision du 2 juillet 2009, la Commission a, sur le fondement de l’article 22, paragraphe 4, de cette directive émis des objections au sujet de cette demande de report s’agissant de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones HU0001 – région de Budapest, HU0005 – région de Dunaújváros, HU0008 – vallée de Sajó et HU0011 – villes désignées, ainsi que concernant la valeur limite annuelle fixée pour les PM10 dans les zones HU0002 – Győr-Mosonmagyaróvár et HU0006 – région de Pécs.
18 En revanche, la Commission n’a pas soulevé d’objection en ce qui concerne la demande d’exemption de l’obligation d’appliquer la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones HU0002 – Győr-Mosonmagyaróvár, HU0003 – Komárom-Tatabánya-Esztergom, HU0006 – région de Pécs et HU0009 – région de Debrecen et ne s’est pas non plus opposée à la demande d’exemption de l’obligation d’appliquer la valeur limite annuelle fixée pour les PM10 dans les zones HU0001 – région de Budapest, HU0008 – vallée de Sajó et HU0011 – villes désignées.
19 Le 23 novembre 2009, la Commission a adressé aux autorités hongroises une lettre de mise en demeure pour infraction à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 1999/30 (dont les dispositions ont été reprises à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50) fondée sur les griefs exposés dans sa décision du 2 juillet 2009, mentionnée au point 17 du présent arrêt, et compte tenu des rapports annuels sur la qualité de l’air présentés par la Hongrie conformément à l’article 11 de la directive 96/62 (dont les dispositions ont été reprises à l’article 27 de la directive 2008/50), selon lesquels, de l’année 2005 à l’année 2008 incluse, la valeur limite journalière fixée pour les PM10 avait été dépassée dans les zones HU0001 – région de Budapest, HU0008 – vallée de Sajó et HU0011 – villes désignées.
20 Par une lettre du 22 janvier 2010, les autorités hongroises ont répondu à la lettre de mise en demeure de la Commission. La Hongrie n’a pas contesté avoir enfreint les obligations qui lui incombent en vertu de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 et a précisé, en outre, que, selon les données préliminaires disponibles, la valeur limite journalière fixée pour les PM10 avait été également dépassée pendant l’année 2009 dans les zones concernées.
21 Compte tenu du rapport annuel sur la qualité de l’air présenté par la Hongrie pour l’année 2009, conformément à l’article 27 de la directive 2008/50, selon lequel la valeur limite journalière fixée pour les PM10 pendant cette année avait été dépassée dans les trois zones de qualité de l’air concernées, la Commission a adressé, le 29 octobre 2010, un avis motivé (ci-après l’« avis motivé ») à la Hongrie, lui reprochant d’avoir manqué aux obligations fixées à l’article 13, paragraphe 1, de cette directive.
22 Dans sa réponse du 16 décembre 2010 à l’avis motivé, la Hongrie n’a pas contesté le dépassement de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les trois zones concernées.
23 Par une lettre du 26 octobre 2011, la Hongrie a informé la Commission de l’adoption, par la décision gouvernementale no 1330/2011, du 12 octobre 2011 [1330/2011 (X. 12.) Korm. Határozat], du programme de mesures intersectorielles pour la limitation des PM10 (ci-après le « programme de mesures »). Dans deux autres réponses complémentaires datées respectivement des 17 août et 17 décembre 2012, la Hongrie a transmis à la Commission des informations supplémentaires sur la mise en œuvre du programme de mesures, notamment au cours de l’année 2012.
24 Le 22 février 2013, la Commission a adressé une lettre de mise en demeure complémentaire aux autorités hongroises, pour violation de l’article 13, paragraphe 1, et de l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50 dans les trois zones concernées visées dans la première lettre de mise en demeure du 23 novembre 2009 et dans l’avis motivé. La Commission a fondé son approche à cet égard sur le non-respect persistant, au cours de la période allant de l’année 2005 à l’année 2011, de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones susmentionnées. En outre, la Commission a étendu la procédure d’infraction à un certain nombre d’autres zones qui n’étaient pas visées dans la première lettre de mise en demeure du 23 novembre 2009, ni dans l’avis motivé, à savoir les zones HU0002 – Győr-Mosonmagyaróvár, HU0003 – Komárom-Tatabánya-Esztergom et HU0006 – région de Pécs, en raison du non-respect de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones susmentionnées pour la période consécutive à l’expiration, le 10 juin 2011, de l’exemption prévue à l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2008/50.
25 Dans sa réponse du 24 avril 2013 à la lettre de mise en demeure complémentaire de la Commission, la Hongrie n’a pas contesté avoir enfreint la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones et au cours des périodes mentionnées dans cette lettre, mais a, toutefois, invoqué plusieurs raisons pour justifier le niveau élevé de la concentration des PM10 en Hongrie, à savoir les particularités géographiques et les conditions météorologiques défavorables ainsi que le problème posé par la pollution transfrontalière. Le 31 janvier 2014, cet État membre a présenté, en complément à sa réponse à ladite lettre de mise en demeure complémentaire, un rapport sur la mise en œuvre du programme de mesures pendant l’année 2013.
26 Le 31 mars 2014, la Commission a décidé, sur la base des réponses de la Hongrie et du rapport relatif à la qualité de l’air de l’année 2012, qui lui avait été présenté par cet État membre, d’adresser un avis motivé complémentaire (ci-après l’« avis motivé complémentaire ») à cet État membre, estimant que celui-ci avait manqué aux obligations lui incombant en vertu des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50 ainsi que de l’article 23, paragraphe 1, lu seul et en combinaison avec l’annexe XV, section A, de cette directive, dans les 4 zones de qualité de l’air visées par la même lettre de mise en demeure complémentaire, à savoir les zones HU0001 – région de Budapest, HU0006 – région de Pécs, HU0008 – vallée de Sajó et HU0011 – villes désignées. La Commission s’est fondée sur le non-respect continu de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones HU0001 – région de Budapest, HU0008 – vallée de Sajó et HU0011– villes désignées au cours de chacune des années constituant la période allant de l’année 2005 à l’année 2012, et sur le non-respect continu de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans la zone HU0006 – région de Pécs à compter du 11 juin 2011, date à laquelle avait expiré la période d’exemption prévue à l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2008/50, jusqu’à l’année 2012.
27 Dans sa réponse du 30 mai 2014 à l’avis motivé complémentaire, la Hongrie a rappelé les difficultés qu’elle devait surmonter dans le domaine considéré.
28 Les 3 mars 2016 et 21 mars 2017, la Hongrie a communiqué, dans le cadre d’une réponse complémentaire à l’avis motivé complémentaire, les rapports sur la mise en œuvre du programme de mesures au cours des années 2015 et 2016.
29 Le 20 juillet 2017, la Hongrie a répondu aux questions concrètes soulevées lors d’une réunion entre cet État membre et la Commission.
30 Le 9 février 2018, la Hongrie a transmis des informations écrites complémentaires concernant les violations de la directive 2008/50 en cause, dans lesquelles cet État membre a décrit succinctement les mesures déjà prises et celles prévues pour améliorer la qualité de l’air, ainsi que, le 11 avril 2018, le rapport sur la mise en œuvre du programme de mesures relatif à l’année 2017.
31 Au cours de la procédure précontentieuse, l’analyse de l’ensemble des informations fournies, notamment du rapport annuel sur la qualité de l’air de 2016, a révélé le respect, pendant l’année 2016, de la valeur limite journalière fixée pour des PM10 dans la zone HU0011 – villes désignées.
32 Considérant que la Hongrie continuait toutefois de manquer aux obligations lui incombant en vertu de la directive 2008/50, la Commission a décidé d’introduire le présent recours en manquement.
Sur le recours
Sur la recevabilité du recours
Argumentation des parties
33 La Hongrie conteste la recevabilité du présent recours à deux égards.
34 D’une part, cet État membre considère que la Commission n’a pas indiqué la manière de calculer et d’agréger les données relatives à la pollution atmosphérique. D’autre part, la Hongrie fait valoir que la Commission n’a pas pleinement exposé la configuration dans le temps de la pollution de l’air.
35 À cet égard, la Hongrie rappelle, à titre liminaire, que, dans le cadre d’une procédure en manquement, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué et d’apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification, par celle-ci, de l’existence de ce manquement, sans que la Commission puisse se fonder sur une présomption quelconque.
36 En l’espèce, il serait douteux que cette institution se soit acquittée à tous points de vue de ses obligations en matière de charge de la preuve. S’agissant de la violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50, la Commission s’appuierait sur des données chiffrées, sans exposer dûment leur contexte factuel.
37 Quant à l’obligation figurant à l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu en combinaison avec l’annexe XV de cette directive, la Commission n’aurait pas non plus dûment exposé la configuration dans le temps de la pollution de l’air.
38 La Hongrie précise que, selon l’annexe XI de la directive 2008/50, la valeur limite journalière fixée pour les PM10 ne peut être dépassée plus de 35 fois par année civile. Les données reprises dans les tableaux 1 à 3 de la requête ne permettraient cependant pas d’établir si ont été rassemblés tous les cas de dépassement des valeurs limites dans les points de prélèvements de la région concernée ou si n’ont été pris en considération que les jours où, indépendamment du nombre de points de prélèvement, il a été constaté un dépassement du nombre des incidents, que ce soit dans la région, par localité ou par point de prélèvement.
39 Selon la Hongrie, les séries de données prises comme base par la Commission dans sa requête ne font pas application des modalités d’évaluation de l’Agence européenne pour l’environnement (AEE). Cependant, cette méthode serait utilisée dans l’évaluation annuelle de la situation de l’environnement à Budapest, laquelle montrerait clairement que, pendant la période de cinq années correspondant aux années 2012 à 2016, le niveau de pollution par les PM10 dans cette ville a connu une nette amélioration par rapport à la période allant de l’année 2007 à l’année 2011. Toutefois, la Commission n’aurait pas pris en compte cette tendance à l’amélioration dans sa requête. Ladite tendance serait encore plus visible si la variation annuelle du niveau de pollution par les PM10 à Budapest était présentée en proportion du nombre de jours dits « propres » au cours d’une année.
40 Dès lors, la Hongrie considère que la Commission, dans sa requête, ne mentionne pas précisément la manière dont les données relatives à la pollution atmosphérique, qui servent de fondement au manquement qui lui est imputé, ont été comptabilisées, non plus que la configuration dans le temps de cette pollution atmosphérique, ce qui remettrait en question la recevabilité du recours.
41 La Commission, s’agissant de la méthode appliquée, fait valoir que la Hongrie devrait être familiarisée avec celle-ci étant donné qu’elle est utilisée lors de réunions techniques et dans le cadre de l’assistance pour le traitement numérique des rapports sur la qualité de l’air. Cette institution souligne, notamment, que les États membres sont tenus de mettre à disposition leurs rapports annuels sur la qualité de l’air dans le référentiel de données géré par l’AEE, dont sont issues les données que la Commission a utilisées dans sa requête.
42 S’agissant du second grief, la Commission rappelle, notamment, que l’obligation prévue à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 est une obligation de résultat exprimée au niveau des zones et des agglomérations. Même si, en l’espèce, certaines stations n’auraient pas connu de dépassement, il n’en resterait pas moins que le non-respect des valeurs limites persisterait au niveau des zones et des agglomérations. De même, le fait que la non-conformité d’une zone s’étende sur plusieurs années prouverait l’existence d’un manquement systématique et persistant. La Commission souligne qu’il convient de tenir compte des dépassements mesurés à n’importe quel point d’une zone donnée, le recours à des moyennes exposant la population à des risques pour la santé, dont la prévention constituait l’objet de la directive 2008/50. Elle ne pourrait donc tenir compte de la concentration moyenne mesurée dans une zone donnée ou de son évolution dans le temps, dans le cadre de l’évaluation du caractère systématique et persistant d’une valeur limite dans cette zone. Un simple dépassement enregistré dans ladite zone serait suffisant à cet effet.
Appréciation de la Cour
43 S’agissant des exceptions d’irrecevabilité soulevées par la Hongrie, qu’il convient d’examiner ensemble, il y a lieu de constater, en premier lieu, que les chiffres en cause indiquent la durée, exprimée en nombre de jours entiers, durant laquelle un dépassement des valeurs limites dans la zone concernée a été enregistré. Il ressort des informations dont dispose la Cour que cette méthode est notamment utilisée, pour tous les États membres, à l’occasion des réunions techniques qui se tiennent au sein de l’AEE, ainsi que dans le cadre de l’assistance pour le traitement numérique des rapports sur la qualité de l’air.
44 En deuxième lieu, en vertu de l’article 5 de la décision d’exécution 2011/850/UE de la Commission, du 12 décembre 2011, portant modalités d’application des directives 2004/107/CE et 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil concernant l’échange réciproque d’informations et la déclaration concernant l’évaluation de la qualité de l’air ambiant (JO 2011, L 335, p. 86), les États membres sont tenus, afin de rationaliser les informations provenant de ceux-ci, de maximiser l’utilité de ces informations et de réduire la charge administrative, de mettre à disposition leurs rapports annuels sur la qualité de l’air dans le cadre du référentiel de données géré par l’AEE, qui est accessible via le portail de la qualité de l’air et sur lequel peuvent être consultés les rapports officiels sur la qualité de l’air transmis par les États membres, y compris ceux établis par la Hongrie.
45 Les données figurant dans lesdits rapports sont automatiquement traitées par voie électronique en plusieurs étapes comprenant, notamment, le contrôle de la cohérence des informations ainsi que le contrôle et l’agrégation des données primaires relatives aux objectifs spécifiques en matière de qualité des données, afin de garantir l’intégrité de ces données transmises par les États membres dans le cadre de la déclaration électronique sur la qualité de l’air.
46 Il s’ensuit que les données présentées par la Commission dans sa requête ne procèdent pas simplement d’une agrégation au niveau de l’AEE, mais relèvent des déclarations effectuées par les États membres au sujet de l’ensemble des objectifs environnementaux effectivement atteints dans chacune des zones et agglomérations du territoire de chacun de ceux-ci. Or, il convient de constater que la Hongrie n’avance aucun argument précis susceptible de remettre en cause l’exactitude ou la cohérence des données concernées.
47 En troisième lieu, en ce qui concerne le tableau présenté par la Hongrie dans son mémoire en défense aux fins de dégager une tendance positive pour la région de Budapest, en appliquant une autre méthode d’exploitation des données, force est de constater que, indépendamment de la méthode appliquée, ce tableau fait état d’un dépassement de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 ayant été constaté plus de 35 fois par année civile pour ce qui concerne cette région et la période visée par le présent recours.
48 Il résulte des considérations qui précèdent que l’argumentation de la Hongrie n’est pas de nature à affecter la recevabilité du présent recours.
Sur le premier grief, tiré d’une violation systématique et persistante des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50
Observations des parties
49 Par son premier grief, la Commission fait valoir que, en ayant dépassé, de manière systématique et persistante, la valeur limite journalière fixée pour les PM10, d’une part, à partir de l’année 2005 dans les zones HU0001 – région de Budapest et HU0008 – vallée de Sajó, ainsi que, d’autre part, à partir du 11 juin 2011, à l’exception de l’année 2014, dans la zone HU0006 – région de Pécs, la Hongrie a violé les obligations résultant de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu en combinaison avec l’annexe XI de cette dernière.
50 À titre liminaire, la Commission apporte une précision concernant l’application ratione temporis de la directive 2008/50, faisant valoir une violation de l’article 13 de cette directive dans certaines zones et agglomérations de Hongrie à partir de l’année 2005, bien que celle-ci ne soit entrée en vigueur que le 11 juin 2008 et que, aux termes de l’article 33, paragraphe 1, de ladite directive, les États membres devaient mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour s’y conformer avant le 11 juin 2010.
51 En se référant aux points 43 et 45 de l’arrêt du 22 février 2018, Commission/Pologne (C‑336/16, EU:C:2018:94), cette institution rappelle que la directive 2008/50 est venue remplacer, conformément à son considérant 3, cinq actes de l’Union, au nombre desquels figure la directive 1999/30 qui précisait les valeurs limites relatives à la qualité de l’air qui devaient être respectées à compter du 1er janvier 2005. La Cour aurait notamment souligné, à cet égard, que les dispositions combinées de l’article 5 et de l’annexe III de la directive 1999/30, qui couvraient la période antérieure à celle de mise en œuvre de la directive 2008/50, ont été maintenues par les dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de cette directive, de sorte qu’un grief tiré d’une violation de ces dernières dispositions est également recevable pour des périodes allant du 1er janvier 2005 au 10 juin 2010.
52 La Commission soutient également, toujours à titre liminaire, que, dans l’hypothèse où le recours vise à faire constater un manquement systématique et persistant aux obligations résultant de la directive 2008/50, la Cour admet la production d’éléments complémentaires visant, au stade de la procédure suivie devant elle, à étayer le caractère général et constant du manquement ainsi allégué. La Cour aurait également confirmé que, dans cette hypothèse, l’objet d’un recours en manquement supposé persistant pouvait s’étendre à des faits postérieurs à l’avis motivé, pour autant que ceux-ci étaient de même nature et constitutifs d’un même comportement que les faits visés dans ledit avis. À cet égard, la Commission soutient que, même après le 31 mai 2014, date d’échéance du délai imparti dans l’avis motivé complémentaire, la Hongrie n’avait toujours pas pris les mesures nécessaires pour mettre fin à la violation systématique et persistante du droit de l’Union.
53 S’agissant plus particulièrement du premier grief invoqué, la Commission fait valoir que la Hongrie n’a pas contesté le dépassement de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones concernées décrit dans l’avis motivé complémentaire.
54 En outre, en ce qui concerne l’argument de la Hongrie selon lequel, au cours de la période postérieure à l’année 2008, une tendance à l’amélioration a été observée dans cet État membre, s’agissant du respect de la valeur limite annuelle, et dans la mesure où ledit État membre a respecté de manière continue, à compter de l’année 2010, les valeurs limites d’émissions prévues par la directive 2001/81, la Commission fait valoir que, selon une jurisprudence constante, conformément à l’article 13, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2008/50, les États membres doivent veiller à ce que, dans l’ensemble de leurs zones et de leurs agglomérations, les niveaux de PM10 dans l’air ambiant ne dépassent pas les valeurs limites fixées à l’annexe XI de cette dernière directive, ce qui constituerait une obligation de résultat qui serait indépendante de toute autre obligation prévue par le droit de l’Union.
55 En outre, la Commission fait valoir qu’un État membre ne saurait avoir entièrement satisfait à ladite obligation en raison du seul fait qu’un plan a été établi conformément à l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50.
56 Enfin, la Commission avance que l’examen des rapports annuels sur la qualité de l’air établis pour la période allant de l’année 2005 à l’année 2016 et remis par la Hongrie montre que la concentration de PM10 dans les zones HU0001 – région de Budapest et HU0008 – vallée de Sajó a dépassé, chaque année à partir de l’année 2005, cela plus de 35 fois par année civile, la valeur limite journalière, cette constatation révélant un problème de nature systémique pour la résolution duquel la Hongrie n’a pas, jusqu’à présent, pris de mesures efficaces permettant de faire passer cette concentration sous le niveau exigé.
57 La Hongrie, tout en niant avoir enfreint l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50, ne conteste pas les dépassements de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones concernées, tels que décrits par la Commission.
58 Toutefois, s’agissant du caractère systématique et persistant de la violation des dispositions invoquées par la Commission, la Hongrie fait valoir que les données concernant le dépassement des valeurs limites de PM10 font clairement apparaître une tendance à l’amélioration et que le problème rencontré est fondamentalement imputable à sa situation géographique et non à d’éventuelles lacunes dans les mesures prises par les autorités hongroises.
Appréciation de la Cour
59 À titre liminaire, il convient de relever, en premier lieu, que la Commission reproche à la Hongrie d’avoir manqué, de manière systématique et persistante, aux obligations découlant des dispositions combinées de l’article 13 de la directive 2008/50 et de l’annexe XI de celle-ci, dans les trois zones visées par le présent recours, à partir du 1er janvier 2005 pour deux de ces zones et, pour la troisième zone, à partir du 11 juin 2011 et jusqu’à l’année 2017. Or, dans la mesure où une partie de cette période se situe à une date antérieure à celle à laquelle les États membres étaient tenus de mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à ladite directive, fixée au 11 juin 2010, voire avant la date d’entrée en vigueur de celle-ci, à savoir le 11 juin 2008, il convient de souligner que la Cour a déjà précisé que les griefs tirés de ces dispositions sont recevables également pour la période allant du 1er janvier 2005 au 11 juin 2010, dès lors que les obligations prévues à ces dispositions trouvent leur origine dans la version initiale de cet acte de l’Union, à savoir les dispositions combinées de l’article 5 de la directive 1999/30 et de l’annexe III de celle-ci [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 65 et jurisprudence citée].
60 En deuxième lieu, il convient de relever que, afin d’étayer la généralité et la constance du manquement reproché, la Commission s’appuie, dans sa requête, sur les données sur la qualité de l’air pour les années 2015 et 2016 qui lui ont été présentées par la Hongrie et, dans son mémoire en réplique, sur celles pour l’année 2017. Si ces données constituent ainsi des faits intervenus postérieurement à la date d’expiration du délai imparti dans l’avis motivé complémentaire, il n’en reste pas moins qu’ils sont de même nature et constitutifs du même comportement que les faits exposés dans cet avis motivé, de telle sorte que l’objet du présent recours peut s’étendre à ceux-ci [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 66 et jurisprudence citée].
61 En troisième lieu, dans son mémoire en réplique, la Commission a, eu égard aux données relatives à l’année 2017, indiqué que la qualité de l’air s’était détériorée par rapport à l’année 2016 dans la zone HU0001 – région de Budapest, qu’elle était restée approximativement au niveau de celle de l’année 2015 dans la zone HU0006 – région de Pécs et qu’elle avait connu les plus mauvais résultats depuis l’année 2012 dans la zone HU0008 – vallée de la Sajó.
62 Il convient ainsi d’analyser le bien-fondé du premier grief en tenant compte de ces indications, dès lors qu’elles ne visent qu’à préciser un grief que la Commission avait déjà fait valoir de manière plus générale dans la requête et, partant, ne modifient pas l’objet du manquement allégué et n’ont aucune incidence sur la portée du litige [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 68 et jurisprudence citée].
63 Ces précisions liminaires ayant été apportées, il y a lieu de relever que, aux termes de l’article 1er, point 1, de la directive 2008/50, celle-ci établit des mesures visant à définir et à fixer des objectifs concernant la qualité de l’air ambiant, afin d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs pour la santé humaine et pour l’environnement dans son ensemble. Dans ce cadre, l’article 13, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive prévoit que les États membres veillent à ce que, dans l’ensemble de leurs zones et de leurs agglomérations, les niveaux, notamment, de PM10 dans l’air ambiant ne dépassent pas les valeurs limites fixées à l’annexe XI de ladite directive.
64 Il convient de rappeler que le grief tiré de la violation dudit article 13, paragraphe 1, premier alinéa, doit être apprécié en tenant compte de la jurisprudence constante aux termes de laquelle la procédure prévue à l’article 258 TFUE repose sur la constatation objective du non-respect, par un État membre, des obligations que lui imposent le traité FUE ou un acte de droit dérivé [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 70 et jurisprudence citée].
65 La Cour a ainsi déjà souligné à maintes reprises que le fait de dépasser la valeur limite fixée pour les PM10 dans l’air ambiant suffit en lui‑même pour que puisse être constaté un manquement aux dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 et de l’annexe XI de celle-ci [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 71 et jurisprudence citée].
66 Or, en l’occurrence, les données résultant des rapports annuels relatifs à la qualité de l’air, présentées par la Hongrie en vertu de l’article 27 de la directive 2008/50, montrent que, de l’année 2005 jusqu’à l’année 2016 incluse, la valeur limite journalière fixée pour les PM10 a été très régulièrement dépassée dans les zones visées par le recours de la Commission.
67 En ce qui concerne la zone HU0001 ‐ région de Budapest, il résulte de ces données que la valeur limite journalière fixée pour les PM10 a été dépassée de l’année 2005 à l’année 2016 chaque année, cela plus de 35 fois par année civile, et, au cours de l’année 2015, de façon particulièrement flagrante. De même, dans la zone HU0008 ‐ vallée de Sajó, un tel dépassement de cette valeur limite a pu être constaté pendant chaque année de la même période. En outre, dans cette zone, selon les données relatives aux années 2015 et 2016, le nombre de jours durant lesquels la valeur limite journalière n’a pas été respectée a excédé de plus de 100 % le nombre de jours de dépassement toléré par la directive 2008/50. De la même manière, dans la zone HU0006 ‐ région de Pécs, qui avait profité d’une exemption de l’obligation d’appliquer la valeur limite journalière fixée pour les PM10, conformément à l’article 22 de la directive 2008/50, jusqu’au 10 juin 2011, cette valeur limite a été dépassée, plus de 35 fois par année civile, chaque année pendant la période visée par le présent recours en ce qui concerne cette zone, à savoir celle ayant commencé le 11 juin 2011, à l’exception de l’année 2014. En 2016, le nombre de jours durant lesquels la valeur limite journalière n’a pas été respectée dans ladite zone a encore excédé de 45 % le nombre de jours de dépassement toléré par cette directive.
68 Par ailleurs, il ressort des données relatives à la qualité de l’air dans les zones concernées par le présent recours, pour l’année 2017, que la valeur limite journalière a été dépassée plus de 35 fois au cours de cette année, le nombre de jours durant lesquels cette valeur n’a pas été respectée dans la zone HU0008 ‐ vallée de Sajó s’élevant à près de 200 % du nombre de jours de dépassement toléré par la directive 2008/50.
69 Il en résulte que les dépassements ainsi constatés doivent être considérés comme persistants et systématiques, sans que la Commission soit tenue d’apporter des preuves supplémentaires á cet égard [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 76].
70 De même, contrairement à ce qu’allègue la Hongrie, un manquement peut demeurer systématique et persistant en dépit d’une éventuelle tendance partielle à la baisse mise en évidence par les données recueillies, qui n’aboutit toutefois pas à ce que cet État membre se conforme aux valeurs limites au respect desquelles il est tenu [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 77 et jurisprudence citée]. Or, tel est le cas en l’espèce.
71 S’agissant de l’argument tiré de l’impact considérable de la pollution transfrontalière sur la qualité de l’air, il convient de rappeler, à cet égard, que, dans une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué et donc d’apporter la preuve qu’un État membre n’a pas respecté une obligation prescrite par une disposition du droit de l’Union, sans pouvoir se fonder sur une présomption quelconque [voir, notamment, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 83 et jurisprudence citée].
72 Or, en ce qui concerne le manquement allégué en l’espèce, il y a lieu de souligner, ainsi qu’il ressort des considérants 17 et 18 de la directive 2008/50, que le législateur de l’Union a fixé les valeurs limites prévues par celle-ci afin de protéger la santé humaine et l’environnement, tout en tenant pleinement compte du fait que les polluants atmosphériques sont produits par de multiples sources et activités et que les différentes politiques menées, tant nationales que de l’Union, peuvent avoir une incidence à cet égard.
73 Par ailleurs, cette directive prévoit, d’une part, à ses articles 20 et 21, la possibilité pour un État membre de faire reconnaître, en tant que sources de pollution contribuant aux dépassements des valeurs limites reprochés, les sources naturelles et le sablage ou le salage hivernal des routes. D’autre part, le paragraphe 2 de l’article 22 de ladite directive prévoit les conditions dans lesquelles, en raison de la situation particulière d’une zone ou d’une agglomération due notamment aux caractéristiques de dispersion du site ou aux conditions climatiques défavorables, l’exemption temporaire de l’obligation de respecter ces valeurs peut être octroyée après un examen comprenant également, ainsi qu’il ressort du paragraphe 4 dudit article, la prise en compte des effets estimés des mesures nationales et de celles de l’Union, existantes et futures.
74 Il s’ensuit que, pour autant que la Commission apporte des éléments permettant de constater le dépassement des valeurs limites fixées par l’article 13 de la directive 2008/50, lu conjointement avec l’annexe XI de celle-ci, dans les zones et agglomérations concernées par son recours et pour les périodes visées dans celui-ci, un État membre ne saurait, sans s’être vu accorder les dérogations au titre des dispositions citées au point précédent et dans les conditions rappelées au même point, se prévaloir de telles circonstances pour contester l’imputabilité du manquement reproché et s’exonérer, ainsi, du respect des obligations claires auxquelles il est tenu depuis le 1er janvier 2005, conformément, en premier lieu, à l’article 5 de la directive 1999/30 et l’annexe III de celle-ci, ainsi que, en second lieu, à l’article 13 et à l’annexe XI de la directive 2008/50.
75 À cet égard, il convient de constater que, bien que la dérogation mentionnée au point précédent ait été accordée pour la zone HU0006 ‐ région de Pécs, l’argument tiré de l’impact considérable de la pollution transfrontalière ne saurait, en toute hypothèse, justifier un dépassement des valeurs limites, cet argument devant être apprécié, en tout état de cause, en tenant compte des références temporelles prévues par ladite dérogation, soit, en l’occurrence, le 11 juin 2011, en ce qui concerne le respect des valeurs limites fixées pour les PM10.
76 Dès lors, et en l’absence de la preuve, apportée par la Hongrie, de l’existence des circonstances exceptionnelles dont les conséquences n’auraient pu être évitées malgré toutes les diligences déployées, est dépourvu de pertinence le fait que le manquement résulte de la volonté de l’État membre auquel il est imputable, de sa négligence ou bien encore de difficultés techniques ou structurelles auxquelles celui-ci aurait été confronté [arrêts du 24 octobre 2019, Commission/France (Dépassement des valeurs limites pour le dioxyde d’azote), C‑636/18, EU:C:2019:900, point 42, ainsi que du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 87 et jurisprudence citée].
77 Par conséquent, les particularités topographiques et climatiques particulièrement défavorables à la dispersion des polluants que pourraient présenter les zones concernées par le présent recours, notamment la zone HU0008 ‐ vallée de Sajó, ne sont pas de nature à exonérer l’État membre concerné de la responsabilité du dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10, mais, au contraire, constituent des éléments qui, ainsi qu’il ressort du point 2, sous c) et d), de la partie A de l’annexe XV de la directive 2008/50, doivent être pris en compte dans le cadre des plans relatifs à la qualité de l’air que cet État membre est tenu, en vertu de l’article 23 de cette directive, d’établir pour ces zones afin d’atteindre la valeur limite en cas de dépassement de celle-ci [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 89].
78 Il résulte de ce qui précède que le premier grief doit être accueilli.
Sur le second grief, tiré d’une violation de l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu seul et en combinaison avec la section A de l’annexe XV de celle-ci
Argumentation des parties
79 Par son second grief, la Commission soutient que la Hongrie a manqué, à partir du 11 juin 2010, aux obligations qui lui incombent en application de l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu seul et en combinaison avec la section A de l’annexe XV de celle-ci, notamment à l’obligation, prévue à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de cette directive, de veiller à ce que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 soit la plus courte possible.
80 La Commission fait valoir, à titre liminaire, que découlent principalement de l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50 deux obligations, à savoir, d’une part, celle d’adopter des mesures appropriées afin de s’assurer que la période de dépassement soit la plus courte possible et, d’autre part, l’obligation de faire figurer dans les plans relatifs à la qualité de l’air le contenu minimal prévu à l’annexe XV, section A, de cette directive.
81 La Commission souligne que l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50 instaure un lien direct entre, d’une part, le dépassement des valeurs limites, c’est-à-dire la violation des obligations prévues par les dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de cette directive, et, d’autre part, l’établissement des plans relatifs à la qualité de l’air.
82 Il convient, selon la Commission, dans ce cadre, de procéder à une analyse au cas par cas des plans relatifs à la qualité de l’air établis par l’État membre concerné, pour vérifier si ceux-ci sont en conformité avec l’article 23 de la directive 2008/50. Dans le cadre de cette appréciation, bien que les États membres disposent d’une certaine marge d’appréciation pour la détermination des mesures à adopter, celles-ci doivent, en tout état de cause, permettre que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible.
83 Afin de déterminer si un plan relatif à la qualité de l’air prévoit des mesures appropriées pour que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible, la Commission fait valoir qu’il convient de tenir compte de plusieurs facteurs, déduits, notamment, de la jurisprudence pertinente de la Cour.
84 Premièrement, en se référant à l’arrêt du 5 avril 2017, Commission/Bulgarie (C‑488/15, EU:C:2017:267, points 115 à 117), la Commission fait valoir que la qualification, par la Cour, du dépassement des valeurs limites pendant plusieurs années de « systématique et persistant » démontre par elle-même, sans qu’il soit besoin d’examiner de manière détaillée le contenu des plans relatifs à la qualité de l’air établis par l’État membre concerné, que cet État membre n’a pas mis à exécution des mesures appropriées et efficaces pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 soit « la plus courte possible ».
85 Deuxièmement, un dépassement des valeurs limites sur une longue durée constituerait un indice important du fait que l’État membre concerné n’a pas rempli l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50. La durée des futurs dépassements estimés des valeurs limites devrait également être, comme l’aurait indiqué la Cour dans son arrêt du 22 février 2018, Commission/Pologne (C‑336/16, EU:C:2018:94, point 99), prise en considération lors de l’évaluation des plans relatifs à la qualité de l’air, un délai particulièrement long ne pouvant être justifié que par des circonstances exceptionnelles.
86 Troisièmement, il conviendrait de tenir compte du niveau absolu du dépassement des valeurs limites. Plus la durée d’un dépassement est longue, plus celui-ci indiquerait l’efficacité ou l’inefficacité des mesures déjà adoptées en vue de l’amélioration de la qualité de l’air. La Commission rappelle que, en tout état de cause, il appartient à l’État membre concerné de contester l’indice que constitue le dépassement persistant des valeurs limites et de démontrer, notamment, que ses plans relatifs à la qualité de l’air remplissent les exigences fixées à l’article 23, paragraphe 1, et à l’annexe XV, section A, de ladite directive.
87 Quatrièmement, l’évolution du dépassement, même à la baisse, lorsque l’ampleur de ce dernier est telle que les mesures figurant dans les plans relatifs à la qualité de l’air ne semblent pas être de nature à assurer que la période de dépassement soit la plus courte possible, constituerait également un indice important du fait que l’État membre concerné n’a pas satisfait à l’obligation résultant de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50.
88 Cinquièmement, il devrait être tenu compte du contenu formel des plans relatifs à la qualité de l’air, en particulier du point de savoir si ceux-ci contiennent toutes les informations requises à la section A de l’annexe XV de la directive 2008/50.
89 Sixièmement, le contenu matériel des plans relatifs à la qualité de l’air, en particulier la nature contraignante et suffisante des mesures envisagées, ainsi que la prévision d’un cadre financier approprié pour leur mise en œuvre seraient des facteurs dont il convient de tenir compte dans le cadre de l’évaluation desdits plans.
90 Dans ce contexte, la Commission fait valoir que, bien que les États membres disposent d’une certaine marge d’appréciation en ce qui concerne le choix des mesures à mettre en œuvre, plus la période de non-respect dure et plus la situation s’aggrave, plus cette marge d’appréciation se réduit.
91 La Commission soutient également que, étant donné que, en l’espèce, l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 a été enfreint de manière systématique et persistante, la Hongrie ayant omis de se conformer aux obligations résultant de cette disposition ainsi que de l’annexe XI de cette directive en ce qui concerne la valeur limite journalière, dans les zones HU0001 – région de Budapest et HU0008 – vallée de Sajó à partir de l’année 2005 et, dans la zone de HU0006 – région de Pécs à partir du 10 juin 2011, à l’exception de l’année 2014, soit pendant une période de dépassement exceptionnellement longue, il y a lieu de constater une violation de l’article 23, paragraphe 1, de ladite directive.
92 En outre, la Commission reproche à l’État membre concerné l’absence d’éléments d’information essentiels exigés à l’annexe XV, section A, de la directive 2008/50, notamment l’absence d’informations indispensables sur les mesures déjà appliquées et celles envisagées, en particulier en ce qui concerne l’estimation de l’amélioration de la qualité de l’air escomptée et le délai prévu pour la réalisation de ces objectifs, ainsi que l’exigerait l’annexe XV, section A, point 8, sous c), de cette directive.
93 La Commission invoque, à cet égard, l’absence de révision des plans relatifs à la qualité de l’air adoptés par la Hongrie pendant l’année 2008, alors que ceux-ci s’étaient révélés inefficaces pour que cet État membre soit à même de se conformer à la directive 2008/50, ainsi que le défaut d’adoption de mesures concrètes nécessaires pour que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible, critère en principe exigé à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de cette directive.
94 La Commission conteste, dans ce contexte, l’argumentation de la Hongrie selon laquelle le respect des exigences relatives à la qualité de l’air nécessitait beaucoup plus d’efforts et de temps que dans d’autres États membres, qui bénéficient d’une situation géographique et de conditions géologiques et météorologiques plus favorables. La Commission réfute également l’argument avancé par cet État membre selon lequel il convient de prendre en compte l’impact de la pollution transfrontalière sur la qualité de l’air constatée sur son territoire, dans la mesure où ces difficultés invoquées par la Hongrie étaient connues de longue date, qu’elles avaient déjà été prises en compte dans le cadre de l’évaluation de la notification qu’elle avait transmise en vue de prolonger le délai fixé conformément à l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2008/50, et qu’elles n’ont pas été quantifiées de manière précise dans les plans élaborés.
95 La Commission ajoute que les plans sur la qualité de l’air transmis à cette institution au cours de l’année 2008 présentaient déjà des lacunes importantes en ce qu’ils ne contenaient pas d’évaluation des incidences des mesures envisagées pour réduire les émissions de PM10. Les plans sur la qualité de l’air révisés concernant l’année 2013 auraient présenté les mêmes insuffisances que ceux relatifs à l’année 2008, dans la mesure où ils ne contenaient, selon la Commission, aucune indication des effets réels des mesures mentionnées ni aucune évaluation de leur impact global dans l’ensemble des zones concernées.
96 La Commission signale également qu’aucune tendance à la baisse notable durant la période suivant l’adoption de ces plans n’a pu être constatée. Au contraire, le nombre de jours de dépassement aurait été plus élevé pendant l’année 2016 que durant l’année 2014, dans chacune des zones concernées.
97 À cet égard, la Commission soutient que, en dépit du temps qui s’est écoulé depuis le démarrage du programme de mesures adopté au cours de l’année 2011, la Hongrie n’est toujours pas parvenue à respecter la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones concernées, en raison, notamment, de la lente mise en œuvre de ce programme ou en raison du retard considérable apporté à la mise en œuvre de certaines mesures prévues par ledit programme. Étant donné que les sources résidentielles, en particulier le chauffage domestique, constitueraient le principal facteur de pollution par les PM10 en Hongrie, le retard constaté dans l’adoption des mesures législatives nécessaires à la réduction de ces émissions ne serait pas justifiable.
98 En outre, ni les plans sur la qualité de l’air correspondants, ni le programme de mesures, ni les rapports de mise en œuvre le concernant n’indiqueraient clairement la date de mise en conformité prévue, la date indiquée par les autorités hongroises, située entre la fin de l’année 2019 et l’année 2025, semblant arbitraire et n’étant en aucun cas conforme à l’exigence visée à l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50.
99 La Commission en conclut que les mesures prises jusqu’à présent sont manifestement inappropriées pour mettre fin au dépassement de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les meilleurs délais et qu’il existe de toute évidence d’autres mesures efficaces qui pourraient contribuer de manière substantielle à ce que cette valeur limite soit respectée.
100 La Hongrie fait notamment valoir l’existence d’une tendance claire à l’amélioration, dont témoigneraient non seulement les données mesurées, mais également le resserrement de l’objet du recours de la Commission, dans la mesure où, parmi les huit zones initialement concernées, trois seulement font l’objet de celui-ci. La Hongrie soutient, à cet égard, que tant le nombre maximal de dépassements de la valeur limite journalière que la proportion des stations enregistrant un dépassement ont diminué au cours des dernières années. Alors que, autour de l’année 2006, le nombre de dépassements de la valeur limite journalière était supérieur à 200, ces dépassements seraient restés inférieurs à 100 ces dernières années, et la proportion de stations constatant un dépassement serait deux fois moins élevée qu’alors, tandis que les dépassements de la valeur limite annuelle seraient toujours plus rares, même si de tels dépassements peuvent, selon cet État membre, être relevés.
101 Toutefois, la Hongrie soutient que cette institution n’a pas tenu compte de cette tendance à l’amélioration de l’air pendant la période allant de l’année 2012 à l’année 2016, par rapport à la situation constatée pendant la période allant de l’année 2007 à l’année 2011.
102 La Hongrie précise, à cet égard, que le pic de l’année 2015 s’explique par des travaux de construction autour d’une station située sur une place à Budapest, ce qui constituerait une situation exceptionnelle qui, conformément à la jurisprudence de la Cour, serait également une circonstance pertinente devant être prise en considération par la Commission.
103 La Hongrie invoque également, pour les années 2017 et 2018, une diminution de la pollution, nonobstant des augmentations ponctuelles dues à des circonstances particulières, telles qu’un froid exceptionnel à la fin du mois de janvier 2017 ou des travaux de reconstruction au cours de l’année 2018. Elle souligne que les États membres disposent d’une certaine marge d’appréciation lors de la détermination des mesures à adopter, dont elle a fait usage, et qu’elle a pris les mesures nécessaires pour atteindre les valeurs limites dans le délai le plus court possible, en y consacrant des moyens importants, jusqu’à la date du dépôt de son mémoire en défense, le 2 janvier 2019.
104 En ce qui concerne les mesures prises afin d’améliorer la qualité de l’air dans la zone HU0001 – région de Budapest, la Hongrie énumère, outre une référence à la densité du réseau des transports en commun local, à titre d’exemple, le développement de l’usage du vélo, l’acquisition d’autobus, de tramways et de trolleybus, la réalisation de parkings P+R, la rénovation d’une ligne de métro ainsi que la mise en service d’une autre ligne, la mise en place d’un réseau de rechargement pour les véhicules électriques, la rénovation des nœuds de circulation et la modernisation énergétique des immeubles et des bâtiments.
105 S’agissant de la zone HU0006 – région de Pécs, la Hongrie renvoie aux programmes et aux mesures visant, à titre d’exemple, à étendre les zones à trafic modéré, la protection des plantes ligneuses et le maintien de l’équilibre entre les valeurs d’activité biologique des zones, la réforme de la réglementation locale relative à l’alerte « smog », la coordination des travaux publics et du nettoyage public ainsi que les programmes de remplacement des autobus ou des locomotives diesel.
106 En ce qui concerne la zone HU0008 – vallée de Sajó, la Hongrie invoque des programmes visant, à titre d’exemple, à la réduction des émissions industrielles, notamment par la fermeture de certaines centrales, des restrictions relatives aux émissions des habitations, la modernisation des chauffages individuels, la mise en place de nouvelles installations de combustion modernes, des programmes visant une meilleure gestion des déchets et l’accroissement des espaces verts.
107 Dans ce contexte, la Hongrie souligne que l’ensemble du pays est situé dans un bassin et que cette situation aggrave des particularités locales, telles que celles aboutissant souvent, dans la zone HU0008 – vallée de Sajó, à un phénomène « d’inversion » restreignant le mouvement de l’air et donc, également, l’éloignement des PM10.
108 En outre, selon la Hongrie, l’affirmation de la Commission selon laquelle cet État membre, à défaut d’une quantification précise, n’aurait pas démontré l’importance que revêtirait la pollution transfrontalière est dépourvue de fondement.
109 Dans son mémoire en réplique, s’agissant des conditions météorologiques défavorables, qui sont, selon le gouvernement hongrois, responsables de la détérioration de la qualité de l’air dans la zone HU0008 – vallée de Sajó, la Commission fait valoir que ces facteurs ne sauraient, à eux seuls, expliquer les dépassements constatés.
110 La Commission rappelle également, étant donné la durée, en l’espèce, des dépassements de la valeur limite journalière fixée pour les PM10, la jurisprudence selon laquelle aucune difficulté exceptionnelle n’est susceptible de justifier des prévisions de retard aussi longues quant au respect des valeurs limites et que des plans relatifs à la qualité de l’air ne prévoyant le respect des valeurs limites que sur le long terme ne sont pas compatibles avec l’exigence visant à assurer que la période de dépassement soit la plus courte possible.
111 S’agissant de l’argument tiré de la pollution transfrontalière, la Commission réplique qu’elle prend des mesures concertées, à cet égard, dans toute l’Union et que les États membres voisins de la Hongrie sont également tenus d’adopter des mesures concernant la qualité de l’air en appliquant également les instruments relevant de la directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil, du 14 décembre 2016, concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques, modifiant la directive 2003/35/CE et abrogeant la directive 2001/81 (JO 2016, L 344, p. 1).
112 La Hongrie, dans son mémoire en duplique, s’agissant de l’argumentation de la Commission tirée du manque de quantification de l’incidence des mesures prévues, admet que, actuellement, l’évaluation appropriée des incidences ne peut plus être réalisée avec la précision nécessaire sans équipement informatique. Or, pour cette raison, un modèle national de la qualité de l’air aurait été élaboré et, dans le cadre de sa première application, les plans révisés au cours de l’année 2016 comprendraient déjà une évaluation des incidences.
113 La Hongrie souligne, en outre, que la notion de « période la plus courte possible », au sens de l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, doit être interprétée au cas par cas, en prenant en considération les mesures envisagées, qui doivent être mises en œuvre aussi rapidement que possible. Cependant, la période la plus courte possible, relative à la mise en œuvre de ces mesures, ne devrait pas être déterminée, en raison de la nature complexe de la pollution de l’air, en fonction des effets desdites mesures.
Appréciation de la Cour
114 Il résulte de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 que, lorsque le dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 a lieu après le délai prévu pour leur application, l’État membre concerné est tenu d’établir un plan relatif à la qualité de l’air qui réponde à certaines exigences.
115 Ainsi, ce plan doit prévoir les mesures appropriées pour que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible et peut comporter des mesures additionnelles spécifiques pour protéger les catégories de population sensibles, notamment les enfants. En outre, selon l’article 23, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2008/50, ledit plan doit contenir au moins les informations énumérées à l’annexe XV, section A, de cette directive et peut aussi inclure les mesures visées à l’article 24 de celle-ci. Ce même plan doit être transmis à la Commission sans délai et au plus tard deux ans après la fin de l’année au cours de laquelle le premier dépassement des valeurs limites a été constaté.
116 Ainsi qu’il résulte de la jurisprudence constante de la Cour, l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50 a une portée générale étant donné qu’il s’applique, sans limitation dans le temps, aux dépassements de toute valeur limite de polluant fixée par cette directive, après le délai prévu pour son application, qu’il soit fixé par ladite directive ou par la Commission en vertu de l’article 22 de celle-ci [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 132 et jurisprudence citée].
117 Il y a également lieu de relever que l’article 23 de la directive 2008/50 instaure un lien direct entre, d’une part, le dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 telles que prévues par les dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 et de l’annexe XI de celle-ci et, d’autre part, l’établissement de plans relatifs à la qualité de l’air [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895 point 133 et jurisprudence citée].
118 Ces plans ne peuvent être établis que sur le fondement de l’équilibre entre l’objectif de réduction du risque de pollution et les différents intérêts publics et privés en présence [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 134 et jurisprudence citée].
119 Dès lors, le fait qu’un État membre dépasse les valeurs limites fixées pour les PM10 ne suffit pas, à lui seul, pour qu’il soit considéré que cet État membre a manqué aux obligations prévues à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 135 et jurisprudence citée].
120 Cependant, il résulte de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 que, si les États membres disposent d’une certaine marge de manœuvre pour la détermination des mesures à adopter, celles-ci doivent, en tout état de cause, permettre que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 136 et jurisprudence citée].
121 Dans ces conditions, il convient de vérifier, par une analyse au cas par cas, si les plans relatifs à la qualité de l’air établis par l’État membre concerné sont en conformité avec l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 137 et jurisprudence citée].
122 En l’occurrence, force est de constater, à titre liminaire, que la Hongrie a, de manière systématique et persistante, manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 et de l’annexe XI de celle-ci, dans les zones concernées par le présent recours, entre l’année 2005 et l’année 2017, ainsi qu’il résulte de l’examen du premier grief soulevé par la Commission.
123 Il convient de rappeler, dans ce contexte, que l’obligation d’établir, en cas de dépassements des valeurs limites prévues par la directive 2008/50, des plans relatifs à la qualité de l’air comportant des mesures appropriées pour que la période de dépassement soit la plus courte possible s’est imposée à l’État membre concerné à partir du 11 juin 2010. Dans la mesure où de tels dépassements avaient déjà été constatés à cette date, voire avant celle-ci, dans les zones HU0001 ‐ région de Budapest et HU0008 ‐ vallée de Sajó, et, en tout état de cause, dans toutes les zones visées par le présent recours à partir de ladite date, la Hongrie qui devait mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2008/50, conformément à l’article 33, paragraphe 1, de celle-ci, était tenue d’adopter et de mettre à exécution, le plus rapidement possible, des mesures appropriées, en application de l’article 23, paragraphe 1, de cette directive.
124 Or, il ressort du dossier soumis à la Cour, premièrement, que, au moment de l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé complémentaire, la Hongrie avait bien adopté des plans relatifs à la qualité de l’air ainsi que différentes mesures destinées à améliorer celle‑ci.
125 Deuxièmement, il importe de souligner que, en vertu de l’article 23, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2008/50, les plans établis doivent contenir au moins les informations énumérées à l’annexe XV, section A, de celle-ci. Or, il ressort des données figurant dans ledit dossier que ces plans, d’une part, ne donnent pas d’indication précise concernant l’amélioration de la qualité de l’air escomptée et le délai prévu pour la réalisation des objectifs visés. D’autre part, les mesures invoquées par la Hongrie ne mentionnent pas la date à laquelle sera assuré le respect de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones concernées, et sont, en outre, souvent en cours d’adoption ou de planification et prévoient parfois une durée de mise en œuvre pouvant s’étendre sur plusieurs années après l’entrée en vigueur des valeurs limites fixées pour les PM10.
126 À cet égard, il y a lieu de constater que la création d’une zone à faibles émissions à Budapest, qui était déjà prévue dans le plan relatif à la qualité de l’air de 2008, n’a pas été réalisée avant l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé complémentaire. En outre, le plan relatif à la qualité de l’air de 2013 visant cette zone ne contient aucune information en ce qui concerne le délai de mise en conformité. S’agissant de la zone HU0006 – région de Pécs, il ressort du plan relatif à la qualité de l’air de 2013 que le délai envisagé pour la mise en conformité a été fixé au 31 décembre 2019, tandis que le gouvernement hongrois, dans sa réponse à l’avis motivé complémentaire, indique le 1er janvier 2021 comme date définitive pour cette mise en conformité, ce qui montre que les mesures prévues par ce plan ne permettaient pas de garantir que la période de non-conformité soit, conformément à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50, la plus courte possible. S’agissant du plan relatif à la qualité de l’air de 2013 afférent à la zone HU0008 – vallée de Sajó, lequel contient en grande partie les mêmes mesures que celles figurant dans le plan relatif à la qualité de l’air de 2008, il convient de constater qu’il n’en ressort aucun délai clair et précis de mise en conformité définitif.
127 Par ailleurs, il convient de rappeler que les données résultant des rapports annuels relatifs à la qualité de l’air indiquent que, dans la zone HU0001 – région de Budapest, entre l’année 2005 et l’année 2017, la valeur limite journalière fixée pour les PM10 a été dépassée chaque année. Bien que ce dépassement montre une tendance générale à la baisse durant cette période, le nombre de jours durant lesquels cette valeur limite a été dépassée était particulièrement élevé pendant l’année 2015, ce nombre ayant plus que doublé par rapport à l’année précédente, malgré les mesures prévues par les autorités hongroises. Par ailleurs, alors que cet accroissement s’est réduit entre l’année 2015 et l’année 2016, le nombre de jours durant lesquels ladite valeur limite a été dépassée était plus élevé pendant l’année 2016 que pendant l’année 2014. S’agissant de la zone HU0006 – région de Pécs, à partir du 11 juin 2011 et jusqu’à l’année 2016 incluse, la concentration de PM10 a dépassé tous les ans (à l’exception de l’année 2014) la valeur limite journalière, cela plus de 35 fois par année civile. Durant l’année 2016, le nombre de jours durant lesquels ladite valeur limite a été dépassée a encore été supérieur de 45 % au nombre de jours de dépassement toléré par la directive 2008/50 et, en dépit d’une baisse significative pendant l’année 2017, il a encore été supérieur au nombre de jours de dépassement toléré par cette directive. En ce qui concerne la zone HU0008 – vallée de Sajó, il ressort du dossier soumis à la Cour, que, entre l’année 2005 et l’année 2016, la valeur limite journalière a été dépassée chaque année, cela plus de 35 fois par année civile. S’il est vrai qu’un tel dépassement n’a eu lieu que durant 38 jours au cours de l’année 2014, il convient toutefois de constater que, pendant la période antérieure, le nombre de jours de dépassement toléré par cette directive avait été dépassé de 100 % au moins chaque année. Pendant l’année 2015, ce nombre de jours a presque doublé et a continué à augmenter au cours des années suivantes. Dans ce contexte, il convient de relever que le nombre de jours pendant lesquels la valeur limite journalière fixée pour les PM10 a été dépassé au cours de l’année 2017 a été supérieur au nombre de jours de dépassement constaté pour l’année 2010.
128 Compte tenu des éléments figurant aux points 124 à 127 du présent arrêt, il y a lieu de relever que la Hongrie n’a manifestement pas adopté en temps utile des mesures appropriées permettant d’assurer que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 soit la plus courte possible dans les zones concernées. Ainsi, le dépassement de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 est demeuré systématique et persistant durant, respectivement, six et huit années dans lesdites zones, en dépit de l’obligation incombant à cet État membre de prendre toutes les mesures appropriées et efficaces pour se conformer à l’exigence selon laquelle la période de dépassement doit être la plus courte possible.
129 Or, une telle situation démontre par elle-même, sans qu’il soit besoin d’examiner de manière plus détaillée le contenu des plans relatifs à la qualité de l’air établis par la Hongrie, que, en l’occurrence, cet État membre n’a pas mis à exécution des mesures appropriées et efficaces pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 soit « la plus courte possible », au sens de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 147 et jurisprudence citée].
130 S’agissant de l’argument avancé par la Hongrie selon lequel il est indispensable, pour l’État membre concerné, de disposer de délais plus longs pour que les mesures prévues dans les différents plans relatifs à la qualité de l’air puissent produire leurs effets, notamment en raison de sa situation géographique et des conditions géologiques et météorologiques moins favorables que dans d’autres États membres ainsi que de l’impact considérable de la pollution transfrontalière sur la qualité de l’air, il convient de constater que cette considération ne saurait, en toute hypothèse, justifier un délai particulièrement long pour mettre un terme à un dépassement des valeurs limites, celui-ci devant être apprécié, en tout état de cause, en tenant compte des références temporelles prévues par la directive 2008/50 pour satisfaire aux obligations de celle-ci, soit, en l’espèce, le 1er janvier 2005, pour les valeurs limites fixées pour les PM10, et le 11 juin 2010, pour l’adoption des plans relatifs à la qualité de l’air, ainsi que de l’importance des objectifs de protection de la santé humaine et de l’environnement poursuivis par cette directive.
131 Il y a lieu de relever à cet égard que, selon le libellé même de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de cette directive, le caractère approprié des mesures prévues dans un plan relatif à la qualité de l’air doit être évalué au regard de leur capacité de garantir que la période de dépassement soit « la plus courte possible », cette exigence étant plus stricte que celle applicable antérieurement, sous l’empire de la directive 96/62, qui se limitait à imposer aux États membres d’adopter, « dans un délai raisonnable », des mesures visant à mettre la qualité de l’air en conformité avec les valeurs limites applicables aux concentrations de PM10 [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 149 et jurisprudence citée].
132 C’est ainsi que, dans cette optique, l’article 23 de la directive 2008/50 impose que, lorsqu’un dépassement des valeurs limites fixées pour les PM10 a été constaté, une telle situation doit conduire le plus rapidement possible l’État membre concerné non seulement à adopter, mais aussi à mettre en exécution des mesures appropriées dans un plan relatif à la qualité de l’air, la marge de manœuvre dont dispose cet État membre en cas de dépassement des valeurs limites étant donc, dans ce contexte, limitée par cette exigence [arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 150].
133 Par ailleurs, en ce qui concerne l’argument de la Hongrie selon lequel des mesures sont appropriées même si elles ne commencent à produire des effets que longtemps après la date de la constatation du dépassement de la valeur limite concernée, ou, autrement dit, la période « la plus courte possible » ne devrait pas, en raison de la nature complexe de la pollution de l’air, concerner les effets des mesures, il convient de rappeler qu’un État membre doit établir que les difficultés qu’il invoque pour mettre fin aux dépassements des valeurs limites fixées pour les PM10, lesquelles ne revêtent pas un caractère exceptionnel, sont de nature à exclure que des délais moins longs auraient pu être fixés [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 151 et jurisprudence citée].
134 Il y a lieu de constater, dans ce contexte, que la Hongrie s’est bornée, s’agissant de sa situation géographique ainsi que des conditions géologiques et météorologiques présentes dans cet État membre, à invoquer des éléments de caractère général mentionnés dans les plans relatifs à la qualité de l’air, sans fournir davantage de précisions ni effectuer une analyse plus approfondie, au cas par cas, en ce qui concerne chacune des zones visées par le recours de la Commission. Or, ces difficultés structurelles ne revêtent pas un caractère exceptionnel et ne sont pas de nature à exclure que des délais moins longs auraient pu être fixés [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 152 et jurisprudence citée].
135 S’agissant, plus particulièrement, de l’argument tiré de la pollution transfrontalière, il convient de relever que la Hongrie n’a pas quantifié, de manière suffisamment précise, l’incidence de cette pollution sur le respect de la valeur limite journalière fixée pour les PM10 dans les zones visées par le présent recours. En tout état de cause, le fait que des facteurs externes contribuent à la pollution de l’air dans cet État membre ne saurait, ainsi qu’il a été relevé au point 135 du présent arrêt, justifier la circonstance que, à l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé complémentaire, cette valeur limite n’était toujours pas respectée dans ces zones.
136 De surcroît, les difficultés invoquées par la Hongrie étaient connues de longue date et avaient déjà été prises en compte dans le cadre de l’évaluation des éléments que cet État membre avait transmis à la Commission en vue de prolonger le délai imparti, conformément à l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2008/50.
137 Dans ces conditions, le second grief invoqué par la Commission doit également être accueilli.
138 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que la Hongrie :
– en ayant dépassé de façon systématique et persistante la valeur limite journalière fixée pour les concentrations de particules PM10, d’une part, à partir du 1er janvier 2005 et jusqu’à l’année 2017 incluse, dans la zone HU0001 – région de Budapest et dans la zone HU0008 – vallée de Sajó, ainsi que, d’autre part, à partir du 11 juin 2011 et jusqu’à l’année 2017 incluse (à l’exception de l’année 2014), dans la zone HU0006 – région de Pécs, a manqué à l’obligation qui lui incombait en vertu des dispositions combinées de l’article 13 et de l’annexe XI de la directive 2008/50, et
– en n’ayant pas adopté, à partir du 11 juin 2010, de mesures appropriées pour garantir le respect de la valeur limite journalière fixée pour les concentrations de particules PM10 dans ces zones, a manqué aux obligations imposées à l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu seul et en combinaison avec l’annexe XV, section A, de cette directive, et, en particulier, à l’obligation prévue à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la même directive, de veiller à ce que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible.
Sur les dépens
139 En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la Hongrie et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête :
1) La Hongrie :
– en ayant dépassé de façon systématique et persistante la valeur limite journalière fixée pour les concentrations de particulesPM10, d’une part, à partir du 1er janvier 2005 et jusqu’à l’année 2017 incluse, dans la zone HU0001 – région de Budapest et dans la zone HU0008 – vallée de Sajó, ainsi que, d’autre part, à partir du 11 juin 2011 et jusqu’à l’année 2017 incluse (à l’exception de l’année 2014), dans la zone HU0006 – région de Pécs, a manqué à l’obligation qui lui incombait en vertu des dispositions combinées de l’article 13 et de l’annexe XI de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008, concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe, et
– en n’ayant pas adopté, à partir du 11 juin 2010, de mesures appropriées pour garantir le respect de la valeur limite journalière fixée pour les concentrations de particules PM10 dans ces zones, a manqué aux obligations imposées à l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu seul et en combinaison avec l’annexe XV, section A, de cette directive, et, en particulier, à l’obligation prévue à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la même directive, de veiller à ce que la période de dépassement des valeurs limites soit la plus courte possible.
2) La Hongrie est condamnée aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure : le hongrois.
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