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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> CF v Commission ( - Civil service - Retirement pension - Pension rights acquired before entering the service of the European Union - Judgment) French Text [2024] EUECJ T-51/24 (09 October 2024) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2024/T5124.html Cite as: ECLI:EU:T:2024:686, EU:T:2024:686, [2024] EUECJ T-51/24 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)
9 octobre 2024 (*)
« Fonction publique - Pension d’ancienneté - Droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union - Transfert vers le régime de l’Union - Rejet de la demande de transfert - Demande présentée hors délai - Circonstances exceptionnelles - Article 77 du statut - Article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut - Article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des dispositions générales d’exécution des articles 11 et 12 de l’annexe VIII du statut »
Dans l’affaire T‑51/24,
CF, représenté par Me M. Velardo, avocate,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par Mmes A. Baeckelmans, M. Brauhoff et E. Garello, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (dixième chambre),
composé de Mme O. Porchia, présidente, MM. M. Jaeger (rapporteur) et S. Verschuur, juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu la phase écrite de la procédure,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, CF, demande l’annulation, d’une part, des quatre décisions de la Commission européenne du 5 janvier 2023 rejetant ses quatre demandes de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union européenne (ci-après les « décisions attaquées »), au titre de l’article 11, paragraphes 2 et 3, de l’annexe VIII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), et, d’autre part, de la décision du 23 octobre 2023 rejetant sa réclamation à l’encontre des décisions attaquées (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).
Faits à l’origine du litige
2 Entre le 1er février 2012 et le 30 avril 2016, le requérant était employé en tant qu’agent temporaire par l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol).
3 Depuis le 1er mai 2016, le requérant est fonctionnaire de la Commission, au service de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF). Il a été confirmé dans ses fonctions le 1er février 2017.
4 Avant d’entrer au service de l’Union, le requérant a été agent de police d’État en Grèce entre le 3 octobre 1997 et le 26 mars 2019.
5 Le 2 mai 2019, le requérant a introduit une demande de transfert de ses droits à pension acquis au sein d’un fonds grec créé en 2008, le Fonds de prévoyance complémentaire et d’assistance sociale pour le personnel des institutions de sécurité (ci-après le « fonds TEAPASA »), vers le régime des pensions des institutions de l’Union (ci-après le « RPIUE »), en vertu de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut.
6 Le 13 mai 2019, l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission a approuvé la demande du requérant et l’a transmise au Fonds unique de sécurité sociale grec (ci-après l’« EFKA ») afin d’obtenir les informations nécessaires au transfert des droits à pension.
7 L’EFKA, créé en 2016 et actif depuis le 1er janvier 2017, est un fonds de pension unique au sein duquel ont été fusionnés les fonds de pension grecs qui existaient avant sa création.
8 Le 27 avril 2021, le requérant a demandé des renseignements à la Direction des salaires de la police grecque concernant le sort de ses contributions versées avant la création de l’EFKA. Le 29 avril 2021, ladite direction lui a répondu que ces informations figuraient dans les fiches de paie ou étaient consultables dans ses locaux.
9 Le 14 novembre 2022, le requérant a introduit auprès du PMO quatre autres demandes (ci‑après les « quatre demandes supplémentaires ») de transfert de ses droits à pension acquis dans les fonds GRC ETEAEP, GRC MTS METOXIKO TAMEIO STRATOU, GRC EFKA et GRC ETEAEP (ci-après les « quatre autres fonds ») vers le RPIUE, ces quatre autres fonds ayant été fusionnés au sein de l’EFKA.
10 Le 5 janvier 2023, le PMO a adopté les décisions attaquées. Dans lesdites décisions, tout d’abord, conformément à l’article 5, paragraphe 1, des dispositions générales d’exécution des articles 11 et 12 de l’annexe VIII du statut (ci-après les « DGE ») relatives au transfert de droits à pension, le PMO a indiqué qu’un agent devait introduire sa demande au plus tard dans un délai de six mois à compter de l’expiration de la période nécessaire à l’ouverture du droit visé à l’article 77 du statut. Ensuite, le PMO a précisé que, lorsque ce délai était expiré, une demande de transfert ne pouvait plus être accueillie, à moins que le retard dans sa présentation soit dû à des circonstances exceptionnelles non imputables à l’agent concerné. Enfin, le PMO a considéré que le retard dans la présentation des demandes du requérant n’était pas justifié par de telles circonstances exceptionnelles et a donc rejeté ces demandes.
11 Le 27 mars 2023, le requérant a introduit, auprès de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), une réclamation à l’encontre des décisions attaquées, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut.
12 Le 23 octobre 2023, l’AIPN a adopté la décision de rejet de la réclamation.
Conclusions des parties
13 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler les décisions attaquées ;
– annuler la décision de rejet de la réclamation ;
– condamner la Commission aux dépens.
14 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner le requérant aux dépens.
En droit
Sur l’objet du litige
15 Le requérant dirige son recours tant contre les décisions attaquées que contre la décision de rejet de la réclamation.
16 À cet égard, il convient de rappeler que la réclamation administrative, telle que visée à l’article 90, paragraphe 2, du statut, et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge. Dans ces conditions, un recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (voir arrêt du 8 juillet 2020, WH/EUIPO, T‑138/19, non publié, EU:T:2020:316, point 33 et jurisprudence citée).
17 En effet, toute décision de rejet d’une réclamation, qu’elle soit implicite ou explicite, ne fait, si elle est pure et simple, que confirmer l’acte ou l’abstention dont le réclamant se plaint et ne constitue pas, prise isolément, un acte attaquable, de sorte que les conclusions dirigées contre cette décision sans contenu autonome par rapport à la décision initiale doivent être regardées comme dirigées contre l’acte initial (voir arrêts du 12 septembre 2019, XI/Commission, T‑528/18, non publié, EU:T:2019:594, point 20 et jurisprudence citée, et du 8 juillet 2020, WH/EUIPO, T‑138/19, non publié, EU:T:2020:316, point 34 et jurisprudence citée). Toutefois, une décision explicite de rejet d’une réclamation peut, eu égard à son contenu, ne pas avoir un caractère confirmatif de l’acte contesté par la partie requérante. Tel est le cas lorsque la décision de rejet de la réclamation contient un réexamen de la situation de la partie requérante, en fonction d’éléments de droit et de fait nouveaux, ou lorsqu’elle modifie ou complète la décision initiale. Dans ces hypothèses, le rejet de la réclamation constitue un acte soumis au contrôle du juge, qui le prend en considération dans l’appréciation de la légalité de l’acte contesté, voire le considère comme un acte faisant grief se substituant à ce dernier (voir arrêts du 10 octobre 2019, Colombani/SEAE, T‑372/18, non publié, EU:T:2019:734, point 19 et jurisprudence citée, et du 8 juillet 2020, WH/EUIPO, T‑138/19, non publié, EU:T:2020:316, point 35 et jurisprudence citée).
18 En l’espèce, il y a lieu de constater que, dans la décision de rejet de la réclamation, en répondant aux arguments avancés par le requérant dans sa réclamation, l’AIPN a confirmé les constatations contenues dans les décisions attaquées selon lesquelles, d’une part, les demandes de transfert des droits à pension acquis dans le système grec avant l’entrée au service de l’Union avaient été introduites hors délai par le requérant et, d’autre part, il n’existait pas de circonstances exceptionnelles justifiant le retard du dépôt de ces demandes.
19 Ainsi, il convient de considérer que les actes faisant grief au requérant sont les décisions attaquées, dont la légalité doit être examinée en prenant également en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation.
Sur le fond
20 À l’appui de son recours, le requérant soulève deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut et, le second, d’une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure » et des dispositions de nature financière.
21 Le premier moyen comporte, en substance, trois branches. Par la première branche, le requérant excipe de l’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE. Par la deuxième branche, le requérant reproche à la Commission d’avoir commis une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure ». Par la troisième branche, le requérant reproche à la Commission d’avoir commis une erreur de droit dans l’interprétation des dispositions de nature financière.
22 Le second moyen se divise en deux branches. Par la première branche, le requérant reproche à la Commission d’avoir commis une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure ». Par la seconde branche, en substance, le requérant reproche à la Commission d’avoir violé le devoir de sollicitude et le principe de proportionnalité.
23 Compte tenu du fait que les deux moyens se chevauchent partiellement, il convient d’examiner, tout d’abord, la première branche du premier moyen, puis, ensemble, la deuxième branche du premier moyen et la première branche du second moyen, ensuite, la troisième branche du premier moyen et, enfin, la seconde branche du second moyen.
Sur la première branche du premier moyen, tirée de l’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE
24 À titre liminaire, le requérant fait valoir que l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut se limite à prévoir la faculté de demander le transfert des droits à pension sans introduire aucun délai pour son exercice.
25 En outre, le requérant soulève une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE.
26 En premier lieu, le requérant fait valoir que le délai de six mois, qui n’est pas prévu par l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, mais uniquement par les DGE, est un délai de forclusion excessivement court, d’autant plus qu’il concerne l’exercice d’un droit subjectif.
27 À cet égard, le requérant observe que, dans le système informatique de gestion du personnel Sysper, au sein de la section intitulée « Transferts de droits à pension – Transfert IN », il est indiqué que la demande de transfert de droits à pension doit être soumise avant d’avoir cotisé pendant dix ans et six mois au RPIUE. Selon le requérant, on ne peut pas additionner les dix ans de cotisation nécessaires à l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté et les six mois du délai de forclusion pour l’introduction de la demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union. Le requérant affirme qu’il n’est pas correct de présenter, comme le font les DGE, le délai de dépôt de la demande comme étant de dix ans et six mois, des situations de natures juridiques profondément différentes étant alors mises sur le même plan.
28 En deuxième lieu, le requérant soutient qu’aucune disposition spécifique du statut ne délègue à une institution le pouvoir de définir par des dispositions générales d’exécution le délai dans lequel le droit subjectif de transfert de droits à pension doit être exercé sous peine de forclusion. Ainsi, le délai de six mois serait arbitraire et contraire aux dispositions de rang supérieur.
29 Dans ce contexte, le requérant observe que l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut ne confère aux DGE que le soin de déterminer, « compte tenu du traitement de base, de l’âge et du taux de change à la date de la demande de transfert, le nombre d’annuités [prises] en compte, d’après le régime de pension de l’Union au titre de la période de service antérieur, sur la base du capital transféré, déduction faite du montant qui représente la revalorisation du capital entre la date de la demande de transfert et celle du transfert effectif ». Partant, le requérant considère que, en prévoyant un délai de forclusion pour l’exercice du droit au transfert de droits à pension, les DGE vont au-delà de la délégation prévue à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, puisqu’elles déterminent non seulement le nombre d’annuités prises en compte, mais aussi le moment d’acquisition du droit au transfert lui-même.
30 En troisième lieu, d’une part, le requérant observe que le fait qu’il est erroné de considérer le délai de dix ans et le délai de six mois comme un seul délai est confirmé par l’information figurant sur l’application Intracomm de la Commission, selon laquelle les droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union transférés vers le RPIUE ne sont pas pris en considération pour calculer les dix ans de service au sens de l’article 77 du statut. D’autre part, le requérant affirme que l’introduction d’une demande de transfert de droits à pension avant l’expiration du délai de dix ans, c’est-à-dire avant l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté, ne produirait aucun effet utile et pourrait même être préjudiciable, dans l’hypothèse où un fonctionnaire n’atteindrait pas les dix ans de service, puisqu’il perdrait alors définitivement les cotisations nationales transférées. Cette considération serait d’autant plus importante et centrale pour les agents temporaires, dans la mesure où la situation de ces derniers se caractériserait par une incertitude absolue quant à la durée de leur relation de travail avec l’Union.
31 En quatrième lieu, le requérant fait valoir que, même en admettant que l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE ne soit pas entaché d’illégalité, dans sa situation très spécifique, le délai ne pouvait commencer à courir qu’à partir de sa nomination en tant que fonctionnaire de la Commission, intervenue le 1er février 2017, à la suite de l’accomplissement avec succès d’une période de stage de neuf mois. Le requérant ajoute que, avant cette date et jusqu’au 26 mars 2019, il faisait partie de la police d’État grecque, bien qu’étant en congé sans rémunération, et qu’il ne pouvait donc pas être considéré comme un employé permanent d’Europol. À cet égard, le requérant observe que, en vertu de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, ce n’est qu’avec la titularisation que le fonctionnaire a la faculté de demander le transfert de ses droits à pensions acquis avant son entrée au service de l’Union. Dès lors, selon lui, il est incompréhensible que l’on puisse exiger qu’il ait exercé un droit dont il n’était pas titulaire avant ce moment-là, alors que sa relation de travail était encore instable, puisqu’il était titulaire d’un contrat à durée déterminée avec Europol qui, en vertu des règles internes, n’était pas susceptible d’être renouvelé.
32 Dans ce contexte, le requérant affirme que la circonstance que le site Internet de l’EFKA reconnaisse la possibilité de transférer des droits à pension à l’étranger avant d’acquérir le droit à une pension d’ancienneté grecque, citée dans une note en bas de page de la décision de rejet de la réclamation, n’est pas pertinente, étant donné que sa relation de travail avec l’Union était extrêmement précaire jusqu’au 1er février 2017.
33 Ainsi, selon le requérant, le fait que l’AIPN soutienne, dans la décision de rejet de la réclamation, que le délai a commencé à courir au moment où il a versé des cotisations au RPIUE en tant qu’agent temporaire, soit à partir de 2012, n’est pas pertinent. En effet, le requérant fait valoir que ni le statut, ni les DGE, ni même les instructions internes figurant dans Sysper ou dans Intracomm n’attirent l’attention des intéressés sur la prétendue continuité entre l’emploi d’agent et de fonctionnaire aux fins du transfert de droits à pension. Le requérant en conclut que c’est la date de sa nomination en tant que fonctionnaire, à savoir le 1er février 2017, qui doit être prise en compte et que, par conséquent, même à supposer qu’il existe un délai de dix ans et six mois pour l’exercice du droit au transfert des droits à pension, quod non, il a respecté ce délai.
34 En outre, le requérant conteste l’affirmation, figurant dans la décision de rejet de la réclamation, selon laquelle l’obligation d’introduire une demande de transfert pour chaque fonds de pension découlerait de l’article 11, paragraphe 2, troisième tiret, de l’annexe VIII du statut, qui dispose qu’un fonctionnaire ne peut faire usage qu’une seule fois par État membre et par fonds de pension de la faculté de demander le transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union. Selon le requérant, ledit article et le cadre juridique général plutôt confus ont créé chez lui une incertitude supplémentaire. En effet, il n’aurait pas été en mesure de savoir si, en répétant sa demande pour les quatre autres fonds qui avaient été fusionnés au sein de l’EFKA, il encourait une quelconque déchéance.
35 La Commission conteste les arguments du requérant.
– Observations liminaires
36 Il convient de rappeler que l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE prévoit que, « indépendamment de son statut, l’agent doit introduire sa demande au plus tard dans un délai de six mois à compter de l’expiration de la période nécessaire à l’ouverture du droit visé à l’article 77 du statut ».
37 En outre, en premier lieu, selon la jurisprudence et comme l’affirme à juste titre le requérant, la faculté de transférer les droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union, reconnue à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, revêt le caractère d’un droit subjectif, conféré par le statut et susceptible d’être invoqué tant à l’égard des États membres qu’à l’égard des institutions de l’Union (arrêt du 22 décembre 2022, INPS et Repubblica italiana, C‑404/21, EU:C:2022:1023, point 55).
38 En second lieu, selon une jurisprudence constante, le délai de six mois prévu par les DGE est un délai simple et non un délai de forclusion (voir arrêts du 24 septembre 1996, Sergio/Commission, T‑185/95, EU:T:1996:131, point 43 et jurisprudence citée, et du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, point 28 et jurisprudence citée).
39 À cet égard, il y a lieu de relever que cette appréciation du juge de l’Union a été effectuée sous l’empire d’un ancien cadre réglementaire. L’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut alors applicable prévoyait que la faculté de demander le transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union devait être exercée par l’intéressé « au moment de sa titularisation ».
40 Dans ce contexte, d’une part, le délai de six mois figurant dans les DGE a été considéré comme étant un délai « de complaisance », introduit par l’administration au bénéficie des fonctionnaires et agents temporaires afin de faciliter le transfert de leurs droits à pension vers le régime de l’Union. D’autre part, ce délai a été jugé comme étant raisonnable, du point de vue de l’application du principe de proportionnalité, dans la mesure où la présentation d’une demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union n’implique pas un choix définitif de la part du fonctionnaire ou de l’agent temporaire. En effet, lorsqu’une demande de transfert est présentée, le service compétent adresse une proposition de transfert au fonctionnaire ou à l’agent temporaire concerné et ce n’est qu’à ce moment que celui-ci peut déterminer si le transfert présente un intérêt pour lui (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, points 75, 84 et 85).
41 Or, l’actuel article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, applicable en l’espèce, prévoit qu’un fonctionnaire peut introduire une demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union entre le moment de sa titularisation et le moment où il obtient le droit à une pension d’ancienneté, après avoir accompli au moins dix ans de service au sens de l’article 77 du statut.
42 Cela implique que le fonctionnaire intéressé peut demander le transfert de ses droits à pension, conformément à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, sans avoir la certitude qu’il aura droit à une pension d’ancienneté, cette certitude ne pouvant être acquise qu’au moment où il aura accompli dix ans de service.
43 Il découle de la nature particulière de ces dispositions, lues ensemble, qu’il y a lieu de considérer que le délai de six mois prévu à l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE est un délai simple, au sens de la jurisprudence citée au point 38 ci-dessus, qui permet aux fonctionnaires et aux agents de disposer d’un délai approprié, pour les raisons expliquées au point 40 ci-dessus, pour introduire leur demande de transfert de droits à pension une fois qu’ils ont définitivement obtenu le droit à une pension d’ancienneté, après avoir accompli au moins dix ans de service au sens de l’article 77 du statut.
– Sur le bien-fondé de la première branche du premier moyen
44 Premièrement, contrairement à ce que le requérant fait valoir, l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE n’introduit pas un délai « excessivement court ».
45 En effet, s’il est vrai qu’il ressort du point 42 ci‑dessus que le fonctionnaire ou l’agent n’a la certitude d’acquérir une pension d’ancienneté qu’au moment où il a accompli dix ans de service au sens de l’article 77 du statut, il n’en reste pas moins que la demande de transfert des droits à pension acquis dans le régime national d’un État membre avant l’entrée de l’intéressé au service de l’Union peut être introduite, conformément à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, à partir de la titularisation ou de la fin de la période de stage de l’intéressé. Ainsi, tout fonctionnaire ou tout agent dispose d’une longue période pour réfléchir à la possibilité de déclencher la procédure de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union. Partant, comme cela est indiqué au point 40 ci-dessus, le délai de six mois figurant dans les DGE est un délai « de complaisance » et raisonnable, introduit par l’administration au bénéfice des fonctionnaires et des agents temporaires afin de faciliter le transfert de leurs droits à pension vers le régime de l’Union.
46 Deuxièmement, il convient de relever que la procédure administrative de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union peut s’étendre sur plusieurs années, de sorte que l’existence d’un délai pour qu’un fonctionnaire ou un agent puisse introduire une demande de transfert est, selon la jurisprudence, nécessaire en vue d’une organisation efficace de l’activité de transfert de droits à pension (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, point 84).
47 Troisièmement, compte tenu des observations exposées aux points 36 à 43 ci-dessus, le requérant ne peut pas soutenir que, par le biais de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE, la Commission a introduit un délai de forclusion non prévu par le statut, cet article fixant un délai simple octroyé dans l’intérêt de tout fonctionnaire ou de tout agent pour lui permettre de prendre sa décision de demander ou non le transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union. Il s’ensuit que les arguments du requérant fondés sur la prémisse selon laquelle le délai prévu par l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE est un délai de forclusion doivent être rejetés.
48 Cette conclusion ne peut pas être remise en cause par l’argument du requérant selon lequel l’introduction d’une demande de transfert avant l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté, au sens de l’article 77 du statut, ne produirait aucun effet utile et pourrait même être préjudiciable dans l’hypothèse où le fonctionnaire n’atteindrait pas les dix ans de service.
49 En effet, en premier lieu, contrairement à ce que le requérant fait valoir, la demande de transfert des droits à pensions acquis avant l’entrée au service de l’Union, même si elle est effectuée avant l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté, ouvre une procédure qui peut se clore par l’acceptation, par le fonctionnaire ou l’agent, de la proposition de bonification d’annuités effectuée par l’administration. Cette acceptation ayant pour effet de transférer les droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union vers le RPIUE, l’introduction d’une telle demande ne peut donc pas être considérée comme n’ayant aucun effet utile.
50 En deuxième lieu, l’affirmation du requérant selon laquelle l’introduction d’une demande de transfert des droits à pension serait préjudiciable dans l’hypothèse où le fonctionnaire n’atteindrait pas les dix ans de service, puisqu’il perdrait définitivement les droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union, se fonde sur une interprétation erronée de l’article 11, paragraphe 1, de l’annexe VIII du statut. En effet, il convient de constater que, si un fonctionnaire ou un agent quitte ses fonctions avant d’avoir acquis le droit à une pension d’ancienneté au sens de l’article 77 du statut, il peut transférer l’équivalent actuariel de ses droits à pension acquis au sein du RPIUE vers son nouveau régime, y compris ceux déjà transférés vers le RPIUE conformément à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2023, OR et OS/Commission, T‑171/22, EU:T:2023:520, point 50).
51 En troisième lieu et en tout état de cause, il convient de relever que le requérant lui-même a introduit une demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union alors qu’il n’avait pas encore effectué dix ans de service, cette demande ayant par ailleurs été acceptée par le PMO, de sorte que cet argument ne peut pas être retenu.
52 Quatrièmement, il en va de même pour l’argument du requérant selon lequel ni le statut, ni les DGE, ni même les instructions internes figurant dans Sysper ou dans Intracomm n’attirent l’attention des intéressés sur la prétendue continuité entre l’emploi d’agent et de fonctionnaire aux fins du transfert de droits à pension, de sorte que, dans son cas, le délai a commencé à courir au moment de sa titularisation en tant que fonctionnaire, le 1er février 2017, et non de son entrée en service en tant qu’agent temporaire, le 1er février 2012.
53 À cet égard, il suffit de constater qu’il ressort de la décision du 13 mai 2019, par laquelle le PMO a accepté la demande de transfert des droits à pensions du fonds TEAPASA introduite par le requérant, que la date prise en compte dans le cadre de cette demande, sur indication du requérant lui-même, est celle de son entrée au service de l’Union en tant qu’agent temporaire, le 1er février 2012. Par conséquent, le requérant ne peut pas se prévaloir du caractère erroné de la date sur laquelle le PMO s’est fondé pour rejeter les quatre demandes supplémentaires, à savoir le 1er février 2012, dans la mesure où lui-même avait fondé sa première demande sur cette date.
54 Dans ce contexte, l’argument du requérant selon lequel le fait que le site Internet de l’EFKA reconnaisse la possibilité de transférer des droits à pension à l’étranger avant d’acquérir le droit à une pension d’ancienneté grecque n’est pas pertinent ne peut pas non plus prospérer. En effet, cela confirme plutôt que l’EFKA lui-même admet qu’une personne se trouvant dans une situation semblable à celle du requérant peut transférer vers l’étranger ses droits à pension acquis au sein du système grec.
55 Cinquièmement, en ce qui concerne l’argument du requérant contestant l’interprétation faite par l’AIPN de l’article 11, paragraphe 2, troisième tiret, de l’annexe VIII du statut, qui, selon celle-ci, fonde l’obligation pour un fonctionnaire ou un agent d’introduire une demande pour chaque fonds de pension qu’il souhait transférer vers le RPIUE, il convient de constater ce qui suit.
56 Dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a bien relevé que le requérant avait fait valoir que les quatre demandes supplémentaires auraient dû être considérées comme étant liées à sa demande relative au fonds TEAPASA, introduite dans le délai requis, à savoir le 2 mai 2019. Cependant, tout d’abord, l’AIPN a considéré que ce lien ne pouvait pas être admis, compte tenu du fait que le requérant avait signé une déclaration dans laquelle il avait reconnu qu’il était tenu d’introduire une demande pour chaque fonds national qu’il souhaitait transférer vers le RPIUE, cette déclaration étant obligatoire, dans la procédure d’introduction des demandes de transfert de droits à pension, en vertu de l’article 11, paragraphe 2, troisième tiret, de l’annexe VIII du statut. Ensuite, l’AIPN a relevé que l’obligation d’introduire une demande de transfert pour chaque fonds national découlait des dispositions régissant le transfert des droits à pension, qui laissent à chaque fonctionnaire le choix d’effectuer ou non un tel transfert et de l’effectuer pour l’ensemble ou non des fonds nationaux au sein desquels il a cotisé. Enfin, l’AIPN a, en substance, considéré que le requérant aurait pu, en plus de sa demande relative au fonds TEAPASA, introduire les quatre demandes supplémentaires dans le délai requis.
57 Or, il convient de relever que l’obligation d’introduire une demande de transfert pour chaque fonds national découle bien du libellé de l’article 11, paragraphe 2, troisième tiret, de l’annexe VIII du statut et du choix laissé au fonctionnaire par les dispositions régissant le transfert des droits à pension, comme l’affirme l’AIPN.
58 En outre, il y a lieu de constater que le requérant a signé une déclaration dans laquelle il a reconnu qu’il était tenu d’introduire une demande de transfert pour chaque fonds national, ce qu’il n’a d’ailleurs pas contesté dans ses écritures devant le Tribunal. Cela implique que le requérant était conscient, depuis le moment où il avait introduit sa demande de transfert du fonds TEAPASA, qu’il était tenu d’introduire une demande pour chaque fonds qu’il souhaitait transférer vers le RPIUE.
59 Par ailleurs, l’argument du requérant selon lequel le lien existant entre sa première demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union, acceptée par le PMO, et les quatre demandes supplémentaires, déposées hors délai, justifie que lesdites demandes supplémentaires soient acceptées malgré le non-respect du délai requis ne peut pas être retenu. En effet, cela constituerait une dérogation au délai pour l’introduction d’une demande de transfert de droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union, tel qu’il ressort de l’interprétation combinée de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut et de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE.
60 Partant, la première branche du premier moyen doit être rejetée.
Sur la deuxième branche du premier moyen et sur la première branche du second moyen, tirées d’une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure »
61 À titre liminaire, le requérant conteste les affirmations, contenues dans la décision de rejet de la réclamation, selon lesquelles, d’une part, l’administration est liée par ses propres règles et n’a pas compétence pour y déroger, sauf si une dérogation est expressément prévue, et, d’autre part, les règles applicables en matière de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union ne prévoient pas d’exception ou de dérogation possible. Selon le requérant, la force majeure est au contraire une circonstance ayant une force dérogatoire générale et elle ne doit pas être expressément prévue pour être invoquée.
62 En outre, le requérant affirme qu’il peut être dérogé à tout délai en cas de circonstances exceptionnelles.
63 Par ailleurs, le requérant fait valoir, en substance, que les difficultés liées à la pandémie de COVID-19, qui a eu un impact sur sa situation personnelle, et la situation d’insécurité créée par l’administration nationale grecque auraient dû être considérées par la Commission comme étant des justifications pour le retard dans l’introduction des quatre demandes supplémentaires.
64 Premièrement, en premier lieu, le requérant soutient que le dépassement du délai de forclusion pour l’introduction de sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union est dû à la situation de force majeure provoquée par l’impact de la pandémie de COVID‑19.
65 À cet égard, le requérant affirme que tant l’élément objectif que l’élément subjectif constitutifs d’une situation de force majeure sont réunis en l’espèce.
66 S’agissant de l’élément objectif, le requérant fait valoir que le caractère extraordinaire de la pandémie de COVID‑19 a été reconnu par de nombreuses dispositions tant au niveau des États membres qu’au niveau de l’Union.
67 Dans ce contexte, le requérant soutient que la pandémie de COVID‑19 a eu un impact sur l’activité des institutions de l’Union. Il observe que la Cour de justice de l’Union européenne a prorogé ou a suspendu les délais de procédure, alors même que les pièces des dossiers pouvaient être transmises électroniquement par le biais de la plateforme e-Curia.
68 S’agissant de l’élément subjectif, le requérant fait valoir que, dans son cas, la pandémie de COVID‑19, surtout dans sa phase initiale, a rendu pratiquement impossible la circulation entre un État membre et un autre. Ainsi, il aurait été empêché de se rendre en Grèce pour vérifier la situation juridique réelle de sa demande de transfert de droits à pension acceptée par le PMO. Le requérant fait valoir que, en effet, il lui avait été indiqué qu’il aurait dû se rendre directement dans les bureaux de la division des salaires de la police d’État pour obtenir les informations nécessaires. Il ajoute que sa situation personnelle est devenue encore plus difficile à la suite du décès de sa belle-mère, le 22 avril 2020, puis de celui de son père, le 28 mai 2021, en raison de complications liées à la COVID‑19. Cela aurait entraîné pour lui non seulement un profond désarroi, mais aussi la nécessité d’effectuer à distance les démarches administratives habituelles liées à de tels évènements dramatiques. En outre, le requérant fait valoir que, après le mois de mars 2020, son épouse a également été hospitalisée.
69 En second lieu, le requérant invoque, en substance, une violation du devoir de sollicitude. Il considère que le respect de ce devoir aurait exigé que, dans le contexte dramatique provoqué par la pandémie de COVID‑19, la Commission organise des campagnes de formation ou d’information pour attirer l’attention du personnel sur les droits qu’il pouvait faire valoir en matière de pension. Le requérant soutient donc que l’AIPN a été superficielle en concluant qu’il n’avait pas fait preuve de diligence pour respecter les délais requis.
70 Deuxièmement, le requérant fait valoir que le retard dans l’introduction des quatre demandes supplémentaires devrait être considéré comme étant excusable, compte tenu de la situation générale d’insécurité juridique créée par l’administration grecque. Selon lui, en effet, tout d’abord, sa demande de transfert du fonds TEAPASA est toujours en cours d’examen. Ensuite, l’administration grecque ne lui aurait donné aucune indication quant au fait que ladite demande était incomplète et qu’il était nécessaire de présenter autant de demandes qu’il y avait de fonds. À cet égard, le requérant affirme que ce n’est qu’au cours de l’année 2019 qu’il lui a été précisé que ses contributions avaient été versées aux quatre autres fonds. En outre, l’administration grecque aurait répondu très tardivement à ses demandes de renseignements concernant le transfert du fonds TEAPASA. Enfin, le requérant affirme que ce n’est qu’au mois de novembre 2022, d’une part, qu’il a été informé par un collègue qui se trouvait dans la même situation que lui de la nécessité d’introduire manuellement, dans Sysper, les références aux différents fonds de pension qu’il souhaitait transférer et, d’autre part, qu’il lui est apparu, à la suite d’informations ne provenant d’aucune source officielle, que la création de l’EFKA n’avait pas exclu la survie, pour la période antérieure à cette création, des quatre autres fonds, qui avaient continué à être traités individuellement.
71 La Commission conteste les arguments du requérant.
– Observations liminaires
72 Premièrement, il convient de relever que, selon la jurisprudence, dans l’hypothèse où une disposition prévoit un délai simple, le fonctionnaire ou l’agent qui invoque une justification pour ne pas avoir respecté ce délai doit démontrer avoir été confronté à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne lui sont pas imputables, alors que, en présence d’un délai de forclusion, le fonctionnaire ou l’agent ne peut être relevé de ce délai qu’en cas de force majeure (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, points 28 à 33).
73 À cet égard, en premier lieu, s’agissant de la phase précontentieuse, il convient de relever que les décisions attaquées indiquent que, si le délai prévu à l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE est expiré, une demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union ne peut pas être prise en considération, sauf si le retard dans son dépôt est dû à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne sont pas imputables à l’intéressé. En outre, les décisions attaquées précisent que, en l’espèce, le requérant n’a apporté aucune preuve démontrant que le retard dans le dépôt des quatre demandes supplémentaires ne lui était pas imputable.
74 Dans sa réclamation, le requérant a fait valoir que le retard ne lui était pas imputable, et ce en raison d’une combinaison des facteurs, à savoir la pandémie de COVID-19, qui a impacté sa vie privée, l’attitude de l’EFKA et la réforme du système de pension grec.
75 Dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a considéré, en substance, que le retard dans l’introduction des quatre demandes supplémentaires était imputable au requérant.
76 En second lieu, s’agissant de la procédure devant le Tribunal, même si le requérant se réfère à la notion de « circonstances exceptionnelles », il reproche surtout à la Commission une erreur dans l’interprétation de la notion de « force majeure ».
77 Or, malgré cette absence de clarté quant à la justification du non-respect du délai, il y a lieu de rappeler que la jurisprudence citée au point 72 ci-dessus établit que, en présence d’un délai simple, afin de justifier le non-respect de ce délai, un fonctionnaire ou un agent doit démontrer avoir été confronté à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne lui sont pas imputables et pas à un cas de force majeure. En outre et en tout état de cause, les conditions requises pour justifier de l’existence de circonstances exceptionnelles sont moins exigeantes que celles requises pour justifier d’un cas de force majeure. En effet, pour justifier de l’existence de circonstances exceptionnelles, une personne doit uniquement prouver l’existence ou la survenance d’évènements externes l’empêchant de respecter une obligation, tandis que, pour justifier de l’existence d’un cas de force majeure, cette personne doit démontrer non seulement la survenance d’évènements anormaux et étrangers à sa volonté, mais aussi qu’elle a adopté un comportement diligent pour se prémunir contre les conséquences de ces évènements. Ainsi, il est constant que le fait de ne pas pouvoir démontrer l’existence de circonstances exceptionnelles tenant aux faits concrets de l’espèce entraîne, a fortiori, l’inexistence d’un cas de force majeure fondé sur les mêmes faits.
78 Dès lors, à la lumière des circonstances de l’espèce, il convient d’interpréter les arguments du requérant comme visant à démontrer, en substance, que la Commission a commis une erreur de droit en considérant que le dépôt tardif de sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union lui était imputable et ne pouvait pas être justifié par des circonstances exceptionnelles.
79 Deuxièmement, selon la jurisprudence, d’une part, il ressort clairement de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut que c’est au fonctionnaire titularisé qu’appartient l’initiative de l’introduction d’une demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union, de sorte qu’il ne peut pas être soutenu qu’une institution a manqué à son devoir de sollicitude en n’informant pas ledit fonctionnaire, de sa propre initiative, de la procédure à suivre en ce qui concerne ce transfert (arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, point 66) et, d’autre part, tout fonctionnaire est censé connaître le statut et, plus particulièrement, les règles régissant sa rémunération ou sa pension d’ancienneté (arrêt du 18 septembre 2018, Barroso Truta e.a./Cour de justice de l’Union européenne, T‑702/16 P, EU:T:2018:557, point 40).
– Sur le bien-fondé de la deuxième branche du premier moyen et de la première branche du second moyen
80 En premier lieu, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel la pandémie de COVID-19 a eu un impact sur la libre circulation entre les États membres et, donc, l’a empêché de se rendre en Grèce pour clarifier certains aspects relatifs au transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée en service de l’Union vers le RPIUE, il convient de relever que, même en admettant que l’explosion de ladite pandémie, qui a eu lieu au mois de février 2020, puisse être considérée comme étant une circonstance exceptionnelle au sens de la jurisprudence citée au point 72 ci-dessus, en l’espèce, dans la période comprise entre le 1er février et le 31 juillet 2022, pendant laquelle courait le délai de six mois pour le dépôt de la demande du requérant conformément à l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE, la pandémie sévissait depuis environ deux ans, ses effets ayant déjà commencé à s’estomper. En outre, pendant ladite période, la circulation entre les États membres n’était plus limitée comme lors de l’explosion de la pandémie en 2020. Ainsi, le requérant ne peut pas véritablement soutenir que la pandémie de COVID‑19 l’a empêché de se rendre en Grèce entre le 1er février et le 31 juillet 2022 afin de clarifier avec les autorités helléniques certains aspects relatifs au transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée en service de l’Union vers le RPIUE.
81 En ce qui concerne l’argument du requérant tiré d’une violation du devoir de sollicitude dans le contexte de la pandémie de COVID‑19, il convient de relever que, compte tenu de la jurisprudence citée au point 79 ci-dessus et de la circonstance selon laquelle une demande de transfert de droits à pension peut être introduite par un fonctionnaire ou par un agent par voie électronique, par le biais de Sysper, sans avoir à quitter son domicile, et selon laquelle, en tout état de cause, les effets de la pandémie de COVID‑19 avaient déjà commencé à s’estomper lorsque le délai de six mois pour introduire les quatre demandes supplémentaires a commencé à courir, il doit être rejeté. En effet, le devoir de sollicitude des institutions de l’Union envers leurs employés n’entraînait pas pour celles-ci l’obligation d’organiser des séances de formation sur les modalités d’exercice du droit au transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union.
82 Il en va de même pour l’argument du requérant lié à l’impact que la pandémie de COVID-19 a eu sur sa situation personnelle. En effet, dans la mesure où les évènements relatés par le requérant ont eu lieu au cours des années 2020 et 2021, où le délai pour déposer les quatre demandes supplémentaires a expiré le 31 juillet 2022 et où lesdites demandes pouvaient être introduites par voie électronique, par le biais de Sysper, sans avoir à quitter son domicile, c’est à juste titre que la Commission a pu conclure que ces évènements ne justifiaient pas le retard dans le dépôt de ces demandes.
83 En deuxième lieu, s’agissant des arguments du requérant relatifs au fait que la Cour de justice de l’Union européenne a adapté certains délais à cause de la pandémie de COVID‑19, il convient de constater qu’il ne peut pas prospérer, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la pertinence de la comparaison faite par le requérant avec sa propre situation. En effet, s’il est vrai que cette institution avait adapté certains délais au moment de l’explosion de la crise sanitaire au cours de l’année 2020, elle a ensuite abandonné ces mesures exceptionnelles, ce qui était déjà le cas durant la période comprise entre le 1er février et le 31 juillet 2022.
84 En troisième lieu, en ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel le retard dans l’introduction des quatre demandes supplémentaires est justifié par l’attitude de l’administration grecque, il convient de constater ce qui suit.
85 Certes, il ressort du dossier, sans que cela soit contesté par la Commission, que le requérant n’a pas eu de réponse définitive de la part des autorités grecques quant au sort réservé à sa demande de transfert du fonds TEAPASA.
86 Cependant, premièrement, le requérant reconnaît, dans ses écritures, que, d’une part, au cours de l’année 2019, il lui avait été précisé que ses contributions avaient été versées aux quatre autres fonds et, d’autre part, il avait demandé à une employée de l’EFKA, environ deux fois par an après l’introduction de sa demande de transfert du fonds TEAPASA, si ladite demande de transfert avait été appliquée aux quatre autres fonds. À cet égard, il convient de constater que, dans sa réclamation, datée du 27 mars 2023, le requérant a affirmé qu’il avait été en contact avec cette employée « pendant les trois dernières années ». Cela démontre que, bien avant l’expiration du délai pour introduire sa demande de transfert relative aux quatre autres fonds et malgré le fait qu’il n’ait pas reçu de réponse définitive de la part de l’EFKA, le requérant se questionnait déjà quant au sort des cotisations versées sur ces fonds. Par conséquent, l’argument du requérant selon lequel il n’a appris qu’au mois de novembre 2022, sur la base d’informations ne provenant d’aucune source officielle, que les quatre autres fonds avaient continué à être traités individuellement pendant la période précédant la création de l’EFKA ne peut pas prospérer.
87 Il en va de même pour l’argument du requérant selon lequel il a appris par un collègue, toujours au mois de novembre 2022, qu’il devait introduire manuellement, dans Sysper, les références aux différents fonds de pension nationaux qu’il souhaitait transférer vers le RPIUE. En effet, il suffit de constater que, selon la jurisprudence, tout fonctionnaire est censé connaître le statut et, plus particulièrement, les règles régissant sa rémunération ou sa pension d’ancienneté (arrêt du 18 septembre 2018, Barroso Truta e.a./Cour de justice de l’Union européenne, T‑702/16 P, EU:T:2018:557, point 40).
88 Deuxièmement, s’agissant de la prétendue tardivité de la réponse fournie par les autorités grecques aux demandes de renseignements du requérant concernant le transfert du fonds TEAPASA, il suffit de constater que l’attitude de ces autorités ne peut pas justifier, en l’espèce, le non-respect, par le requérant, de ses obligations découlant du statut, compte tenu de la constatation effectuée au point 86 ci-dessus.
89 En conclusion, le requérant n’a pas apporté de justifications suffisantes pour pouvoir conclure que la Commission a commis une erreur en considérant que le retard dans le dépôt de sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union lui était imputable et n’était pas justifié par des circonstances exceptionnelles liées aux effets de la pandémie de COVID‑19, à sa situation personnelle et à l’attitude de l’administration nationale grecque.
90 Partant, la deuxième branche du premier moyen et la première branche du second moyen doivent être rejetées.
Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de la violation des dispositions financières
91 Le requérant relève que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a fondé sa position sur la jurisprudence selon laquelle les dispositions ouvrant droit à des prestations financières, telles que les dispositions relatives aux pensions, doivent être interprétées strictement.
92 À cet égard, premièrement, le requérant émet des réserves quant au fait que les règles régissant le transfert des droits à pension relèvent bien de la catégorie des dispositions ouvrant droit à des prestations financières.
93 Deuxièmement, en faisant référence à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, le requérant observe que le montant correspondant aux années de service reconnues par la Commission à la suite de la procédure de transfert est entièrement financé par des montants qui appartiennent déjà au fonctionnaire et qui sont versés à cette fin dans les caisses de l’Union. Selon le requérant, l’opération de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union apparaît donc tout à fait neutre d’un point de vue financier. Dans ce contexte, le requérant observe que la jurisprudence citée par l’AIPN concerne des hypothèses différentes qui représentent des charges accrues pour l’administration.
94 La Commission conteste les arguments du requérant.
95 Il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, si une décision est valablement fondée sur un ou plusieurs motifs, les moyens visant d’autres motifs de ladite décision sont inopérants, dès lors que, à les supposer fondés, ces moyens ne seraient pas susceptibles d’entraîner l’annulation de celle-ci [arrêts du 21 mai 2014, Mocová/Commission, T‑347/12 P, EU:T:2014:268, point 22 (non publié), et du 19 juillet 2017, Parlement/Meyrl, T‑699/16 P, non publié, EU:T:2017:524, point 64 ; voir également, en ce sens, ordonnance du 18 octobre 2001, Kish Glass/Commission, C‑241/00 P, EU:C:2001:556, point 42].
96 Or, s’il est vrai que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a effectué un renvoi général à la jurisprudence selon laquelle les dispositions ouvrant droit à des prestations financières, telles que les dispositions relatives aux pensions, doivent être interprétées strictement et même en admettant que cette référence ne soit pas pertinente en l’espèce, il n’en reste pas moins que, dans ladite décision, c’est à juste titre que l’AIPN a conclu que le retard dans le dépôt de la demande de transfert des droits à pension du requérant ne pouvait être considéré comme étant dû à la pandémie de COVID‑19 ou à l’attitude des autorités grecques.
97 À cet égard, il ressort de l’examen de la deuxième branche du premier moyen et de la première branche du second moyen que la Commission n’a pas commis d’erreur en considérant que le délai requis était expiré au moment du dépôt des quatre demandes supplémentaires et que le requérant n’avait pas établi que le retard dans ce dépôt ne lui était pas imputable, mais était justifié par des circonstances exceptionnelles. Partant, les motifs invoqués par la Commission n’étant pas entachés d’erreur, l’argument du requérant tiré de la référence erronée à la jurisprudence relative à l’interprétation stricte des dispositions ouvrant droit à des prestations financières doit être rejeté comme étant inopérant.
Sur la seconde branche du second moyen, tirée, en substance, de la violation du devoir de sollicitude et du principe de proportionnalité
98 Le requérant affirme qu’il va subir un préjudice grave et irréparable, parce que les cotisations qu’il a acquittées dans les quatre autres fonds seront définitivement perdues.
99 En effet, en premier lieu, selon lui, le « transfert out » de ses droits à pension acquis dans le RPIUE vers le système grec n’étant possible qu’à la fin de sa relation de travail avec l’Union, la capitalisation de ses droits à pension ne pourra avoir lieu, en théorie, que lorsqu’il aura atteint l’âge de la retraite, en vertu des dispositions du statut, dans la mesure où il est inimaginable qu’il soit tenu de démissionner dans le seul but de capitaliser ses cotisations accumulées jusqu’à présent. À cet égard, le requérant observe que, compte tenu de ses perspectives de carrière, il est raisonnable de penser que la pension d’ancienneté à laquelle il aura droit en vertu des dispositions du statut sera certainement supérieure à celle à laquelle il aurait droit au niveau national.
100 En second lieu, le requérant soutient qu’il ne pourrait pas minimiser ses pertes financières en renonçant au transfert de ses droits à pension pour bénéficier de deux pensions d’ancienneté distinctes et proportionnelles aux périodes de cotisation accumulées dans le système grec et dans celui de l’Union, étant donné qu’il n’a pas cotisé durant la période minimale requise par la législation grecque pour pouvoir bénéficier d’une pension de retraite nationale.
101 Ainsi, le requérant soutient que la Commission a violé tant le devoir de sollicitude que le principe de proportionnalité, eu égard à la gravité du préjudice qui lui est causé par rapport au bénéfice qu’en retire l’administration elle-même.
102 La Commission conteste les arguments du requérant.
103 Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la question de savoir si, en l’espèce, la règle de concordance entre la requête et la réclamation a été respectée, les arguments au soutien de la présente branche semblant n’avoir été soulevés qu’au stade de la requête, il convient de relever que le principe de totalisation des périodes de cotisation prévu par le règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2004, L 166, p. 1), selon la jurisprudence applicable aux fonctionnaires et aux agents de l’Union, s’oppose à ce qu’un État membre ne tienne pas compte des périodes d’activité accomplies sous le RPIUE aux fins de l’ouverture du droit à une pension de retraite, pro rata, au titre d’un régime national (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2004, My, C‑293/03, EU:C:2004:821, point 49, et ordonnance du 9 juillet 2010, Ricci et Pisaneschi, C‑286/09, non publiée, EU:C:2010:420, point 34). Il en découle que les périodes d’activité accomplies sous le régime de pension de l’Union par un fonctionnaire ou un agent doivent être prises en compte, aux fins de l’octroi, au prorata, de la pension d’ancienneté prévue par le régime de sécurité sociale d’un État membre.
104 Ainsi, les arguments invoqués par le requérant au soutien d’une violation du principe de proportionnalité et du devoir de sollicitude ne peuvent pas prospérer, dans la mesure où la prémisse factuelle sur laquelle ils sont fondés, à savoir l’existence d’un préjudice causé par la perte des sommes cotisées dans le système grec, manque en fait.
105 À la lumière de ces considérations, il convient de rejeter la seconde branche du second moyen et, partant, le recours dans son intégralité.
Sur les dépens
106 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (dixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) CF est condamné aux dépens.
Porchia | Jaeger | Verschuur |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 octobre 2024.
Signatures
* Langue de procédure : l’italien.
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