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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> VO v Commission (Civil service - Officials - Demotion for incompetence - Judgment) French Text [2024] EUECJ T-160/23 (06 November 2024) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2024/T16023.html Cite as: [2024] EUECJ T-160/23, ECLI:EU:T:2024:791, EU:T:2024:791 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)
6 novembre 2024 (*)
« Fonction publique - Fonctionnaires - Rétrogradation pour insuffisance professionnelle - Article 51, paragraphe 1, sous a), du statut - Dispositions internes d’exécution de l’article 51 du statut - Programme d’appui et de correction - Plan d’accompagnement - Responsabilité - Préjudices matériel et moral »
Dans l’affaire T‑160/23,
VO, représentée par Me É. Boigelot, avocat,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M. L. Hohenecker et Mme G. Niddam, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre),
composé de MM. L. Truchot, président, H. Kanninen et M. Sampol Pucurull (rapporteur), juges,
greffier : M. L. Ramette, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure,
à la suite de l’audience du 6 mars 2024,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, la requérante, VO, demande, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission européenne du 20 mai 2022 la rétrogradant du grade AST 2, échelon 3, au grade AST 1, échelon 3, avec effet au 1er juin 2022 (ci-après la « décision attaquée ») et, d’autre part, la réparation des préjudices matériel et moral qu’elle aurait subis de ce fait.
Antécédents du litige
2 La requérante est une ancienne fonctionnaire entrée au service de la Commission le 1er novembre 2008.
3 Après plusieurs réaffectations, la requérante a été transférée le 16 octobre 2016 dans l’unité dirigée par A, où elle occupait un poste de secrétaire.
4 Le 23 novembre 2017, la requérante a participé à une réunion, à laquelle étaient présents A et B, une responsable des ressources humaines, et au cours de laquelle ces derniers ont exprimé leurs préoccupations au sujet de la qualité de son travail et l’ont avertie que ses prestations ne correspondaient pas au niveau attendu.
5 Le rapport d’évaluation pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2017, établi le 16 mars 2018 par A, a conclu que les prestations de la requérante étaient insatisfaisantes durant la période concernée (ci-après le « rapport d’évaluation 2017 »). La requérante n’a pas signé son rapport d’évaluation. Le 29 novembre 2018, la requérante a fait appel dudit rapport. Le 19 décembre 2018, le rapport d’évaluation 2017, portant la conclusion que la performance de la requérante avait été insatisfaisante, est devenu définitif après décision du notateur d’appel.
6 Par une note du 24 octobre 2018, A a rappelé à la requérante les obligations statutaires en matière d’horaires de travail, d’encodage des heures et de communication d’un certificat médical en cas d’absence pour raison médicale, en l’avertissant des éventuelles conséquences disciplinaires de son comportement.
7 Le 6 décembre 2018, A a convié la requérante à une réunion en présence de B du service des ressources humaines, qu’elle a déclinée. Après une seconde invitation le 10 décembre 2018, la requérante a informé A qu’elle souhaitait d’abord s’entretenir avec un responsable du service des ressources humaines ainsi qu’avec les services sociaux.
8 Pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2018, le rapport d’évaluation, établi le 19 février 2019 par A et devenu définitif le 25 mars 2019, concluait également au caractère insatisfaisant des prestations de la requérante pour la période concernée (ci-après le « rapport d’évaluation 2018 »).
9 Le 13 mai 2019, au cours d’une réunion organisée en présence de la requérante, de A et de B, il a notamment été décidé de ne plus attribuer à la requérante le traitement des consultations interservices dont elle était chargée, en raison d’erreurs récurrentes et des possibles répercussions de ces erreurs sur ses collègues et sur la réputation de l’unité, mais de lui laisser la responsabilité de la gestion des missions.
10 Le 18 septembre 2019, A a organisé une réunion afin d’aborder avec la requérante la question de la gestion des missions et des déclarations de frais.
11 Pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2019, le rapport d’évaluation de la requérante, établi le 3 février 2020 par A, a de nouveau conclu que le niveau de ses prestations avait été insatisfaisant (ci-après le « rapport d’évaluation 2019 »). Le 28 février 2020, la requérante a fait appel du rapport d’évaluation 2019.
12 Le 1er août 2020, la requérante a été transférée dans une autre unité, dirigée par C.
13 Par un avis unanime du 3 décembre 2020, le comité paritaire consultatif de l’insuffisance professionnelle (ci-après le « comité »), saisi à la suite de l’appel de la requérante contre le rapport d’évaluation 2019, conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la décision C(2013) 8985 de la Commission, du 16 décembre 2013, relative aux dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut et aux modalités d’application de l’article 44, premier alinéa, du statut (ci-après les « DGE de l’article 43 »), a considéré qu’il convenait de confirmer le rapport d’évaluation 2019. Le comité a d’abord souligné que certains aspects de ses prestations, notamment le respect des horaires, auraient pu être mieux appréhendés sous l’angle disciplinaire plutôt que par des rapports d’évaluation insatisfaisants. Le comité a ensuite estimé que la requérante aurait dû bénéficier d’un plan d’accompagnement dès le premier rapport d’évaluation insatisfaisant. De surcroît, étant donné que les prestations de la requérante étaient insatisfaisantes depuis un certain temps, le comité a souligné qu’une mesure de mobilité aurait pu être comprise dans un tel plan, tout en rappelant que la requérante avait bien fait l’objet d’une réaffectation le 1er août 2020. Le comité a également relevé que la situation de la requérante devrait faire l’objet d’une approche multidisciplinaire afin de résoudre les problèmes sous-jacents de façon appropriée. Le comité a enfin considéré que la requérante devrait bénéficier de formations afin de relever le niveau de ses prestations.
14 Le 11 janvier 2021, le rapport d’évaluation 2019 est devenu définitif après que l’évaluateur d’appel a confirmé que la performance de la requérante pour l’année 2019 avait été insatisfaisante, en vertu de l’article 7, paragraphe 4, des DGE de l’article 43.
15 Le 10 février 2021, le chef de l’unité chargé de la gestion des évaluations au sein de la Commission a sollicité un avis médical, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 1, de la décision C(2019) 6855 de la Commission, du 4 octobre 2019, relative aux procédures de traitement de l’insuffisance professionnelle (ci-après les « dispositions internes de 2019 »), en raison d’un doute sur l’origine médicale des difficultés rencontrées par la requérante pour exercer les tâches lui incombant. Par courrier électronique du 13 juillet 2021, le service médical de la Commission a conclu que la requérante ne présentait pas de contre-indication médicale à la réalisation de ses tâches.
16 Par une note du 16 novembre 2021, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a communiqué à la requérante une proposition motivée de la rétrograder, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous b), du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »). Par un courrier électronique du 19 novembre 2021, l’AIPN l’a invitée à présenter ses commentaires sur cette proposition.
17 Pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2020, le rapport d’évaluation, établi le 7 mai 2021 par C et devenu définitif le 25 novembre 2021, a également conclu que la performance de la requérante avait été insatisfaisante. Les prestations de la requérante ont été évaluées par A pour la période allant du 1er janvier au 31 juillet 2020 et par C à partir du 1er août 2020.
18 Le 1er décembre 2021, l’AIPN a sollicité l’avis du comité sur la proposition de rétrograder la requérante. Le 6 décembre 2021, la requérante a présenté ses commentaires au comité. Le 13 décembre 2021, elle a informé sa cheffe d’unité et le service médical de la Commission qu’elle était en congé maladie et ne pouvait donc être entendue par le comité qui l’avait convoquée pour un entretien le 14 décembre 2021.
19 Le 16 février 2022, la requérante, initialement convoquée le 14 décembre 2021, a finalement été entendue par le comité lors d’une audition, après son retour de congé maladie.
20 Le 1er mars 2022, le comité a adopté à l’unanimité un avis motivé, sur le fondement de l’article 51, paragraphe 4, du statut, et conclu que la proposition de rétrogradation était justifiée. Le comité a d’abord estimé que la requérante avait bénéficié d’un soutien de la part de sa hiérarchie et du service des ressources humaines. Le comité a ensuite pris en compte sa réaffectation le 1er août 2020 dans une nouvelle unité. Le comité a enfin considéré que, malgré le soutien apporté et les efforts fournis par sa hiérarchie et le service des ressources humaines dans ce nouvel environnement de travail, le travail de la requérante n’avait pas atteint le niveau attendu d’une secrétaire de la Commission.
21 Le 7 mars 2022, la requérante a présenté ses commentaires sur l’avis du comité.
22 Par la décision attaquée, l’AIPN a rétrogradé la requérante du grade AST 2, échelon 3, au grade AST 1, échelon 3, avec effet au 1er juin 2022, sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du statut et de l’article 7, paragraphe 1, des dispositions internes de 2019.
23 Dans cette décision, en premier lieu, l’AIPN a rappelé que la requérante avait fait l’objet de trois rapports d’évaluation insatisfaisants consécutifs pour les années 2017, 2018 et 2019. Premièrement, concernant l’année 2017, l’AIPN a constaté que la requérante n’avait pas respecté des délais, avait commis des erreurs, avait enregistré des heures de travail ne correspondant pas au travail fourni et n’avait pas tenu compte des retours de son chef d’unité. Deuxièmement, l’AIPN a indiqué qu’en 2018 les difficultés de la requérante avaient persisté, malgré l’attribution de tâches simples, la désignation d’un mentor et la fixation d’objectifs clairs. Sa conduite dans le service a également été considérée comme insatisfaisante, en particulier en raison du non-respect des horaires de travail. Troisièmement, l’AIPN a indiqué que, en 2019, malgré les avertissements de ses supérieurs hiérarchiques et les retours de son chef d’unité et du service des ressources humaines, ses prestations n’avaient pas présenté d’améliorations. En deuxième lieu, l’AIPN a constaté l’absence de progrès de la requérante en 2020, rapportée dans le rapport d’évaluation 2020 concluant que les prestations de la requérante avaient été une fois de plus insatisfaisantes. L’AIPN a expliqué que, lors de sa réaffectation le 1er août 2020, d’une part, l’adjointe à la cheffe d’unité avait facilité sa prise de poste et, d’autre part, sa nouvelle cheffe d’unité lui avait donné des tâches correspondant à ses compétences, lui avait fréquemment fourni des retours sur son travail et avait mis à sa disposition les informations utiles à l’exécution de ses tâches. En troisième lieu, l’AIPN a rappelé que le service médical de la Commission avait conclu que la requérante ne présentait pas de contre-indication médicale à la réalisation de ses tâches.
24 Par décision du 12 juillet 2022, l’AIPN a infligé à la requérante la sanction disciplinaire de révocation, sans réduction de ses droits à pension, avec effet au 1er août 2022.
25 Le 20 août 2022, la requérante a introduit une réclamation sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, qui avait pour objet l’annulation de la décision attaquée et la réparation de ses préjudices matériel et moral.
26 Par décision du 15 décembre 2022, l’AIPN a rejeté la réclamation de la requérante.
Conclusions des parties
27 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission à la réparation de son préjudice matériel évalué à 533,88 euros et de son préjudice moral évalué à 10 000 euros ;
– condamner la Commission aux dépens.
28 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
Sur les conclusions en annulation
29 Au soutien de ses conclusions en annulation, la requérante invoque, en substance, un premier moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, un deuxième moyen, tiré de violations de l’article 51 du statut et des dispositions internes prises en exécution de cet article, et un troisième moyen, tiré de la violation du devoir de sollicitude, du principe de protection de la confiance légitime, du principe de bonne administration, du principe d’égalité de traitement et d’un détournement de pouvoir.
30 Le Tribunal estime opportun d’examiner d’abord le deuxième moyen, lequel s’articule, en substance, en trois branches. La première est tirée de l’absence d’un programme ou d’un plan d’accompagnement conforme aux dispositions internes d’exécution de l’article 51 du statut. La deuxième est tirée du non-respect du délai prévu pour l’adoption de la proposition de rétrogradation. La troisième est tirée d’erreurs manifestes dans la prise en compte des éléments constitutifs de l’insuffisance professionnelle.
31 Dans le cadre de la première branche, la requérante fait valoir que l’évaluateur n’a pas respecté son obligation de mettre en place un plan d’accompagnement, tel que prévu par les dispositions internes d’exécution de l’article 51 du statut, à savoir la décision C(2004) 1597 de la Commission, du 28 avril 2004, relative au maintien du niveau des prestations (ci-après les « dispositions internes de 2004 ») et les dispositions internes de 2019. La requérante soutient d’abord que l’AIPN aurait dû mettre en place un plan d’accompagnement écrit à la suite du premier rapport d’évaluation insatisfaisant de 2017, puis du deuxième rapport d’évaluation insatisfaisant de 2018, conformément aux dispositions internes de 2019, qui étaient, selon elle, applicables. Elle conteste à cet égard tant l’adoption d’un tableau de suivi des tâches que la désignation d’un tuteur par l’administration en 2018. La requérante relève ensuite que, en violation de l’article 12, paragraphe 2, des dispositions internes de 2019, il n’y a pas non plus eu de plan d’accompagnement lors de l’établissement du troisième rapport d’évaluation insatisfaisant. La requérante précise enfin qu’un plan d’accompagnement ne lui aurait été présenté qu’en décembre 2021 et aurait seulement été mis en œuvre à partir de mars 2022. La requérante reproche en conséquence à l’AIPN d’avoir considéré qu’elle n’avait fait aucun progrès alors qu’aucun objectif ou critère de réussite ne lui aurait été fixé.
32 La Commission rétorque d’abord que les dispositions internes de 2019 n’étaient pas en vigueur lors de l’établissement des deux premiers rapports d’évaluation. De plus, les dispositions internes de 2004 alors en vigueur ne s’appliquaient que mutatis mutandis, après le changement du système d’évaluation entré en vigueur le 1er janvier 2014. Elle explique que lesdites dispositions internes avaient été adoptées lorsque le système d’évaluation consistait notamment en une notation sur 20 points et que ce système d’évaluation a été remplacé par une indication du niveau satisfaisant ou non des prestations. La Commission soutient ensuite que les dispositions internes de 2004 ont bien été appliquées dans leur esprit dès le premier rapport insatisfaisant, au cours de l’année 2018, notamment par la mise en œuvre d’un tableau de suivi des tâches et la désignation d’un tuteur. La Commission admet que la procédure prévue n’a pas été suivie stricto sensu, à savoir la mise en place d’un programme d’appui et de correction écrit et signé par la requérante, mais le justifie par le refus de coopération de cette dernière. En tout état de cause, l’établissement d’un tel programme ne constituerait pas l’une des deux conditions de fond de la rétrogradation prévues à l’article 51 du statut que sont l’existence de trois rapports d’évaluation insatisfaisants consécutifs et l’absence de progrès. La Commission affirme enfin qu’un plan d’accompagnement, au sens des dispositions internes de 2019, a bien été adopté et appliqué du 1er janvier 2021 au 30 juin 2022.
33 Il convient de rappeler que l’article 43, premier alinéa, du statut prévoit ce qui suit :
« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire font l’objet d’un rapport annuel dans les conditions fixées par l’autorité investie du pouvoir de nomination de chaque institution conformément à l’article 110. Ce rapport indique si le niveau des prestations du fonctionnaire est satisfaisant ou non […] »
34 Les DGE de l’article 43 énoncent, à leur article 2, paragraphe 3, première phrase, que chaque rapport contient une conclusion indiquant si les prestations du titulaire de poste ont été satisfaisantes ou non.
35 Il est, par ailleurs, prévu à l’article 51, paragraphe 1, du statut ce qui suit :
« 1. L’autorité investie du pouvoir de nomination de chaque institution définit les procédures visant à détecter, gérer et résoudre les cas d’insuffisance professionnelle en temps utile et de manière appropriée.
Lorsqu’elle adopte des dispositions internes, l’autorité investie du pouvoir de nomination de chaque institution respecte les prescriptions suivantes :
a) le fonctionnaire qui, sur la base de trois rapports annuels consécutifs insatisfaisants tels que visés à l’article 43, ne fait toujours preuve d’aucun progrès dans ses compétences professionnelles est rétrogradé d’un grade. Si les deux rapports annuels suivants font encore état de prestations insatisfaisantes, le fonctionnaire est licencié ;
b) toute proposition de rétrogradation ou de licenciement d’un fonctionnaire expose les raisons qui la motivent et est communiquée à l’intéressé. La proposition de l’autorité investie du pouvoir de nomination est transmise au comité paritaire consultatif prévu à l’article 9, paragraphe 6 [...] »
36 S’agissant des procédures visées à l’article 51, paragraphe 1, du statut, mises en œuvre par la Commission, il y a lieu de relever que les dispositions internes de 2004 sont entrées en vigueur le 1er mai 2004, conformément à l’article 18 desdites dispositions.
37 L’article 12, paragraphe 1, des dispositions internes de 2019 prévoit que les dispositions internes de 2004 sont abrogées. Il résulte de l’article 14 des dispositions internes de 2019 que ces dernières sont entrées en vigueur le 5 octobre 2019. Ainsi, les dispositions internes de 2019 ont remplacé les dispositions internes de 2004 à compter de cette date.
38 Il ressort de la décision attaquée que la requérante a été rétrogradée à la suite de trois rapports d’évaluation consécutifs insatisfaisants devenus définitifs, pour les années 2017, 2018 et 2019.
39 Or, le rapport d’évaluation 2017 et le rapport d’évaluation 2018 sont devenus définitifs, respectivement, le 19 décembre 2018 et le 25 mars 2019, soit avant le 5 octobre 2019. Ainsi, la procédure de traitement de l’insuffisance professionnelle était régie par les dispositions internes de 2004, applicables ratione temporis, lorsque lesdits rapports sont devenus définitifs.
40 Par conséquent, il convient d’écarter l’argument de la requérante selon lequel les dispositions internes de 2019 étaient applicables lorsque les deux premiers rapports d’évaluation insatisfaisants en cause sont devenus définitifs.
41 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la requérante invoque, en substance, deux griefs à l’appui de la première branche, tirés, le premier, de l’absence de programme d’appui et de correction tel que prévu par les dispositions internes de 2004 et, le second, de l’absence de plan d’accompagnement conforme aux dispositions internes de 2019, après leur entrée en vigueur le 5 octobre 2019 et l’abrogation des règles précédentes.
42 Le Tribunal estime qu’il convient d’examiner d’abord le second grief.
43 L’article 4, paragraphe 2, des dispositions internes de 2019 dispose ce qui suit :
« La procédure de traitement de l’insuffisance professionnelle comporte au moins les mesures suivantes : (a) un plan d’accompagnement, (b) la rétrogradation à la suite de trois rapports annuels consécutifs insatisfaisants établis en vertu de l’article 43 du statut et devenus définitifs, (c) le licenciement à la suite de cinq rapports annuels consécutifs insatisfaisants établis en vertu de l’article 43 du statut et devenus définitifs. »
44 De plus, il est prévu à l’article 5, paragraphe 1, des dispositions internes de 2019 ce qui suit :
« Lorsqu’un rapport annuel, établi en vertu de l’article 43 du statut et devenu définitif, contient pour la première fois une conclusion indiquant que les prestations n’ont pas été satisfaisantes, l’évaluateur, après un entretien préalable avec le fonctionnaire, élabore par écrit un projet de plan d’accompagnement dans un délai d’un mois à partir de la date à laquelle le rapport annuel est devenu définitif […] »
45 La requérante soutient que la Commission a méconnu son obligation d’établir un plan d’accompagnement conforme aux dispositions internes de 2019 et, en particulier, à leur article 12, paragraphe 2, puisqu’un plan d’accompagnement ne lui aurait été communiqué qu’en décembre 2021.
46 La Commission affirme qu’un plan d’accompagnement écrit et établi avec la requérante a été adopté en vertu de l’article 5, paragraphe 1, des dispositions internes de 2019, à l’issue du troisième rapport d’évaluation insatisfaisant. Ce plan aurait été appliqué du 1er janvier 2021 au 30 juin 2022. Ledit plan fixerait des objectifs raisonnables, des critères de réussite clairs et mesurables, un planning précis et des réunions de suivi.
47 En premier lieu, il convient de relever que la Commission a versé au dossier un document établi par C, la nouvelle cheffe d’unité de la requérante, intitulé « plan d’accompagnement ». Selon ce document, ledit plan couvrait la période allant du 1er janvier 2021 au 30 juin 2022. Pour chacun des aspects relatifs au rendement, aux compétences et à la conduite dans le service, la cheffe d’unité a défini des objectifs, les moyens disponibles pour les atteindre, tels que des applications informatiques à utiliser, des formations à suivre ou le service compétent à contacter, les critères de réussite et le calendrier de mise en œuvre.
48 Il est aussi indiqué dans ce document qu’il a été communiqué par C à la requérante le 20 décembre 2022.
49 La requérante conteste toutefois que ce document lui ait été communiqué à cette date et a fortiori qu’il ait été mis en œuvre à partir de janvier 2021. La requérante précise que ledit plan ne lui a été présenté qu’en décembre 2021 par C et ajoute que, en raison de son congé de maladie de janvier à février 2022, ce plan n’aurait été mis en œuvre qu’à partir de mars 2022.
50 Lors de l’audience, la Commission a affirmé que C avait notifié à la requérante ce plan le 20 décembre 2020.
51 Les parties ne s’accordent donc pas sur l’année de la communication du document en cause.
52 À cet égard, premièrement, il est manifeste que la mention sur le document de la date du 20 décembre 2022 comme date à laquelle ledit document aurait été communiqué à la requérante constitue une erreur de plume. En effet, la requérante a été révoquée par une décision du 12 juillet 2022, avec effet au 1er août 2022, et avait donc quitté ses fonctions à la Commission à la date indiquée dans ledit document.
53 Deuxièmement, il convient de relever que la Commission ne précise pas la date à laquelle le plan d’accompagnement aurait été élaboré, ni n’apporte d’élément de preuve de nature à étayer l’argument selon lequel ledit plan aurait été notifié à la requérante le 20 décembre 2020 et appliqué à partir du 1er janvier 2021. De surcroît, la circonstance selon laquelle des réunions de suivi avaient été fixées en mars, avril et juin 2022, ainsi qu’il ressort du document en question, est de nature à priver de plausibilité l’argument de la Commission. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permet d’établir que des réunions visant à l’élaboration ou au suivi dudit plan auraient été organisées au cours de l’année 2021.
54 Il y a donc lieu de considérer que ce document a été notifié à la requérante par sa nouvelle cheffe d’unité en décembre 2021 et mis en œuvre au plus tôt à partir de mi-février 2022, au retour du congé de maladie de la requérante.
55 En deuxième lieu, il importe de rappeler que les dispositions internes de 2019 comportent une disposition transitoire à l’article 12, paragraphe 2, libellée comme suit :
« Dans les cas où un plan d’appui et de correction, établi en vertu de la décision de la Commission du 28 avril 2004 relative au maintien du niveau des prestations C (2004) 1597/7, ou des mesures équivalentes, sont en place le jour où la présente décision prend effet, l’évaluateur procède sans délai à une appréciation des adaptations rendues nécessaires par la présente décision et, au terme de cette évaluation, établit un projet de nouveau plan d’accompagnement qui remplace le plan d’appui et de correction. Ce projet est notifié au fonctionnaire qui dispose de 5 jours ouvrables pour présenter ses commentaires éventuels. Au plus tard dans les 15 jours ouvrables à l’issue de ce délai, l’évaluateur établit le plan d’accompagnement qui prend effet dès sa notification au fonctionnaire. Le plan d’appui et de correction demeure d’application tant que le plan d’accompagnement n’est pas établi de la façon décrite dans la présente disposition. »
56 En l’espèce, il convient de relever que, à la date de l’entrée en vigueur des dispositions internes de 2019, le 5 octobre 2019, l’insuffisance des prestations de la requérante avait été constatée à l’occasion de deux rapports d’évaluation insatisfaisants devenus définitifs, à savoir ceux représentant les années 2017 et 2018.
57 La Commission fait valoir que, bien qu’elle n’ait pas adopté un programme d’appui et de correction au sens des dispositions internes de 2004, écrit et signé par la requérante, elle a néanmoins mis en place certaines mesures au titre desdites dispositions internes, à l’issue des deux premiers rapports d’évaluation insatisfaisants.
58 À cet égard, par la décision de rejet de la réclamation du 15 décembre 2022, l’AIPN a été amenée à compléter la motivation de la décision attaquée, notamment en répondant aux griefs que la requérante avait avancés dans sa réclamation en ce qui concerne la méconnaissance de l’obligation d’adopter un plan d’accompagnement. Ainsi, compte tenu du caractère évolutif de la procédure précontentieuse, la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation doit également être prise en considération pour l’examen de la légalité de l’acte initial faisant grief, à savoir la décision attaquée, cette motivation étant censée coïncider avec ce dernier acte [voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 2019, Fleig/SEAE, T‑492/17, EU:T:2019:211, point 37 (non publié) et jurisprudence citée].
59 Dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a énuméré les mesures mises en place au profit de la requérante, dans l’esprit d’un soutien visant l’amélioration de ses prestations, parmi lesquelles figuraient, notamment, l’établissement d’un tableau de suivi des tâches et la désignation d’un tuteur en 2018, ainsi que l’élaboration d’un plan d’action et la modification des tâches de la requérante lors de la réunion du 13 mai 2019 organisée en présence de cette dernière, de A et de B.
60 S’il est possible de considérer que, à la date de l’entrée en vigueur des dispositions internes de 2019, l’évaluateur avait adopté des mesures équivalentes au programme d’appui et de correction prévu par les dispositions internes de 2004, il a toutefois été constaté au point 54 ci‑dessus qu’un plan d’accompagnement au sens de l’article 5, paragraphe 1, des dispositions internes de 2019 n’avait été notifié à la requérante qu’en décembre 2021.
61 Dans cette mesure, l’évaluateur a méconnu l’obligation prévue à l’article 12, paragraphe 2, des dispositions internes de 2019, consistant, à la date de l’entrée en vigueur desdites dispositions internes, à procéder sans délai à une appréciation des adaptations rendues nécessaires par lesdites dispositions internes et à établir un projet de nouveau plan d’accompagnement remplaçant les mesures adoptées au titre des dispositions internes de 2004, avant de le notifier au fonctionnaire.
62 En troisième lieu, il résulte du point 54 ci-dessus que ledit plan a été mis en œuvre au plus tôt à partir de mi-février 2022, soit environ trois mois seulement avant l’adoption de la décision attaquée.
63 À cet égard, il ressort de la décision attaquée que l’AIPN a constaté que, « malgré le soutien apporté et les efforts fournis par la hiérarchie et le service des ressources humaines (notamment le service psycho-social et le service d’orientation professionnelle), le niveau des prestations de la requérante n’a[vait] pas atteint le niveau attendu pour une secrétaire de la Commission ». L’AIPN a alors considéré que la requérante n’avait fait preuve d’aucun progrès dans ses compétences professionnelles et que, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du statut, il convenait de la rétrograder, après avoir constaté qu’elle avait obtenu trois rapports d’évaluation insatisfaisants consécutifs.
64 Il convient d’abord de relever que le suivi médical et psycho-social par les services de la Commission et les séances d’orientation professionnelle de 2020 ne pouvaient faire office de mesures prises au titre des dispositions internes de 2019. En effet, comme le fait valoir à juste titre la requérante, il résulte du considérant 7 des dispositions internes de 2019 que les mesures qui y sont prévues « n’ont pas pour objet de se substituer aux mécanismes et aux services existants qui poursuivent au moins partiellement les mêmes objectifs[, à savoir notamment] le Médiateur, l’orientation professionnelle, le soutien psychologique et social, le service médical, la prévention du harcèlement […] et les procédures disciplinaires ».
65 Ensuite, force est de constater qu’en communiquant à la requérante un plan d’accompagnement en décembre 2021 et en ne le mettant en œuvre qu’à compter de mi-février 2022, alors qu’elle avait déjà fait l’objet de quatre rapports d’évaluation insatisfaisants consécutifs définitifs et que l’AIPN avait adopté la proposition de rétrogradation le 16 novembre 2021, l’administration n’a pas donné le temps nécessaire à la requérante pour démontrer une progression dans ses prestations et ainsi garantir un effet utile audit plan.
66 Dans ces conditions, il convient d’accueillir le second grief de la première branche du deuxième moyen et, partant, d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens du recours.
Sur les conclusions indemnitaires
67 La requérante estime avoir subi un préjudice matériel, qu’elle évalue à la somme de 533,88 euros, et un préjudice moral, qu’elle évalue ex æquo et bono à la somme de 10 000 euros.
68 S’agissant du préjudice matériel, la requérante indique qu’il consiste en la perte de revenus correspondant à la différence entre sa rémunération nette avant et après sa rétrogradation.
69 Quant au préjudice moral, il découlerait d’abord de l’acharnement dont aurait fait preuve l’AIPN à son égard. Son préjudice moral résulterait ensuite du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée. La requérante dénonce l’attitude brutale et déshumanisée de l’AIPN envers elle après 19 années de carrière au sein de l’institution, constitutive d’une violation du devoir de sollicitude. Son préjudice moral découlerait enfin de l’ensemble des illégalités dont est entachée la décision attaquée et notamment de l’absence de plan d’accompagnement avant décembre 2021.
70 La requérante aurait ressenti la décision attaquée comme le rejet par l’AIPN de sa personne, de sa dignité et une négation de toute humanité à son égard. Elle ajoute que la décision attaquée l’humilierait et ternirait son image au sein de l’institution et à l’égard des tiers.
71 Selon elle, son préjudice moral ne saurait être réparé par la seule annulation de la décision attaquée.
72 La Commission conclut au rejet des conclusions indemnitaires.
73 Il convient de rappeler que, dans le domaine de la fonction publique, l’engagement de la responsabilité d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union européenne est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement qui lui est reproché, la réalité du préjudice allégué et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement reproché et le préjudice allégué, ces trois conditions étant cumulatives (voir arrêt du 8 novembre 2018, QB/BCE, T‑827/16, EU:T:2018:756, point 117 et jurisprudence citée).
74 Au regard de la responsabilité accrue de l’Union lorsqu’elle agit en tant qu’employeur, la seule constatation d’une illégalité commise par l’AIPN, qu’il s’agisse d’un acte ou d’un comportement décisionnel, est suffisante pour considérer comme remplie la première des trois conditions nécessaires à l’engagement de la responsabilité de l’Union pour les dommages causés à ses fonctionnaires et agents en raison d’une violation du droit de la fonction publique de l’Union, et ce, par conséquent, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur la question de savoir s’il s’agit d’une violation « suffisamment caractérisée » d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers (voir, en ce sens, arrêt du 3 octobre 2019, DQ e.a./Parlement, T‑730/18, EU:T:2019:725, point 50 et jurisprudence citée).
75 Il convient de constater que, s’agissant des conclusions en annulation de la décision attaquée, le deuxième moyen a été accueilli, en raison du caractère tardif de l’établissement et de la mise en œuvre du plan d’accompagnement, en violation des dispositions internes de 2019. Ainsi, la première condition d’engagement de la responsabilité de la Commission, à savoir l’illégalité du comportement reproché, est remplie.
76 S’agissant du préjudice matériel allégué et du lien de causalité, il est constant que la décision attaquée a causé à la requérante une perte de rémunération, correspondant à la différence entre la rémunération que celle-ci aurait dû percevoir en tant que fonctionnaire au grade AST 2, échelon 3, et celle qu’elle a perçue du fait de sa rétrogradation au grade AST 1, échelon 3.
77 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 91, paragraphe 1, seconde phrase, du statut, le Tribunal dispose, en ce qui concerne les litiges à caractère pécuniaire, d’une compétence de pleine juridiction (arrêt du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, EU:C:2008:107, point 58).
78 La compétence de pleine juridiction conférée au juge de l’Union à l’article 91, paragraphe 1, du statut l’investit de la mission de donner aux litiges dont il est saisi une solution complète, c’est-à-dire de statuer sur l’ensemble des droits et des obligations de l’agent, sauf à renvoyer à l’institution en cause, et sous son contrôle, l’exécution de telle partie de l’arrêt dans les conditions précises qu’il fixe (arrêts du 18 décembre 2007, Weißenfels/Parlement, C‑135/06 P, EU:C:2007:812, point 67, et du 7 septembre 2022, LR/BEI, T‑529/20, EU:T:2022:523, point 66).
79 Il appartient au juge de l’Union de prononcer, le cas échéant, à l’encontre d’une institution une condamnation au versement d’une somme à laquelle le requérant a droit en vertu du statut ou d’un autre acte juridique (arrêt du 7 septembre 2022, LR/BEI, T‑529/20, EU:T:2022:523, point 68 ; voir, en ce sens, arrêt du 18 décembre 2007, Weißenfels/Parlement, C‑135/06 P, EU:C:2007:812, point 68).
80 Constituent des « litiges à caractère pécuniaire », au sens de l’article 91, paragraphe 1, du statut, non seulement les actions en responsabilité dirigées par les agents contre une institution, mais aussi tous ceux qui tendent au versement par une institution à un agent d’une somme qu’il estime lui être due en vertu du statut ou d’un autre acte qui régit leurs relations de travail (arrêts du 18 décembre 2007, Weißenfels/Parlement, C‑135/06 P, EU:C:2007:812, point 65, et du 7 septembre 2022, LR/BEI, T‑529/20, EU:T:2022:523, point 67).
81 En l’espèce, la demande de la requérante tendant à ce que la Commission lui rembourse la somme correspondant à la différence de rémunération entre celle qu’elle percevait avant l’adoption de la décision attaquée et celle qu’elle a perçue à la suite de sa rétrogradation revêt un caractère pécuniaire, au sens de l’article 91, paragraphe 1, du statut.
82 Eu égard à l’annulation de la décision attaquée, il y a lieu de condamner la Commission à rembourser à la requérante une somme correspondant à la différence entre le montant de la rémunération qu’elle percevait avant l’adoption de la décision attaquée et celui résultant de l’adoption de ladite décision.
83 La requérante fait valoir que cette perte de rémunération s’élève à la somme de 533,88 euros.
84 La Commission a confirmé lors de l’audience qu’elle ne contestait pas le montant de la somme calculée par la requérante.
85 Dès lors, le préjudice subi par la requérante doit être fixé à la somme de 533,88 euros.
86 Quant au préjudice moral, il convient d’abord de relever qu’une partie du préjudice moral allégué par la requérante et qui découlerait de l’acharnement dont aurait fait preuve l’AIPN envers elle trouverait sa cause non pas dans l’adoption de la décision attaquée, mais dans des comportements qui se seraient produits au sein de son unité au cours des périodes évaluées dans les rapports d’évaluation en cause dans la décision attaquée.
87 Ainsi, la requérante n’a pas établi l’existence d’un lien de causalité entre ce préjudice moral allégué et l’adoption de la décision attaquée.
88 De plus, à défaut d’avoir respecté la procédure précontentieuse prévue à cet effet, la requérante n’est pas recevable à demander la réparation du préjudice moral qu’elle a subi en raison des prétendus comportements de ses supérieurs hiérarchiques au cours de ces années et au sujet desquels elle n’a pas saisi l’AIPN, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, d’une demande d’assistance au sens de l’article 24 du statut.
89 Il y a ensuite lieu de rappeler que l’annulation d’un acte entaché d’illégalité peut constituer en elle-même la réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que cet acte peut avoir causé, à moins que la partie requérante ne démontre avoir subi un préjudice moral insusceptible d’être intégralement réparé par cette annulation (arrêt du 28 avril 2021, Correia/CESE, T‑843/19, EU:T:2021:221, point 86).
90 Or, force est de constater que la requérante attribue à la décision attaquée une atteinte à son image auprès de l’institution et des tiers, ainsi que le sentiment négatif qu’elle a ressenti lors de son adoption.
91 Dès lors, le Tribunal estime que tout préjudice moral que la requérante pourrait avoir subi en raison de l’adoption de la décision attaquée sera réparé de manière adéquate et suffisante par l’annulation de ladite décision.
92 En tout état de cause, il convient de rappeler que la responsabilité de l’Union ne saurait être engagée que si la partie requérante a effectivement subi un préjudice réel et certain. Il incombe à la partie requérante d’apporter des éléments de preuve au juge de l’Union afin d’établir l’existence et l’ampleur d’un tel préjudice (voir arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE, T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397, point 101 et jurisprudence citée).
93 Or, la requérante n’a apporté aucun élément de preuve permettant d’établir la réalité du préjudice qu’elle invoque.
94 Au regard des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que la requérante n’apporte aucun élément de preuve de nature à étayer ses affirmations sur la réalité du préjudice moral subi, ni ne démontre que ledit préjudice est insusceptible d’être intégralement réparé par l’annulation de la décision attaquée.
95 Partant, il y a lieu d’accueillir les conclusions indemnitaires en ce qu’elles visent la réparation du préjudice matériel et de les rejeter pour le surplus.
96 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être accueilli en ce qu’il tend à l’annulation de la décision attaquée et à la réparation du préjudice matériel, et rejeté pour le surplus.
Sur les dépens
97 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé pour l’essentiel, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision de la Commission européenne du 20 mai 2022 rétrogradant VO du grade AST 2, échelon 3, au grade AST 1, échelon 3, avec effet au 1er juin 2022, est annulée.
2) La Commission est condamnée à payer à VO la somme de 533,88 euros en réparation du préjudice matériel subi.
3) Le recours est rejeté pour le surplus.
4) La Commission est condamnée aux dépens.
Truchot | Kanninen | Sampol Pucurull |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 novembre 2024.
Signatures
* Langue de procédure : le français.
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